LE
TOURISME VERT
u n t o u r i s m e
d e l i b e r t é
Apport et témoignage de Tourisme en Espace Rural TER par Jean Lobry membre du Directoire
Maison du Tourisme Vert 35, rue Godot de Mauroy 75009 Paris
La Documentation Française
Le tourisme vert - un tourisme de liberté : apport et témoignage de TER (tourisme en espace rural) par Jean Lobry au nom de l'équipe d'animation de TER* - Paris : La Documentation Française, 1985. - 124 p. : ill. ; 24 cm.
ISBN : 2-11-001470-9
* André Guignand - Jean Lobry - Vincent Planque - Yves Singer - Suzanne Thibal.
© La Documentation Française - Paris, 1985 ISBN 2-11-001470-9
Alors que s'élaborait cet ouvrage, un nouveau témoignage de l'action de l'associa- tion « Tourisme en Espace Rural », TER, MM. René Souchon, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Agriculture et de la Forêt, et Jean-Marie Bockel, secré- taire d'État auprès du ministre du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, déci- daient de confier à M. Henri Grolleau, inspecteur général du Tourisme et André Ramus, ingénieur général du Génie rural, des eaux et forêts, une mission de réflexion et de propositions sur l'ensemble des questions intéressant le Tourisme en espace rural.
Dans cette concordance fortuite nous nous réjouissons de pouvoir apporter, par cet ouvrage, notre contribution pour éclairer le passé et partiellement le présent du « Tourisme vert ».
DIRECTOIRE DE TER (article X des statuts)
Composent le Directoire :
• en tant que représentants des organismes fondateurs de TER : Présidents d'Honneur Raymond Pages
Louis Tissot (t) Président Robert Morlevat
(Fédération nationale des Logis de France et Auberges rurales)
Vice-Président André Guignand Trésorier (Villages Vacances Familles) Vice-Président Yves Borredon
(Agriculture et Tourisme) Membres Marcel Foulquier
(Fédéraion nationale des Gîtes ruraux de France) Fernand Chaussebourg
(Fédération nationale des Comités départementaux de Tourisme)
• à titre personnel : Jean Lobry Vincent Planque Yves Singer Suzanne Thibal
• ont successivement assumé la présidence de TER :
Robert Morlevat (1971) - au titre des Stations vertes de vacances Raymond Pages (1972) - au titre des gîtes ruraux de France Louis Tissot (1973-1978) - au titre de VVF
Robert Morlevat (depuis 1979) - au titre des Logis et Auberges de France
UN TOURISME DE LIBERTÉ LE TOURISME VERT
Dans ce premier chapitre nous retraçons, brièvement, de 1970 à 1982, l'histoire et les activités de l'association Tourisme en Espace Rural : TER. Douze années de la belle aventure du développement et de la promotion du tourisme en espace rural.
Une aventure riche de rencontres, d'échanges d'idées, passionnante par les pro- blèmes qui se présentèrent, furent à résoudre.
Au lendemain de 1968, se sont en effet, à nouveau mobilisés ceux qui avaient été à l'origine des grands mouvements touristiques nationaux de l'après-guerre, mouvements de tourisme social et familial en espace rural : les Logis et Auberges de France, les Gîtes ruraux de France, Villages Vacances Familles : VVF...
Il leur paraît alors opportun, à partir de ces chaînes d'hébergement, d'impulser une nouvelle dynamique fondée sur la concertation et la coopération entre parte- naires du tourisme vert.
Les enjeux économiques, sociaux et culturels de l'aménagement touristique de l'espace rural, de son ouverture aux citadins sont alors importants. Ils ne peuvent que rendre sensibles ces praticiens aux risques de perturbations résultant du suc- cès grandissant du tourisme vert surtout si son développement se révèle anarchi- que.
Aussi l'équipe de TER s'assigne-t-elle pour mission fondamentale de constituer une « table ronde » permanente ouverte, de recherche, de réflexion, de concerta- tion entre les partenaires du tourisme rural : administrations, collectivités locales, compagnies consulaires, groupements professionnels, associations, institutions bancaires, notamment.
Favoriser, simultanément et conjointement,
• la prise en compte des idées-force sous-jacentes au tourisme vert ;
• la mise en place de produits touristiques de qualité ;
• l'organisation touristique au niveau des pays, c'est-à-dire l'accès des citadins à un espace porteur de valeurs traditionnelles, et préparé à les recevoir ;
• la possibilité pour les ruraux de relancer la vie économique et sociale de leur terroir, par une nouvelle activité, tout en préservant leur patrimoine culturel ;
• une nouvelle solidarité ville-campagne entre collectivités locales urbaines et rurales, à la rencontre entre citadins et gens du pays
tels ont été les objectifs.
Ce premier chapitre porte témoignage de ce vécu collectif. Un passé très récent qui peut éclairer le présent et préparer l'avenir, ce que nous verrons dans les cha- pitres suivants.
Les 17 colloques qui se sont déroulés, à l'instigation de TER, ou de TER et d'un autre de ses partenaires, comme ce fut fréquemment le cas, durant cette période, ont été denses, riches en apports d'expériences, de relations, de discussions et de conclusions.
Nous ne saurions, ici, rapporter ces nombreuses heures de débats... en quelques lignes. On voudra bien le comprendre.
Années 50... naît le tourisme rural...
Des vacances à la campagne ! Un phénomène qui n'est pas si lointain dans la trajectoire de notre histoire.
Des prémices du nouveau goût pour la nature, enregistrées au cours du XIX siècle et des premières décennies de celui qui s'achève, arrivons dans les années 50.
C'est alors en effet qu'Émile Aubert, sénateur des Basses-Alpes donne une impulsion décisive à la naissance des premiers gîtes en faisant accorder aux ruraux des subventions du département pour construire et équiper des locaux destinés à l'accueil des citadins en vacances.
C'est là que se situe la véritable naissance de ce que nous appelons le tourisme rural, et qui acquiert bientôt droit de cité dans le rapport général de la commission de modernisation du tourisme, établi par Vincent Planque, inspecteur général du tourisme, dans le cadre du II plan quinquennal de modernisation et d'équipement du territoire français.
Les années 50..., si riches de créations dans les domaines qui nous interessent, alors que passé le temps de l'essentiel des rétablissements vitaux d'après la seconde guerre, on peut songer à l'éclosion des vacances...
Et que simultanément aux attirances du « soleil-mer » ou du « montagne- neige » s'éveillent aussi nos campagnes au phénomène, traçant ainsi une 3 voie.
Sur le GR 6 en Dordogne... le château de Commarque et en arrière plan le château de Laussel Ph. Emery, FFRP
... et TER, en 1970
Gîtes ruraux, Logis de France, Villages Vacances Familles, Stations vertes de vacances... hébergement, équipement, accueil, animation... ces promoteurs de vacances vertes décident, aux lendemains de 1968, de regrouper leurs efforts et d'impulser une nouvelle dynamique basée sur la concertation et la coopération entre les partenaires du tourisme vert. Et de la Conférence permanente des orga- nisations de tourisme familial et social en milieu rural, qu'ils ont créée en 1969, rejoints par la Fédération nationale des comités régionaux de propagande et d'expansion des produits agricoles et le Touring Club de France, en mai 1970, naît une association de concertation et de coordination : Tourisme en Espace Rural, TER.
TER, accueillie favorablement par les Pouvoirs publics : Agriculture, Tou- risme, Plan et DATAR qui l'encouragent et voient en elle l'interlocuteur privilé- gié, qu'elle est toujours...
Première rencontre
Certainement est-il opportun de rappeler les objectifs fondamentaux de TER à travers l'article 2 de ses statuts.
« L 'association a pour but d'organiser la concertation et la coopération entre ses membres en vue de :
1 - promouvoir le tourisme en espace rural, notamment par des recherches et études concourant :
• au choix des sites naturels à équiper et à améliorer compte tenu de l'environne- ment ;
• à la création ou l' aménagement des moyens d'hébergement ;
• à l' équipement de loisirs en liaison avec les collectivités locales ;
• à la propagande, sous toutes ses formes et par tous moyens appropriés, tant en France qu'à l'étranger ;
• à l' expansion des produits régionaux de qualité ;
• à la mise en place de service d'information et de réservation.
2 - être l' interlocuteur des pouvoirs publics pour tout ce qui concerne le tourisme en espace rural, notamment en apportant son concours à ses adhérents à cet égard ;
3 - faciliter à ses adhérents la réalisation de leur objectifs dans le domaine de la formation des personnes concernées par le tourisme rural et l'animation ; 4 - favoriser toutes innovations et créativités en matière de formules de séjours et de loisirs en milieu rural ;
5 – favoriser une coordination des actions au niveau régional.
Mais encore faut-il s 'assurer que tous les partenaires du tourisme rural : admi- nistrations, collectivités locales, compagnies consulaires, groupements profession- nels, associations, institutions bancaires, et sur d'autres critères, ruraux et cita- dins, sont bien disposés à user et utiliser cette table ronde permanente et ouverte que constitue et qu'anime TER.
Logis de France, en Dordogne Hôtel La Flambée à Bergerac Ph. Logis de France
On le prouve, en novembre 1972, par le premier colloque de TER, alors présidé par Raymond Pagès, en tant que président de la fédération nationale des gîtes ruraux, colloque qui répond à un évident besoin, constitue un succès évident.
Durant cette journée chaleureuse, plus de 500 participants venus de tous les horizons du monde rural ou s'y intéressant, se sont retrouvés ayant bien compris que si cette manifestation s'intitule « un colloque pour quoi faire ? » c'est bien d'ouvrir, effectivement, la concertation générale et de créer les bases de l'ensem- ble des réflexions qu'il conviendra de mener.
Réflexions ! Le professeur Louis Leprince Ringuet dès l'abord livre les siennes sur le thème des vacances bleues, blanches, mais surtout vertes qui doivent pour les années à venir constituer des vacances de liberté « où chacun peut y manifester sa personnalité selon ses goûts,... où chacun peut s'y former ou y parfaire sa conduite d'homme par la découverte de la nature : une envie qu'il faut donner pour que ceux qui se sentent les mal compris, les mal aimés du pays rural, soient mieux connus de ceux des villes. Certes, toute une série de problèmes à résoudre avec audace et aussi avec prudence ».
Le tourisme vert, l'expression est donc lancée ici, lors de ce 1 grand colloque.
On connaît la fortune qu'elle a rencontrée !
Ainsi d'emblée l'accent se trouve-t-il porté sur l'une des séries de questions fon- damentales que pose le tourisme en milieu rural : un espoir dans le domaine de l'aménagement de l'espace rural ; la nécessité de bonnes relations sociales entre urbains et ruraux, le fait qu'il ne peut se développer à côté du monde agricole, mais avec lui.
Et, encore que richesse limitée, l'espace rural doit être sauvegardé et aménagé.
Et tout au long de cette journée on débroussaillera les pistes de concertation à emprunter désormais,
pour choisir les implantations, déterminer les équipements, densifier les formu- les d'hébergement,
assurer les moyens de l' accueil et d'une animation qui fera appel aux valeurs réelles et profondes,
prendre en compte les facteurs écologiques,
esquisser aussi des notions de commercialisation des produits, des propos bien neufs encore pour le milieu,
et surtout apporter des soins tout particuliers à développer cette qualité de vie que va constituer la rencontre des milieux urbain et rural.
Et chacun est bien conscient que sur les chemins qui nous attendent la tâche, les tâches, ne seront point toutes aisées.
Mais, tous, à l'issue de cette grande journée, peuvent épouser la formule d'Oli- vier Guichard, alors ministre de l'Aménagement du territoire, de l'Équipement, du Logement et du Tourisme, venu conclure le colloque : « Vous représentez une force d 'initiative et d 'espérance pour un tourisme qui assure enfin l'égalité de celui qui vient et de celui qui accueille, de celui qui passe et de celui qui reste. Le tou- risme que vous animez est à la fois force de développement et réponse à nos inquiétudes ».
Initiative et espérance : le premier acte du lancement officiel de TER ne serait pas terminé, sans le manifeste du tourisme en espace rural.
Adopté par le colloque, il va constituer pour les années à venir l'inspiration et la référence pour toute action en matière de tourisme rural en France et dans cer- tains pays étrangers.
Pour tous ceux qui, au sein des communes, pays, départements, régions ainsi qu 'au plan national ont décidé, en s'associant, de jouer un rôle dans cette action collective qu'est le tourisme en espace rural.
Le manifeste du Tourisme en espace rural
« Considérant, au plan social : a - pour le monde rural :
• un profond désir de désenclavement économique, social, humain ;
b - pour les citadins :
• le tourisme comme un fait social fondamental des temps modernes,
• la multiplication des temps de loisirs et la recherche d'activités de détente,
• de nouveaux besoins à satisfaire, provoqués par les agressions de la vie moderne - besoins de caractère physiologique, psychique, spirituel ;
au plan écologique :
• une meilleure prise de conscience de la nécessité de protéger le milieu rural,
• une sensibilisation plus aiguë en faveur de la conservation du patrimoine histo- rique, architectural, culturel du pays ;
au plan économique :
• la nécessité pour les ruraux de ressources complémentaires par l'exercice de nouvelles activités dont ils doivent conserver la maîtrise,
• le fait touristique rural, facteur de développement économique,
• la prise en considération de ce facteur dans tous les schémas d 'aménagement rural ;
au plan international :
• le brassage de plus en plus accentué entre les ressortissants des pays européens,
• la tendance à la concertation à tous les niveaux et dans tous les domaines,
• la nécessité pour la France, dans l'optique de la compétition d'offrir, sur le mar- ché international, des produits touristiques authentiques, originaux, de qualité.
Objectifs
Le tourisme en espace rural ne doit pas :
• contribuer à faire courir le risque d'une colonisation de la campagne française, notamment par l'accaparement des sols,
• gêner, par une mobilisation concurrentielle des possibilités d'investissement, la couverture des besoins fondamentaux des occupants du sols et des collectivités locales concernées,
• porter atteinte à l'intégrité naturelle, architecturale, humaine des provinces.
Le tourisme en espace rural doit favoriser :
• l'insertion des citadins en milieu rural, dans le respect d'un seuil d'équilibre entre le nombre des ruraux et celui des vacanciers,
• la rencontre et la concertation, et susciter la multiplication des contacts entre ruraux et citadins, source d'enrichissement humain pour tous.
Le tourisme en espace rural doit apporter : - au rural,
de réelles possibilités de promotion humaine, tout en assurant le complément éco- nomique lui permettant d'assumer pleinement sa vocation fondamentale d'agri- culteur ou d'artisan ;
- au citadin,
le moyen d'exercer effectivement son droit à l'espace, au « retour aux sources »,
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