• Aucun résultat trouvé

Une Etude de la Mondialisation en Tant qu'outil du Néocolonialisme en Afrique: Le cas du Sénégal et du Cameroun

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Une Etude de la Mondialisation en Tant qu'outil du Néocolonialisme en Afrique: Le cas du Sénégal et du Cameroun"

Copied!
47
0
0

Texte intégral

(1)

Une Etude de la Mondialisation en Tant qu'outil du Néocolonialisme en Afrique:

Le cas du Sénégal et du Cameroun

Item Type text; Electronic Thesis Authors Allihien, Anault Jean Publisher The University of Arizona.

Rights Copyright © is held by the author. Digital access to this material is made possible by the University Libraries, University of Arizona.

Further transmission, reproduction, presentation (such as public display or performance) of protected items is prohibited except with permission of the author.

Download date 14/03/2021 02:57:58

Link to Item http://hdl.handle.net/10150/633089

(2)

1 UNE ÉTUDE DE LA MONDIALISATION EN TANT QU’OUTIL DU NÉOCOLONIALISME EN

AFRIQUE: LE CAS DU SÉNÉGAL ET DU CAMEROUN

by

Anault Jean Allihien

____________________________

Copyright © Anault Jean Allihien 2019

A Thesis Submitted to the Faculty of the

DEPARTMENT OF FRENCH & ITALIAN

In Partial Fulfillment of the Requirements

For the Degree of

MASTER OF ARTS FRENCH

In the Graduate College

THE UNIVERSITY OF ARIZONA

2019

(3)
(4)

3

Résumé 4

Introduction 5

Chapitre 1: De la mission civilisatrice à la mission d’exploitation 7

La colonisation comme fondation du marché néolibérale 7

Le système français de la colonisation : la domination directe 9

L’Assimilation française et ses effets actuels 10

Afrique Occidentale Française (A.O.F.) : un aperçu historique 11

Structure et fonctionnement de l’A.O.F 11

Afrique Equatoriale Française (A.E.F.) : un aperçu historique 12

Structure et fonctionnement de l’A.E.F. 13

Les indépendances et ses espoirs 13

Les problèmes de l’Afrique postcoloniale 16

Chapitre 2: Le Cameroun et la mondialisation 17

Le Cameroun de l'indépendance au temps présent 18

Les problèmes de la mondialisation au Cameroun 19

Le plan politique: la françafrique 19

Le plan économique 22

Le franc CFA: cordon ombilical 24

La mondialisation dans la culture 25

Chapitre 3: Le Sénégal et la mondialisation 27

Le Sénégal de l'indépendance à nos jours 28

Les problèmes de la mondialisation au Sénégal 30

Le plan politique - culture de soutien de la France pour les présidents sénégalais 30

Le plan économique 33

Le capitalisme néolibéral comme contexte pour la mondialisation 33

Le poisson: source de vie du Sénégal 34

Le plan socioculturel 37

La globalisation dans la vie quotidienne 37

conclusion 41

Bibliographie et sitographie 43

(5)

4 UNE ÉTUDE DE LA MONDIALISATION EN TANT QU’OUTIL DU NÉOCOLONIALISME EN

AFRIQUE: LE CAS DU SÉNÉGAL ET DU CAMEROUN Anault Jean Allihien

University of Arizona

Résumé

Cette étude examine la mondialisation en tant qu’outil de la ‘‘recolonisation’’ de l’Afrique. Les différents aspects de la mondialisation—le plan économique, le plan politique et le plan socioculturel—seront examinés par rapport à leurs rôles dans l’établissement du néo-colonialisme. Ce mot problématique qui est la mondialisation sera sujet d’examen. Nous allons traiter de ses origines, ses significations et des problèmes liés à ce concept dans ces contextes Francophones.

Abstract

This thesis examines globalization as a tool for the "recolonization" of Africa. The different aspects of globalization- economic, political, and socio-cultural - will be examined in relation to their roles in the establishment of neo-colonialism. This problematic word, which is globalization, will be subject to scrutiny. We will discuss its origins, its meanings and problems related to this concept in these Francophone settings.

(6)

5 Introduction

Les années 1960 ont marqué un nouveau chapitre pour le continent africain. C'était la période des indépendances pour ce continent qui avait subi des centaines d'années d’oppressions de toutes sortes.

Avec l'indépendance du Ghana en 1957, le rêve commun que partageaient ces pays a commencé à se matérialiser. Bien qu’elles soient maintenant indépendantes, le nouveau chapitre de ces nations n’a pas été sans difficultés. L’Afrique décolonisée, pendant la période qui suivait, a été ravagée par l’instabilité politique, la corruption, la pauvreté, parmi d’autres choses. Bref, de tout ce qui était en contradiction avec cette indépendance qui leur avait coûté très cher.

Les anciens colonisateurs sont-ils à la base des problèmes de l’Afrique postcoloniale? Avaient-ils vraiment ‘‘quitté’’ l’Afrique. Ceci dans l’espoir d’avoir la mainmise dans le continent africain en se cachant derrière la mondialisation. La mondialisation qui est un des thèmes principaux des Études Francophones, est un terme économique à la base. Selon le dictionnaire Larousse, la mondialisation désigne ‘‘l'élargissement du champ d'activité des agents économiques (entreprises, banques, Bourses) du cadre national à la dimension mondiale’’. Comme Frederick Cooper le dit dans Colonialism in Question, le concept de la mondialisation vient de l'idée d’ouverture des frontières pour favoriser les échanges.

Globalization talk takes its inspiration from the fall of the Berlin Wall, which offered the possibility or maybe the illusion that barriers to crossnational economic relations were falling. For friend and foe alike, the ideological framework of globalization is liberalism— arguments for free trade and free movement of capital. (Cooper 96)

Le mur de Berlin est considéré comme un objet anti-mondialisation, car il empêche le libre échange, même à l'intérieur de l’Allemagne. On parle ici de frontières physiques, mais il faudrait garder à l’esprit qu’il n’y a vraiment pas de limite à ce qui peut être échangé dans le cadre de la mondialisation.

L’œuvre centrale de mon mémoire serait de considérer la mondialisation en tant qu’outil de cette

‘‘recolonisation’’ de l’Afrique. Les différents aspects de la mondialisation—le plan économique, le plan

(7)

6 politique et le plan socioculturel—seront examinés par rapport à leurs rôles dans l’établissement du néo colonialisme. Cette notion problématique qui est la mondialisation sera interrogée. Nous allons traiter de ses origines, de ses significations et des problèmes liés à ce concept en contexte francophone. Dans ce même esprit, nous allons parler de la colonisation, qui est aussi l’un des thèmes principaux des Études francophones. Nous allons parler de son histoire dans le but de relever les similarités entre ces deux systèmes. Il s’agit ici des similitudes non seulement théoriques, mais aussi dans la pratique de ces deux systèmes et dans leurs fondements.

L'étude se focalisera sur l’Afrique de l’Ouest, en particulier sur le Sénégal et le Cameroun. Ce choix de pays en tant qu'objets d’étude a été motivé tout d’abord par le fait que ce travail se situe dans le domaine des Études Francophones, aussi était-il nécessaire de se focaliser sur des pays francophones. De plus, j’ai choisi le Sénégal parce que c’est un véritable exemple de l’assimilation et un pays qui a connu une paix et une stabilité relatives. Le Cameroun a par contre été victime d'instabilité pendant des années.

En outre, ces choix ont été motivés par le pays d’origine des auteurs de mon corpus. Felwine Sarr est sénégalais et Achille Mbembe est camerounais. Mon corpus critique se compose d‘Afrotopia de Felwine Sarr, d’Écrire l’Afrique-Monde de Felwine Sarr et d’Achille Mbembe, ainsi que d’Africa since 1940 et Colonialism in Question de Frederick Cooper. Le but de mon mémoire sera d’examiner la mondialisation et ses lacunes qui font d’elle un système qui vise à reléguer l’Afrique francophone au dernier plan, et devient par conséquent un outil du néocolonialisme.

(8)

7 Chapitre 1: De la mission civilisatrice à la mission d’exploitation

La colonisation comme fondation du marché néolibérale

Selon Frederick Cooper, dans Colonialism in Question, il y a deux théories de la mondialisation sur lesquelles les spécialistes ne s’accordent pas. La première est celle qui traite la mondialisation

d’aujourd’hui comme le résultat le plus raffiné et le plus inclusif d’une série de mondialisations qui prend ses racines dans la période qui précède les frontières imposées en Afrique par les Européens. Il s’agit ici des réseaux de commerce et d'échanges qui existaient à l'intérieur du continent africain. Alors, selon cette théorie, la mondialisation dont on parle aujourd’hui est plus inclusive dans la mesure où elle a créé non seulement l’ouverture de l’Afrique sur l’Afrique elle-même, mais aussi sur l’Europe et les Amériques à travers l’esclavage et la colonisation, et ensuite sur le reste du monde. De l’autre côté, il y a la théorie selon laquelle l'époque dans laquelle on vit aujourd’hui est une époque globale complètement différente du passé où les échanges économiques et sociaux se faisaient uniquement dans le cadre des États-nations ou des empires. En d’autres termes, le monde d’aujourd’hui serait global, tandis que ce n’aurait pas été le cas dans le passé.

Cependant, Cooper trouve que ces deux théories ont un problème en commun. Elles examinent le passé en partant d’une image idéale du présent global comme point de départ. Ces théories-là, selon Cooper, ne font que nous montrer soit que le passé était en effet l’un des stages de développement du monde global d’aujourd’hui, soit que le monde global d’aujourd’hui est une déviation totale d’un passé non global.

Colonial conquests imposed territorial borders on long-distance trading networks within Africa and imposed monopolies on the growing external trade of this time, damaging or destroying more articulated trading systems crossing the Indian Ocean and the Sahara Desert and lining the West African coast. Africans were forced into imperial economic systems focused on a single European metropole. (Cooper 105)

(9)

8 Il se peut que la mondialisation à laquelle on a affaire aujourd’hui soit une création mise en place pour remplacer les systèmes d'échanges économiques et sociales qui existaient à travers le monde entier, particulièrement en Afrique. Pour illustrer cela, Cooper prend la colonisation de l’Afrique par les Européens comme exemple - les idéologues coloniaux prétendaient qu’ils ouvraient le continent africain, alors qu’en réalité ils l’ouvraient en faveur de l’Europe et le refermaient sur lui-même. La colonisation a

mis fin aux systèmes d'échanges commerciaux qui existaient à travers le Sahara et la côte ouest-africaine.

Il y a quelques centaines d'années, avec l'avènement des inventions et des grands avancements en technologie, les pays européens ont commencé à quitter l’Europe pour diverses raisons. Avec les

‘‘nouvelles’’ technologies dans le domaine de la navigation, il était devenu clair que les Européens allaient franchir les océans et découvrir des terres lointaines. Alors ils se sont mis en route à la recherche d‘épices, pour faire du commerce, pour propager l’évangile ou simplement pour découvrir le monde.

C’est ainsi que les Européens sont arrivés sur les autres continent y compris le continent africain.

L’Afrique du Nord n'était pas considérée comme un territoire inconnu pour les Européens, les Grecs et les Romains y avaient notamment accès depuis des siècles. Cependant, les premiers Européens à arriver en Afrique subsaharienne furent les Portugais. Plusieurs groupes d'Européens y sont venus après les Portugais. Les premiers contacts étaient principalement pour faire du commerce. Voyant la richesse en ressources minérales et naturelles de cette partie de l’Afrique, les échanges commerciaux devinrent de plus en plus importants. Des traités de paix ont été signés pour créer un environnement propice qui allait faciliter les affaires entre les différentes partis.

On ne peut parler de la colonisation sans parler de l’esclavage qui a précédé la période coloniale et a duré des centaines d'années. L’esclavage était aussi du commerce, mais la marchandise dans ce type de commerce était des Africains capturés et vendus contre leur choix. Les territoires du long de la côte étaient connus pour ce genre de commerce. L'île de Gorée, au Sénégal, qui était le point de départ de nombreux esclaves était considéré comme un endroit très important, faisant du Sénégal tout entier un point d'intérêt pour la France. Après la balkanisation de l’Afrique en 1885 lors de la conférence de Berlin, la colonisation était l’ordre du jour sur le continent africain.

(10)

9 C’est ainsi que l'établissement des colonies en Afrique a commencé. Selon le dictionnaire

Larousse, le fait de coloniser veut dire ‘‘transformer un pays en une colonie, en un territoire dépendant d'une métropole.’’ La définition d’une colonie dans le dictionnaire Larousse c’est un ‘‘territoire occupé et administré par une nation en dehors de ses frontières, et demeurant attaché à la métropole par des liens politiques et économiques étroits.’’ La colonisation donnait aux Européens l’accès à toutes les ressources qu’ils achetaient auparavant. Pour une centaine d'années, l’Afrique fut sous domination française, anglaise, belge, allemande et portugaise. La gestion des colonies africaines était devenue la source principale des économies européennes et était, par conséquent, considérée comme très importante. Des ministères de colonies étaient dédiés à l’administration des colonies depuis la métropole.

Le système français de la colonisation : la domination directe

La France était l’un des pays qui avait une forte présence sur le continent africain. Suite à plusieurs guerres de conquête entre les troupes françaises et les peuples indigènes, la France avait réussi à prendre contrôle et à occuper plusieurs territoires africains. Elle avait colonisé une grande partie de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique Centrale. Il y avait deux systèmes fondamentaux de colonisation, à savoir la domination directe et le gouvernement indirect. Les Français utilisaient la domination directe tandis que les Anglais quant à eux faisaient usage du gouvernement indirect. Avec la domination directe, la France avait le contrôle direct sur presque toutes les institutions des territoires dominés. Ce contrôle et ce pouvoir venaient du gouvernement central qui était dans la métropole. Les Anglais, avaient recours au gouvernement indirect qui se servait des institutions locales pour gouverner les peuples et les territoires colonisés.

Dans le système de la domination directe, les structures locales de pouvoir sont complètement ignorées et remplacées par des institutions françaises. Pour survivre dans un tel système, il fallait jouer le jeu selon les mêmes règles. L'autorité sur le terrain était toujours française; du gouvernement local jusqu’au gouvernement central en France.

(11)

10 L’Assimilation française et ses effets actuels

Le système colonial français contrairement à celui des Anglais n'était pas un système qui envisageait l’indépendance des peuples colonisés un jour. Les ressortissants des colonies françaises étaient des sujets avec un seul but : celui de devenir eux aussi des citoyens français. A la base, l’assimilation, est le système français de colonisation dans lequel les indigènes sont formés à devenir semblables aux citoyens français. Pour obtenir la citoyenneté française, il fallait obéir aux lois françaises, apprendre la langue, et assimiler la culture. Ce système pourrait-il être la cause de la ‘‘dépendance’’ et l’attachement des pays africains francophones à la France aujourd’hui? Selon Felwine Sarr, bien que les temps coloniaux soient une réalité du passé, les esprits des Africains d’aujourd’hui sont toujours colonisés et doivent être décolonisés (152). Plusieurs décennies après l’assimilation, les Africains pensent toujours qu’ils doivent se diriger vers un modèle idéal (qui met en avant les pays du premier monde), qui a pourtant été construit par les colonisateurs et projeté sur les Africains. Felwine Sarr apporte le côté utopique à mon travail. Afrotopia évoque une image d’espoir pour les Africains. Cette perspective est importante pour mon travail puisque cela représente pour moi, en tant qu’Africain, un appel à se mettre au travail pour s’assurer que cette utopie devienne une réalité. De la même manière, Frederick Cooper et Achille Mbembe ont aussi des apports uniques à mon travail. Étant historien, Cooper fourni le contexte historique dans lequel ma recherche se situe. Il faudrait aussi ajouter que Africa Since 1940 et

Colonialism in Question de Cooper ne sont pas du tout utopique. Ce sont les présentations de faits et de théories. Les liens entre le colonialisme et la mondialisation sont accentués par Cooper dans Colonialism in Question.

(12)

11 Afrique Occidentale Française (A.O.F.) : un aperçu historique

Suite à la création du ministère des colonies en 1894, l’A.O.F. fut créé le 16 juin 1895. Cette union était composée de la Côte d’Ivoire, de la Guinée, du Sénégal et du Soudan français qu’on appelle aujourd’hui le Mali. Cette association était une création administrative établie pour mieux gérer les colonies françaises de l’Afrique de l’Ouest. Le gouverneur général de l’Afrique Occidentale Française qui était sous la direction du ministère des colonies était à la tête de l’A.O.F. Le gouverneur était siégé à Dakar qui était devenue la capitale de l’A.O.F. Au fil du temps, d’autres colonies se sont ajoutées à cette fédération, y compris la Haute-Volta, le Haut Sénégal et le Niger, la Mauritanie et le Dahomey. L’A.O.F.

était un véritable comptoir pour la France qui avait pour but d’exploiter les ressources des différents territoires membres. Cette même exploitation se fait aujourd’hui sous un nouveau terme : la

mondialisation. La mission civilisatrice s'était rapidement transformée en mission d’exploitation. La Côte d’Ivoire, le Soudan français et la Haute-Guinée étaient exploités pour leur or. La Guinée, quant à elle, s’est vu exploitée pour ses diamants. Le Sénégal était exploité pour le titane. Heureusement, l'époque de la mission civilisatrice (la colonisation) est derrière nous maintenant, mais aujourd’hui, nous avons affaire à la mission d’exploitation. Cette exploitation continue aujourd’hui avec la mondialisation. Au nom de la mondialisation, les pays les plus riches se servent des pays les plus pauvres pour s’enrichir. Pourtant, dans le cadre de la mondialisation, tous les pays devraient se servir de ces réseaux et de ces opportunités pour créer d’autres opportunités pour leurs peuples et éventuellement enrichir le pays tout entier. De nos jours, nous constatons que les gouvernements des pays en voie de développement s’enrichissent au péril du peuple.

Structure et fonctionnement de l’A.O.F

Le ministère des colonies était à la tête de l’A.O.F. C'était l’organe du gouvernement français chargé de gérer et de suivre le progrès des colonies françaises, y compris celles en Afrique.

(13)

12 Sous le ministère des colonies, il y avait le gouverneur général (le haut-commissaire). Celui-ci était comme le président de la fédération. Il était responsable du fonctionnement quotidien des colonies appartenant à l’A.O.F. Le siège de son administration était situé à Dakar, au Sénégal. Juste en dessous du gouverneur général, il y avait les lieutenants gouverneurs dans les différentes colonies de l’A.O.F. Ceux- ci étaient comme des ministres qui s’occupaient de chaque colonie et devaient rendre compte au

gouverneur général. Il est important de noter que toutes ces personnes étaient des représentants de la France, mis à ces postes au profit de la France métropolitaine. Les colonies, elles aussi, étaient divisées en juridictions administratives appelées des cercles, qui avaient leurs propres dirigeants. Après le référendum de 1958, où les ressortissants des différentes colonies ont décidé de se diviser en républiques autonomes, fut la fin de la fédération de l’A.O.F.

Afrique Équatoriale Française (A.E.F.) : un aperçu historique

Dans le même esprit de la création de l’A.O.F., l’A.E.F. était une fédération de colonies françaises. L’A.E.F. a été créée en 1910 selon le modèle de l’A.O.F. qui était déjà établie. Cette fédération était composée de quatre colonies dont le Gabon, le Tchad, le Moyen-Congo et l’Oubangui- Chari (aujourd’hui la République Centrafricaine). Le Cameroun, plus tard est devenu membre spécial de cette fédération puisqu’il était un protectorat français. Sa capitale, aussi appelé chef-lieu, était Brazzaville.

C'était une création administrative qui allait aider à mieux gérer les territoires français de l’Afrique centrale.

L’A.O.F était très rentable pour la France puisqu’il y avait une énorme richesse en ressources naturelles. Une fois de plus, la France qui était venue « aider » à la civilisation de ces peuples, s’est enrichie en exploitant les ressources naturelles qui s’y trouvaient . L’A.E.F., était beaucoup plus riche en ressources naturelles que l’A.O.F.. L’exploitation des ressources naturelles de l’A.E.F. persiste toujours aujourd’hui sous une autre forme: la mondialisation. Toutes les ressources naturelles du Tchad, de la République centrafricaine, de la République du Congo et du Gabon sont exploitées par des compagnies

(14)

13 étrangères qui s’enrichissent, enrichissant leurs pays en appauvrissant les pays où se trouvent les

ressources exploitées.

Structure et fonctionnement de l’A.E.F.

A la tête de l’A.E.F., il y a le gouverneur général qui est chargé de l’administration de l’ensemble des colonies et qui est censé rendre des comptes au ministère des colonies en France. Il reçoit des

commandes du ministère des colonies concernant la gestion et le fonctionnement de l’A.E.F. De son siège à Brazzaville, il joue un rôle de président de la zone toute entière. En dessous du Haut-commissaire, il y a des lieutenants gouverneurs comme dans l’A.O.F. Ces leaders sont à la tête des gouvernements locaux dans les différentes colonies qui forment l’A.E.F. Les lieutenants gouverneurs étaient comme des

ministres désignés pour chacune des colonies et qui devaient rendre compte au gouverneur général. Dans chaque colonie de la zone, il y avait aussi des départements qui s’appelaient des municipalités. Le système colonial français était bien structuré afin de mieux servir les besoins des colons.

Les indépendances et ses espoirs

La fin des années 1950 et le début des années 1960 ont marqué l'avènement des indépendances pour la plupart des territoires africains colonisés. Cette période était pleine d’agitations dans le but d’être indépendant des puissances coloniales. Les Africains en général cherchaient à se libérer de l’oppression et de tout ce qui venait de la colonisation. Bien que le désir d’être libre soit un désir fondamental qui est inné, cette période était caractérisée par plusieurs démarches vers les indépendances et la liberté en général. Un des facteurs qui a contribué à ces mouvements de libération était le retour des soldats

africains qui étaient engagés pendant la seconde Guerre Mondiale. Ces anciens combattants ont beaucoup contribué à la démystification du ‘‘blanc’’ , ce qui a éventuellement donné naissance à des mouvements nationalistes qui ont été fructueux.

Qu’est-ce que les indépendances des anciennes colonies françaises signifieraient pour la France?

Il ne faut pas oublier que les colonies africaines étaient très rentables pour la France. Une grande partie de

(15)

14 l'économie française reposait sur les colonies. Les luttes pour les indépendances n’ont donc pas été sans opposition de la part de la France métropolitaine. La Guinée fut la première colonie dans l’A.O.F. à avoir son indépendance en 1958, après le référendum de de Gaulle. Tandis que les autres pays de la zone ont voté pour être des républiques individuelles, la Guinée a voté pour son indépendance immédiate et totale selon la politique radicale de Sékou Touré. Cette décision a exaspéré la France qui a alors imposé

plusieurs sanctions à la Guinée. Les autres pays de l’A.O.F. sont devenus indépendant en 1960, comme la majorité des peuples africains. Par définition, le mot indépendance signifie, dans ce contexte, l'état d’un pays capable de se gouverner et d’être responsable de ses propres affaires. Ces nouvelles nations allaient elles-mêmes être au contrôle de leurs territoires y compris de toutes leurs ressources. En principe, voilà ce que les indépendances des anciennes colonies françaises auraient dû signifier. Mais on se pose la

question, est-ce que les Français sont vraiment partis? Ont-ils vraiment laissé la gestion de ces nouvelles nations aux peuples eux-mêmes? La France avait tout à perdre dans cette histoire d'indépendance des colonies. Cela signifiait la fin de l’exploitation de ces territoires africains, qui auparavant étaient très rentables pour la France.

Les conséquences de la décolonisation sur la France métropolitaine peuvent être divisées en trois grandes parties, à savoir : les effets économiques, politiques et socioculturels. La plupart des

désavantages liés aux indépendances des colonies africaines pour la France sont en même temps des bénéfices pour les peuples africains. Cela montre clairement que la colonisation était vraiment au profit de la France et non des peuples colonisés.

Les impacts économiques de la décolonisation étaient peut-être les plus importants pour la France puisque les retours sur investissement dans les colonies en Afrique lui rapportaient beaucoup plus et que ces revenus formaient une part importante de son économie. La France avait accès à toutes les ressources naturelles des colonies. Ces matières premières constituaient la base de l’industrie en Europe (Coquery- Vidrovitch and Moniot 208-209). Comme les colonies étaient principalement des comptoirs et n'étaient pas censées avoir des activités de production, toutes les ressources naturelles provenant des colonies étaient transportées en France à l’état brut. Une fois arrivées en France, ces ressources naturelles allaient

(16)

15 servir de matières premières pour les industries de production. Le café, le cacao, l’arachide, l’or, la

bauxite, entre autres choses, constituaient la survie des industries de production de la France. Alors les indépendances de ces colonies mettaient fin à l'accès à ces matières premières, ainsi qu’aux ressources minières comme le diamant, l’or, la bauxite, etc. D’un autre côté, les Africains allaient être au contrôle de toutes leurs ressources et devaient être émancipés économiquement. Les Africains eux-mêmes pourraient transformer leurs ressources en produits finis en y ajoutant de la valeur. Ils pourraient aussi simplement commercialiser leurs matières premières à leur profit.

En termes de pouvoir politique, le fait d’avoir des colonies était un signe de puissance pour les nations européennes. Les pays européens voyaient la colonisation comme un moyen de faire rayonner leur puissance à travers le monde entier. Plus elles avaient de colonies, plus les nations étaient

considérées puissantes. L’occupation d’un territoire et d’un peuple étranger exige une domination efficace de ce territoire et de ses habitants. Cela n’est évidemment pas possible sans une puissance militaire et des structures politiques. Alors la perte de ses colonies à cause des indépendances signifiait aussi une perte de puissance politique pour la France: elle n’aurait plus le statut de ‘‘maître’’ sur ses anciennes colonies.

Néanmoins, cela était l’un des bénéfices des indépendances pour les pays africains. Ce même pouvoir ou cette même puissance politique, que la France avait perdue, allait désormais être dans les mains des Africains libérés. Les anciennes colonies étaient maintenant censées être des pays souverains, sans domination externe.

La colonisation est aussi un moyen à travers lequel un pays peut propager sa langue, sa culture et ses traditions à travers le monde entier. La Francophonie, par exemple, qui désigne l’ensemble des peuples et cultures parlant ou étant associés à la langue française, n’existerait pas sans l’histoire coloniale et sans le financement de ses institutions depuis 1960. Dans ce même ordre d'idées, on pourrait aussi citer the Commonwealth of Nations qui est l'équivalent anglais de la Francophonie. Comme la langue et la culture sont inséparables, les peuples africains qui ont été colonisés par les Français n’ont pas seulement appris la langue française, mais aussi la culture de la France. Les indépendances de ces anciennes colonies allait alors mettre fin à la relation entre la France et ses anciennes colonies qui était fondée sur

(17)

16 l’exploitation et aussi l’imposition de la culture et de la langue françaises. Encore, cette rupture pour les pays africains était une bénédiction. Ils pourraient mettre en avant leurs propres langues, leurs cultures et

leurs traditions, au lieu de celles de la France qui avaient été imposées.

Les problèmes de l’Afrique postcoloniale

Après les indépendances, on aurait pensé voir une Afrique redéfinie, prospère et qui fonctionnait toute seule. C'était le progrès naturel auquel on s’attendait après des années d’exploitation et

d’oppression. Mais, non! Au contraire, c'était comme si les indépendances, considérées comme une bénédiction pour les colonies, avaient été transformées en malédiction du jour au lendemain, et ces nouvelles nations souveraines ont commencé à traverser des moments très sombres (Nugent 7). Dans les paragraphes qui suivent nous allons énumérer quelques problèmes qui relèvent de la période

postcoloniale.

Les problèmes de l’Afrique postcoloniale peuvent être divisés dans les catégories suivantes; les problèmes politiques(dictature, corruption, coups d’état, guerres, l’influence des anciens maîtres), les problèmes sociaux(identité, modernité, continuation des institutions coloniales) et les problèmes économiques(dettes, absence d’industries de production pour transformer les matières premières, monnaie). Une grande majorité des problèmes auxquels ont fait face les nouvelles nations africaines pendant la période postcoloniale était liée à la gestion au niveau national. La période des luttes pour les indépendances a vu naître plusieurs Africains qui, par amour pour leurs patries, ont été à la tête des révolutions. Cela explique pourquoi ces derniers ont gagné le support des peuples qu’ils représentaient et se sont trouvés en position de pouvoir après les indépendances. Cependant le fait d’avoir un ressortissant du pays comme président ne voulait pas dire qu’il n’y aurait plus de problèmes. Au contraire, les

problèmes n’ont pas cessé de se multiplier.

Tous les problèmes cités ci-dessus existaient bien avant les indépendances des pays africains.

Alors pourquoi est-ce que les Africains font face à ces mêmes problèmes aujourd’hui? On parle aujourd’hui de néocolonialisme. Comme son nom l’indique, il s’agit ici dune nouvelle forme de

(18)

17 colonialisme. Selon le dictionnaire Larousse, le néocolonialisme se définit comme ‘‘Politique menée par certains pays développés visant à instituer, sous des formes nouvelles, leur domination sur les États indépendants du tiers monde autrefois colonisés.’’ Le mot a été utilisé pour la première fois par Jean-Paul Sartre, mais le premier président du Ghana, Kwame Nkrumah, l’a rendu populaire. Il a beaucoup utilisé ce mot pour désigner l’influence et la mainmise des pays occidentaux dans les affaires des pays en voie de développement. Cette influence pouvait être politique, économique ou même culturelle. Ceux-ci

constituent les mêmes aspects visés par la mondialisation.

La mondialisation, en tant que telle, ne devrait pas être une expression qui suscite des sentiments négatifs chez les Africains, mais ce concept est utilisé aujourd’hui comme une continuation de la

colonisation. L’Afrique n’en tire généralement pas assez de bénéfices. Dans les chapitres qui suivent, nous allons établir le lien entre la colonisation et la mondialisation.

(19)

18 Chapitre 2: Le Cameroun et la mondialisation

Le Cameroun de l'indépendance au temps présent

Le Cameroun est un pays d’Afrique centrale ayant des frontières communes avec le Nigeria, le Tchad, le Gabon, la République Centrafricaine, la République du Congo et la Guinée Équatoriale. Au sud-ouest du Cameroun, se trouve le golfe de Guinée. C’est un pays riche en ressources naturelles y compris le coton, le cacao, le café, la bauxite et le fer. Le Cameroun français a obtenu son indépendance le 1er janvier 1960 et le Cameroun anglais a obtenu la sienne le 1er octobre 1961. Après les

indépendances, le Cameroun comme la plupart des autres pays africains, a connu une période assez tumultueuse. Le premier président, Ahmadou Ahidjo, qui était premier ministre de 1958 jusqu’à

l’indépendance, pratiquait une politique de favoritisme envers son groupe ethnique, les Peuls. Il faudrait dire que le président Ahidjo avait le soutien de la France. Pendant les élections d’avril 1964, il y a eu des révoltes accompagnées de violences à travers le pays. Les supporters de Marguerite Mbida se sont lancés dans les rues pour protester contre le trucage des élections. La gendarmerie camerounaise a été interpellée pour ‘‘gérer’’ la situation. Il y a eu un nombre important de morts. Plusieurs personnes ont été arrêtées et envoyées dans des camps de concentration. En fait, le gouvernement camerounais avait signé des accords militaires avec la France qui est intervenue pendant cette période-là. Ces accords avaient pour but d’assurer la sécurité interne et externe du pays. Le président Ahidjo avait de son côté le gouvernement et l'armée française. Ahidjo a finalement démissionné de son poste de président en 1982 à cause de sa santé.

C’est ainsi que Paul Biya est devenu le second président du Cameroun. Le mandat de celui-ci a également été marqué par l’agitation politique.

Selon la Banque Africaine de Développement, l'économie du Cameroun est la plus résiliente de la sous-région même si cela ne représente pas la situation économique de la population. Dans les pages suivantes, nous allons revoir les chiffres et les statistiques économiques par rapport à la performance du Cameroun, en faisant toutefois le lien avec la situation économique des masses. Il serait important de

(20)

19 noter que ces chiffres ont été tirés de l’œuvre de la Banque Africaine de Développement, baptisée

Perspectives économiques en Afrique. Le PIB du Cameroun selon la Banque Mondiale est de 34,8 milliards de dollars pour l'année 2017. Ce PIB est censé connaître une croissance de 4,7% en 2020, ce qui est considéré comme un signe en termes de croissance de PIB. La question reste, cette croissance,

représente-t-elle la situation économique de la population camerounaise? L'économie du Cameroun a la réputation d'être la plus diversifiée de la sous-région grâce à son secteur primaire très actif composé entre autres du pétrole, de la pêche et de l’agriculture. La population camerounaise est aussi diversifiée que son économie. Avec environ 24 millions d’habitants, selon la Banque Mondiale en 2017, qui sont distribués parmi des ethnies parlant plus d’une centaine de langues. Le Cameroun est majoritairement chrétien, soit plus de la moitié de la population.

Les problèmes de la mondialisation au Cameroun

Le plan politique: la Françafrique

Peu de temps après les indépendances au Cameroun, le président Ahidjo a signé un accord de sécurité avec la France. Cet accord était censé assurer la sécurité interne et externe du Cameroun avec le soutien de la France. Ce genre de contrat remonte dans le concept tellement controversé appelé

la « Françafrique ». Cela ne s’agit pas juste du rapport entre la France et ses anciennes colonies, mais encore plus que cela. Ce terme suggère la mainmise active de la France dans les affaires, particulièrement politiques, économiques et militaires de ses anciennes colonies, de telle sorte qu’elle puisse en tirer des bénéfices. Certains chefs de gouvernement tels que le premier président de la Côte d’Ivoire, Félix Houphouët Boigny, et bien sûr Ahmadou Ahidjo, considéraient ces interventions françaises comme une bénédiction pour l’Afrique. Comme le dit Antoine Glaser au cours d’un entretien réalisé par Annick Steta,

‘‘Dans l'esprit de Félix Houphouët-Boigny, la Françafrique désignait une communauté de destin entre l'ancienne puissance coloniale et les États africains’’ (Glaser and Steta 91). La plupart des présidents qui considèrent la Françafrique de façon positive en profitent pour s’assurer de leur sécurité et pour s’enrichir

(21)

20 au profit des masses. Il serait très tentant de dire que la Françafrique est une chose du passé et que cela n’existe plus de nos jours. Je dirais plutôt que la Françafrique ne devrait plus exister de nos jours, mais est-ce la réalité sur le continent africain? En 2012, pendant son discours lors d’une visite au Sénégal, le président français, François Hollande, a affirmé que la Françafrique était effectivement une chose du passé et qu’aujourd’hui, il y a la France et l’Afrique indépendantes, et il y a aussi la relation entre les deux. Mais en 2013, la France a envoyé des troupes militaires pour intervenir en Afrique, au Mali.

D’ailleurs la France a toujours une présence militaire très importante aujourd’hui en 2019 dans ses anciennes colonies africaines. Il y a certainement des intérêts à protéger. Alors, le président Ahidjo s’est servi du soutien de la France pour lutter contre son propre peuple. En 1964, l’Union des Populations du Cameroun, qui était activement opposé au gouvernement d’Ahidjo fut la cible de la gendarmerie en conjonction avec l'armée française qui ‘‘assurait’’ la ‘‘sécurité interne’’ du Cameroun. C'était un véritable massacre. La France s'était mêlée directement des affaires du Cameroun.

Le lien entre la Françafrique et la mondialisation est indiscutable. Si l’on considère la mondialisation comme un système de réseaux qui relie les pays, c’est clair que la Françafrique est un produit entremêlé avec la mondialisation en termes de culture et du marché capitaliste en plus des zones de sécurité militaire. La Françafrique, n’est pas du tout un nouveau phénomène. Cela existait bien avant les indépendances, mais sans être appelée ‘‘Françafrique’’. C'était absolument normal pour le

colonisateur de se mêler des affaires politiques, économiques et militaires de ses colonies. En fait, le fait même d’être présent sur un territoire et de l’avoir colonisé voulait dire qu’on se mêlait des affaires de ce territoire colonisé. A partir de cela, il est évident que la mondialisation pourrait être vue comme une continuation de la colonisation, bien qu’elle persiste de manières différentes à nos jours. La France qui avait perdu ses colonies pendant les années 50 et 60, a profité de la mondialisation sous forme de la Françafrique, pour s’assurer de sa présence et de son contrôle dans ses anciennes colonies maintenant devenues des pays souverains, mais dont la souveraineté vraie et sans entrave est malheureusement à remettre en question. La mondialisation aujourd’hui sert de justification pour les pays occidentaux de

‘‘revenir’’ en Afrique. Comme c’était le cas il y a des centaines d'années, les Européens avaient besoin de

(22)

21 justifier leur arrivée en Afrique; c'était tout d’abord une ‘‘mission civilisatrice’’ et, bien sûr, pour prêcher l'évangile. Dans le cas des accords entre le président Ahidjo et la France, c'était pour assurer la sécurité interne et externe du Cameroun. Qui était vraiment protégé? Et contre qui? Le sentiment populaire à propos du premier président Camerounais Ahidjo était que c’était un président mis en place avec l’aide des Français. Il était soutenu par la France. Le soutien de la France l’a permis de diriger le pays de l’indépendance en 1960 jusqu’en 1982. Paul Biya qui a été nommé président cette année-là est toujours président du Cameroun. Cela fait 37 ans au pouvoir d’un pays soi-disant « démocratique ». Beaucoup sont ceux qui estiment que Biya est toujours au pouvoir parce que son gouvernement jouit du soutien de la France et parce qu’il truque les élections.

On estime que les problèmes politiques actuels du Cameroun viennent de l'interférence de la France dans ses affaires de gouvernance. Tout d’abord les régions anglophones qui sont à la frontière du Nigeria se sentent négligées. Il y a eu plusieurs manifestations par des professionnels anglophones de cette région parce qu’ils avaient été forcés d’utiliser le français dans leur milieu de travail. Le Cameroun uni, n’a pas su unifier toute la population vivante entre ses frontières. Ce problème a créé des sentiments séparatistes dans les régions anglophones du pays. Ces sentiments se sont transformés en des mouvements de plus en plus radicaux qui désirent la transformation de ces régions en un état indépendant du reste du Cameroun. Ambazonia ou Amba land est le nom que s’est donnée cette région séparatiste qui, en 2017, s’est déclarée indépendante du reste du Cameroun. Ambazonia a même un leader qui se considère comme un président (Rahman and Shaban). En plus, avec le soutien français dont le président actuel Biya jouit, il est presque impossible de le remplacer à la présidence, sauf à travers des élections démocratiques libres et justes. D’ailleurs la France aurait condamné un président qui change la constitution afin d'être capable de diriger le pays pour un septième mandat. Aujourd’hui, Maurice Kamto, un leader de l’opposition et le candidat du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun, est en prison, chargé d'hostilité contre la patrie et d’appel à l’insurrection. M. Kamto, suite aux élections présidentielles d’octobre 2018, s’est déclaré vainqueur, désobéissant l’avertissement du président Biya contre cette pratique. Il a accusé le président Biya d’avoir truqué les élections. Ses accusations et ses preuves sont rejetées en cours de justice

(23)

22 et sa punition pourrait aller jusqu'à la peine de mort. Le soutien de la France rend le président Biya

apparemment intouchable jusqu’à aujourd’hui, et tous ceux qui osent essayer de lui arracher le pouvoir politique en souffrent les conséquences. En fait, tous ceux qui ne le soutiennent pas font face à diverses formes d’intimidation et même de menaces comme la censure des médias, un climat répressif,

l’emprisonnement et même la mort.

Le plan économique

Comme le monde est devenu un village global aujourd’hui, c’est avantageux d’avoir des liens avec d’autres pays et des organisations internationales. C’est ainsi que les pays africains sont entrés dans des accords avec les institutions financières internationales comme la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International dans le but d'améliorer leurs conditions économiques. Frederick Cooper, dans son livre, Colonialism in Question, appelle cette dimension de la mondialisation, ‘‘Banker’s Boast’’ :

Pressure from the United States, the IMF, and transnational corporations brings down national barriers to the movement of capital. This is in part an argument for a new regulatory regime, one which lowers barriers to capital flow as well as trade, and which operates on a global level. It is also an argument about discipline: the world market, conceived of as a web of transactions, now forces governments to conform to its dictates.

(Cooper 93)

Lorsqu’il n’y a plus de barrières au libre échange et au flux de capitaux, le pays est considéré global et est automatiquement soumis aux vagues de la mondialisation. On parle toujours d'inégalités dans la mondialisation. Ces liens et ces accords semblent toujours être au profit d‘autres pays et institutions financières tandis que l’Afrique souffre toujours. Cette image est bien représentée dans le film Bamako (2006) par Abderrahmane Sissako, où la Banque Mondiale qui n’est même pas présente a été traduite en justice et forcéede répondre aux accusations faites contre elle par les citoyens du Mali. Le film aborde le sujet de la mondialisation en tant que concept utilisé par les pays développés et qui est injuste à la base, car permettant aux pays développés d’infiltrer l’Afrique sous prétexte de la mondialiser, de la développer et de l’aider. Comme le constate Tejumola Olaniyan;

(24)

23 The film realizes in cinematic representation a conceit no doubt many

Africans have at one time or the other imagined or dreamed of even if as mere relieving jest: put the IMF and World Bank and all their allies local and foreign, on trial for their impoverishment of Africa in the name of helping it. (132)

La Banque Mondiale et le Fond Monétaire International savent bien que la solution des dettes de l’Afrique ne demeure pas dans le fait de leur donner encore plus de prêts, mais d’aider à développer une économie locale vigoureuse qui pourrait subvenir aux besoin de la population. D’ailleurs, nous savons tous comment les choses se sont terminées dans le passé lorsque les pays européens ont décidé de venir en aide à l’Afrique ‘‘sauvage’’. Comme le disent Myriam et Raymond Gervais, les démarches par la Banque Mondiale et le Fond Monétaire Internationale pour sauver l’Afrique on fait plus de mal que de bien au continent :

A plusieurs reprises, il a été suggéré que: 1) le FMI et la Banque mondiale dictaient aux États la manière de sortir des crises financière et économique; 2) les solutions du type préconisé par les institutions financières internationales (telles les PAS) s'avéraient peu adaptées à la situation de ces pays; 3) les PAS avaient surtout eu pour effet d'accentuer l'appauvrissement des populations sous ajustement. (8)

Les « programmes d’ajustements structurels » qui étaient la solution proposée par la Banque Mondiale et le FMI aux pays africains afin qu’ils se sortent de la crise économique ont tant été critiqués tout d’abord parce que c'était un pas qui obligeait ces pays africains à adopter ces réformes. Pour finir, cela n’a fait que contribuer à l’appauvrissement des pays africains.

En plus de l’appauvrissement du pays tout entier, l'implémentation des programmes d’ajustement structurel au Cameroun dans les années 1980 a contribué à la croissance du taux de chômage. Selon Fodouop Kengne, puisque les fonds envisagés pour le secteur public avaient considérablement diminué, plusieurs établissements publics ont dû licencier leurs travailleurs. Mais le secteur privé n'était pas en sécurité non plus, puisqu’il y avait déjà une crise économique dans laquelle tout le pays était. Le chômage frappait particulièrement dans les grandes villes, comme la capitale de Yaoundé et Douala, le port

principal.

(25)

24 Le franc CFA: cordon ombilical

Après les indépendances des anciennes colonies françaises, des accords financiers entre ces pays- là et la France, l’ancien colonisateur, font de telle sorte que la France reste toujours au contrôle de leur monnaie nationale. Ces accords entre les anciennes colonies françaises et la France rentrent dans le cadre de la mondialisation. Mais qui est le vrai gagnant dans cette mondialisation? Le fait que le sort de la monnaie nationale d’un pays soit entre les mains d’un autre suggère l’injustice. Il y a deux zones Franc CFA, qui sont l’Afrique centrale et l’Afrique de l’Ouest. Le Cameroun appartient à la zone d’Afrique centrale. Depuis 1948, le Franc CFA a une parité fixe avec la monnaie française, qui était jusqu’en 1999 le Franc français, mais l’Euro aujourd’hui. La performance du Franc CFA dépend de la performance de

l’euro. La parité fixe avec l’euro signifie que le franc CFA jouit d’une certaine stabilité venant de l’euro.

Bien qu’il y ait plusieurs problèmes associés à cette parité fixe, qui est d’ailleurs décidée par la France, la stabilité qu’offre cet accord constitue l’une des forces du franc CFA. Le franc CFA est-il un outil du néocolonialisme? Considérons les points suivants :le franc CFA, qui est la monnaie utilisée au Cameroun, est géré par la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC). La BEAC fonctionne indépendamment des gouvernements de la zone CFA de l’Afrique Centrale, mais est sous la gestion du ministère français des finances. La vraie indépendance ne peut pas être réalisée si l’on ne gère pas sa propre monnaie ! Le budget du Cameroun est contrôlé par la Banque Mondiale et le FMI, tandis que sa monnaie est contrôlée par le gouvernement français. D’ailleurs, le Cameroun ne produit pas sa propre monnaie, le franc CFA est imprimé en France dans la région de Bordeaux. Alors, c’est clair que le Cameroun n’a pas de contrôle sur sa monnaie. Le fait même qu’il fasse partie de la zone CFA de l’Afrique Centrale veut dire que son indépendance monétaire est compromise. La dévaluation du CFA en 1994 est un cas spécifique qui montre que le Cameroun et les autres pays de la zone CFA ne sont pas maîtres de leur monnaie.

Le marché capitaliste pose aussi un problème pour l’industrie locale qui cherche à se développer au Cameroun. Avec l'avènement de la mondialisation, le marché local est envahi par des biens et des services venant des quatre coins du monde. Cela peut être une bénédiction en même temps qu’une

(26)

25 malédiction pour les Camerounais. Avec le marché libre, les pays riches continuent de s’enrichir, tandis que les pauvres continuent de s’appauvrir. Une véritable mondialisation serait de trouver aussi des biens et services camerounais dans le monde entier. Mais cette mondialisation est inégale. Les organisations les plus prospères au Cameroun sont celles qui viennent de l'étranger, tandis que l’industrie local a du mal à s’en sortir.

La mondialisation dans la culture

Tout ce qui affecte l'économie et la politique d’un pays a forcément des conséquences socioculturelles sur la vie de ses habitants. En abordant les conséquences socioculturelles de la

mondialisation au Cameroun, je vais me focaliser sur un sujet qui devient de plus en plus pertinent non seulement au Cameroun mais à travers le continent africain. Dans les pages qui suivent nous allons explorer la question de la légalisation de l’homosexualité au Cameroun en la situant dans le discours de la mondialisation. Tout d’abord, il est nécessaire de préciser que les effets de la mondialisation sur la vie socioculturelle des Camerounais se fait ressentir d’une manière très subtile puisque la plupart du temps, les effets socio-culturels sont des changements qui ne sont pas forcément exécutés sur la population mais qu’ils décident d’adopter eux-mêmes sous l’influence de la mondialisation dans leur pays. Mais comme la pression est exercée par les leaders des pays développés sur les gouvernements africains afin qu’ils légalisent et décriminalisent l’homosexualité dans leurs pays, on parle ici d’influence externe (Awondo 147). Cette pression est souvent accompagnée de la menace de reconsidérer les aides développementales qui auraient été offertes aux pays africains. Cela suscite de nombreuses discussions autour de ce sujet.

Pour certains, c’est une tentative de détruire les cultures, les traditions et les valeurs africaines, tandis que pour d’autres, il s’agit de la lutte pour les droits de l’Homme.

Comment peut-on situer le discours autour de la légalisation et décriminalisation de

l’homosexualité au Cameroun dans le contexte de la mondialisation? Sous l’action des médias, qui sont d’ailleurs des outils de la mondialisation, le débat de la légalisation de l’homosexualité est suivi de très près par la population camerounaise. Comme le dit Ludovic Ladŏ:

(27)

26 Jusqu'à très récemment beaucoup d'Africains suivaient ce débat sur la

légitimité de l'homosexualité de loin, par le biais des médias, comme étant « l'affaire des Blancs ». Mais le pouvoir qu'ont les médias de mondialiser les débats et controverses, de convertir les questionnements locaux en problèmes mondiaux, n'est plus à démontrer. (921)

Avec sa pertinence à travers le monde entier, c’est normal que ce sujet soit beaucoup plus abordé aujourd’hui au Cameroun. De plus, les atrocités auxquelles font face les homosexuels au Cameroun sont aujourd’hui sujet de discussion à travers le monde entier. Particulièrement, avec l’assassinat du journaliste et militant pour les droits des homosexuels, Eric Lembembe en 2013, et les travaux d’Alice Nkom, avocate et militante des droits des personnes homosexuelles, la question de la décriminalisation de l’homosexualité est devenue l’un des sujets les plus abordés au Cameroun. Cependant, je vais me focaliser sur la place du discours autour de la légalisation et de la décriminalisation de l’homosexualité dans le néocolonialisme au Cameroun.

Pendant les obsèques et l’enterrement d’Eric Lembembe, la présence des ambassadeurs des États- Unis et de la Grande Bretagne était un message au gouvernement du Cameroun afin de reconsidérer sa position sur la décriminalisation de l’homosexualité. Ici, nous avons affaire à un exemple de cas où les représentants de deux des pays considérés comme des puissances occidentales essaient d’influencer la position d’un gouvernement africain sur un sujet complexe, dans la vie sociale et culturelle de la population. Il faudrait reconnaître que les Africains ont, d’une façon générale, tendance à rejeter tout ce qui ressemble à des tentatives impérialistes. ‘‘Sont-ils venus nous coloniser encore?’’- une question que l’on entend le plus souvent dans ce genre de situations. Bien que l’Afrique ne puisse jamais être vraiment indépendante tant que les pays développés ne cesseront pas de décider ce qui doit être légal ou illégal en Afrique, cette question de la légalisation de l’homosexualité au Cameroun est assez complexe et mérite d’être examinée.

Au Cameroun aujourd’hui, plusieurs personnes homosexuelles sont emprisonnées, torturées et même assassinées, comme dans le cas d’Eric Lembembe. C’est injuste! C’est également injuste que les pays développés tentent de prescrire des lois pour le Cameroun. Alors, quelle est la solution à ce

(28)

27 dilemme? Les pays occidentaux ont eux aussi, dans le passé, considéré le fait d’être homosexuel comme inconcevable et inacceptable. Il a fallu des mouvement internes pour lutter pour les droits des

homosexuels dans ces pays. Aujourd’hui, au Cameroun, il y a ces mêmes mouvement internes comme celui de l'avocate Alice Nkom qui ne cesse de grandir. Le Cameroun viendra certainement à un point où la légalisation de l’homosexualité sera réalisée. D’ailleurs, c’est inévitable. Mais comment protéger les personnes homosexuelles au Cameroun en attendant la décriminalisation et la légalisation de

l’homosexualité?

(29)

28 Chapitre 3: Le Sénégal et la mondialisation

Le Sénégal de l'indépendance à nos jours

Le Sénégal est un pays en Afrique de l’Ouest ayant des frontières avec cinq pays, qui sont: le Mali, la Mauritanie, la Gambie, la Guinée et la Guinée-Bissau. A l’Ouest du Sénégal se trouve l'océan Atlantique. Le Sénégal, contrairement au Cameroun, est beaucoup moins riche en ressources naturelles.

Néanmoins, il est l’un des principaux producteurs de phosphates.

Le Sénégal a été colonisé par la France et faisait partie de l’Afrique-Occidentale française (A.-O.

F.). Les deux capitales successives de l’Afrique-Occidentale française, Saint-Louis et Dakar se trouvaient au Sénégal. Pendant la période coloniale, le Sénégal était un territoire très important pour la France.

C'était non seulement le siège de l’administration coloniale, mais aussi, les quatre communes françaises—

Saint-Louis, Dakar, Gorée et Rufisque—où habitaient des citoyens français, se situaient au Sénégal. On dirait même que le Sénégal était comme une seconde France en Afrique de l’Ouest. Évidemment, le Sénégal était un territoire très important dans l’empire coloniale de la France. C’est pourquoi j’ai choisi de l’inclure dans ce travail.

Le Sénégal a obtenu son indépendance le 20 août 1960. Avant cela, il formait avec le Mali actuel, la Fédération du Mali. La période postcoloniale au Sénégal n’a pas été sans agitations, mais relativement

‘‘paisible’’ si l’on considère les événements tumultueux qui ont marqué cette période dans les autres pays qui avaient été colonisés par la France. Jusqu'à présent, il n’y a jamais eu de coup d’État au Sénégal. Ce qui est assez exceptionnel. Son premier président fut Léopold Sédar Senghor, un grand écrivain et poète, qui avait beaucoup contribué à l'indépendance du Sénégal. Il a négocié l'indépendance du Sénégal ‘‘en amitié avec la France’’. Il était le cofondateur du Bloc Démocratique Sénégalais, qui s’est transformé en Bloc Populaire Sénégalais et encore plus tard, en l’Union Progressiste Sénégalaise qui a rassemblé la population Sénégalaise et l’a mobilisée vers l'indépendance. Il est important de noter que Senghor avait la nationalité française. Il a même occupé un poste de ministre en France. Il a donc commencé sa carrière politique en France avant de devenir président du Sénégal. Il fut aussi le premier Africain élu à

(30)

29 l'Académie française, ce qui reconnaissait à la fois ses accomplissements littéraires et l’étendue de son admiration en France. Certains pensent que Léopold Sédar Senghor était un véritable exemple de

‘‘marionnette’’ de la France. Mais il faut admettre que dans la plupart des anciennes colonies françaises, il était presque impossible de devenir premier président après les indépendances sans avoir et la confiance et le soutien de la France.

En 1962, Senghor a mis le président du Conseil, Mamadou Dia, en prison, l’accusant d’une tentative de coup d’État. Cette action controversée à l'époque, fut critiquée par plusieurs personnalités dans le monde entier, comme Jean-Paul Sartre. Après cela, Senghor a procédé en 1966 à la déclaration du système de parti unique. C’est ainsi que l’Union Progressiste Sénégalaise fut le seul parti politique autorisé au pays. Le multipartisme est rétabli au Sénégal dix ans plus tard, en 1976. La même année qui a vu enfin la libération de Mamadou Dia. En 1968, de façon synchronisée avec les événements dans plusieurs pays francophones et, bien sûr, en France, il y a eu des manifestations au Sénégal pour des réformes sur le plan économique et politique. Pourtant, Léopold Sédar Senghor demeura président jusqu’en 1980. La présidence de Senghor était une véritable personnification des liens diplomatiques entre la France et le Sénégal.

En 1981, Abdou Diouf, qui était premier ministre dans l’administration de Senghor, devient président jusqu’en 2000. Lui aussi avait un très bon rapport avec la France. Après sa présidence, il devient secrétaire général de la Francophonie. Après Diouf, Abdoulaye Wade est venu au pouvoir en 2000 où il est resté jusqu’en 2012. Après sa présidence, Abdoulaye Wade quitte le Sénégal et s'installe à Versailles en France. Il y a toujours un rapport entre les premiers présidents du Sénégal et la France et ceci nous incite à réfléchir sur son importance en termes de prolongement de l’influence française en Afrique après la décolonisation. Le Sénégal était le foyer principal de la « Francophonie » sur le continent africain pendant la deuxième moitié du vingtième siècle.

Macky Sall, le président actuel du Sénégal, succède Wade en 2012. Macky Sall est venu au pouvoir avec 65.8% des voix après l’engagement d’un mouvement citoyen qui s’appelle « Y’en a marre ». Les militants de ce mouvement novateur et efficace sont des musiciens populaires et des

(31)

30 journalistes qui revendiquent la démocratie, la liberté d’expression et la bonne gouvernance. Il est vrai que toutes ces transitions de pouvoir présidentiel au Sénégal se sont faites suite à des élections, mais l’intégrité du processus a été vivement critiquée par les militants sur place. Cependant, il faudrait

admettre que le Sénégal est souvent considéré comme un modèle pour les autres pays africains en termes de stabilité politique et de transition de pouvoir politique sans conflit armé.

Le Sénégal jouit d’une des économies les plus florissantes d’Afrique de l’Ouest qui est fondée sur les services, l’industrie et l’agriculture. Le tourisme rapporte beaucoup de revenus et est considéré comme un patrimoine important au pays. La pêche est aussi un contributeur majeur à l'économie sénégalaise.

Cependant, cette croissance économique ne se reflète pas dans la vie de la grande majorité des Sénégalais.

Aujourd’hui, le Sénégal fait face à des problèmes tels que la corruption, le chômage, la pauvreté et le coût élevé de la vie, pour n’en citer que quelques uns. Y’en a marre a commencé parce que les jeunes en avaient marre des coupures d’électricité. Ils revendiquaient la bonne gouvernance et une culture de démocratie sans corruption. Les jeunes avaient laissé la place politique aux vieux et aux élites

économiques et donc ce mouvement citoyen cherchait à éveiller les jeunes et à cultiver des citoyens exigeants et qui connaissaient leurs droits.

Les problèmes de la mondialisation au Sénégal

Le plan politique - culture de soutien de la France pour les présidents sénégalais

Depuis la période coloniale, le Sénégal a une réputation de calque de la France dans la sous- région d’Afrique occidentale. Le Sénégal représentait le concept de l’assimilation avec ses quatre communes françaises (Dakar, Gorée, Rufisque et Saint-Louis) où les habitants étaient des citoyens français. Ces communes représentaient une véritable extension de la France métropolitaine. À partir du Sénégal, le gouverneur de l’A.O.F. administrait tout ce vaste territoire colonial. Le Sénégal était alors un pays très important pour la France en termes de culture, de géographie et de pourvoir impérial. En fait, pendant la première guerre mondiale, le député Blaise Diagne a aidé à recruter des milliers de soldats sénégalais pour combattre aux côtés de l'armée française. Il y avait une sorte de complicité entre Diagne

(32)

31 et la France. Ce dernier mettait évidemment les intérêts de la France au-dessus de ceux de son peuple. En commençant par Léopold Sédar Senghor, il y a toujours eu une certaine complicité entre les leaders sénégalais et la France, ce qui se transformait en une culture de soutien politique réciproque entre la France et ces leaders. Ce phénomène est peut-être la cause des cas d’abus de pouvoir politique dont nous allons traiter dans les pages qui suivent.

Alors que le reste de l’Afrique souhaitait la libération nationale et l'indépendance, Senghor pensait que l’Afrique ne devrait pas rompre les liens avec les colonisateurs. Pour lui, on pouvait être indépendant en restant amis avec le colonisateur. Alors, Léopold Sédar Senghor a négocié les termes de l'indépendance du Sénégal de telle sorte que les deux partis, le Sénégal et la France restent de ‘‘bons amis’’ Est-ce par hasard qu’il soit devenu le premier président du Sénégal après l'indépendance? Il ne représentait aucune menace pour la France. Comme Paul Nugent le souligne dans son livre Africa Since Independence de 2004, il y avait une vaste différence entre les mots de Kwame Nkrumah, qui voulait la libération totale du continent africain, et les paroles de Senghor lors d’un discours en 1957 :

In Africa, when children have grown up, they leave their parents' hut, and build a hut of their own by its side. Believe me, we don't want to leave the French compound. We have grown up in it, and it is good to be alive in it. We simply want to build our own huts. (Senghor qtd. in Nugent 7)

Senghor voulait que le Sénégal reste toujours attaché à la France. Son idée d'indépendance était d’avoir un certain degré de libération et d'auto-gouvernance mais toujours avec la supervision et le contrôle de la France colonisatrice. Il jouissait du soutien de la France qui voulait d’ailleurs toujours profiter du contrôle de ce territoire. Senghor était-il une simple marionnette de la France? Pour certains, il était tout à fait contrôlé par la France et avait donc donné un faux sens à l'indépendance du peuple

sénégalais. Cette amitié néocoloniale avec la France pourrait être la raison pour laquelle il a pu commettre certaines infractions sans qu’il y ait de répercussions. Juste deux ans après l'indépendance en 1960, le président Senghor, qui n’avait pas la meilleure des relations avec le président du Conseil, Mamadou Dia,

(33)

32 a jeté ce dernier accompagné de quatre autres ministres en prison pour une tentative de coup d’État.

Mamadou Dia a été condamné à vingt ans de prison contre la décision de Ousmane Camara, le procureur général qui ne voulait pas le condamner. Cette action a été l’objet principal de plusieurs critiques à travers le monde entier et est considérée comme la première des infractions qui ont marqué la présidence de Léopold Sédar Senghor. Encore, on estime que le soutien de la France pour son administration était une explication de ce geste fait dans l’impunité. Après l’emprisonnement de Mamadou Dia, Senghor commence à faire preuve de caractéristiques d’un dictateur. En 1966, il parvient à établir un système de parti unique au Sénégal, dans lequel l’Union Progressiste Sénégalais est le seul parti politique autorisé.

Cette décision représentait une véritable attaque sur la démocratie du pays.

Avec Abdoulaye Wade au pouvoir, et cette culture de soutien français pour les leaders sénégalais toujours en place, les choses n’ont pas changé de façon fondamentale. En 2002, devenu président,Wade qui avait été arrêté en 1993 et soupçonné d’avoir été impliqué dans l’assassinat de l’avocat et membre du conseil constitutionnel, Babacar Sèye, libère les meurtriers. Était-il vraiment impliqué dans cet assassinat?

Il faudrait dire que Wade, tout comme ses prédécesseurs, jouissait aussi du soutien de la France.

D’ailleurs, cette amitié néocoloniale se reflétait dans sa décision de retourner en France et de s’installer à Versailles après sa présidence. Wade a aussi changé le mandat présidentiel de sept ans à cinq ans et l’a changé encore de cinq ans à sept ans. Wade a voulu poser sa candidature aux élections

présidentielles en 2012, alors que la constitution permettait seulement deux mandats. Ce désir de

prolonger son pouvoir a provoqué des manifestations particulièrement parmi les jeunes qui s’opposaient à une révision de la constitution.

Au fil des années, toutes ces infractions et ces menaces à la démocratie, mêlées à la mauvaise gouvernance et aux problèmes sociaux comme le chômage, ont créé un sentiment de désespoir parmi la population, particulièrement parmi les jeunes. Ce sentiment de désespoir a produit plusieurs mouvements et des manifestations qui ont pour but d’apporter des changements positifs et des réformes dans la gouvernance du pays. C’est ainsi que fut créée en 2011, pendant la campagne électorale, le mouvement Y’en a marre. Il s’agit d’un mouvement au Sénégal fondé par Cheikh Fadel Barro et Aliou Sané, tous les

(34)

33 deux journalistes, et un groupe de hip-hop Keur Gui avec des rappeurs célèbres, Thiat, Kilifeu et Fou Malade. Ce mouvement citoyen qui est né pour revendiquer une cessation des coupures d'électricité, aujourd’hui a pour but d’inciter des changements dans la gouvernance en renouvelant le personnel politique au pouvoir et aussi de lutter contre la corruption. Ce mouvement est très populaire parmi les jeunes qui sont les plus touchés par les conséquences de la corruption et le chômage. La jeunesse en a marre! Depuis son avènement, le groupe s’oppose carrément à tout geste qu’il juge inconstitutionnel. Le groupe a condamné et manifesté contre l’abus du pouvoir politique pour éliminer les candidats Khalifa Sall et Karim Wade aux élections présidentielles du 24 février 2019. Ce groupe citoyen reste sur place et veille sur la démocratie au Sénégal.

Le plan économique

Le capitalisme néolibéral comme contexte pour la mondialisation

Pour aborder les problèmes économiques de la mondialisation au Sénégal, nous allons étudier les problèmes associés aux accords de pêche entre le Sénégal et l’Union Européenne. Il s’agit ici de la décision du Sénégal de donner l’autorisation de pêcher dans les eaux sénégalaises à l’Union Européenne en échange d’argent. Néanmoins, il serait important de parler brièvement du capitalisme néolibéral, qui est le système qui enveloppe la mondialisation elle-même. Cet accord de pêche dont on parle n’est pas du tout un cas isolé. Cela fait partie du capitalisme néolibéral qui privilégie la privatisation et les marchés libres afin de maximiser les profits. Ce système va encore plus loin dans la mesure où il s’agit d’utiliser le gouvernement pour s’emparer d’une position de contrôle économiquement avantageuse. Par exemple lorsque le gouvernement donne à une entité l’autonomie ou le pouvoir dans un marché donné. C’est ainsi que dans le cadre de la mondialisation en Afrique, les ‘‘gatekeeper states,’’ comme les appelle Frederick Cooper, ‘‘vendent’’ les ressources naturelles de leurs pays aux pays développés. Comme le constate Phyllis Taoua dans son livre African Freedom:How Africa Responded to Independence :

It was striking for me to discover that the road that links Niamey and Agadez, which runs from Niger’s uranium mines all the way to the port

Références

Documents relatifs

Aussi, les exigences professionnelles du Directeur de l’Institut Français du Gabon et même du responsable de la communication de « La Boutique Satellite » ne nous ont

Nous avons notamment distingué que les pays francophones avaient deux caractéristiques majeures pouvant expliquer en partie leur retard sur le plan éducatif par rapport aux pays

Si pour les pays du Nord ces évolutions correspondent à la mise en œuvre de politiques publiques adoptées dans le cadre de décisions souveraines, pour plusieurs pays africains,

Selon une étude de l’Alliance des ligues francophones africaines et méditerranéennes contre le cancer (ALIAM), la mortalité par cancer est proportionnellement plus

En résumé, la réforme fiscale forestière de 1994 du Cameroun, faite sous l’instigation de la Banque mondiale, n’a permis qu’une légère mobilisation des recettes fiscales

4 Sur les effets des politiques de libéralisation, Banque mondiale, 1989 ; Banque mondiale-PNUD, 1989 ; Nash, 1990 ; Elbadawi, 1992 ; Michaely, Papageorgiou & Choski, 1991 ;

consultations leS plans ctuals.

Los .discussions Su&cit^Qs lors deces consultations sont ,caracteriseos par un echange do vuo, large et direct, entro lo personnel du Ponds et les fonctionnaires rosponsablos