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Note sur quelques fulgurites observées dans les hautes Alpes
BRUN, Albert
BRUN, Albert. Note sur quelques fulgurites observées dans les hautes Alpes. Archives des sciences physiques et naturelles, 1884, vol. 3e période, t. 12, p. 610-614
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SOCIETE DE PHYSIQUESr1ance du 20 1iove1nbre.
Alb. Brun. Fulgurites - C. Soret. Concentration de deux parties d1 une meme dissoluuon soumises 4 des températures d1fJ'erentes. - P. de Loriol Echino· , dermes de l'Ile Maurice - H. Fol. Traité d'ana.tom1e, - Scb1tT. Production de sucre au contact de la sah ve.
�f. Albe11t BRUN hl une Note sur quelques
{ttlgurites
observ�es dans les hautes Alpes.
Communiqué à la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève.
Source gallica.bnf.fr Bibliotl1èque nationale de France
L'examen des effets de la foudre a toujours présenté de l'intérêt, et l'on s'en est occupé déjà à divers points de vue.
Ayant eu, dans différentes hautes ascensions dans les Al-
pes, l'occasion d'observer des portions de roches vitrifiées, dont la fusion ne pouvait vraisemblablement être attribuée qu'à l'action de l'éclair, M. Brun en fit une étude attentive, et voici les résultats de ce travail
Comme matériaux il a eu à sa disposition les fulgurites trouvées par MM. Thury et Wanner (de Genève), sur les sommets suivants La Ruinette (3879m), le Mont-Blanc de Seillon (3871n), La Pointe L'Évêque (3738m): tous trois situés dans le massif de l'Otemma, en Valais.
Puis celles qu'il avait récoltées lui-même au Weiss-
mis (4031 m), au Rympfischhorn (4203"1) et à la Pointe de Rosa Blanche (3348m).
M. le prof. Favre possède un fort bel échantillon trouvé au
Mont-Blanc, sur l'arête des Bosses. M. W. Maunoir en a rap- porté un du sommet du Cervin (4484m).
M. Charlet-Straton, de Chamounix, a aussi observé des globules vitrifiés de grandes dimensions, provenant de l'arête des Courtes, près de l'Aiguille Verte (chaîne du Mont- Blanc).
Toutes ces fulgurites se sont trouvées sur les rochers du sommet même de la montagne ou quelquefois, comme au Mont-Blanc île Seillon, sur l'arête, à quelques mètres au-
dessous.
C'est tantôt une roche déjà brisée et fendue qui a été vitri-
fiée, tantôt une petite région d'un bloc énorme sans fissures.
Souvent on remarque une surface fondue dans une dé- pression du rocher, alors que des pointes aigués, voisines de 2-3 mètres ont été épargnées.
Ce n'est pas toujours sur les arêtes vives de la roche qu'a lieu sa fusion par le coup de foudre, mais quelquefois sur le
milieu de larges surfaces planes, comme on le voit au Rymp- flschhorn et au Mont-Blanc de Seillon.
L'apparence qu'offre la région fondue est assez variable.
Tantôt ce sont de simples perles de '/s de millimètre de dia-
mètre environ, accolées et couvrant quelquescentimètres car-
rés de la roche; tantôt des demi-sphères de plusieurs millim.
de diamètre, vides à l'intérieur. Quelquefois on voit des traî- nées vitrifiées, sinueuses, longues de 10 à 12 centim., large de
1 à 1 et se réunissant en un centre commun, comme cela
a été observé au Mont-Blanc de Seillon.
Sur l'arête de la même montagne, il se trouvait, au milieu d'une surface plane d'un bloc de gneiss, une dépression cir- culaire de 8am de diamètre, profonde de 1 centim., et à pa-
rois complètement vitrifiées.
A la Ruinette, un galet qui faisait saillie en dehors du
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a été troué comme par un projectile de fusil, et
les parois du trou ont été parfaitement fondues; cette forme
de fulgurite aurait de l'analogie avec les tubes vitrifiés trouvés par M. le prof. Chaix dans les plaines du Ha- novre.
Dans tous les cas l'épaisseur du verre n'est jamais bien grande
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millim. au plus, et la surface fondue atteint rare-rement de grandes dimensions. L'une des plus grandes ob-
servées se trouvait sur une pierre de la grosseur du poing, dont toutes les petites saillies de la surface avaient été vitri-
fiées, les portions en dépression ayant été épargnées.
Il s'en suit que le poids de la matière fondue n'excède guère gramme 0,1 à 0,5. Une fulgurite très belle de la Rui-
nette ne pesait que gramme 0,122. •
Il ne semble pas que dans les cas observés la foudre ait
brisé la roche, car dans tous les échantillons examinés sur
place, les cassures de la pierre n'étaient que des fissures d'érosion, du reste MM. Thury et Wanner ont observé que certaines pierres des steinmann de la Ruinette et de la
Pointe de l'Évêque avaient été fondues, mais non dépla- cées.
La masse vitrifiée a tous les caractères du verre résultant
de la fusion du minéral sous-jacent. Elle est brillante, mame- lonnée, bulleuse, à cassure conchoïdale, plus ou moins colo-
rée et transparente. La couleur varie du noir foncé au blanc
Le steinmann est une petite tourelle faite en pierres sèches, érigée par le premier ascensionniste pour marquer le sommet.
laiteux en passant par le brun, et dépend du minéral qui a été fondu. Les fulgurites au Rympfischhorn sont d'un beau
noir, .car la roche est riche en amphibole actinote, celles de la Ruinette sont brun pâle, la roche étant un gneiss chlori-
teux où le feldstpath prédomine.
La nature boursouflée de la fulgurite provient de ce que,
au moment du coup de foudre, la pierre était humide. Par
l'analyse on ne peut, il est vrai, trouver aucune trace d'eau
dans la masse fondue, mais la substance brute en fournit
assez pour expliquer le boursouflement du
verre'.
Examinée au microscope, la fulgurite présente outre les pores vides dus à la dilatation de la vapeur d'eau, un grand nombre d'inclusions solides sans formes bien définies et irré- gulièrement réparties dans une masse vitreuse homogène.
Ces inclusions ne sont que des débris de minéraux arrachés et n'ayant pas eu le temps de fondre.
Étudiée à la lumière polarisée, cette masse n'est pas
biréfringente (tandis que les inclusions le sont, quartz, feldspath, etc.), elle n'a donc pas le caractère du
verre
trempé.
Si l'on trempe une fulgurite dans l'acide fluorhydrique étendu, il se forme des figures de corrosion représentant exactement des lignes parallèles aux courbes de niveau géo-
graphique des petits mamelons.
La densité apparente (c'est-à-dire les pores compris) de la
masse fondue est de 2,25.
Il était intéressant de faire une analyse chimique complète d'une fulgurlte pour savoir si, dans l'acte de cette fusion ins- tantanée, sous l'influence d'un courant électrique mtense, il ne se passe pas une réaction chimique spéciale.
L'analysefut faite en utilisant un échantillondu Mont Blanc de Seillon, sur gneiss d'Arolla (chlorite, oligoclase, orthose,
quartz).
Elle a donné
1 Cette eau est répartie dans les leptoclases en proportion de 0,533 à 2 °/oo (voir Écho des Alpes, 1884 Note sur l'érosion).
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6t 4.
SOCIÉTÉ DE PHYSIQUESilice . . . 65, 73 Alumine . . . 19,59 Peroxyde de fer . . . 5,57
Chaux . . . 3,03