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Du consentement et de la sexualité (2)

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1780 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 14 septembre 2011

actualité, info

Du consentement et de la sexualité (2)

Poursuivons et achevons notre exposé des principaux éléments médico­légaux de ce

«fait divers» hors du commun : «l’affaire Do­

minique Strauss­Kahn» bientôt devenue «af­

faire DSK» (Rev Med Suisse 2011;7:1226­7 et 2011;7:1722­3). Au centre de ce feuilleton scabreux et planétaire, un rapport sexuel qui, nul ne l’ignore plus, a eu pour cadre, dans la fin de matinée du 14 mai 2011, la suite 2806 du Sofitel de New York. Un rapport sexuel à tout le moins précipité dont on ne sait tou­

jours pas – le saura­t­on jamais ? – s’il était

«consenti». C’est ici que la médecine légale nourrie de génétique peut témoigner de ses vertus et de ses limites. Si dans ce domaine le consentement ne laisse guère de traces spécifiques, il semble bien qu’il puisse par­

fois en aller de même avec un «non­consen­

tement», pour ne pas parler de refus expli­

cite ; étant bien entendu que la femme (Naf­

fissatou Diallo, 32 ans, femme de cham bre de l’hôtel new­yorkais) estime aujourd’hui avoir été victime d’un viol.

C’est le rapport rendu public, il y a peu, par le procureur de Manhattan (rapport qui aura conduit la justice américaine à abandon­

ner les poursuites pénales contre l’ancien directeur général du Fonds monétaire inter­

national) qui fournit l’essentiel des données objectives concernant cette affaire devenue par ailleurs machine à fantasmes. Nous avons vu ce qu’il en était des dires de la plaignante quant aux gestes de celui qu’elle accuse et qui, pour résumer, peuvent être définis com­

me une série de violences physiques asso­

ciées à une fellation imposée sous la con­

trainte : «(…) la plaignante a rapporté que l’accusé l’a mise à genoux de force, a intro­

duit de force son pénis dans sa bouche, a tenu sa tête, puis a éjaculé. Selon la plaignante, cet acte sexuel a eu lieu au fond du couloir de la suite, à proxi mité de la salle de bains.

La plaignante a affirmé avoir immédiatement craché le sperme de l’accusé sur la moquette du couloir de la suite, et l’a fait à plusieurs reprises alors qu’elle fuyait.»

Nous avons aussi vu ce qu’il en était de l’examen physique et génital de la plaignan te.

Que nous apprend, ici, la génétique ? Pour l’essentiel que l’analyse de l’ADN et la loca­

lisation des échantillons biologiques prélevés dans la suite de l’hôtel new­yorkais confir­

ment les déclarations de la plaignante. Le document de synthèse du procureur de Man­

hattan résume les preuves établies sur les lieux par les enquêteurs de la police crimi­

nelle de New York. Il précise que les poli­

ciers ont d’abord identifié cinq zones, dans la suite 2806, qui toutes recélaient a priori des sécrétions biologiques humaines, salive ou sperme. L’une des taches fut localisée à environ deux mètres du lieu où la plaignan te affirmait que le contact sexuel avait eu lieu.

Or cette tache «recelait la présence de sper me et d’amylase et contenait un mélange d’ADN de l’accusé et de la plaignante».

Le 16 mai 2011 (deux jours plus tard), la police criminelle est retournée à l’hôtel, dans la suite, et a, entre autres examens, effectué des prélèvements dans le lavabo de la petite salle d’eau. Elle a aussi collecté des mou­

choirs en papier dans la salle de bains pro­

en marge

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Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 14 septembre 2011 1781 prement dite. La plaignante avait déclaré

qu’après l’incident, elle avait craché dans le lavabo de la salle d’eau. Les deux prélève­

ments effectués dans le lavabo ainsi que les mouchoirs n’ont pas révélé la présence de sperme mais bien d’amylase. Les enquêteurs n’ont d’autre part pas pu extraire un maté­

riel suffisant des prélèvements pour établir un profil ADN.

Ajoutons, en marge, les éléments suivants, eux aussi extraits du rapport, et qui sont un reflet de ce que les murs de la suite de cet hôtel de luxe pourraient nous dire s’ils étaient dotés d’oreilles : «Trois des autres taches sur la moquette contenaient le sperme et l’ADN de trois autres hommes non identifiés, et une tache contenait de l’amylase et un mélange d’ADN de trois autres individus non identi­

fiés. La tache sur le papier peint contenait du sperme et l’ADN de quatre autres hommes non identifiés. Comme rien n’établit qu’une autre personne était présente durant les faits

incriminés, les circonstances de la présence de ces traces d’ADN non identifiées n’ont pas de lien avec l’enquête.»

Des investigations scientifiques ont d’autre part été menées sur l’uniforme (une robe et une blouse) de la plaignante. Trois traces sur la partie supérieure de l’uniforme ont été iden­

tifiées comme contenant du sperme ; deux des trois contenaient de l’amylase pouvant pro­

venir de sperme, de salive ou de sécrétion vaginale. Or les enquêteurs peuvent affirmer que seul l’ADN correspondant à celui de l’ac­

cusé a été identifié à partir de ces trois traces.

Le document du procureur précise encore qu’au moment des faits, la plaignante portait deux paires de collants (une plus sombre, une plus claire, cette dernière étant à l’inté­

rieure de la paire sombre) et, sous les deux paires, une culotte. Les examens ont permis de retrouver de l’ADN de l’accusé (prove­

nant de tissus cellulaires et non de sperme) sur la bande élastique des deux collants et sur celle de la culotte. Pour le procureur de Man­

hattan, ces résultats objectifs suggèrent que l’accusé a bel et bien touché les sous­vête­

ments de la plaignante. Pour autant, ils ne contredisent ni ne confirment les déclara­

tions de la plaignante lorsqu’elle affirme que l’accusé a placé sa main à l’intérieur de ses sous­vêtements et touché directement son sexe.

Voici les principaux éléments du dossier.

«Consentement» ou pas ? «Viol» ou pas ? Com­

ment se prononcer dès lors que la justice se refuse à qualifier un tel geste ? On peut for­

muler l’interrogation autrement : une rela­

tion sexuelle à ce point précipitée peut­elle être consentie ? Depuis l’abandon des pour­

suites (et dans l’attente d’un procès civil), les avocats de DSK s’emploient à déminer le terrain sémantique. Ainsi Benjamin Brafman (qui connaît précisément le prix des choses) fait­il délicieusement valoir que son client

«a payé au prix fort une absence passagère de jugement» ; «une absence qui n’avait rien de criminel». Est­ce dire que DSK n’avait pas alors toute sa raison et, qu’à ce titre, on ne saurait le tenir pour coupable ?

Il y a quelques jours, à Paris, Michel Rocard, ancien Premier ministre français (socialiste), allumait un pétard : il faisait publiquement valoir que Dominique Strauss­Kahn, ancien ministre (socialiste) du gouvernement fran­

çais, était atteint d’une «maladie mentale»

qui lui interdisait de «maîtriser ses pulsions».

Peu après M. Rocard s’excusait publique­

ment auprès de son «ami» DSK expliquant qu’il «regrettait que les propos à l’emporte­

pièce aient pu être blessants». Plusieurs pro­

ches commencent d’autre part à prendre leurs distances avec celui qui était le favori des sondages pour la présidentielle française de 2012. Et certains militants lui demandent de présenter des excuses ; non pas à la femme de chambre mais au Parti socialiste français.

(Fin)

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

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