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j o u r n a l h o m e p a g e :w w w . e m - c o n s u l t e . c o m / p r o d u i t / E N C E P
THÉRAPEUTIQUE
Traitement du trouble bipolaire en phase maniaque : synthèse critique des
recommandations internationales
Treatment of manic phases of bipolar disorder:
Critical synthesis of international guidelines
P.A. Geoffroy
a,b,c,g,∗, F. Bellivier
a,b,c,g, C. Henry
d,e,f,gaInserm,UMR-S1144,VariaPsy,équipe1,Paris,France
bPôleneurosciences,AP—HP,groupehospitalierSaint-Louis-Lariboisière-FernandWidal,Paris,France
cUniversitéParis-7Paris-Diderot,UFRdemédecine,Paris,France
dUniversitéParis-Est,UFRdemédecine,Créteil,France
ePôledepsychiatrie,hôpitalH.Mondor-A.Chenevier,AP—HP,94000Créteil,France
fInserm,U955,psychiatriegénétique,94000Créteil,France
gFondationFondaMental,94000Créteil,France
Rec¸ule28novembre2011;acceptéle18octobre2013 DisponiblesurInternetle7f´evrier2014
MOTSCLÉS Troublebipolaire; Recommandations; Traitement; Thymorégulateur; Manie;
Épisodemaniaque
Résumé Letroublebipolaireestunemaladierécurrentesévèrereconnueparl’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme la septième cause de handicap par année de vie parmi toutes lesmaladies dansla populationdes 15à 44ans. Le handicap majeurconféré par cette pathologie est lié au très haut niveau de rechute, à l’impact fonctionnel des comorbidités associées et des troubles cognitifs entre les épisodes. L’utilisation systéma- tique par les cliniciens d’algorithmes décisionnels issus des recommandations améliore la prise encharge globale des patients bipolaires, en comparaison àune modalité de traite- ment habituel. Bien qu’elles n’embrassent pas l’ensemble des situations rencontrées avec les patients, cette approche systématique contribue au développement d’une médecine personnalisée, indispensable dans cette pathologie. Notre revue synthétise les recomman- dations internationaleslesplus récentesdansla priseencharge desphases maniaques.De manièreconsensuelle,lesrecommandationsproposentenpremièreintentionl’utilisationdes stabilisateursde l’humeur traditionnels (lithium ouvalproate) etdes antipsychotiquesaty- piques (APA — olanzapine, rispéridone, aripiprazole et quétiapine), ainsi que l’arrêt des antidépresseurs. Les recommandations sont divergentes concernant l’utilisationdes combi- naisons thérapeutiques proposées soit en traitement de première intention pour les cas
∗Auteurcorrespondant.Servicedepsychiatrieadulte,hôpitalFernand-Widal,200,rueduFaubourg-Saint-Denis,75475Pariscedex10, France.
Adressee-mail:pierre.a.geoffroy@gmail.com(P.A.Geoffroy).
0013-7006/$—seefrontmatter©L’Encéphale,Paris,2013.
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2013.10.007
sévères,soitensecondeintention.Letraitementdesétatsmixtesestaussipeuconsensuel et quelquesrecommandationsproposentlevalproate, lacarbamazépine etcertainsAPA en premièreintention,endéconseillantl’utilisationdulithium.Enfin,laduréedutraitementdes phasesmaniaquesestnonconsensuelle.
©L’Encéphale,Paris,2013.
KEYWORDS Bipolardisorder;
Guidelines;
Treatment;
Moodstabilizer;
Mania;
Manicepisode
Summary
Introduction.—Bipolardisorder(BD)istheseventhleadingcauseofdisabilityperyearoflife amongalldiseasesinthepopulationaged15to44.Itisagroupofheterogeneousdiseases,with frequentcomorbidpsychiatricorsomaticdisorders,variabletreatmentresponseandfrequent residualsymptomsbetweenepisodes.Themajorimpairmentassociatedwiththisdisorderis relatedtothehighrelapseandrecurrencerates,thefunctionalimpactofcomorbiditiesand cognitiveimpairment betweenepisodes. Theprognosisofthedisease relies ontheefficacy ofrelapseandrecurrencepreventioninterventions.Giventheheterogeneityofthedisorder, relapseandrecurrencepreventionneedstodevelopapersonalizedcareplanfromthestartof theacutephase.Insuchacomplexsituation,guideline-drivenalgorithmsofdecisionareknown to improve overallcare ofpatients with bipolar disorder, compared tostandardtreatment decisions.Althoughguidelinesdonotaccountforallthesituationsencounteredwithpatients, thissystematicapproachcontributestothedevelopmentofpersonalizedmedicine.
Methods.—Wepresentacriticalreviewofrecentinternationalrecommendationsforthemana- gementofmanicphases.Wesummarizetreatmentoptionsthatreachconsensus(monotherapy andcombinationtherapy)andcommentonoptionsthatdifferacrossguidelines.
Results.—Thesynthesis ofrecent internationalguidelines shows a consensus for theinitial treatmentformanicphases.Foracuteandlong-termmanagement,theanti-manicdrugspro- posedaretraditionalmoodstabilizers(lithiumorvalproate)andatypicalantipsychotics(APA— olanzapine,risperidone,aripiprazoleandquetiapine).Allguidelinesindicatestoppingantide- pressantdrugsduringmanicphases.Internationalguidelinesalsopresentwithsomedifferences.
First,asmonotherapyisoftennonsufficientinclinicalpractice,combinationtherapywitha traditional moodstabilizerandanAPAaredisputedeitherinfirstline treatmentforsevere casesorinsecondline.Second,mixedepisodestreatmentisnotconsensualeitherandsome guidelines propose infirst line valproate,carbamazepine andsome APA, and advicenot to uselithium.Ontheotherhand,someguidelinesdonotproposespecifictreatmentformixed episodesandgroupthemwithmanicepisodesmanagement.Durationoftreatmentisunclear.
Conclusion.—Guidelines utilization has shown that the systemic use by clinicians of deci- sionalgorithmsincomparisonto‘‘treatmentasusual’’modalityimprovestheoverallcareof patientswithBD.Futuredatafromcohortsofpatientsseemnecessarytocomplementtheexis- tingdatafromclinicaltrials.Thesecohortstudieswillhelptotakeintoaccountthedifferent individualprofilesofBDandthusmayhelptoproposeamorepersonalizedmedicine.
©L’Encéphale,Paris,2013.
Introduction
Letroublebipolaire(TB)estunemaladierécurrentesévère reconnue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme la septième cause de handicap par année de vie parmitouteslesmaladiesdanslapopulationdes15à44ans [1].On observeunetrèsgrandehétérogénéitédelamala- die, avec de fréquentes comorbidités psychiatriques ou somatiques,deréponse auxtraitementsoudesymptômes résiduelsentrelesépisodes[2].Lehandicapmajeurconféré parcettepathologieestliéautrèshautniveauderechute, à l’impact fonctionnel des comorbidités associées et des troubles cognitifs entre les épisodes. Le pronostic de la pathologieest donclié àl’efficacité desmesures prophy- lactiques et à laprise encompte de cette hétérogénéité pourladéfinitiond’unprogrammedesoinspersonnalisésqui doitêtreélaborédèslaphaseaiguë[3].Lesrecommanda- tionsthérapeutiquesactuellesproposentl’instaurationd’un traitementthymorégulateur(oustabilisateursdel’humeur) dèslepremierépisodemaniaquecar90%évoluentversun
TB[4].LesindicationsdesthymorégulateursdansleTBsont issuesdesrecommandationsprofessionnelles,ouguidelines, quisontdespropositionsdepriseenchargethérapeutiques développéesàpartird’uneévaluationméthodiquedelalit- térature scientifique internationale conjuguée à des avis d’experts. Elles permettent d’orienter les cliniciens dans leurchoixthérapeutiqueenfacilitant l’accèsauxdonnées de la littérature scientifique et en les synthétisant selon unemédecinedite«baséesurlespreuves».Cependant,ces recommandationsnesuiventpastouteslamêmeméthodo- logieetmêmesicertainspointssontconsensuels,d’autres lesontmoinsetnefacilitentpasleurcompréhensionetleur applicabilitéclinique.
Ainsi, notre revue se propose de synthétiser les prin- cipalesrecommandations internationaleslesplusrécentes dans la prise en charge des phases maniaques. Ceci est d’autant plus pertinent qu’il n’existe pas à ce jour de recommandations franc¸aises suivant ces méthodes. Nous présenterons en premier lieu les options thérapeutiques (monothérapieetbithérapie)faisantconsensus,puisseront
discutés les points de divergence pour enfin réaliser un résumécritique.
Méthodes
Cette synthèse s’appuierasur les recommandationsinter- nationales de la version collaborative récemment mise à jour du réseau canadien (CANMAT, Canadian Network for MoodandAnxiety)etdelasociétéinternationaldestroubles bipolaires(ISBD,InternationalSocietyforBipolarDisorders) publiéeen2009[5],decellesdelafédérationmondialedes sociétés de psychiatrie biologique (WFSBP, World Federa- tionofSocietiesofBiologicalPsychiatry2009[6]),decelles del’association britanniquedepsychopharmacologie(BAP, British Association for Psychopharmacology [7] de 2009), desrecommandationstrèspragmatiquesdelaNationalIns- titute for Health and Clinical Excellence (NICE) de 2006 [4],etenfin des recommandationsaustraliennes [8]. Cer- taines recommandations plus anciennesseront citées afin decomprendreleschangementssurvenusaucoursdesder- nièresannées[9—12].
EnFrance,seulesdesrecommandationsprofessionnelles fondéessurlespratiquesbaséessurl’expérienced’unpanel d’experts,sontdisponibles.Cetteméthodologieestcomplé- mentairedes recommandationsfondéessurlespreuveset apportentdesindicationspourdessituationscliniquespour lesquelleslesdonnéesd’étudescontrôléesrandomiséessont rares[13].
Parailleurs,soulignonsqu’ilexisteunedifférencethéo- rique des notions de rechute (ou relapse en anglais) et récidive (ou recurrenceen anglais) renvoyant respective- ment à un traitement d’entretien (instauré pour éviter une rechute ou résurgence des symptômes d’un épisode thymique non terminé) et à un traitement préventif des récidives(traitementà distance del’épisode thymique et instaurépouréviterunnouvelépisode).Danslaplupartdes recommandations thérapeutiques, cette distinction n’est pas effectuée et apparaît en l’état actuel de la science purement théorique avec en pratique un recouvrement importantdesdeuxnotions[14].Aussi,nousn’avonspuet nefaisonspasladistinctiondecesdeuxnotionsdanscette revuedelittérature.
Nous avons ainsi effectué une synthèse critique des recommandations internationales pour y dégager des consensusetd’en discuterles divergences afin d’aider le praticiendansseschoixthérapeutiques.Cettesynthèsese centrerasurlesmolécules disponiblesen Franceetayant rec¸u une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans l’indicationdutraitementdestroublesbipolaires(HAS)[15].
Indicationsdesthymorégulateursdansles phasesmaniaques
La prescription d’un thymorégulateur dans le TB doit s’accompagner d’une information sur les traitements et d’une prise encharge centréesur des conseils d’hygiène devieetdesmesurespsycho-éducatives[4].L’information relative aux effets secondaires et aux mesures de sur- veillanceestégalementprimordiale.Cesmesuresréduisent le risque élevé de rupture de traitement et renforce
l’alliance thérapeutiqueen faveurd’une meilleure obser- vance.
Optionsthérapeutiquesconsensuelles
Traitementenphaseaiguë
De manière consensuelle, toutes les recommandations s’accordentpourinterrompreuntraitementantidépresseur en première intention. Il est également recommandé d’associer à la prescription d’un thymorégulateur de mesurestellesquel’évictiondesstimulantsenvironnemen- taux,lapréconisationd’activitéscalmesetlaritualisation duquotidienavecpeud’activités[4].
Ilexisteunrelatifconsensuspourpréconiserunemono- thérapieenpremièreintention[4—8].Cesrecommandations proposentlesmêmes molécules enpremièrelignedans la prise en charge d’un épisode maniaque [4—8]: le lithium (Li), l’acide valproïque (VPA)et les antipsychotiques aty- piques(APAouantipsychotiquesditsdesecondegénération)
— olanzapine, rispéridone, aripiprazole et quétiapine. Le Tableau 1résumelesrecommandationsissuesduCANMAT- ISBD pourles molécules commercialiséesenFranceouen coursdedemanded’AMM.
Efficacitéetprofildetolérance:deuxingrédientsdela réussitethérapeutique
Nousavonsvuquelefacteurprincipalderechuteetd’échec thérapeutiqueétaitl’inobservanceetl’arrêtprématurédes thymorégulateurs[16].Audelàdesfacteursdirectementliés au patient, il ya ceux imputables aux effets secondaires des traitements dont il conviendra d’informer le patient.
Finalement,c’estl’efficacité etle profildetolérance qui permettrontdeguiderlesprescriptions.Lesrecommanda- tions dela WFSBPproposent une synthèsetenant compte decesdeuxaspectspourchaquemolécule.Nousrapportons dansleTableau2unrésuméutilepourlapratiqueclinique quitientcomptedesposologiesrecommandées[6].
Recommandationsinternationales:pointsde divergencesetsynthèsecritique
Duréedutraitement
Si la durée du traitement est une question fréquemment posée par les patients, l’absence de niveau de preuve fait qu’iln’y a que detrès rares recommandations sur le sujet.
LeNICErecommandede poursuivreuntraitement pro- phylactique au moins 2ans après un premier épisode thymiqueouaumoins5anssilepatientprésentedesrisques de récidive importants tels que: un épisode psychotique sévère,unecomorbiditéaddictive,unisolementsocial,une situationdeprécarité[4].LaWFSBPrecommandentlapour- suiteaussilongtempsquepossibledèslorsquelediagnostic detroublebipolaireestposé[6].
L’objectifdutraitementau longcoursest d’acheverla guérisonde l’épisodethymique (enévitant larechute) et d’enprévenirlarécidive[9].Leproblèmemajeurdutraite- mentaulongcoursestl’adhésiondupatientautraitement.
Eneffet, laplupart des patientsrechutent à caused’une absence totale oupartielle d’observance à ce traitement [16].Parmilesfacteursfavorisantl’observance,ilexistedes facteursdirectementliésaupatienttelquelefaitd’avoirun
Tableau 1 Recommandations pourle traitement des épisodesmaniaques (CANMATet ISBD, 2009[5]). Adaptées pourles moléculescommercialiséesenFranceouencoursdedemanded’AMM.
Option1 Lithium
Valproate
Antipsychotiqueatypique(olanzapine,rispéridone,quétiapine,aripiprazole) Lithiumouvalproate+olanzapine/rispéridone/quétiapine/aripiprazole
Option2 Carbamazépine
Lithium+valproate Asénapine
Asénapine+lithiumouvalproate Électro-convulsivo-thérapie(ECT)
Option3 Halopéridol,chlorpromazine,
Lithiumouvalproate+halopéridol Lithium+carbamazépine
Clozapine
Nonrecommandé Monothérapieavecgabapentine,topiramare,lamotrigine Rispéridone+carbamazépine
Olanzapine+carbamazépine
Tableau2 Niveaudepreuveetrecommandationstenantcompteduprofildetolérancepourlestraitementspharmacologiques etnonpharmacologiquesdanslesmaniesetposologiesrecommandées.
Traitement Niveaudecertitude Niveauderecommandation Posologierecommandée(mg)
Aripiprazole A 1 15—30
Azénapine A 2 10—20
Carbamazépine A 2 600—1200
Halopéridol A 2 5—20
Lithium A 2 600—1200
Olanzapine A 2 10—20
Quétiapine A 2 400—800
Rispéridone A 1 2—6
Valproate A 1 1200—3000
Chlorpromazine B 3 300—1000
Amisulpride C1 4 400—800
Clonazépam C1 4 2—8
Clozapine C1 4 100—300
Lorazépam C1 4 4—8
Oxcarbazépine C1 4 900—1800
Lamotrigine E — 50—200
ECT C1 4
rTMS E —
AdaptédelaWFSBP,2009[6].
ECT:électro-convulsivo-thérapie;rTMS:stimulationmagnétiquetranscraniennerépétée.
bonniveaud’éducationetdesfacteursliésauxtraitements quiserontd’autantmieuxsuivislorsqu’ilsréduisentlasévé- ritédesépisodesdépressifs,qu’ilsn’entraînentpasdeprise depoidsnidetroublescognitifs[16].
Au delà de la mauvaise observance, il existe égale- ment d’autres facteurs prédictifs de rechutes. Les plus importants sont les symptômes résiduels tant dépressifs que maniaques [17]. Ainsi, il est nécessaire de réduire au maximum les symptômes résiduels ce qui constituera parla suite un élémentessentiel du pronosticdu patient traité.Parailleurs,desantécédentsdecyclesrapidesconsti- tuent également un risque plus important de rechutes [18].
Lesprincipauxeffetssecondaires àcoursetlongterme desdifférentesmoléculesparticiperontauchoixdutraite- ment.Lelithiumestassociéàunrisqueaccrudedéfautde filtrationrénale, d’hypothyroïdie, d’hyperparathyroïdieet deprisedepoids.Ilexistecependantpeudepreuvespour sonimputabilitédanslasurvenued’insuffisancerénale.Le risquedemalformationscongénitalesestégalementrevuà labaisseetlerisquebénéfice/risquedoitêtreévaluéavec attentionavantdeprendreladécisionderetirerlelithium aucoursdelagrossesse[19].
À l’inverse,l’acide valproïque resteen principe àévi- terchezlesfemmesenâgedeprocréeràcausedesonfort potentieltératogène dosedépendant [20]etdurisquede
Tableau3 Résumédesétudesissuesdelalittératureinternationaletestantlescombinaisonsthérapeutiquesdanslesépisodes maniaques.
Études Combinaisontraitement
(Nombredesujets)
Résultats
Garfinkeletal.,1980[29] Li+PBO(7) HAL+PBO(7) Li+HAL(7)
HAL+PBO=HAL+Li HAL+PBO>PBO+Li HAL+Li>PBO+Li Kleinetal.,1984[30] CBZ+HAL(14)
PBO+HAL(13)
CBZ+HAL>PBO+HAL Müller&Stoll,1984[31] CBZ+HAL(6)
PBO+HAL
CBZ+HAL>PBO+HAL Desaietal.,1987[32] CBZ+Li(5)
PBO+Li
CBZ+Li>PBO+Li Mölleretal.,1989[33] CBZ+HAL(11)
PBO+HAL(9)
CBZ+HAL=PBO+HAL
(CBZ+HALamoinsconsomméLEV=preuve indirectecombinaison>monothérapie) Anandetal.,1999[34] LAM+Li(8)
PBO+Li(8)
LAM+Li=PBO+Li Müller-Oerlinghausenetal.,
2000[35]
VPA+APT(69) PBO+APT(67)
VPA+APT>PBO+APT
VPA+SNDpermirentmoinsdeprescriptiondeBZD et/ouAPT
Pandeetal.,2000[36] GBP+SH(54) PBO+SH(59)
GBP+SH<PBO+SH Sachsetal.,2002[37] RSP+SH(52)
HAL+SH(53) PBO+SH(51)
RSP+SH>PBO+SH HAL+SH>PBO+SH RSP+SH=HAL+SH Tohenetal.,2002[38] OLZ+SH(220)
PBO+SH(114)
OLZ+SH>PBO+SH Delbelloetal.,2002[39] QTP+VPA(15)
PBO+VPA(15)
QTP+VPA>PBO+VPA Yathametal.,2003[40] RSP+SH(75)
PBO+SH(75)
RSP+SH>PBO+SH Sachsetal.,2004[41] QTP+SH(91)
PBO+SH(100)
QTP+SH>PBO+SH Akhondzadehetal.,2006[47] ALP+HAL+Li(38)
PBO+HAL+Li(37)
ALP+HAL+Li>PBO+HAL+Li McIntyreetal.,2007[42] QTP+SH(197)
PBO+SH(205)
QTP+SH>PBO+SH Yathametal.,2007[43] QTP+SH(104)
PBO+SH(96)
QTP+SH>PBO+SH Sussmametal.,2007[48] QTP+SH(197)
PBO+SH(205)
QTP+SH>PBO+SH Vietaetal.,2008[44] ARI+SH(253)
PBO+SH(131)
ARI+SH>PBO+SH Tohenetal.,2008[49] OLZ+CBZ(58)
PBO+CBZ(60)
OLZ+CBZ=PBO+CBZ Juruenaetal.,2009[45] OXC+Li(26)
CBZ+Li(26)
OXC+Li>CBZ+Li Amrollahietal.,2011[50] TXF+Li(20)
PBO+Li(20)
TXF+Li>PBO+Li Berwaertsetal.,2011[51] PER+SH(197)
PBO+SH(205)
PER+SH=PBO+SH Szegedietal.,2012[46] ASE+SH(158)
PBO+SH(166)
ASE+SH>PBO+SH
Tableau3(Suite)
Études Combinaisontraitement
(Nombredesujets)
Résultats
Ouyangetal.,2012[52] RSP+VPA(22) HAL+VPA(19)
RSP+VPA>HAL+VPA
AdaptédeGeoffroyetal.,2012[22].
>:combinaisonplusefficacequelamonothérapie;ALP:allopurinol;APT:antipsychotiquetypique;ARI:aripiprazole;ASE:asénapine; BZD:benzodiazépines;CBZ:carbamazépine;GBP:gabapentine;HAL:halopéridol;LAM:lamotrigine;LEV:lévomépromazine;Li: lithium;NS:nonspécifié;OLZ:olanzapine;PBO:placebo;PER:palipéridone;QTP:quétiapine;RSP:rispéridone;SH:stabilisateur del’humeur(lithiumorvalproate);TXF:tamoxiphène;VPA:valproate.
survenued’ovairespolykystiques [4]. D’autrepart, lacar- bamazépinen’estplusuntraitementdepremièreintention àcausedeseseffetssecondaires.
L’utilisationdesantipsychotiquesaulongcoursestàéva- luerenfonctiondurisquedesurvenued’effetssecondaires telsquel’apparitiond’undiabète,d’unsyndromemétabo- liqueoulerisqueplus élevéqu’aveclesautresmolécules d’évolutionversunépisodedépressifetceparticulièrement chez le sujet âgé. L’utilisation d’un antipsychotique peut égalementaulongcoursêtrepourvoyeurdesymptomatolo- gienégativesecondaireavecnotammentuneabrasiondes affectsetentraînernotammentunemauvaiserécupération fonctionnelle,maisceciestplusmarquéaveclesneurolep- tiquesclassiques[21].
Lesassociationsthérapeutiques
Plusrécemment,desdonnéesontclairementétablilasupé- rioritédescombinaisonsdetraitementavecleLiouleVPA etun APA dans le traitement des phases maniaques [22].
À l’heure actuelle, ces associations sont réservées dans les recommandations internationales aux manies sévères (danslesrecommandationsduWorldFederationofSocieties of Biological Psychiatry[WFSBP] [6] et la British Associa- tionforPsychopharmacology[BAP][7])et,commeseconde optionthérapeutiquedanslesmanieslégèresàmodérées,y comprisdanslesrecommandationsdelaHauteAutoritéde santé[HAS] [15,23]. Cependant, le Canadian Network for MoodandAnxietyTreatmentsetl’InternationalSocietyfor BipolarDisorders(CANMATetISBD)préconisentlabithérapie LiouVPAetunAPAparmilesstratégiesdepremièreligne sansprécisercettenotiondesévéritédel’épisode[5].
Or, en pratique clinique les patients bénéficient en grande majorité de plusieurs agents anti-maniaques [22].
Ainsi, l’utilisation des associationsthérapeutiques dans le cadredes phasesmaniaques estune pratiquecouranteet largementprépondérantesur lamonothérapie.Deplus, il existe des discordances importantes entreles recomman- dations et les habitudes de prescription dans la maladie bipolaire puisque seulement un patient sur six est traité en fonction des recommandations [24]. En pratique, la monothérapien’estsouventpassuffisantepourobtenirune réductionrapide dessymptômes. Ainsi,moins de10%des patientsrec¸oiventunemonothérapiepourletraitementdes épisodesmaniaques[23]etWolsfsperger etal.rapportent unemoyennedeplusdetroispsychotropesprescritsaucours desétatsmaniaques[25].
Ce décalageentrelesrecommandationsinternationales etlapratiquecliniqueestprobablementdûàlacomplexité
et à la sévérité de cette maladie, à ses comorbidités, à l’inobservance thérapeutique etaux effets indésirables [26]. De plus, pour des raisons évidentes d’éthiques, les patientsinclusdanslesessaisthérapeutiquescontreplacebo nesontpastoujoursreprésentatifsdespatientshospitalisés dansnosservices.
Unerevuerécenteobservequedemanièregénéraleles antipsychotiquessonttrèslargementprescrits:72%à92% des situations d’épisode maniaque [27]. La méta-analyse de Smith et al., portant sur 3089sujets présentant un épisodemaniaque,montrequelescombinaisonsavechalo- péridol,olanzapine,rispéridone etquétiapine parrapport auxmonothérapies avecthymorégulateurs classiques sont significativementplus efficaces bien que moins bientolé- rées[28].Unerevuerécenteréaliséeparnotreéquipesur lescombinaisonsthérapeutiquesdanslesphasesmaniaques confirmeégalement,àlalecturedelalittératureinternatio- nale,uneefficacitésupérieuredescombinaisonsLiouVPA avecunAPA[22].
Ilfautsoulignerquemalgréunprofildetoléranceaccep- tabledesbithérapies,cesprofilssontvariablesenfonction desassociations (voirrevuedeGeoffroy etcollaborateurs [22] pour plus de détails). Néanmoins les combinaisons thérapeutiques sont généralement marquées par un taux d’effets secondaires et d’arrêts plus importants [22]. Le Tableau3résumelescombinaisonstestéesdanslalittéra- tureinternationale[29—52].
Ces études montrent également l’intérêt de ces asso- ciationssur du moyenterme (généralement de 1à 2ans) car elles augmentent le délai de récidive dépressive ou maniaque en comparaison avec un thymorégulateur en monothérapiemalgré des profils detolérance moins bons bienqu’acceptables[22].
Des questions se posent alors: doit-on poursuivre l’associationoufavoriserunemonothérapiecommetraite- mentprophylactique?Sic’estlecas,quelestletraitement àenleverenpremièreintention?
Lesrecommandationsfuturesdevrontyrépondreetpro- poser des algorithmes spécifiques pour ces combinaisons thérapeutiques. Dans l’attente, l’attitude thérapeutique sera à adapter au cas par cas, aux molécules utili- sées et au profil clinique de la pathologie dont par exemple le type de polarité prédominante du patient [22] ou l’âge de début de la maladie [53]. Soulignons qu’au décours d’un premier épisode, les connaissances actuelles nous invitent à privilégier la monothérapie du fait de la moins bonne tolérance des associa- tions.
Traitementdesétatsmixtes
Lapriseencharged’unétatmixteestmoinsconsensuelleet ilexisteglobalementdeuxtypesderecommandations.Les premièresquirecommandentl’utilisationpréférentiellede certainesmoléculesconsidéréescommeplusefficacesdans cetteindicationspécifique.AinsiellespréconisentleVPA, lacarbamazépineetcertainsAPAetconsidèrentlelithium commemoinsefficace[4,21,24].
Lessecondesdontlesrecommandationsprofessionnelles duNICEontunpositionnementdifférentennedifférenciant pasle traitementd’unemanieclassiquedeceluidel’état mixte[4].Ellesneproposentpasdechoixdemoléculesspé- cifiqueshormislefaitd’éviterl’emploid’unantidépresseur commeindiquédanslesautresrecommandations.
Des études complémentaires spécifiques de ces états mixtesetbienmenéessontnécessairesafindeproposerdes recommandationsavecunniveaudepreuveacceptable.
Conclusion
Les troubles bipolaires sont des troubles évoluant sur la vie entière et dont le devenir, au delà des récurrences thymiques,estconditionnéparlaprésencedesymptômes résiduels et de troubles comorbides tant psychiatriques quesomatiques.Lapriseenchargedevratenircomptede l’ensembledeces élémentsafindepromouvoirunebonne qualitédeviepourlepatient.Ainsi,letraitementdesépi- sodesaigusdevrarépondreauximpératifsd’efficacitétout entenantcompte delanécessité depoursuivrele traite- ment à titre prophylactique et donc aussi d’un profil de toléranceacceptableaulongcourspourlepatient.
L’utilisation des recommandations a démontré que l’utilisation systématique par les cliniciens d’algorithmes décisionnelsencomparaisonàunemodalité detraitement habituel(treatmentasusual) améliorela prise encharge globaledes patients bipolaires[54].Pourtant, ces recom- mandationsontleurspropreslimitesetellesnerépondent pasàtouteslesquestionsdescliniciensquisontconfrontésà desprésentationscliniquesetdesréponsesthérapeutiques trèshétérogènes.Ilconviendraitdecompléterlesdonnées issuesdesessaiscliniquespardesdonnéesissuesdecohortes pourallerversunemédecinepersonnaliséetenantcompte plus spécifiquementdes profils évolutifs de la maladie et descomorbidités.Bienévidemment,aucunerecommanda- tionnesauraitrépondreàlasingularitédechaquesituation cliniqueetnesauraitfaireoublierl’expériencecliniquedans laprisededécision.
Déclarationd’intérêts
Lesauteursdéclarentnepasavoirdeconflitsd’intérêtsen relationaveccetarticle.
Références
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