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Actualité sociale janvier 2022

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Il est difficile actuellement d’évoquer l’actualité sociale d’un pays, que ce soit de la France ou de l’Allemagne, sans évoquer la pandémie qui nous tient fermement dans ses griffes depuis deux ans. Si la France est plus touchée que l’Allemagne en ce début d’année, nos voisins d’outre-Rhin sont également très affectés, car le variant Omicron a rattrapé l’Allemagne, même si les chiffres partent à la hausse avec un certain retard par rapport à la France.

Parmi les autres sujets qui intéressent les Allemands actuellement, certains sont la conséquence du changement de gouver- nement intervenu à l’automne dernier, notamment la légalisation du cannabis, déjà envisagée auparavant, mais dont la mise en place de la réglementation s’est accélérée ces derniers temps. La présence des Verts au gouvernement a sans doute également joué un rôle dans la sortie anticipée du charbon actée par la coalition «  feu tricolore  ». Si la victoire pour le moins inattendue des sociaux-démocrates aux dernières élections a déjà marqué et marquera encore la vie sociale et économique du pays, il est un aspect qu’ils n’avaient pas prévu de traiter de sitôt, à savoir le changement à la tête de la Bundesbank, dont ils ont pu, pour la première fois depuis longtemps, déterminer le président, un choix suscep- tible d’ouvrir des orientations différentes de la politique monétaire. Que le niveau actuel de l’inflation inquiète les Allemands

n’est pas une nouveauté, c’est un souci permanent né des soubresauts historiques, mais cette fois-ci il atteint un niveau inconnu depuis des dizaines d’années, propre à réveiller de mauvais souvenirs. Cette inquiétude, conjuguée à celle induite par la propagation virulente de la pandémie, conduit à un début d’année difficile, un défi tant pour le nouveau gouvernement que pour tous les Allemands.

Pandémie : le variant Omicron rattrape l’Allemagne

Si le variant Omicron sévit en France depuis des mois – l’Allemagne a déclaré la France pays à haut risque depuis la fin de l’année 2021, ce qui n’est guère surprenant – notre voisin d’outre-Rhin est aussi rattrapé par la vague d’infections, avec quelques semaines de retard par rapport à d’autres pays européens. À la fin de l’année 2021, selon les données déclarées par les Länder, 44,3  % des détections du coronavirus analysées par rapport aux variants étaient dues à Omicron. Une semaine auparavant, ce taux, avec 15,8 %, était encore trois fois moindre. Le nombre d’infections déclarées – des centaines de milliers par jour en France comparé à des dizaines de milliers en Allemagne – est toutefois à prendre avec précaution  : la collecte des données par les instances des Länder semble incom- plète, comme l’a annoncé l’Institut Robert Koch, peut-être en raison de la prévalence

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plus grande des auto-tests non recensés outre-Rhin, ou bien parce que la protection des données personnelles y est plus stricte qu’en France. Le nombre de décès dus au Covid, assez comparable dans les deux pays, semble l’indiquer. Les experts des deux pays estiment que le variant Omicron entraîne une évolution moins grave de l’infection, et que les personnes touchées ont moins besoin de se faire hospitaliser.

Devant la remontée considérable du nombre d’infections, le nouveau gouver- nement a durci les mesures anti-Covid.

Encore avant la fin de l’année  2021, il a notamment adopté l’obligation de vacci- nation dans les établissements de santé (einrichtungsbezogene Impfpflicht), qui s’applique dès le 15  mars 2022 aux employés des cliniques, des maisons de soins, des services de soins ambulatoires et d’autres établissements similaires, et qui est régie par la loi sur la protection contre les infections. L’objectif de cette nouvelle réglementation est de mieux protéger les personnes âgées et celles souffrant de multi-morbidités contre une contamination par le coronavirus. Par le passé, des épidémies de COVID-19 se sont produites à plusieurs reprises, notamment dans les maisons de retraite.

Si l’obligation de vaccination pour certaines catégories de personnel est actée, celle portant sur l’ensemble de la population, une mesure chaudement débattue dans l’ensemble de la population, risque de ne pas voir le jour de sitôt, contrairement à la promesse d’Olaf Scholz qui la voyait entrer en vigueur au plus tard début mars 2022.

La raison en est le calendrier très contraint des deux Chambres parlementaires. Le Bundestag ne pourra prendre de décision qu’au milieu du mois de mars. Puisque le Bundesrat, qui doit donner son appro- bation à cette mesure très contestée dans la population, ne se réunit que le 8 avril, le projet ne pourra pas être approuvé avant cette date, pour une entrée en vigueur au plus tôt début mai.

Si, en outre, un registre central des vaccinations avec des données sur toutes les personnes vaccinées doit être mis en

place pour l’application de cette obligation, comme c’est probable, la vaccination obliga- toire pourrait très bien entrer en vigueur au mois de juin seulement. Dirk Wiese, vice-pré- sident du groupe parlementaire responsable du projet de vaccination obligatoire au sein du SPD, s’est contenté de déclarer début janvier : « Nous devrions achever les délibé- rations au Bundestag au cours du premier trimestre ». Il s’agit selon lui d’un calendrier exigeant. En ce qui concerne d’éventuels retards, Wiese a souligné que l’obligation de vaccination n’avait de toute façon pas d’effet à court terme, mais qu’il s’agissait

« d’une précaution à prendre en perspective de l’automne et l’hiver prochains  ». De façon surprenante, le gouvernement fédéral laisse aux groupes parlementaires le soin de prendre l’initiative d’une loi sur la vacci- nation obligatoire.

Cette réflexion sur la vaccination obliga- toire a été accompagnée d’une série de mesures destinées à freiner la propagation du virus. Dans toute l’Allemagne, les personnes non-vaccinées sont interdites d’aller dans les bars, restaurants, théâtres, cinémas, salles de spectacles et de sport, mais aussi les commerces non essentiels. De plus, O. Scholz a renforcé le contrôle dans les bars et les restaurants pour les personnes vaccinées. Depuis le 15  janvier 2022 au plus tard, les clients doivent se conformer à la règle 2G+, c’est-à-dire présenter un test négatif en plus d’un certificat de vaccination ou de guérison. Seules les personnes ayant déjà reçu une dose de rappel (geboostert) sont exemptées de test. Si les règles d’iso- lement ont été allégées pour ne pas désor- ganiser l’activité économique du pays, il est recommandé de strictement limiter les contacts au domicile privé et à l’extérieur.

Il est vrai que les Allemands sont un peu moins vaccinés que leurs voisins  : début 2022, seulement 71,6 % de la population a reçu deux doses, ce qui la place derrière le Portugal, l’Espagne, l’Italie ou la France.

Pourtant, ils savent, ou au moins supposent, que le retour à la normale n’est pas pour cette année. D’après un sondage réalisé par l’institut de sondage YouGov pour l’agence de presse allemande Deutsche

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Presse Agentur, seuls 15 % pensent que la pandémie sera en grande partie ou complè- tement résorbée cette année. En revanche, 79  % estiment que le virus continuera à perturber leur vie tout au long de l’année, du moins en partie. Certains estiment que le Covid, au fil de ses différentes variantes, se transformera en un ennui saisonnier, à l’instar de la grippe…

Légalisation du cannabis envisagée

Le contrat de coalition du nouveau gouver- nement tricolore d’Olaf Scholz comporte une mesure qui reste encore contestée dans la plupart des pays européens, à savoir la légalisation de la production et de la consom- mation de cannabis. La date de l’entrée en vigueur du nouveau règlement n’est pas encore fixée. La maîtrise de la situation sanitaire actuelle mobilisant l’attention des pouvoirs publics, l’élaboration des condi- tions de son application prendra sans doute encore du temps, probablement plusieurs mois. La légalisation du cannabis est actuel- lement prévue pour une durée de quatre ans. À la fin de cette période, la loi sera évaluée avant une éventuelle reconduction.

Avec cette loi portant sur « la distribution contrôlée de cannabis aux adultes à des fins de consommation dans des magasins agréés », selon le texte du projet de loi, l’Alle- magne rejoint le club très fermé des pays où le cannabis est toléré, voire autorisé. En Europe, l’Espagne et les Pays-Bas acceptent déjà, sous certaines conditions, la consom- mation et la culture de cannabis à des fins personnelles. La République tchèque et le Portugal, allant un peu moins loin, ont décri- minalisé la consommation de cannabis.

Malte est le premier pays de l’UE à autoriser non seulement la consommation mais aussi la culture de cannabis à des fins person- nelles. La France, elle, y reste fermement opposée, une position de moins en moins suivie par les autres pays européens.

© Maxppp – Jean-Marc Quinet.

Cette libéralisation ferait de l’Allemagne le deuxième pays de l’UE, après les Pays Bas, à choisir la voie de la vente encadrée dans des magasins agréés, soit des café-tabacs ou des pharmacies. L’Allemagne dispose déjà d’une législation moins restrictive que nombre de ses voisins, avec la possibilité dans certaines grandes villes, notamment Berlin, de détenir une petite quantité de cannabis pour la consommation person- nelle. Son usage à des fins thérapeutiques a été autorisé dès 2017.

Ceux qui plaident en faveur de cette mesure, dont ses protagonistes au sein des trois partis de gouvernement, avancent des raisons de santé publique  : le cannabis vendu dans la rue est rarement un produit pur. Il est souvent coupé avec d’autres substances, telles que de la laque, du sable ou du Brix, un adhésif de synthèse destiné à gonfler artificiellement son poids. S’y ajoute le danger actuel de la hausse signifi- cative du THC, le tétrahydrocannabinol, la molécule à l’origine d’effets psychotropes dans les produits frelatés, ainsi que celui de l’accroissement significatif des produits de synthèse. Avec la légalisation du haschich, le nouveau gouvernement espère pouvoir réduire le recours à ces produits stupé- fiants vendus dans l’illégalité et améliorer ainsi non seulement la santé mais aussi les finances publiques. Si le cannabis en vente libre suscite l’inquiétude des addictologues et des syndicats de policiers, qui redoutent une banalisation de la consommation de drogues, il ravit les financiers : taxé comme le tabac et l’alcool, il pourrait en effet remplir les caisses de l’État sans compter la création de plusieurs milliers d’emplois.

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Vers une sortie anticipée du charbon ?

Avant l’arrivée au pouvoir de la coalition

« feu tricolore » sous la conduite d’O. Scholz, la sortie définitive du charbon avait été actée pour 2038. Or, il s’avère que la fin du charbon pourrait avoir lieu bien plus tôt que prévu, et ce pour deux raisons princi- pales. La première est le renchérissement très important de la production d’élec- tricité à partir de charbon. La fixation des objectifs climatiques au niveau européen va entraîner un relèvement progressif de la taxe de CO2 au delà de de 25 € la tonne.

Comme les centrales à charbon émettent beaucoup de CO2, un prix du CO2 de 50 € par tonne augmente considérablement les coûts de production de l’électricité  : d’environ 50 % pour le charbon par rapport à aujourd’hui et de plus de 100 % pour le lignite, particulièrement nuisible au climat.

C’est pourquoi la production d’électricité à partir du charbon ne cesse de reculer : de 43 % du total en 2010, elle est passée à 24 % seulement en 2020 ; pour 2030, on ne prévoit qu’une part de 2 % du charbon au sein du mix électrique.

L’électricité produite à partir du lignite est ainsi devenue, en Allemagne comme dans d’autres pays européens, l’énergie la plus onéreuse, alors que l’électricité verte, provenant du soleil ou du vent, devient de plus en plus abordable. C’est pourquoi les spécialistes tablent sur la fin de l’élec- tricité produite à partir de charbon ou de lignite vers l’année 2030. C’est le lignite qui est particulièrement touché par l’aug- mentation du prix du CO2 : il devient plus cher que la houille et le gaz. Sa part dans le mix électrique passe de 17  % actuel- lement (voir graphique) à environ 0,5  % en 2030. L’électricité produite à partir de la houille chute également, passant de 7 % aujourd’hui à 1,8 %.

Cela signifie que d’ici 2030, moins d’un tiers du lignite devrait être extrait dans les mines à ciel ouvert allemandes, contrai- rement à ce qu’affirment les entreprises de lignite, soit environ 510 millions de tonnes au total. La moitié environ de cette quantité se trouverait dans le bassin minier rhénan,

près de Cologne, et l’autre moitié dans les deux bassins miniers est-allemands, près de Leipzig et dans le Brandebourg (Lausitz).

Si la première raison du recul, voire de l’extinction du charbon est économique, la seconde est de nature politique, à savoir les projets en la matière du nouveau gouver- nement réunissant les Verts et les Libéraux sous la houlette des Sociaux-démocrates.

Et ce n’est peut-être pas par hasard qu’ils ont choisi la même date de 2030 comme horizon temporel pour la sortie définitive du charbon. Cette date qui, initialement, avait été retenue comme un idéal à atteindre –

« idealerweise » – est désormais l’horizon temporel fixé par le gouvernement, une décision que l’opposition chrétienne-démo- crate a qualifié de « rupture de confiance, une évolution amère pour les régions et les emplois concernés ».

C’est donc surtout dans les régions charbonnières elles-mêmes que les projets de la nouvelle coalition suscitent l’inquiétude.

Beaucoup se sentent pris au dépourvu, et pas seulement dans le bassin minier de la Lusace dans le Brandebourg et la Saxe, où l’extraction du lignite est pratiquée depuis des décennies. Pour eux, 2030, c’est demain. D’où les questions angoissées  : Comment cela va-t-il se passer ? Comment et où créer de nouveaux emplois ? Et d’où viendra l’électricité  ? Le nouveau gouver- nement, quant à lui, a une autre perspective : la sortie anticipée du charbon doit garantir les objectifs climatiques de l’Allemagne.

C’est pourquoi il a été décidé de réduire les gaz à effet de serre de 65 % d’ici 2030 par rapport à 1990. Le gouvernement estime que les objectifs d’émission ne pourront pas être atteints sans une sortie quasi totale du charbon d’ici 2030.

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Parallèlement, pour sortir plus tôt du charbon, les énergies renouvelables comme le vent et le soleil doivent être développées beaucoup plus rapidement. Le gouver- nement prévoit une augmentation considé- rable de la consommation d’électricité d’ici 2030, notamment en raison de l’augmen- tation du nombre de voitures électriques et de pompes à chaleur électriques dans les bâtiments. Et 80 % de cette quantité crois- sante doit provenir d’énergies renouve- lables d’ici 2030 – au lieu de l’objectif de 65 % prévu jusqu’à présent. Une croissance considérable ; en 2020, la part d’électricité verte n’atteignait que 45 % environ.

Pour y parvenir, des milliers de nouvelles éoliennes seront nécessaires. Le nouveau gouvernement veut consacrer jusqu’à deux pour cent de la surface du pays à l’énergie éolienne, soit beaucoup plus que jusqu’à présent, mais c’est surtout le développement sur terre qui piétine : trop peu de surfaces, des procédures de planification trop longues, de nombreuses plaintes, des conflits avec la protection des espèces et de la nature.

Fin 2020, à peine 0,7 % à 0,85 % de la surface nationale était légalement affectée à l’énergie éolienne, selon le rapport d’une commission fédérale et des Länder publié en octobre dernier. Selon certains rapports des Länder, les procédures de planification durent actuellement au moins cinq ans, parfois même douze ans.

En attendant, les producteurs d’électricité à partir de charbon paraissent peu inquiets.

Le nouveau gouvernement souhaitant, en plus des énergies renouvelables, favoriser les centrales à gaz, ils pourraient parfai- tement envisager de convertir leurs centrales existantes pour fonctionner au gaz…

Changement inattendu à la tête de la Bundesbank

Le départ d’Angela Merkel, après seize ans à la tête du gouvernement, s’accom- pagne d’un autre retrait, inattendu celui-là : Jens Weidmann, président de la Bundesbank depuis dix ans, a annoncé sa démission à la fin de l’année dernière, alors qu’il lui restait encore cinq ans de mandat à faire. Il a quitté ses fonctions le 31  décembre 2021 pour des « raisons personnelles ». Arrivé à la tête de la banque centrale allemande en pleine crise de l’euro et de la dette grecque, Jens Weidmann était fermement opposé à une politique monétaire expansionniste. Dans sa lettre de départ, il a invoqué la nécessité de ne pas perdre de vue les risques d’inflation potentiels. Avec le départ de J. Weidmann, les chrétiens-démocrates perdent, après A.  Merkel et Wolfgang Schäuble, ancien ministre des Finances et président du Bundestag, la troisième personnalité qui a dominé la vie politique en Allemagne.

Désormais, le Chancelier est SPD, Bärbel Bas, qui a remplacé Wolfgang Schäuble au perchoir l’est aussi. J. Weidmann a été remplacé par Joachim Nagel.

Le 20 décembre 2021, deux mois après l’annonce du départ de J. Weidmann, Olaf Scholz et Christian Lindner, son ministre des Finances, ont choisi l’économiste Joachim Nagel pour lui succéder à ce poste. La satisfaction au sein de la BuBa a été grande à l’annonce de sa nomination, car il connaît très bien la structure, ayant travaillé pendant 17  ans au sein de la banque centrale. Il a même fait partie du directoire de 2010 à 2016. Avant sa nomination à la Bundesbank, J.  Nagel a travaillé pour la Banque des règlements internationaux (BRI) à Bâle. Ce qui a parlé en faveur de J. Nagel est qu’il connaît déjà la plupart des décideurs et qu’il dispose

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d’un excellent réseau aussi bien à la Bundesbank qu’à la BCE. De plus, il connaît bien la politique monétaire. Il a même entre- temps passé quelque temps à l’étranger pour affiner son profil. Il est toutefois une période de sa carrière qui aurait pu lui être fatale : quand il a quitté la Bundesbank en 2016 après avoir perdu la course pour le poste de suppléant, il a rejoint la KfW (Kreditanstalt für Wiederaufbau), la banque publique de développement allemande, où il fut président du conseil de surveillance de KfW Ipex-Bank. À l’époque, la banque a prêté plus de 100  millions d’euros à Wirecard, qui ont presque tous été perdus dans le scandale dont Wirecard fut l’acteur principal. Mais J.  Nagel n’a jamais été impliqué dans cette affaire.

C’est l’inflation qui sera l’un des sujets les plus urgents pour le nouveau patron.

Elle a atteint plus de 5 %, soit le niveau le plus élevé depuis la réunification au début des années 1990. Pour juguler ce danger, J. Nagel devra également se concerter avec les autres membres du conseil de la BCE.

Son prédécesseur, J. Weidmann, a toujours laissé entendre qu’il était assez seul au sein de l’instance européenne dans la mesure où il y défendait une politique monétaire plutôt restrictive. En prenant congé, il a encore insisté sur le fait que la politique monétaire ne devait « pas s’en tenir trop longtemps à son cours actuellement très expansif ».

Il est probable que J.  Nagel suive la politique plutôt restrictive de son prédé- cesseur. Un indice à cet égard se trouve dans une interview d’il y a quelques années où il déplorait le QE (quantitative easing) :

«  Il existe un risque que la consolidation budgétaire requise dans certains pays de la zone euro soit mise en veilleuse  », ce qui, selon lui, «  pourrait augmenter la pression politique sur le conseil de la BCE pour reporter une hausse des taux d’intérêt qui est nécessaire du point de vue de la politique monétaire ». Si le rôle de J. Nagel est essentiel pour l’économie allemande, il aura probablement moins d’influence au sein de la BCE. C’est Isabel Schnabel, membre du directoire de la BCE, qui sera la voix allemande au niveau européen. Son

nom a été cité à plusieurs reprises pour prendre la succession de J.  Weidmann, d’autant plus qu’à Berlin, on aurait souhaité voir une femme prendre la direction de la Buba, mais la nomination d’Isabel Schnabel aurait conduit à la perte d’un membre allemand au directoire de la BCE, ce que le nouveau gouvernement souhaitait éviter.

Connu comme étant un excellent communi- cateur, J. Nagel est considéré par beaucoup comme favori pour succéder à Christine Lagarde le moment venu.

Le niveau de l’inflation inquiète les Allemands

Au mois de décembre dernier, l’inflation en Allemagne a atteint 5,3  % sur un an, d’après les indications de Destatis, l’Institut de statistique allemand. Sur l’ensemble de l’année 2021, l’inflation a été de 3,1 %, un niveau inconnu depuis près de trente ans.

L’indicateur a gagné 0,1 point par rapport à novembre, après sept mois de hausse ininterrompue. Il continue à être tiré par les prix de l’énergie qui ont augmenté de 18,3  %. L’Allemagne est en effet particu- lièrement dépendante du gaz importé de Russie. Afin de parvenir plus rapidement à une décision permettant l’autorisation de Nordstream 2, le Kremlin est soupçonné, au moyen de Gazprom, de freiner les livraisons de gaz à travers l’autre gazoduc, Yamal, ce qui a pour conséquence de tirer les prix vers le haut.

Mais cette situation n’est pas propre à l’Allemagne. Depuis plusieurs mois, partout en Europe, les prix du gaz et de l’électricité flambent, suite à une hausse considérable de la demande. Les prix des biens ont, eux aussi, beaucoup grimpé, de 7,8 %, d’après Destatis. Cette hausse est due aux pénuries de matières premières et de composants qui touchent de nombreuses chaînes d’approvi- sionnement que la pandémie a désorganisé depuis des mois. Elle est aussi provoquée par un autre facteur relatif au taux de TVA : du 1er juillet au 31 décembre 2020, l’Allemagne a réduit ses taux de TVA pour relancer la consommation des ménages qui avait fléchi suite à l’impact de la pandémie.

Outre-Rhin, le taux normal est de 19 %, et le

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taux réduit, de 7 %. Pendant les six mois en question, ces taux ont été abaissés respec- tivement à 16 % et à 5 %. Cette réduction a pu avoir un réel impact sur la consom- mation, notamment pour les achats d’une certaine importance. Cette mesure n’ayant pas été reconduite, l’impact du renchéris- sement a été très perceptible en 2021 dans le porte-monnaie des consommateurs, qui sont très sensibles à l’inflation. La stabilité de la monnaie est une valeur à laquelle les Allemands sont très attachés. Le nouveau patron de la Bundesbank, entré en fonction le 1er janvier 2022, aura pour une de ses premières missions celle de rassurer le pays.

Les prévisions actuelles sont de nature à aider J. Nagel dans cette tâche. La plupart des observateurs estiment que l’inflation a atteint un pic en Allemagne et dans la zone euro en décembre  2021. Toutefois, il est probable que les consommateurs devront encore attendre pour bénéficier de l’aug- mentation de leur pouvoir d’achat. Non seulement le prix élevé du pétrole, mais aussi et surtout les augmentations considé- rables des prix du gaz et de l’électricité au début de l’année  2022 donneront aux consommateurs allemands le sentiment que tout est devenu très cher. Avec des taux d’inflation de 3 à 4  % attendus en Allemagne au premier semestre 2022, cette impression d’un renchérissement généralisé est probablement justifiée. Le gouvernement actuel est conscient de cet appauvrissement relatif. L’objectif du gouvernement Scholz de relever le SMIC à 12 € l’heure ouvrée en témoigne.

En décembre dernier, la Banque centrale européenne a sensiblement relevé ses prévi- sions d’inflation pour cette année à 3,2 % pour la zone euro, mais elle considère que cette montée est passagère. Elle reste sur des prévisions d’inflation à moyen terme inférieures à 2  %. Les chiffres publiés par l’Allemagne au mois de janvier, qui, à l’instar des taux d’inflation des autres pays de la zone euro, étaient supérieurs aux attentes du marché, devraient conduire à des demandes, notamment de la part de l’Allemagne, pour que la BCE mette fin plus rapidement que prévu à son programme

d’achat d’actifs. Toutefois, la BCE n’est pas connue pour ses réactions rapides. Il est plutôt improbable qu’I. Schnabel puisse avoir un impact à ce niveau.

Brèves

Bientôt le chant du Muezzin à Cologne ? À Cologne, ville dont 10 % des habitants sont de confession musulmane, la Maire sans étiquette, Henriette Reker, a décidé d’autoriser la quinzaine de mosquées que compte la cité rhénane à procéder tous les vendredis entre midi et quinze heures à l’appel du muezzin à la prière. Elle a estimé que les deux religions du Livre s’équi- valaient et qu’il convenait de s’engager dans la voie de la liberté confessionnelle protégée par la Constitution. Si le débat sur les questions identitaires est nettement moins vif en Allemagne qu’en France, les Allemands se déclarent néanmoins majori- tairement (à 61 %) hostiles à cette mesure.

C’est peut-être pour cette raison que les responsables musulmans de Cologne ne sont pas pressés de fixer une date pour la mise en pratique de cette mesure, car il s’agit, selon eux de l’appel à la prière des fidèles, et non pas d’une mesure destinée à antagoniser la population chrétienne de la ville.

FlixBus à la conquête de l’Amérique

Au mois d’octobre 2021, le groupe américain Greyhound, spécialiste de la traversée de l’Amérique en bus, a été vendu au groupe allemand FlixMobility.

Greyhound, célèbre compagnie créée en 1914, a connu de nombreux avatars ces derniers temps, deux faillites, en  1991 et  2001, reprise par un groupe canadien d’abord, puis par une société britannique qui, toutes deux, jettent l’éponge après peu de temps. Il est vrai que la concur- rence des compagnies low cost, deux fois moins chères et dix fois plus rapides a été mortelle. La société allemande, déjà très bien établie en Europe, a réussi là où les autres ont échoué, car son modèle écono- mique y est très différent, peu gourmand en capital, les bus étant possédés par

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les opérateurs locaux, FlixMobility ne fournissant que la marque, la logistique et les clients. Mais cette fois-ci, la société acquiert près de 1  300  bus, 2  400  desti- nations et 16  millions de clients, espérant être seule sur le marché. Le tour de table pour financer cette opération, 650 millions de dollars en juin 2021, quatre fois le prix de Greyhound, a vu l’arrivée d’investisseurs américains, tels que Blackrock qui, manifes- tement, croient en les chances de l’entre- preneur allemand.

Bonne santé du marché de l’emploi

Contrairement aux attentes, le marché du travail a connu une évolution positive en 2021, d’après les indications fournies par le directeur de la Bundesanstalt für Arbeit (BA, Agence fédérale pour l’emploi). Le nombre de demandeurs d’emploi s’est réduit de 82 000 par rapport à 2020, en dépit des problèmes d’approvisionnement induits par la pandémie. Selon la BA, l’Alle- magne comptait en 2021 2,613  millions de chômeurs en moyenne, soit 5,7  % des actifs (0,2 point de moins qu’en 2020). De son côté, Hubertus Heil, ministre social-dé- mocrate du Travail et des Affaires sociales reconduit dans ses fonctions (exercées depuis 2018), a mis en avant deux évolu- tions positives observées en 2021  : le nombre record d’emplois pleinement soumis aux charges sociales (34,37  millions en octobre  2021) et le niveau de chômage

des jeunes, qui est au plus bas depuis la Réunification, en 1990.

Des remous dans l’industrie automobile allemande

Les salariés au siège allemand d’Opel à Rüsselsheim ont eu chaud. La maison fondée en 1862 par Adam Opel ne sera pas démantelée comme le souhaitait Stellantis. Le géant franco-italien auquel Opel est rattaché souhaitait procéder à une réorganisation profonde pour créer des synergies entre les différentes compo- santes de ce groupe gigantesque. L’idée était de sortir les usines allemandes d’Opel pour les rattacher directement à une unité de fabrication basée à Amsterdam, pour que les usines puissent produire tous les modèles du groupe afin de s’adapter plus vite à la demande. Mais les syndicats ont vu le danger qui se cache derrière cette rationalisation, à savoir celui de sortir les usines allemandes du système de cogestion qui leur donne un droit de regard sur la gestion, notamment sur l’emploi dans les sites. Ils ont obtenu gain de cause, Stellantis renonce à cette réorganisation. Toutefois, le danger n’est pas écarté, car l’industrie automobile allemande est confrontée à la transition considérable du thermique vers l’électrique – et la construction d’une voiture électrique demande beaucoup moins de main-d’œuvre : 10 heures chez Tesla, trois fois plus chez VW…

brigitte.lestrade@free.fr

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