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Mieux comprendre l’autonomie du patient

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Academic year: 2022

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Reference

Mieux comprendre l'autonomie du patient

HURST, Samia

HURST, Samia. Mieux comprendre l'autonomie du patient. Revue médicale suisse , 2013, vol.

377, p. 594

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:84874

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594 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 13 mars 2013

actualité, info

«Mais alors, comment va-t-on dire non aux familles ?» Depuis l’entrée en vigueur du nouveau Code civil en janvier 2013, certains proches ont un pouvoir de représentation automatique pour les décisions médicales en cas d’incapacité de discernement du pa­

tient.1

C’est un grand changement et il soulève quelques craintes. On en croise plusieurs de par les couloirs d’un hôpital : en vrac, celle que ces proches soient investis d’un pouvoir qui évincerait les professionnels de la santé, que ces décisions soient lourdes et délé­

tères pour eux,2 qu’ils soient incompétents, exigent des choses impossibles ou dérai­

sonnables. A la base de tout cela, la même idée : les proches pourraient tout décider pour le patient. Mais en fait ce n’est pas du tout ce qui est prévu. Tout comme le patient lorsqu’il est capable de discernement, les proches auront le droit de consentir – ou non – aux interventions médicales proposées.

Pas moins, mais pas plus non plus. Ils n’au­

ront pas le droit d’exiger des interventions non indiquées, une prise en charge dans telle ou telle unité, ou des ressources infinies.

Comment dire non aux familles ? Avec dif­

ficulté, certes, comme dans tout désaccord entre personnes humaines normalement cons tituées.3 Avec difficulté, oui, mais de bon droit. Pourquoi avons­nous du mal à le voir ? Peut­être parce que nous avons aussi parfois du mal à dessiner les contours de l’autonomie qui est ici représentée : celle du patient.

Car en reconnaissant l’importance de l’au­

tonomie du patient dans la médecine, on n’a pas toujours reconnu ce qu’elle pouvait avoir de complexe. Premièrement, même si la liber té nous évoque l’absence de limites, au­

cune de ses variantes n’est réellement illimi­

tée. La liberté d’action au sens le plus large s’arrête, dit­on toujours, où commence celle des autres. C’est le principe du tort. Un pa­

tient ne pourra pas s’attendre à mon aide pour assassiner sa femme : c’est évident. L’auto­

nomie qui importe dans la pratique clinique n’est pas une liberté totale, ni même la liberté dans les limites du principe du tort. C’est la souveraineté sur notre propre corps. Le droit de dire non à une intrusion dans notre sphère personnelle lorsque l’on rejette, en connais­

sance de cause, son bien­fondé. Ce droit est crucial, mais n’inclut pas celui d’exiger des interventions. Bien sûr, il arrive qu’un patient

demande des choses qui restent raisonna­

bles et dans ces cas on négocie.4 Il en ira de même avec ses proches.

Cette forme de l’autonomie n’est pas non plus un devoir de décider dans une splen­

dide solitude. Tenir compte des avis de ceux qui nous entourent, connaître les recomman­

dations des professionnels, rien de cela n’est contraire à l’exercice de notre liberté. Plutôt que de prendre une posture de parfaite neu­

tralité, respecter l’autonomie des patients exige quelque chose de plus subtil : que leur avis nous importe assez visiblement pour qu’ils puissent avoir la confiance de nous dire non. Difficile exercice. Mais leur refuser nos conseils serait, devant une décision com­

pliquée, une bien étrange manière de les rendre plus libres. Les familles de nos patients vont elles aussi continuer d’avoir besoin de notre avis. Sans doute encore davantage.

Exercer la liberté d’autrui ? Cela donnerait le vertige. Il s’agira en fait davantage de donner voix à ce qu’il aurait voulu, de fonder une dé­

cision sur la vision qu’il avait de son propre intérêt. Oui, cet exercice peut clairement être soutenu par une aide. Il est difficile lui aussi, et beaucoup seront débutants. Comment aider les familles ? Voilà une question bien différente… On devrait la poser aussi avec les patients : comment les aider à être auto- nomes ? Tout un programme, et qui n’est pas si paradoxal que ça.

1 Conseil d’éthique clinique des HUG. Rôle des proches dans les décisions thérapeutiques 2012. Disponible ici : http://ethique­clinique.hug­ge.ch/_library/pdf/Demande _des_proches_­_2012.pdf

2 Wendler D, Rid A. Systematic review : The effect on surrogates of making treatment decisions for others.

Ann Intern Med 2011;154:336­46.

3 Hurst S, Hull SC, DuVal G, Danis M. How physicians face ethical difficulties : A qualitative analysis. J Med Ethics 2005;31:7­14.

4 Ray S, Hurst S, Perrier A. Que faire en cas de désac­

cord entre le médecin et le patient : quelques balises juridiques et éthiques. Rev Med Suisse 2008;4:2538­

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carte blanche

Pr Samia Hurst Médecin et bioéthicienne Institut d’éthique biomédicale Faculté de médecine CMU, 1211 Genève 4 samia.hurst@unige.ch

Mieux comprendre l’autonomie du patient Tension artérielle

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