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Dyspnée

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Texte intégral

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Dyspnée

A. Pelet, S. Doll et B. Favrat

2490 Médecine&Hygiène 2508, 8 décembre 2004www.medhyg.ch

REVUE

www.medhyg.chMédecine&Hygiène 2432, 9 avril 2003 0000

Présentation de cas

Madame Padesouffle est une pa- tiente de 35 ans, connue pour une toxi- comanie active depuis plus de dix ans, sous traitement de substitution par mé- thadone à raison de 140 mg/j. La pa- tiente dit s’injecter occasionnellement de l’héroïne. Elle fume du cannabis à raison de 4 à 5 joints par jour et est ta- bagique à 30 unités/paquet/année. La patiente se présente à votre consulta- tion en urgence, en se plaignant d’une dyspnée d’apparition progressive sur trois semaines, associée à une toux pro- ductive, des expectorations fétides et verdâtres, et des épisodes de «chaud- froid» depuis 48 heures. Un test VIH a été effectué il y a un an et demi, dont le résultat est négatif selon la patiente.

A l’examen physique, la patiente est tachypnéique au moindre effort, avec une fréquence respiratoire de 24/min.

La température axillaire est à 37,7°C, la TA de 100/60, le pouls à 108/min, régu- lier. L’auscultation pulmonaire montre des ronchis diffus en sur-projection des plages pulmonaires supérieure et moyen- ne droites, sans matité. Le reste de l’examen montre des adénopathies sous-angulo-maxillaires bilatérales et un écoulement postérieur.

Que faites-vous ?

Que faut-il savoir ?

La population de patients toxicoma- nes est plus vulnérable aux infections respiratoires en raison de la consomma- tion de «produits» divers sous forme snif- fée ou fumée et également en raison du tabagisme et de la consommation de can- nabis fréquents.1,2

D’autre part, étant donné la précarité de logement, la promiscuité et la préva- lence élevée d’infection à VIH, les pa- tients toxicodépendants sont exposés de manière préférentielle à la tuberculose (TBC), qu’il convient de rechercher acti- vement.3,4

La toux est un symptôme fréquent chez les patients toxicodépendants. Il faut investiguer de manière particulière l’anam- nèse des consommations inhalées ou fu-

mées (y compris parfois des comprimés !), et éviter la prescription de codéine et de dextrométhorphane. La prise en charge ne diffère pas de patients non toxicodé- pendants.

Diagnostic différentiel des dyspnées à évoquer :5

쐌 Infectieux

쐌 Cardiovasculaire: embolie pulmonai- re, décompensation cardiaque (sur en- docardite par exemple)

쐌 Pulmonaire : bronchospasme (sur inhalation de toxiques), atteinte du parenchyme (fibrose par exemple)

쐌 Hématologique : anémie

쐌 Traumatique : pneumothorax, trau- matisme de la paroi thoracique

쐌 Métabolique : (acidose, hyperthyroï- die, etc.)

Evaluer la nécessité d’une hospitalisation

Les critères de gravité orientant vers une hospitalisation sont :5 – un état confusionnel

– une fréquence cardiaque > 125/min – une pression systolique < 90 – une situation médico-sociale ou psychiatrique empêchant le maintien à domicile

– une fréquence respiratoire > 30 – une cyanose

– une température > 40°C ou < 35°C

En cas d’infection à VIH connue

Evaluer le degré d’immunosuppres- sion (CD 4) et rechercher les causes as- sociées au degré d’immunosuppression (ne pas oublier TBC !). Vérifier si le pa- tient reçoit une prophylaxie contre le Pneumocystis cariniisi les CD 4 < 200 cel- lules/mm3. En cas de difficulté, il est pré- férable de s’adresser à une consultation spécialisée ou d’hospitaliser le patient selon l’état clinique.

Les patients VIH positifs présen- tent quatre fois plus d’infections pul- monaires que les patients VIH négatifs.

Il est recommandé de vacciner les patients VIH contre le pneumocoque le plus tôt possible.6

En cas d’absence d’infection à VIH ou de sérologie inconnue

1. Si suspicion depneumonie :

쐌 Effectuer une radiographie du tho- rax (DD d’abcès, d’épanchement, de processus interstitiel).

쐌 Expectorations avec recherche de BK ; laboratoire selon la clinique.

쐌 Cave : en cas de doute sur la com- pliance du patient à se rendre à l’examen radiologique (problème psychiatrique associé, désinsertion massive ou méfiance par rapport aux soignants), ne pas hésiter à instaurer un traitement en attendant l’examen, après avoir fait des prélève- ments (expectorationsavec recherche de BK, hémocultures selon contexte).

쐌 Si la radiographie du thorax confirme le diagnostic de pneumonie, traitement par clarithromycine (si < 65 ans). En cas de pneumonie lobaire, traiter par amoxi- cilline-clavulanate. La lévofloxacine peut être une alternative,7et couvreMycoplasma pneumoniae, Haemophilus influenza, Strepto- coccus pneumoniae. Cave : contre-indica- tion : épilepsie. La lévofloxacine ne cou- vre pasLegionnella pneumophila.

쐌 En cas de sérologie VIH inconnue ou ancienne, ne pas hésiter à tester le pa- tient. En présence d’une pneumonie à Streptocoque pneumoniae confirmée chez un patient de < 50 ans, il estrecom- mandéde rechercher une infection à VIH systématiquement.

2. Si le patient est afébrile,penser à une surinfection bronchique, un asthme, une hyperactivité bronchique, ou à une atteinte pulmonaire sur toxiques (type fibrose).

3. Réévaluer à 48-72 heures de ma- nière systématique :si péjoration clini- que, hospitaliser ou évaluer la nécessité d’examens complémentaires : lavage bron- cho-alvéolaire, échographie cardiaque, avis spécialisé, etc.

Pathologies plus spécifiques à rechercher

쐌 Opiacés :œdème pulmonaire non car- diogène.8,9

쐌 Cocaïne free base ou crack : dou-

TOXICODÉPENDANCE : PROBLÈMES SOMATIQUES COURANTS

Coordination rédactionnelle : Jacques Besson et Anne Pelet Division d’abus de substances CHUV, Lausanne

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www.medhyg.chMédecine&Hygiène 2508, 8 décembre 2004 2491

TOXICODÉPENDANCE : PROBLÈMES SOMATIQUES COURANTS

0000 Médecine&Hygiène 2316, 4 octobre 2000www.medhyg.ch

쐌 Haschich et dérivés :aspergillose pul- monaire invasive chez patients immuno- déprimés,22cancers (suspectés).23

쐌 Produits de «coupe» : hypertension pulmonaire secondaire.

쐌 Amphétamines :œdème pulmonaire (rares cas décrits).24

Cas clinique (suite)

Une radiographie du thorax chez Madame Padesouffle montre une pneu- monie lobaire. Une culture d’expectora- leurs thoraciques, lésions des voies aérien-

nes supérieures,10 bronchospasme,11,17 crachats noirâtres (si «crack»),12atteinte des bronches larges et petites.13

쐌 Haschich et dérivés : bronchopneu- monie obstructive chronique.14,15

쐌 Produits de «coupe» :pneumopathies interstitielles, syndrome restrictif (granu- lomatose,16fibrose, etc.) sur talc et autres produits de coupe.

쐌 Sur injections : embolies pulmonai- res, pneumothorax si essai d’injection en jugulaire.

쐌 Inhalation (sniffé ou fumé):asthme.17,18

Pathologies plus rares décrites

쐌 Cocaïne free-base ou «crack» : lé- sions thermiques de l’arbre bronchique, pneumothorax, hémoptysie, sténoses sous-glottiques sévères, œdème pulmo- naire, syndrome de détresse respiratoire de l’adulte (SDRA), atteinte pulmonaire à éosinophiles (avec hémorragies pulmo- naires, ouCrack lung),19hémorragies intra- pulmonaires,20 bronchiolite oblitérante avec pneumonie organisée (BOOP).21

tion se révèle négative. Des hémocultu- res ne peuvent être pratiquées car la patiente refuse les prises de sang. Un traitement par amoxicilline-clavulanate est instauré. A 48 heures, la patiente est afébrile, et va beaucoup mieux. Un ren- dez-vous est convenu avec la patiente pour effectuer un nouveau test VIH, où les consommations de cocaïne et de can- nabis ainsi que le tabagisme seront à nouveau discutés dans la perspective de l’épisode aigu. Vous fournissez égale- ment à la patiente de la documentation concernant l’arrêt du tabagisme.

Bibliographie :

1 Goedert JJ, Fung MW, Felton S, Battjes RJ, Engels EA.

Cause-specific mortality associated with VIH and HTLV-II infections among injecting drug users in the USA. AIDS 2001 ; 15 : 1295-302.

2 Sanchez-Carbonell X, Vilaregut A. A 10-year follow-up study on the health status of heroin addicts based on official registers. Addiction 2001 ; 96 : 1777-86.

3 Rusen ID, Yuan L, Millson ME. Prevalence of Mycobacterium tuberculosis infection among injec- tion drug users in Toronto. Canadian Med Ass J 1999 ; 160 : 799-802.

4 Perlman DC, Salomon N, Perkins MP, et al.

Tuberculosis in drug users. Clin Inf Dis 1995 ; 21 : 1253-64.

5 Favrat B, Uldry C. Evaluation diagnostique de la dysp- née. Revue Med Suisse Romande 2001 ; 121 : 19- 25.

6 Katzenstein TL. Pneumococcal vaccination of HIV- infected individuals : Safety and efficacy. AIDS Patient Care STDS 1997 ; 11 : 269-75.

7 Léophonte P, Veyssier P. La Lévofloxacine dans le traitement des pneumonies communautaires à pneu- mocoque. Presse Méd 1999 ; 28 : 1975-9.

8 Proudfoot A, Vale A. Substance abuse ; features and acute management. Medicine 1995 ; 23 : 71-6.

9 Sporer KA, Dorn E. Heroin-related noncardiogenic pul- monary edema. Chest 2001 ; 120 : 1628-32.

10 Trimatchi M, Gregorini G, Faccetti B, et al. Cocaine- induced midline destructive lesions. Medicine 2001 ; 80 : 391-404.

11 Rome LA, Lippmann ML, Dalsey WC, Taggart P, Pomerantz S. Prevalence of cocaine use and its

쐌 En cas de dyspnée subaiguë, évaluer la nécessité d’hospitaliser le patient

쐌 Les substances consommées et le mode d’absorption sont des éléments à investi- guer

쐌 Il est recommandé d’évaluer les comorbi- dités somatiques, et surtout la possibilité d’une infection VIH, ainsi qu’une patholo- gie thrombo-embolique sous-jacente

쐌 Il faut dépister le VIH en cas de TBC avé- rée ou de pneumonie àS. pneumoniae survenant avant 50 ans

쐌 Si le patient refuse l’hospitalisation ou la radio du thorax, ou si l’on n’est pas sûr que le patient revienne à une éva- luation ultérieure, ne pas hésiter à trai- ter comme une pneumonie

Points-clés

impact on asthma exacerbation in an urban popula- tion. Chest 2000 ; 117 : 1324-9.

12 Benson MK, Bentley AM. Lung disease induced by drug addiction. Thorax 1995 ; 50 : 1125-7.

13 Tashkin DP, Simmons MS, Coulson AH, Clarck VA, Gong H. Respiratory effects of cocaine «freebasing»

among habitual users of marijuana with or without tobacco. Chest 1987 ; 92 : 638-44.

14 Tashkin DP, Coulson AH, Clark VA, et al. Respiratory symptoms and lung function in habitual heavy smo- kers of marijuana alone, smokers of marijuana and tobacco, smokers of tobacco alone and nonsmokers.

Am Rev Respir Dis 1987 ; 131 : 209-16.

15 Bloom JW, Kaltenborn WT, Paoletti P, Camilli A, Leibowitz MD. Respiratory effects of non-tobacco cigarettes. BMJ 1987 ; 295 : 1516-8.

16 Lemoine R, Dusmet M. Pulmonary granulomas in an intravenous drug user. N Engl J Med 2000 ; 343 : 1312.

17 Bueis AB, Vega AP, Ramos JL, et al. Bronchial hyper- reactivity in patients who inhale heroin mixed with cocaine vaporized on aluminum foil. Chest 2002 : 121 : 1223-30.

18 Corbridge T, Cygan J, Greenberger P. Substance abuse and acute asthma. Intensive Care Med 2000 ; 26 : 347-9.

19 Forrester JM, Steele AW, Waldron JA, Parsons PE.

Crack Lung : An acute pulmonary syndrome with a spectum of clinical and histopathologic findings. Am Rev Resp Dis 1990 ; 142 : 462-7.

20 Baldwin GC, Choi R, Roth MD, et al. Evidence of chro- nic damage to the pulmonary microcirculation in habi- tual users of alkaloidal («crack») cocaine. Chest 2002 ; 121 : 1231-8.

Adresse des auteurs :

Dr Anne Pelet

Division des maladies infectieuses CHUV

1011 Lausanne

Drs Bernard Favrat et Sébastien Doll PMU

Bugnon 21 1005 Lausanne

21 Gatof D, Albert RK. Bilateral thumb burns leading to the diagnosis of crack lung. Chest 2002 : 121 : 289-91.

22 Hamadeh R, Ardehali A, Locksley RM, York MK. Fatal aspergillosis associated with smoking contaminated marijuana in a marrow transplant recipient. Chest 1988 ; 94 : 432-4.

23 Carriot F, Sasco AJ. Cannabis et cancer. Rev Epid et Santé Publ 2000 ; 48 : 473-83.

24 Maury E, Darondel JM, Buisinne A, Guitton C, Offenstadt G. Acute pulmonary edema following amphetamine ingestion. Intensive Care Med 1999 ; 25 : 332-3.

Cette publication a été soutenue et financée par l’Office fédéral de la santé publique, Berne.

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