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Mysimba, un coupe-faim américain et la logique du marché unique européen

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Revue Médicale Suisse

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15 avril 2015

actualité, info

en marge

C’est une histoire éclairante, une histoire à la fois médicamenteuse et politique. Elle concerne le Mysimba : une association inédite de naltrexone (aide au maintien de l’abstinence chez les malades de l’alcool) et de bupropion (aide au sevrage tabagique). Mysimba est commercialisé par le laboratoire américain Orexigen Therapeutics et proposé dans certaines formes d’obésité et du surpoids. Mysimba

qui, après avoir séduit les Etats- Unis (sous le nom de Contrave), s’approche à grande vitesse du Vieux Continent. Autorisée en septembre dernier (après bien des tâtonnements) par la Food and Drug Administration (FDA), l’association naltrexone-bupropion vient de recevoir sa carte verte pour une exploitation dans le vaste espace régi par la toute-puissante Agence européenne du médica- ment (EMA).

En décembre dernier, l’EMA emboîtait le pas à la FDA.1 Il s’agissait alors d’un feu vert qui devait encore être approuvé par la Commission européenne avant une commercialisation effective dans chaque Etat membre de l’Union. Une série de précautions entourait la présentation du dossier à Bruxelles : Mysimba ne serait

disponible que sur prescription médicale. Il devrait être réservé à des adultes obèses ou en surpoids, ayant (de surcroît) un (ou plusieurs) autres facteurs de risque (hyper- tension artérielle, diabète de type 2 ou dyslipidémie). L’Agence européenne faisait valoir les quatre études contre placebo fournies par le fabricant, études qui montraient des baisses de poids «cliniquement pertinentes». Elle recommandait

en outre une éva- luation après seize semaines de traite- ment – ainsi que l’arrêt du traite- ment si le patient n’était pas parvenu, alors, à perdre au moins 5% de son poids de départ.

La liste de ses effets indésirables potentiels n’était pas cachée : des troubles gastro-intestinaux et d’autres «liés au système nerveux central». Sans oublier de préciser :

«des incertitudes subsistent en ce qui concerne les résultats cardio- vasculaires à long terme». Pour autant, les résultats intermédiaires d’un essai clinique étaient «rassu- rants en ce qui concerne les risques de pathologies cardiovasculaires graves».

Tout cela ne fut pas sans déclencher quelques épines irritatives. En France, le mensuel spécialisé Prescrire parla de «régression majeure» quant à la sécurité des consommateurs. Et tous ceux qui (en France ou ailleurs) suivent

depuis une ou deux décennies le chapitre «coupe-faim» des affaires de santé publique ne manquèrent de partager ce commentaire.

Prescrire rappela à cette occasion quelques éléments oubliés du passé (assez peu rassurants) du bupropion dont la structure est voisine de celle des dérivés amphé- taminiques. Le mensuel rappela aussi les retraits européens tardifs (il y a une quinzaine d’années) des AMM de plusieurs anorexigènes (clobenzorex, dexfenfluramine, fenfluramine, fenproporex, etc.) dont l’usage n’avait cessé de démontrer les dangers.

C’est là un chapitre riche en souvenirs médiatiques et régle- mentaires : Acomplia (rimonabant, Sanofi) retiré du marché en 2008 en raison de ses effets secondaires ; Sibutral (sibutramine, Abbott), une amphétamine-like anorexigène disparue l’année suivante du marché européen, également en raison d’effets secondaires ; sans parler du trop célèbre Mediator (benfluorex, Servier).

C’était en décembre 2014. Inquiet des dangers potentiels inhérents à la commercialisation de cette spé cialité, le gouvernement fran- çais avait aussitôt (via l’Agence nationale française de sécurité du médicament (Ansm)) demandé un réexamen par Bruxelles du dossier de ce coupe-faim. Elle n’avait été suivie que par l’Irlande, l’Autriche et l’Italie. Trop peu nombreux. Il y a quelques jours la Commission européenne imposait son feu vert définitif. «L’autorisa- tion de mise sur le marché a fina- lement été octroyée jeudi au niveau européen» expliquait, il y a quel- ques jours à la presse, le Pr Joseph Emmerich, l’un des responsables de l’Ansm.

Le Pr Emmerich ajoutait qu’un autre médicament anti-obésité

«plus efficace» (Victoza, liraglu- tide), déjà commercialisé dans le traitement du diabète, avait reçu le feu vert de l’EMA pour sa com- mercialisation en Europe. Et il annonçait, concernant le Mysimba

«un encadrement précis». «On va notamment discuter des conditions de prescription, surveiller le chiffre des ventes et informer les profes- sionnels de santé» précisait-il.

Ce n’était pas suffisant. Le ton vient de monter d’un cran. Aujour- d’hui, c’est le Dr Dominique Martin, (directeur général de l’Ansm) qui prend la parole, dans les colonnes du Monde (daté du 8

avril). Que dit-il ?

Que la France «s’est fermement opposée à la mise sur le marché du Mysimba durant toute l’ins- truction de ce dossier par le comité des médicaments à usage humain de l’Agence européenne du médi- cament». «Nous avons voté contre l’octroi d’une AMM pour le Mysimba parce que nous consi- dérons que le rapport entre les bénéfices et les risques de ce pro- duit est défavorable. Nous avons souhaité, avec l’Irlande, souligner notre désaccord par un avis écrit exprimant notre divergence de point de vue. Nous avons en sus fait appel de ce vote auprès du comité permanent au sein de la Commission européenne. Seuls deux pays ont voté dans le même sens que la France.»

Et ensuite ? «Le recours en appel devant l’instance ad hoc de la Commission ayant été rejeté, et la

décision étant prise à la majorité des Etats membres de l’Union, ce produit est aujourd’hui susceptible d’arriver sur le marché national français, même si l’Ansm n’a pas encore été informée des intentions du laboratoire titulaire de l’auto- risation de mise sur le marché.» En clair, la firme américaine Orexigen Therapeutics fera comme elle l’entendra – étant bien entendu que «la logique du marché unique veut que les autorisations prises au niveau des institutions européennes – autorisations centralisées – soient valides sur la totalité du territoire de l’Union européenne».

La France a perdu mais Paris persiste : «Concernant le Mysimba, l’Ansm persiste à considérer que, à ce jour, le rapport bénéfices/

risques est négatif en raison, d’une part, d’une efficacité limitée sur la perte de poids et, d’autre

Mysimba, un coupe-faim américain et la logique du marché unique européen

L’informatique au cabinet : et le patient dans tout cela ?

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Service de médecine de premier recours

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Il existe de sérieuses incertitudes sur les risques potentiels cardiovas- culaires et neuropsychiatriques

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part, d’une tolérance médiocre avec près d’un patient sur deux qui arrête le traitement. Il existe, par ailleurs, de sérieuses incerti- tudes sur les risques potentiels cardiovasculaires et neuropsy- chiatriques. Nous continuons à penser que la décision prise anti- cipe des résultats à venir, qui seuls auraient permis d’éclairer définitivement les membres du comité.»

Et puis, pour finir : «L’Ansm est particulièrement préoccupée quant à l’utilisation de ce type de pro- duits, dérivés des amphétamines, qui pourraient être assimilés à la catégorie des coupe-faim. Une telle assimilation pourrait con duire à des pratiques de mésusage dé- bordant le cadre de l’autorisation, ce qui aurait pour conséquence d’aggraver les risques. L’Ansm reste donc vigilante et fera tout ce qui est juridiquement possible et qui relève de sa compétence, que ce soit dans le domaine de l’auto- risation et de son encadrement

comme dans celui de la surveil- lance, pour limiter les risques auxquels pourraient être exposés les patients.»

On peut distinguer ici le spectre, toujours actif en France, du Mediator. Certains verront aussi là, en France ou ailleurs, une nouvelle occasion, en or, pour applaudir (ou maudire) l’Union Européenne.

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

revue de presse

Les pharmaciens zurichois pourront bientôt vacciner

Sera-t-il possible un jour d’aller se faire vacciner à la pharmacie ? Zu- rich pourrait bien montrer la voie dès cet automne puisque la Direction cantonale de la santé (GDZ) a sou- mis un projet dans ce sens au Con- seil d’Etat, comme l’ont annoncé le Tages-Anzeiger et la Neue Zürcher Zeitung. Miracle, ni les partis ni les médecins n’ont trouvé à redire à cette proposition, qui a donc de fortes chances d’aboutir. Zurich se- rait ainsi le premier canton à aller aussi loin en Suisse.

La GDZ justifie cette nouvelle com- pétence des pharmaciens par la volonté d’offrir une solution simple pour accroître le taux de vaccination dans la population, en particulier pour les «jeunes et les pendulaires».

Le projet prévoit des conditions strictes. Ainsi, seules les personnes en bonne santé et âgées de 16 ans au moins pourront se faire vacciner à la pharmacie. En outre, l’autorisation n’est accordée qu’aux pharmaciens qui ont suivi des cours postgrades spécifiques ainsi qu’une formation continue régulière. Enfin, elle est li- mitée aux vaccins contre la grippe, l’encéphalite à tiques et les hépatites A et B.

Le projet zurichois s’inscrit dans un mouvement plus large au niveau na- tional. «L’Office fédéral de la santé

publique a reconnu que les cam- pagnes d’information ne suffisent pas lorsqu’il s’agit de toucher les personnes en bonne santé, explique Marcel Mesnil, secrétaire général de la Société suisse des pharma- ciens (PharmaSuisse). Il faut dispo- ser de structures plus simples que les cabinets médicaux, qui sont ac- cessibles uniquement sur rendez- vous. Les pharmacies offrent préci- sément de telles structures, avec du personnel compétent et disponible en tout temps.»

De son côté, la Fédération des mé- decins suisses déclare «suivre avec intérêt le projet zurichois, qui con- vainc par des exigences élevées posées aux pharmaciens» et par le fait qu’il ne vise pas une compétence générale de vaccination. «Laisser aux pharmaciens la possibilité de vacciner dans un cadre clairement défini contribue à la recherche de solutions nouvelles et intéressantes pour la collaboration interprofession- nelle», ajoute-t-elle.

Vice-président de l’Association des médecins genevois, Didier Châtelain réagit avec prudence : «Il ne faut pas banaliser les vaccins et leurs éven- tuels effets secondaires. Le méde- cin a l’avantage de connaître ses patients.» Didier Châtelain, qui est aussi président de l’Association ge- nevoise des médecins internistes et généralistes, souligne également que le contexte en Suisse romande est différent de certains cantons aléma- niques où les médecins ont le droit de vendre des médicaments. «Il n’y a

pas lieu de changer ici un système qui fonctionne bien. Il faut œuvrer plutôt en faveur d’un approfondisse- ment de la collaboration avec les pharmaciens.» (…)

Laurent Aubert Tribune de Genève des 4, 5 et 6 avril

2015

Le CHUV lance un projet pilote d’unité de dégrise- ment

«La plupart des jeunes qui arrivent aux urgences ne sont pas dans le coma, mais dans un état d’alcooli- sation aiguë sans perte de cons- cience», explique le professeur Jean- Bernard Daeppen, chef du Service d’alcoologie du CHUV, à Lausanne.

Depuis la semaine dernière, le centre hospitalier dispose d’une unité de dégrisement, soit quatre lits gérés par le service d’alcoologie.

Ces lits sont occupés par des per- sonnes qui doivent être surveillées le temps de dégriser, mais n’exigent pas un recours au plateau technique des urgences. Du jeudi soir au di- manche, une infirmière et une aide- infirmière ainsi qu’une personne char- gée de la sécurité sont présentes de 22 h 00 à 14 h00 le lendemain. Un médecin assure le piquet.

L’unité de dégrisement fonctionne avec le concours des ambulanciers, de la police et de l’Equipe mobile d’urgences sociales (EMUS). Ce sont

eux qui acheminent les patients après un premier tri sur des critères établis. Certains, souffrant de plaies, d’entorses ou autre, font un crochet par les urgences.

Ce projet pilote, qui n’a pas son équi- valent en Suisse romande, sera éva- lué au terme d’une phase test de neuf mois. C’est une première suisse sous cette forme.

La stratégie de l’unité de dégrise- ment est double, explique le profes- seur Daeppen : d’une part soulager un peu les urgences, d’autre part faire de la prévention. L’unité de dé- grisement accueillera surtout des jeunes. S’ils ne représentent qu’une part des 2000 alcoolisations aiguës qui aboutissent chaque année au CHUV, le week-end, ils sont surre- présentés.

Le lendemain qui suit leur arrivée, un médecin, une infirmière ou un psy- chologue entame la discussion pour les interroger autour de leurs per- ceptions de leur consommation d’al- cool et pour les aider à se projeter dans l’avenir. «Nous avons une in- fluence de prévention dans un cer- tain nombre de cas», estime le chef du Service d’alcoologie du CHUV.

Dans tous les cas, une petite lettre est adressée au médecin de famille.

(…)

Claudine Dubois Le Courrier du 9 avril 2015

1 Voir le feu vert de l’European Medicines Agency daté du 18 décembre 2014 : www.ema.europa.eu/docs/en_GB/

document_library/Summary_of_opinion _-_Initial_authorisation/human/0036 87/WC500179589.pdf

Ici le communiqué de presse qui accom- pagnait ce feu vert : www.ema.europa.

eu/ema/index.jsp?curl=pages/news_

and_events/news/2014/12/news_

detail_002240.jsp&mid=WC0b01ac 058004d 5c1

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