• Aucun résultat trouvé

À propos de la Médaille d’or du CNRS décernée au chimiste Gérard Férey

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "À propos de la Médaille d’or du CNRS décernée au chimiste Gérard Férey"

Copied!
1
0
0

Texte intégral

(1)

Éditorial

2 l’actualité chimique - octobre 2010 - n° 345

À propos de la Médaille d’or du CNRS décernée au chimiste Gérard Férey

L

a communauté des chimistes est évidemment fière de voir l’un des siens honoré par la plus prestigieuse distinction scientifique française, la Médaille d’or du CNRS*. Les magnifiques objets chimiques – les maintenant fameux « Matériaux de l’Institut Lavoisier (MIL)** » – illustrent si parfaite- ment la chimie («la chimie crée son objet » pour citer Marcellin Berthelot) qu’une sorte de reconnais- sance implicite de tous les chimistes se tourne vers Gérard Férey qui a été capable non seulement de les concevoir et de les fabriquer mais aussi, c’est essentiel, de les faire connaître et comprendre.

Ce qui nous intéresse ici, c’est l’unanimité du res- pect – tous horizons confondus – qui accompagne la décision des jurys de ces grandes distinctions et d’ailleurs, avec des différences de niveaux, de l’ensemble des prix scientifiques. Le monde scienti- fique n’est pas vraiment exempt de rivalités et de comportements contestables (relire Bourdieu pour en prendre la mesure), mais les décisions des jurys sont (presque) toujours bien accueillies. Paradoxe ? Pas vraiment. Il faut voir dans cette situation la force des pratiques du milieu de la recherche : nécessité de publier ses travaux pour les faire connaître et les soumettre à la critique, importance du « jugement par les pairs » qui se reflète dans la constitution des jurys.

Cet accueil consensuel est en contraste frappant avec celui qui est réservé aux classements des institutions universitaires. Ici, pour les personnalités scientifiques, le consensus ; là, pour les établisse- ments, une contestation souvent vive. Quand on y regarde de plus près, en effet, ces derniers man- quent de pertinence. Le plus médiatisé d’entre eux, le classement de Shangaï, est très réducteur, reposant sur quelques « grandeurs objectives » – le nombre de prix Nobel, les publications dans les revues Nature ou Science, le « Science Citation Index ».

Outre qu’ils sont basés sur les caractéristiques de la culture américaine, ces critères qui utilisent des nombres en valeurs absolues et non pas rapportés aux effectifs, avantagent automatiquement les éta- blissements de grande taille. Prise de position pour le moins contestable s’il s’agit d’évaluer la qualité. Autre faiblesse, le classement, dans sa version la plus

souvent reprise, globalise l’ensemble des disci- plines (sciences dures, sciences de la vie, sciences humaines) ; qui ne perçoit la fragilité d’un jugement par « une note » qui amalgame de tels ensembles hétérogènes ? Le classement du « Times Higher Education Supplement » (THES) est plus subtil par bien des côtés. Il introduit les avis d’experts – éva- luation de la recherche par les pairs, de la formation par des recruteurs d’entreprises internationales.

L’évolution de la définition de ses critères d’une année sur l’autre (depuis 2008, par exemple, les experts ne peuvent plus citer leur propre institution) reflète cependant les imperfections inévitables d’un tel système de notation, avouant par là ses limites.

L’importance des classements des établissements – en dépit de leurs graves insuffisances – dépasse le monde de la recherche et de l’enseignement supérieur. Ils constituent de véritables messages qui sont reçus d’abord par les médias puis influen- cent les décideurs (administrations tutelles, parte- naires industriels) et par là, influent sur l’évolution de tout le système. Il est d’autant plus nécessaire qu’ils soient interprétés avec le recul que seul permet une profonde connaissance de la vie de la recherche et de l’enseignement supérieur. Des scientifiques doivent agir en médiateurs pour éviter les conclusions caricaturales. Parmi ces scienti- fiques, les lauréats des prix prestigieux sont évi- demment sollicités de facto. Voici donc ces cher- cheurs qui se sont passionnés pour le laboratoire et y ont réussi des percées scientifiques qui soudain, devenus lauréats, se trouvent projetés dans un rôle nouveau, celui du sage qui sait faire comprendre aux non-scientifiques (la société, les décideurs) les besoins profonds de la recherche. Malgré le défi que cette transposition appelle, nul doute que le chimiste honoré aujourd’hui saura faire face avec l’efficacité dont a su faire preuve son prédécesseur, comme lauréat de la Médaille d’or, Pierre Potier.

Paul Rigny Rédacteur en chef

*Voir l’interview en page 6.

**Férey G., Les nouveaux solides poreux ou les miracles des trous, L’Act. Chim., 2007, 304, p. I (téléchargeable librement sur www.lactualitechimique.org/larevue_article.php?cle=1674).

Références

Documents relatifs

On ne peut vraiment comprendre le fonctionnement du cerveau au niveau de la vie sociale, de la conscience et de la raison que si l’on est averti du fait que notre cerveau se

Considérant, dès lors, que les pièces irrégulièrement saisies ne sauraient être retenues comme moyens de preuve des concertations relevées dans le rapport d'enquête administrative

Considérant dans ces conditions que l'accord du 20 décembre 1984 souscrit sous l'égide du Comité français du butane et du propane par l'ensemble des sociétés distributrices afin

On y relève les précisions suivantes sur le secteur d'activité des coiffeurs à domicile; 'L'exercice de la profession de coiffeur dans les hôpitaux ou maisons de retraite, dans

 Août 2006, pages 12 et 13 Une crise d'intégration des jeunes de milieux populaires Retour sur la grande révolte des banlieues françaises Neuf mois après les troubles qui,

Ce fut l’occasion pour lui de mobiliser toute son énergie pour rassembler les parte- naires de la chimie française –  l’Académie des sciences, la SCF, le CNRS,

Alors je crois, Mesdames et Messieurs les Ministres, Messieurs les Ambassadeurs, Monsieur le Recteur, Mesdames et Messieurs les Présidents, mes chers Collègues, que vous serez

L’Actualité Chimique : C’est un plaisir pour nous de recevoir un si proche ami, si brillamment honoré, lauréat cette année du Grand Prix de la Fondation de la Maison de la Chimie