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Les papyrus de Genève. Volume 1. : Textes documentaires.

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PAPYRUS DE GENÈVE

PREMIER VOLUME 2

E

ÉDITION

No, 1-10, 12-44,66-78,80-81 TEXTES DOCUMENTAIRES

publiés par

PAUL SCHUBERT

et

ISABELLE JORNOT

avec des contributions de Claudia Wick

GENÈVE

BmLIoTHÈQUE PUBLIQUE ET UNIVERSITAIRE 2002

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PREMIER VOLUME 2

E

ÉDITION

No. 1-10,12-44,66-78,80-81 TEXTES DOCUMENTAIRES

publiés par

PAUL SCHUBERT

et

ISABELLE JORNOT

avec des contributions de

Claudia Wick

BIBLIOTHÈQUE PUBLIQUE ET UNIVERSITAIRE Ville de Genève

Département des affaires culturelles

2002

(10)

- Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique - Société Académique de Genève

- Fonds Rapin de l'État de Genève

- Commission des publications de la Faculté des lettres et sciences humaines de l'Université de Neuchâtel

Collection «Les papyrus de Genève»

Vol. 2 publié par Claude Wehrli (1986) 161 pp.

Vol. 3 publié par Paul Schubert (1996) 196 pp.

© Bibliothèque Publique et Universitaire de Genève, 2002 Parc des Bastions

1211 Genève 4 Suisse

Tél. 41 224182800 Fax 41 224182801

Maquette et mise en page: Compotronic S.A., BoudrylNE Impression: Médecine & Hygiène, Genève

ISBN 2-88220-021-8

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Si l'on voulait paraphraser l'avant-propos de chacun des trois premiers volumes de la série, on pourrait dire que diverses circonstances, dont le détail n'intéresserait personne, ont interrompu trop longtemps la réédition des Papyrus de Genève.1 Nous nous contenterons de rendre un hommage particu- lier à John Rea qui, en 1987 déjà, réclamait à un jeune étudiant genevois la réa- lisation de l'ouvrage que voici. Le premier éditeur, Jules Nicole, a fait œuvre de pionnier dans sa discipline au moment où il a mis à la disposition du monde savant le résultat de ses travaux, sous forme de trois fascicules s'échelonnant entre les années 1896 et 1906. Karl Preisendanz a ainsi pu affirmer: «Den zeit- lichen Primat als papyrologische Forschungsstatte darf Genf für sich beanspru- chen ».2 À l'époque où Nicole a produit son volume, les publications papyrolo- giques étaient très peu nombreuses et par conséquent, les textes qui auraient pu offrir des parallèles manquaient le plus souvent. Quant aux instruments auxi- liaires - dictionnaires, lexiques, recueils divers, pour ne pas parler des res- sources électroniques -, ils faisaient cruellement défaut. Si nécessaire que soit la nouvelle édition de ce volume, elle ne remet donc pas en question les mérites de Jules Nicole. Ce ne sont pas moins de dix-sept papyrus présentés ici qui ont trouvé leur place dans la Chrestomathie de Mitteis et Wilcken. Ce dernier ne s'est d'ailleurs pas contenté de reprendre des textes genevois dans son antholo- gie: peu de temps après la parution des Papyrus de Genève, il a examiné cha- cun des documents à partir de l'original, proposant d'innombrables corrections qui ont naturellement facilité le travail pour la nouvelle édition.3

Au moment de la conception de ce projet, nous avons d'emblée renoncé à inclure les textes des archives d'Abinnaeus, lesquels ont fait l'objet d'une reprise comprenant également les papyrus déposés à Londres.4 On peut néanmoins signaler la présence d'un texte (80) que les éditeurs n'avaient pas identifié comme faisant partie du lot, mais que certains indices nous inciteraient mainte- nant à placer malgré tout dans ces archives.

La collection papyrologique genevoise s'est formée à partir de deux sous-ensembles: d'une part la collection privée de Jules Nicole, léguée à la Bibliothèque Publique et Universitaire peu avant la mort du savant, et d'autre

1 Cf. P.Gen. 1 (2" fascicule, 1900), p. 7; P.Gen. II (1986), p. 1; P.Gen. III (1996), p. 1. Les rai- sons de cette petite manie sont à chaque fois différentes, et nous n'allons pas en déflorer ici le mystère.

2 Cf. K. Preisendanz, Papyrusfunde und Papyrusforschung 234.

3 Cf. U. Wilcken, AP F 3 (1906) 368-404; toutes ces corrections ont été enregistrées dans le pre- mier volume de la Berichtigungsliste.

4 Cf. RoI. BelIN. Martin/E.G. Thrner/D. van Berchem, The Abinnaeus Archive. Papers of a Roman Officer in the Reign of Constantius II.

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part les papyrus achetés directement par la BPU, par l'entremise de Nicole également. C'est la raison pour laquelle les pièces présentées ici comportent des numéros d'inventaire précédés de la mention «P.Nicole », respectivement

«P.Gen.». Dans les deux cas, Nicole a recouru pour ses achats à un intermé- diaire, le célèbre égyptologue Édouard Naville, avec lequel il entretenait une solide amitié.5 Ces achats, réalisés vers la fin du XIXe siècle, se faisaient au moment même où d'autres institutions (notamment le British Museum de Londres, les Konigliche Museen de Berlin et le Musée du Louvre à Paris) acquéraient des papyrus en quantités nettement supérieures à ce que les Genevois pouvaient se permettre. On ne sera par conséquent pas surpris de constater des liens nombreux et étroits entre les documents publiés par Nicole et ceux produits par ses collègues allemands et britanniques à la même époque.

Il faut relever tout particulièrement les papyrus en provenance de Socnopéonèse, datant de la période romaine.6

Chaque texte présenté ici a été révisé en détail d'après l'original et des planches photographiques de bonne qualité. Conformément aux exigences actuelles, nous avons rédigé une brève description physique des papyrus, une introduction substantielle, et nous avons assorti les textes d'un commentaire dans la mesure des besoins. Nous avons en outre abouti à un certain nombre de résultats concrets, dont nous n'énumérerons que les plus importants:

- 4 nous livre le nom d'un nouveau stratège, méconnu jusqu'à ce jour.

8 et 8bis, dans leur nouvelle interprétation, illustrent les rapports liant de riches propriétaires et leurs débiteurs.

12,66,67,68,69 et 70 constituent un dossier émanant des archives notariales de Philadelphie à la fin du Ive siècle ap. J.-c. Ces docu- ments ont été traités de manière globale.

Le déchiffrement d'un passage important de 13 a été corrigé.

21 est un contrat de mariage dont un fragment se trouve à Munich (Universitatsbibliothek), et un autre à Oxford (Bodleian Library).

Pour la première fois, une planche comprenant les trois fragments réunis est publiée.

La date de 22 a été corrigée grâce à l'examen de l'original.

25 appartient aux «Archives d'Eutychidès fils de Sarapion» (appe- lées anciennement «Archives de Sarapion»).

5 Cf V. Martin, La collection de papyrus grecs de la Bibliothèque Publique et Universitaire.

6 Cf E.G. Turner, Greek PapyrP 22; P.Louvre I, p. VI-VII.

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- 41, dans sa nouvelle interprétation, permet d'observer dans le détail la gestion d'un budget dans le village de Philadelphie au début du nI" siècle ap. J.-c.

- 71, 72, 73, 77 et 114 appartiennent à un même dossier, relatif à la gestion de domaines viticoles à Philadelphie appartenant à un riche Alexandrin.

- Il a pu être établi que 74 appartient au célèbre dossier relatif au pro- cès de Drusilla.

- 80, interprété à l'origine comme une liste de lavandière, est en fait une liste destinée à la préparation d'un voyage.

Comme c'est souvent le cas dans les travaux d'équipe, il nous est diffi- cile de préciser dans le détailla part de chacun des éditeurs à la réalisation du présent volume. Isabelle J omot a contribué pendant quatre ans à l'avancement du projet, en qualité d'assistante de recherche; Claudia Wick l'a remplacée durant un congé de quatre mois. Signalons seulement qu'Isabelle Jomot a pro- cédé à une première saisie des textes, qu'elle y a intégré les corrections déjà connues par la Berichtigungsliste, et qu'elle a produit une première traduction de tous les textes. Elle a ensuite rédigé une première version de l'introduction de 3,5,7,12,16,17,20,23,29,35,36,44,66,67,68,69,70 et 75. Enfin, elle a contribué aux corrections de détail dans la phase finale de l'élaboration du livre. Claudia Wick, pour sa part, a rédigé une première version de l'introduc- tion de 1, 7,18,19,32 et 73. Tous ces textes ont été ensuite remaniés par Paul Schubert, qui s'est chargé en outre des autres papyrus que n'ont pas traité ses collaboratrices;

Il nous reste à nous acquitter d'un devoir agréable, celui de remercier les personnes et les instances qui nous ont aidés à réaliser ce projet. Notre recon- naissance s'adresse en premier lieu à la Bibliothèque Publique et Universitaire de Genève, où nous avons trouvé des partenaires aussi serviables qu'efficaces:

Philippe Monnier, qui a assumé la responsabilité des manuscrits à la BPU jus- qu'à sa retraite; Pierre-Alain Baudat, surveillant de la Salle Sénebier; et bien sûr Alain Jacquesson, directeur de la BPU. Les papyrus ont été photographiés par Mme Viviane Siffert (Faculté des lettres, Université de Genève).

Plusieurs collègues nous ont aidés à résoudre des problèmes de détail.

C'est le cas - notamment - d'Hélène Cuvigny (Paris), Jean-Luc Fournet (Strasbourg), Sarah Gaffino (Neuchâtel), Jean Gascou (Strasbourg), Hermann Harrauer (Vienne), Günter Poethke (Berlin), Dominic Rathbone (Londres), Ghislaine Widmer (Genève) et Karl-Theodor Zauzich (Würzburg). Adam Bülow-Jacobsen (CopenhaguelParis) nous a prêté son concours pour résoudre certaines difficultés typographiques.

(14)

Le papyrologue désireux de recourir aux nouvelles technologies de l'in- formation contracte nécessairement une dette énorme envers ceux qui ont mis à la disposition du monde scientifique des outils de travail remarquables, en particulier la Duke Data Bank of Documentary Papyri, le Gesamtverzeichnis der griechischen Papyrusurkunden Agyptens, ainsi que la version électronique de la Bibliographie papyrologique.

Ce projet a été financé en majeure partie par un subside du Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique (subside n° 12-49166.96 et 1213-055446.98), lequel a aussi participé aux frais d'impression du volume.

Nous adressons nos remerciements à toutes les personnes qui contribuent au bon fonctionnement de cette institution. Les frais d'impression ont encore été allégés par de généreuses contributions de la Société Académique de Genève, du Fonds Rapin de l'État de Genève, ainsi que de la Commission des publica- tions de la Faculté des lettres et sciences humaines de l'Université de Neuchâtel. Que ces organismes trouvent ici l'expression de notre profonde reconnaissance; sans leur appui, le présent ouvrage n'aurait pas pu voir le jour.

La mise en page a été réalisée par les soins de Gérard Perrin et Laurence Hirschi (Compotronic, Boudry), et l'impression dirigée par Joseph Cecconi (Médecine & Hygiène, Chêne-Bourg); nous les remercions pour ce beau tra- vail, ainsi que pour le plaisir d'une collaboration idéale. Enfin, Christiane Tripet (Neuchâtel) nous a assistés dans la relecture des épreuves, et Matteo Capponi (Neuchâtel) a vérifié les index.

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1 Lettre officielle de protection 9 juin 213 apo Jo-Co 2 Ordre de paiement II-Ille So apo Jo-c.

3 Plainte pour coups 20 septembre 178

ou 21 septembre 179 apo Jo-Co 4 Pétition d'un métropolite autour de 87 apo Jo-c.

5 Inscription d'un esclave sur une liste 138-144 apo Jo-Co de biens invendus

6 Pétition pour le remboursement d'un prêt 3 mai 146 apo Jo-c.

7 Communication officielle relative aux compétences du clergé

après le 1er octobre 86 apo Jo-Co 8 Contrat de vente de graines de légumes 7 octobre 141 apo Jo-Co

avec paiement anticipé

8bis Contrat de vente de graines de légumes 29 août 140 - 28 août 141 avec paiement anticipé apo Jo-Co

9 Contrat de prêt en graines et en argent 6 mai 252 apo Jo-Co 9bis Contrat de prêt en graines et en argent 6 mai 252 apo Jo-Co 10 Contrat de location pour une partie 8 août 316 apo Jo-c.

de maison

12 Contrat de prêt avec garantie 2 avril 384 apo Jo-Co

13 Reçu de loyer 9 juin 314 apo Jo-Co

14 Pétition VIIVIIe So apo Jo-Co

15 Contrat de vente de blé avec paiement vIIVne So apo Jo-Co anticipé

16 Pétition de cultivateurs empêchés 12 octobre 207 apo Jo-c.

dans leur travail

17 Avis de disparition 2-26 mars, autour de 207 apo Jo-c.

18 Déclaration pour l'epikrisis d'un éphèbe 25 janvier 187 apo Jo-Co 19 Déclaration pour l'epikrisis d'un éphèbe 23 août 148 apo Jo-Co 20 Reçu pour une vente de terrain 18 février 109 avo Jo-c.

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21 Contrat de mariage IIe s. av. J.-C.

22 Contrat de vente d'esclaves juillet/août 38 ap. J.-c.

23 Contrat de vente d'âne 5 février 70 ap. J.-c.

24 Contrat de prêt d'argent, de semence 21 septembre 96 ap. J.-c.

et de blé

25 Reçu de loyer 19 juillet 124 ap. J.-c.

26 Reçu de remboursement de prêt 12 septembre 125 ap. J.-C.

27 Déclaration de propriété 31 juillet 131 ap. J.-C.

28 Plainte pour escroquerie 21 octobre 137 ap. J.-C.

29 Contrat de vente d'une chamelle 30 janvier 137 ap. J.-c.

30 Contrat de vente d'une chamelle 20 juin 142 ap. J.-C.

31 Plainte d'une femme contre son gendre 145/146 ap. J.-c.

32 Certificat pour le sacrifice d'un veau 22 mars 148 ap. J.-c.

33 Déclaration de naissance 9 septembre 155 ap. J.-C.

34 Proposition de bail 18 septembre 156 ap. J.-C.

35 Contrat de vente de deux chameaux 11 novembre 161 ap. J.-c.

à usage militaire

36 Attestation de livraison de tissu de lin 15 novembre 170 ap. J.-c.

pour l'apothéose d'Apis

37 Liste de remplacement pour une liturgie 20 juillet 186 ap. J.-c.

38 Reçu de taxe pour une palmeraie 208/209 ap. J.-C.

d'un domaine public

39 Fragment d'un contrat de location 201-211 ap. J.-C.

pour une plantation d'acacias

40 Reçu pour la taxe sur l'entretien 27 juin 216 ap. J.-c.

des digues

41 Rapport des comptes des dépenses pour après le 26 avril 223 ap. J.-C.

les Anciens du village de Philadelphie

42 Convention des paysans de Philadelphie 25 juillet 224 ap. J.-C.

pour le financement du collège des Anciens

43 Contrat de prêt d'argent et d'orge 28 nov.-27 déc. 227 ap. J.-C.

(17)

44 Demande de parathesis

66 Contrat de location d'un terrain 67 Contrat de location d'un terrain

30 juillet 260 ap. J.-c.

2 mai 374 ap. J.-C.

19 janvier 382 (ou 383) ap. J.-C.

68 Reçu pour le rachat d'une part d'héritage 8 mai 382 ap. J.-c.

69 Contrat de location d'un terrain janvier-avril 386 ap. J.-C.

70 Contrat de location d'un terrain 372/373 ap. J.-c.

71 Registre de vente de vinaigre

me

s. ap. J.-C.

72 Communication relative à un paiement 211 ap. J.-C. (?) pour du vin

73 Contrat d'engagement de musiciens début du

me

siècle ap. J.-C.

74 Lettre privée d'Heraïs à Agrippinus 75 Lettre privée de Sarapammon

à Nepotianus

76 Lettre privée relative à un attelage

139-145 ap. J.-C.

seconde moitié du III" s.

ap. J.-C.

m /

Ive s. ap. J.-c.

77 Reçu pour le prix d'une production de vin 4 juillet 211 ap. J.-C.

78 Proposition de bail 80 Liste pour un voyage

me s.

ap. J.-C. (?) milieu du Ive s. ap. J.-C.

81 Registre de redevances pour de la terre 138-161 ap. J.-C.

à blé

(18)

P.Gen. inv. P.Gen.1 P.Nicole inv. P.Gen.1

1 20 3 12

2 21 5 70

3 23 6 33

4 18 8 69

6 40 9 75

10 16 11 2

11 17 13 68

18 28 15 1

19 27 16 (recto) 81

20 3 19 67

21 4 20 38

21bis 29 25 44

25 5 28 77

27bis 76 30 34

30 6 35 73

32 19 36 (verso) 78

35 7 37 71

40 8 41 41

41 8bis 49 (verso) 72

45 35 50 42

50 9 + 9bis 51 66

54 31 56 26

55 10 63 39

56 13

70 (recto) 14

71 15

101 24

103 37

104 30

105 22

123 32 SIGNES CONVENTIONNELS

130 43 [ 1 = lettres restaurées ou de déchiffrement incertain

130bis 74 () = résolution d'abréviation

201 36 < > = lettres restituées dans le texte

300 25 [] = lettres supprimées par un scribe

400 (verso) 80 { } = lettres superflues supprimées par l'éditeur moderne

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P.Nicole inv. 15 Planche 1

J. Nicole, RA 21 (1893) 227-233

21 x 9,5 cm 9 juin 213 ap. J.-C.

nome arsinoïte

Traduction allemande: W. Schubart, Ein J ahrtausend am Nil n° 41 BLII56;II.261;X77

À l'exception de quatre déchirures verticales, ce papyrus est intégralement conservé. La régularité des déchirures indique que le papyrus était emoulé lorsqu'il a été trouvé. La plus grande lacune affecte le début des lignes 4 à 7 et pose, à la ligne 4, le seul véritable problème d'établissement de texte. Au verso: 10 collages pour réunir ou renforcer deux parties. Pas de marge supérieure ni de marge droite; marge gauche: 1 cm; marge infé- rieure: 9 cm. Au recto comme au verso, l'écriture suit le sens des fibres. L'écriture, une petite cursive régulière, est produite par une main exercée. Le scribe n'a pas utilisé toute la surface disponible sur sa feuille de papyrus. Quelques lettres finales ont des traits prolongés.

Le texte consiste en une lettre de recommandation écrite par Aurelius Theokritos, manifestement un haut fonctionnaire de l'administration, aux stra- tèges du nome arsinoïte, en faveur de (?)-ius Titanianus, vir egregius.

Theokritos enjoint aux stratèges de se comporter correctement envers Titanianus et ses proches, et de défendre ses intérêts. Le motif de cette protec- tion est indiqué explicitement: Titanianus jouit de l'estime particulière de l'empereur lui-même. Pour renforcer son ordre, Theokritos menace les fonc- tionnaires d'une correction rigoureuse en cas de désobéissance.

La lettre est datée de la 21 e année du règne d'un empereur nommé

«Antonin le Pieux», que J. Nicole, dans son editio princeps, a identifié à l'empereur communément désigné sous cette appellation. Toutefois, étant donné qu'il porte à ce moment le titre d'invictus (5-6: cXl1't'tlÎl['wu]), U. Wilcken a montré qu'il devait s'agir de l'empereur Caracalla (c'est-à-dire, plus officiellement, «Sévère Antonin le Pieux»), qui porte le titre d'invictus depuis 211, alors que la titulature d'Antonin le Pieux, pour sa part, en est totalement dépourvue.1 Il ajoute que la datation par année de règne sans pré- cision du nom de l'empereur (cf. ligne 20) apparaît seulement à partir de la fin du II" sièc1e.2 Le 15 Payni de l'an 21 correspond donc au 9 juin 213 ap. J.-C. Une fois la date établie, ce document pose néanmoins des problèmes prosopographiques, du fait que la fonction officielle de Theokritos n'est pas

1 Cf U. Wilcken,APF3 (1906) 379; D. Kienast, Romische Kaisertabelle2 134-135, et surtout 164.

2 Cf P.A1ex. Giss., p. 21-24; P.KOln II 92.

(20)

définie, et que le gentilice de Titanianus est presque entièrement perdu dans la lacune au début du document.

Aurelius Theokritos n'est attesté dans aucun autre document publié à ce jour. Le ton qu'il adopte envers les stratèges laisse supposer qu'il s'agit d'un personnage de quelque importance. Comme, du point de vue hiérarchique, il se situe au-dessus des stratèges, on peut envisager un épistratège, un préfet ou l'un de ses subordonnés directs à Alexandrie, ou encore un haut fonctionnaire à la cour impériale. Pour Wi1cken, Theokritos devait faire partie de la haute administration en Égypte même.3 J.F. Gilliam, pour sa part, a suivi les auteurs de la Prosopographia Imperii Romani, et reconnu en Theokritos plus précisé- ment un épistratège.4 On ne peut pas exclure que Theokritos ait été préfet d'Égypte. En effet, la préfecture de Lucius Baebius Aurelius Iuncius ne nous est attestée que depuis le printemps 212 jusqu'à l'année 212/213; le premier préfet d'Égypte connu ensuite, Marcus Aurelius Septimius Heraklitos, n'est attesté qu'à partir du 16 mars 215.5 Autrement dit, Theokritos pourrait éven- tuellement s'insérer directement après Iuncius, et avant Heraklitos. Finalement, J.G. Milne l'identifie au puissant affranchi de Caracalla mentionné par Dion Cassius; cette suggestion a été défendue récemment avec vigueur par A. Lukaszewicz.6 Selon ce dernier, Theokritos était un affranchi de Caracalla;

par son ambition et son manque de scrupule, il aurait passé du statut d'esclave et de danseur à celui de commandant d'armée et de préfet. Probablement lors d'une visite de préparation précédant le passage de l'empereur à Alexandrie (215/16), Theokritos a fait exécuter Flavius Titianus, procurateur à Alexandrie (È1t1:tpo1teurov Èv 't'Ilt 'AÀeçavôpetat). Dans cette hypothèse, lors de son pas- sage à Alexandrie en 213 pour préparer la visite de l'empereur, Theokritos aurait pris des mesures de protection en faveur d'un proche de l'empereur, Titanianus, qui, sans forcément résider dans le nome arsinoïte, y possédait néanmoins des terres. Dion Cassius ne mentionne pas le gentilice de Theokritos. Mais ce dernier, s'il a été affranchi par Caracalla, devait inévita- blement porter le gentilice de l'empereur, c'est-à-dire Aurelius, que nous retrouvons sur notre papyrus. En conclusion, parmi les diverses possibilités d'identification de notre Aurelius Theokritos, celle défendue par Lukaszewicz

3 Loc. cit.: «Wir müssen in dem Schreiber einen Mann sehen, der speziell in der iigyptischen Verwaltung tiitig war. Über seinen Rang wage ich keine bestimmten Vermutungen».

4 J.F. Gilliam, Mnemosyne 17 (1964) 298. J.D. Thomas, (The Epistrategos in Roman Egypt, 211), n'exclut pas cette possibilité, mais selon lui, il pourrait aussi s'agir d'un autre membre d'une famille importante. Les différentes hypothèses sont énumérées par A. Lukaszewicz, Proc.

of the 20th Int. Congr. of Pap. 567.

5 Cf P. Bureth, ANRWII 10.1 (1988) 491; G. Bastianini, ibidem 512.

6 Cf D.C. 78, 21 ; J.G. Milne, The History ofEgypt under Roman Rule 222 ; Lukaszewicz (art. cit.).

(21)

semble la plus plausible, même si, en l'état actuel de nos connaissances, elle ne saurait avoir un caractère certain.

La position éminente de Titanianus donne à penser qu'un tel personnage a dû laisser des traces dans d'autres textes, qu'il s'agisse de papyrus, d'ins- criptions ou de sources littéraires. Parmi les familles de riches Romains possé- dant des terres dans le nome arsinoïte au début du III" siècle, il faut relever la présence des Valerii Titaniani.7 Ils font partie du même milieu que les Valerii Celeares (cf 72 et 77), ou encore la famille d'Appien, connue par les archives d'Heroninos.8 On peut donc selon toute vraisemblance identifier notre Titanianus à Valerius Titanianus, eminentissimus vir et préfet des vigiles en 217, néocore du grand Sarapis et membre du Musée d'Alexandrie.9 Comme le relève Gilliam [Mnemosyne 17 (1964) 295], Titanianus est manifestement d'origine gréco-égyptienne, et entretient des liens étroits avec Philadelphie.

L'existence d'un Valerius Titanianus dans BGU VII 1655,43 - un testament romain en provenance du nome arsinoïte et datant du 3 juin 169 - pourrait être une coïncidence, mais il pourrait aussi s'agir du père de notre Titanianus.

On trouve par ailleurs un épistratège du nom de Valerius Titanianus en 262 ap. J.-C. (P.Oxy. XVII 2107): il s'agit sans doute du fils du personnage qui nous occupe ici.1O En définitive, ce seraient trois générations de Valerii Titaniani qui se seraient succédé. Le tableau qui suit rassemble les différentes sources relatives aux trois générations.

Date Génération Source Formulation

3 juin 169 1 BGU VII 1655, THaVtaVÔn

43 (sans titre)

après 212 2 P.Lond. II 188 OùaÂÉptoc (p. 144), 86 Tt'tavtavoc

9 juin 213 2 P.Gen.I 1,4-5 [OùaÂÉ)ptov Tt'tavta~ov 'tov

Kpa'ttcl~[ ov]

7 Cf D. Rathbone, Economic Rationalism 56-58 et 69.

8 Cf Rathbone 2l.

Remarques Philadelphie (nome arsinoïte);

testament Sebennytos (nome arsinoïte); liste de possesseurs de terrain (Ka'tOtKOt) nome arsinoïte

9 Cf J.F. Gilliam, Mnemosyne 17 (1964) 293-299 ; idem, Mélanges d'histoire ancienne offerts à William Seston (Paris 1974) 217-225.

10 Cf W. van Rengen / G. Wagner, 59 (1984) 348-353 [= SEG 34 (1984) 1559].

(22)

Date Génération Source Formulation Remarques 214 ? 2 A.E. 1966,474, M. OùaÂ.Éptov 1 Asie Mineure

1-5 Tl'tavlavov 1 È1tt 'trov 'EÂ.Â.T\vlKro[v ]1 Èmc'toÂ.ro[v]1 ['to]û KUPlo[u] 1,llrov (= ab epistulis Graecis)

fin 217 2 CIL XIV 4393 Valerio Titaniano 1 Ostie

=/LS l 465 praefecti vig(ilum) em( inentissimo) v(iro)

217/218 2 SEG 34 (1984) Où[aÂ.Ép(tov)] Crocodilopolis - 1559, 1-4 Tl'taVlaVOv l 'tov Arsinoé (?)

[Kat (?) ... ]~avov 1 uio[v] OùaÂ.Ep(lou) Tl'taVlaVOÛ l 't[oû]

Èçoxoo'ta'tou

mars 227 11 2 BGU VII 1617, OùaÂ.( Eplou ) Philadelphie 34-35 Tl'tavlavoû <X1tO 1 (nome arsinoïte) ;

Mouciou registre de taxes 17 juin 229 2 P.Stras. V 459 OùaÂ.Éptoc [Tl'tavl]l- Polydeukia

avoc <X~'C; ~1tapxoov 1 (nome arsinoïte) ïou'yo~~[cOh' .

(1. o{nyouÂ.oov) Kati 'trov <X1tO 't[ oû] M~~dI- ou Cl'toü[Il]ÉvC?~ 1 Kat <X'tEÂ.[ro]V

après 240, 2 P.Mich. XI 620, OùaÂ.Eplool [T]l[ 't ]a- Théadelphie etc.

26 janvier 1-3 (aussi 122, VlaVrol VEOOKOPOOl (district de 203 et 259) 'tOû IlEyaÂ.[ ou] Themistos,

Capamùoc 1 <X1tO nome arsinoïte) È1tap[x]oov

o{nyouÂ.oov 'trov Èv 'trol Mouciool 1 Cl'tOUIlÉVOOV

Il La date de ce papyrus a fait l'objet de nombreuses hésitations, cf notamment Rathbone, Economic Rationalism 49, qui préfère le placer en 198 (mois de Mecheir à Phamenoth d'une 6e année d'un règne non spécifié). Toutefois, on trouve dans ce document la mention des KÂ.T\(POVOIlOl) 'Iouc'tou <XPX(lEpÉOOC). Ce même archiprêtre Justus apparaît aussi dans P.Yale III 137, datant de 216/7, sans mention de ses héritiers; il n'est par conséquent pas encore mort. De nombreux autres noms présents dans BGU VII 1617 apparaissent aussi dans P.Yale III 137, confirmant, s'il en était besoin, la proximité chronologique entre les deux documents. P'Yale III 137 constitue donc un terminus post quem pour BGU VII 1617, qui date de 227.

(23)

Date Génération Source Formulation Remarques 22 nov. 2 p.Graux 4 'toù Otacll/-!o'tâ.'to'll nome arsinoïte

248 (= SB IV 7464) OùalcEpio'll 1 (Philadelphie ?)

Tl'tavlavoù

7 nov. 3 P.Oxy. XVII OùalcÉpwc ordre aux

262 2107,1 Tl'taVlaVOc <> irénarques du

Kpâ.'tlC'tOC nome

oxyrhynchite 12

La carrière de Valerius Titanianus est en partie comparable à celle d'Antonius Philoxenos, autre propriétaire terrien dans le nome arsinoïte (vin, troupeaux). Dans un document datant de 267 ap. J.-c., ce dernier est appelé Kpanctoc, et il est VEffiKOPOC 'Wû f.lEyaÀou Ca.pamooc (SB VIII 9909, 4;

Théadelphie?); dans P. Stras. 1 8, 2-3 (271-276 ap. J.-C., nome arsinoïte), il est (bto E1tl:tp01tffiV. Néanmoins, Valerius Titanianus a occupé des charges encore plus hautes qu'Antonius Philoxenos.13

Pour en venir au caractère général du document, cette lettre de recom- mandation s'inscrit dans le contexte d'un rapport de coopération entre les grands propriétaires terriens et les administrateurs du nome. Du côté des grands domaines, on peut citer plusieurs documents qui attestent les efforts fournis par les propriétaires lors du passage des fonctionnaires. 14 En revanche, notre docu- ment est un exemple rare émanant des hautes instances du gouvernement en faveur d'un représentant de la classe privilégiée de l'Empire. Titanianus, comme on l'a vu, faisait partie du cercle restreint des dignitaires de l'Empire.

Même si sa famille tire probablement ses origines d'Égypte, il est parvenu à se hisser à des charges élevées. Ce document montre par ailleurs que même des personnages de haut rang, quel que fût leur prestige, dépendaient de la bonne volonté de l'administration locale pour protéger leurs intérêts.

12 À ce propos, cf van Rengen / Wagner 351.

13 Sur le milieu des riches notables propriétaires de domaines à Philadelphie à cette époque, cf 72, introduction.

14 Cf Rathbone 20-21. M. Rostovtzeff, Soc. & Econ. Rist. of the Rom. Empire2 294, 298 et 486-491, donne une idée des rapports entre propriétaires terriens et l'administration du nome, laquelle n'hésite pas à user de la force (militaire) pour régler certains problèmes.

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&'(v'tiypa<pov?)

AÙpr,Al.OC 8EOKpt'tOC C'tpœtllY01.C 'APCEVOEi'tOU XaiPEtv.

[OùaAÉ]el.OV Tt'tavtavov 'tov Kpa'ttc- 5 :[ ov] ~1tO 't<?û KUpiou 1,IlÔlV &'1l't'tr,-

['tou] AÙ'to~e~'topoc 'Av'trovdvou [Eùc]~po~[c] 'tEtllâc8at oùô~ic Èc'ttv

o

q,YVOÔl~. <ho CUVpouAEUro UIl1.V

aiôllllo~roc 1tEpt 'toùc OiKdouc aù- 10 'toû 1tPOCEVEX8flvat, 1l1lôÈ ptat{ ro}-

roc È1tt 'tCx K'tf,lla'ta aù'toû [È]1tt'tpÉ- XElY, 1l1lÔ' ÈK'tapaCCElY 'tOùc YEropyouc, &'AACx È1tt 't01.C &'pic'totc Kat cuvai[p]Ec8at aù'tcp, 1lT}, d 15 lla80tllt ~apCx 'tCx KEKEAEucIlÉ-

va 1tpac[c]ov'tac, È1ttC'tpE-

<P~C'tEPO~ ullâc È1tavop8c.ô- [cro]llat.

ÈppÔlc8(at) ull(âc) E(Üxollat).

20 Ë[ 'touc] Ka " [ll]aûvt te' . Au verso:

~~~~'tOA'h 8EOKPi'tOU

8 ('\}I!~-

Copie (?).

Aurelius Theokritos aux stratèges du nome arsinoïte, salut.

Personne n'ignore que Valerius (?) Titanianus, uir egregius, est tenu en estime par notre empereur invaincu Antonin le Pieux [= Caracalla]. C'est pourquoi je vous conseille de vous comporter avec modestie envers ses proches, de ne pas vous en prendre à ses biens par la force, de ne pas susciter de troubles chez les fermiers, mais de le soutenir contre les notables, de peur que, si j'apprenais que vous agissez contre les ordres, je ne vous inflige une rigoureuse correction.

(25)

Je prie pour que vous vous portiez bien. La 21' année, le 15 Payni.

Au verso: Lettre de Theokritos.

1 a. Le scribe a placé au début du document un a isolé, apparemment surmonté d'un trait horizontal. On pourrait penser qu'il a voulu numéroter les exemplaires qu'il a dû confectionner pour les stratèges du nome. Plus proba- blement, il pourrait s'agir d'une abréviation pour à(V'tiypa<pov). On en trouve un parallèle dans P.Diog. 10, 17 (= P.Coll. Youtie 1 64): à(v'tiypa<pov) ù1t?yp(a<Pllc); reproduction photographique dans P.Coli. Youtie 1, pl.

xx.

4 [OùaM]ptov Tt'tavtavôv. L'identification de Titanianus repose en majeure partie sur la lecture de son gentilice, pour lequel nous n'avons plus que la terminaison. Nicole a restitué ['Ati]Àtov, mais la lacune est trop large pour seulement trois lettres. Une restitution [OùaÀÉ]r:nov serait très satisfai- sante sur le plan des parallèles, puisqu'elle permettrait de rattacher notre papy- rus au cursus de Valerius Titanianus, personnage bien connu par ailleurs.

Toutefois, la lecture du p pose des difficultés considérables. Il ne subsiste que deux traces d'encre superposées, ainsi qu'un trait recourbé assurant la liaison avec le t qui suit. Ces traces ressemblent à la liaison entre le À et le t de Aùp"Àtoc (2). Toutefois l'inclinaison de la longue oblique du À est différente.

Le papyrus ne présente pas d'autres exemples d'une liaison entre À et t. Si l'on considère la lecture pt, les parallèles recensés sur ce papyrus montrent que le scribe lie toujours le· p au t, en prolongeant la courbe du p: Kupiou (5), 1tEpi (9), àptctotc (13). Mais, dans le cas présent, la partie gauche de la liaison entre le t et la lettre précédente semble se recourber, et manquer la liaison avec la trace inférieure gauche. Ce n'est par conséquent qu'avec de sérieuses réserves que l'on peut envisager la lecture [OùaÀÉ]ptov, même si, en ce qui concerne le contenu, elle s'accorderait parfaitement avec ce que l'on sait par ailleurs de la famille des Valerii Titaniani dans le nome arsinoïte. Supposer une erreur du scribe, qui aurait écrit Aùp"Àtov pour OùaÀÉptov par analogie avec la ligne 2, paraît pour le moins contestable sur le plan méthodologique. Finalement, un changement de gentilice ou un double gentilice paraît peu probable, en parti- culier pour un personnage de cette importance. L'hypothèse a été avancée par Gilliam, art. cit. (introduction, n. 4). Il traite la question de nouveau dans Historia 14 (1965) 86-89, où il relève que «quite clearly magistrates, gover- nors and other officiais did not desire or find it necessary to become Aurelii as did many ordinary soldiers and non-commissioned officers ».

13 'toîc àplc'tOtC. Cette formulation est sans parallèle pour l'époque dans les papyrus (aucune attestation comparable de l'emploi de l'adjectif aptc'toc entre les années 150 et 250, d'après la DDBDP). Le sens général de la phrase donne à penser que Titanianus, riche propriétaire absent, a subi les

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attaques indirectes de notables locaux. Si l'on cherche une raison à une hosti- lité des habitants envers les hauts dignitaires, on la trouvera peut-être dans le ton des instructions envoyées par Gaius Valerius Celearis alias Philoxenos au marchand de vin Tesenouphis (72). Dans le présent document, l'arrogance est aussi nettement perceptible dans le ton utilisé par Aurelius Theokritos pour prendre la défense de Titanianus.

19-20. Les salutations (19) sont écrites d'une main très cursive et rapide, à la limite de la lisibilité. Néanmoins, la manière d'écrire les E et les p présente de grandes similitudes avec le corps de la lettre. A la ligne 20, la main est de nouveau plus soignée. Aurelius Theokritos a sans doute recouru aux ser- vices d'un scribe pour diffuser la circulaire. En définitive, c'est probablement la même main qui a rédigé le document dans son intégralité, contrairement à ce que l'on trouve par exemple dans SB l 4639 (= Schubart, PGB na 35;

209 ap. J.-C.), où le préfet d'Égypte Subatianus Aquila a ajouté de sa propre main Èpp&~~0~ CE ~OÛÀOllat entre le corps du texte et la date.

(27)

P.Nicole inv. Il Planche II BL 1156

6,3 x 12,8 cm II-Ille s. ap. J.-C.

nome arsinoïte?

Le papyrus est intégralement conservé; seule la marge gauche a subi quelques dégâts. Marge supérieure: 1 cm; marge gauche: 1,1 cm; marge droite: 0,2 cm; marge infé- rieure: 2 cm. L'écriture suit le sens des fibres; le dos est blanc. Le texte ne comporte pas de date; sur la base d'une comparaison paléographique, on peut le situer entre le Ile et le me siècle de notre ère.'

Ce document se présente sous la forme d'une brève lettre d'affaire;

mais on verra que sa fonction peut être précisée quelque peu. Syros se trouve en ville, sans qu'il soit possible de déterminer de quelle ville il s'agit: peut -être le chef-lieu du nome, peut-être Alexandrie. Syros s'adresse à Alexandros, dont on peut déduire qu'il réside dans un village de la campagne égyptienne. Quant au troisième personnage apparaissant dans le document, il joue un rôle inter- médiaire entre les deux correspondants; il n'entretient pas nécessairement un lien d'affaire durable avec Syros ou Alexandros. Syros a prêté à Alexandros une somme d'argent, dont ce dernier doit rembourser les intérêts, ainsi qu'une partie du capital. Au lieu de procéder au remboursement directement auprès de Syros, Alexandros paiera Pas ion, qui lui-même a payé au préalable les 8 drachmes et 4 oboles à Syros, peut-être pour une affaire tout à fait distincte.

Autrement dit, Syros a rédigé une forme primitive d'ordre de paiement (on pourrait à la rigueur parler de chèque) établi au nom de Pasion, remboursable sur la somme due par Alexandros.2 La transaction ne passe pas par l'intermé- diaire d'une banque.3

Le document ne nous donne aucune indication explicite sur l'usage qu'Alexandros a pu faire de la somme que lui a prêtée Syros. Néanmoins, pour mieux cerner ce que représente l'emprunt en question, on peut tenter une reconstruction qui sera, disons-le d'emblée, hypothétique. Nous ne savons pas à quelle étape du remboursement de la dette Alexandros se trouve, et par conséquent nous devons nous contenter d'estimer la situation au moment où le document est rédigé. Le taux d'intérêt usuel pour l'argent est de 12% par

, Cf p. ex. BGU 115, col. II (= Schubart, PGB n° 33; 197 ap. J.-c.); P.Diog. 19 (226 ap. J.-C.).

2 Sur les transferts d'argent, cf. F. Preisigke, Girowesen, en particulier 209-210, et E. Kiessling, RE Suppl. 4 (1924) 696-709.

3 Cf. U. Wilcken, APF 3 (1906) 380.

(28)

année, c'est-à-dire 1 drachme par mine par mois. En partant de l'idée que le rem- boursement du capital et le versement des intérêts s'effectuent à un rythme men- suel, le capital serait de 467 drachmes, et il faudrait compter 117 mensualités pour rembourser le capital, soit une période d'un peu moins de 10 ans. 467 drachmes pourraient, à titre d'exemple, correspondre au prix d'un âne au tour- nant entre le ne et le me s. ap. J.-C.4 La durée du remboursement, étalée sur envi- ron 10 ans, correspondrait à la durée de l'amortissement d'un âne, soit la période pendant laquelle on peut espérer que l'animal sera productirs Le salaire journa- lier d'un ânier (ov11Â,a:t'llc) se situe aux environs de 2-3 drachmes à la période où notre texte a été rédigé.6 Par conséquent, un paiement mensuel de 4 drachmes sur le capital, ainsi que des intérêts (dégressifs) se montant en l'occurrence à 4 drachmes et 4 oboles, n'ont rien de déraisonnable. Pour en terminer avec cette reconstruction hypothétique, il convient de signaler que l'on trouve effective- ment deux âniers répondant au nom d'Alexandros à la période en question;

cf. SB XVI 12565, 8 (nome arsinoïte, ne s. ap. J.-c.): oUI ['A]Â,Eçavop[o]u oV11Â,(a'tou); P.Leeds 11, 2-3 (philadelphie,

n-m

e s. ap. J.-C.; nO 499 dans P.Customs): Aù(PTtÂ,toc) 'AÂ,Éçavopoc 1 Eic(ayrov) È1tt ovo[tc. Ces deux âniers pourraient ne faire qu'une seule et même personne, et l'on ne peut pas exclure qu'il s'agisse du même Alexandros que l'on trouve dans notre papyrus.

Bien qu'il soit difficile en l'état actuel de la documentation de confirmer une pareille hypothèse, on peut néanmoins constater qu'elle s'inscrirait bien dans un modèle économique où les résidents urbains investissent leur surplus sous forme de prêts consentis aux habitants de la campagne; ce modèle a été décrit par R.S. Bagnall pour une période légèrement postérieure, mais il est déjà valable au ne et au nIe siècle.?

Cupoc 'AÂ,Eçavopcp xa1pEtv.

KaÂ,éi'>e 1tOtTtCEtc ooùc 'té!> à.vaotoov'tt COt 'to 1tt't'taKt?V

IIadrovt ù(1tÈp) ~Èv 'tOKOU (opax~Cxc) 0 ('tE'tproPOÂ,ov) Kat à.1tO 'tOÛ KE<paÂ,alou

(opax~)

0, roc

YEVÉc9m (opax~Cxc) 11 ('tE'tproPOÂ.ov). à.Mà ~Tt à.~EÂ,TtCnC,

5 'tCxc ïwc Ëcxov 1tap' aù'toû Èv9aoE È1tt 'tllc 1tOÂ,EroC.

4 Cf H.-J. Drexhage, Preise, Mieten/Pachten, Kosten und LOhne 293; N. Litinas, ZPE 124 (1999) 201-203.

5 Cf CPR VI 2.

6 Cf Drexhage 403.

7 Egypt in Late Antiquity 74 et 313.

(29)

Syros à Alexandros, salut. Je te prie de donner à Pasion, qui te remet ce billet, 4 dr. 4 ob. en guise d'intérêts et 4 dr. prises sur le capital, soit un total de 8 dr. 4 ob. Mais fais diligence, puisque j'ai reçu la somme équivalente de sa part ici en ville.

(30)

P.Gen. inv. 20 Planche III

22,5 x 13,5 cm 20 septembre 178 ou 21 septembre 179 ap. J.-c.

Socnopéonèse M.Chr. 122

BL l 156 et 461 ; VIII 134

Le papyrus est assez bien conservé: à part quelques trous épars (certains situés sur les plis de la feuille), on ne constate que la perte du coin inférieur gauche. Marge supé- rieure: 1 cm; marge gauche: 2,3 cm; marge inférieure: 2,5 cm; pas de marge droite.

L'écriture, exercée et peu cursive, suit le sens des fibres.

Ce document est une plainte adressée au centurion Furius Proculus par Pabous et Harpalos, tous deux fils de Melas et prêtres de Socnopéonèse. Les deux frères sont héritiers de leur père avec leur sœur Tanephronis et leur frère Stotoetis. Ils se plaignent d'avoir été violemment attaqués par ce dernier et dépossédés de leur part d'héritage, et demandent par conséquent au centurion d'appréhender les coupables afin qu'ils rendent compte de leurs actes.

Bien que l'année de rédaction de la pétition soit perdue dans la lacune, la période pendant laquelle l'affaire a lieu peut être délimitée de manière assez précise. En effet, le document est daté du règne conjoint de Marc Aurèle et Commode. Or les deux empereurs n'ont régné ensemble que du milieu de l'année 177 (date de l'élévation de Commode à la dignité d'Auguste) au 17 mars 180 (date de la mort de Marc Aurèle).l La pétition ayant été rédigée le 23 Thot, il ne peut s'agir que du 20 septembre 177, du 20 septembre 178 ou du 21 septembre 179 (année bissextile). D'autres éléments permettront néan- moins de préciser quelque peu cette date.

C'est D .H. Samuel qui a établi le lien entre 3 et un papyrus de Berlin (SB VI 8979)? Dans ce dernier papyrus, datant des années 178 à 181, un prêtre de Socnopéonèse, Stotoetis fils de Melas, se plaint auprès du secrétaire royal d'avoir été dépossédé avec ses deux sœurs mineures de leur part de l'héritage de leur père récemment décédé, et cela par leurs deux frères Satyros et Harpalos?

1 Cf. D. Kienast, Romische Kaisertabelle2 147.

2 Texte réédité par H.C. Youtie,ZPE3 (1968) 11-14.

3 L'élément déterminant pour dater ce papyrus réside dans la présence d'Apollonios, secrétaire royal, assurant la stratégie par intérim. Son activité en qualité de remplaçant du stratège se situe entre Flavius Apollonios (stratège entre 176 et 178/179, cf P.Lond. II 368 [p. 76], 3) et Apollonios alias Isidoros (stratège le 21 janvier 181, cf P.Prag. 1 21).

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Devant les similitudes de dates, de situations et de noms, trop nombreuses pour n'être que des coïncidences et fournissant une explication vraisemblable aux quelques divergences qui existent entre les deux papyrus, Samuel conclut que SB VI 8979 et 3 concernent la même famille et présentent les deux points de vue de la même affaire.4 Entre les deux documents, les années compatibles sont 178 et 179; ainsi la parenté des textes permet-elle de dater 3 plus précisément au 20 septembre 178 ou au 21 septembre 179.

Sur les raisons qui poussent un groupe à s'adresser au centurion et l'autre au stratège par intérim, on se référera à l'introduction à 16. Les prota- gonistes de 3 portent plainte pour un acte de violence, ce qui relève des com- pétences du centurion, et les auteurs de SB VI 8979 se plaignent au représen- tant de l'autorité judiciaire de voir leurs droits bafoués.

<I>p<?1?eicp TIpmKÀcp ÉKa'tov'teXPXll

1ta[p]~ TIa~o1)'toc K~t 'Ap1teX[À]ou eXll-

<po't[É]pco~ MÉÀavoc tEpÉCOV N1Îcou

Co~o1taiou. 6 1tpoYEypallllÉvoc 5 1t~[ 'til] P 111l&V, Kt> ptE, 'tEÀEU't1ÎWC

È<p' [1)]~Eîv Kat C 'to'to1În Kat TavE<ppo- Vt K[À]l1POVOIlOtc, Ka'tESÉIl~Sa eXll-

<pO [ 't ]Epm 'tilv 1mo mhoû Ka't[ a ]~t<pSî­

w[ v] ÈVOOIlEviav. OÙOEVt ÀÔycp 10 XPl1~0IlEVOC 6 1tpoYEypaIlIlÉ-

voc [C]:<?'toflnc Ka't<X eX1toucîav È- 1tEÀSCÛV tic 'tov 't01tO~ cùv 't11 1tpO- YEYPallllÉVll TavE<PP?Vt, oi} eX1tÉKt- 'tco 1) ÈVoollEvia, 't&v c<ppayiOcov 1)- 15 Il&V [K]owl1 1teXv'tcov È1ttKtIlÉVCO[V], Kat ~~c'teX1;av'tEc 't<Xc È1ttKt[IlÉ]vac

~<ppay[î]oEC ticfl~Sav Kat [1t]0V- 'ta

a

~~:ESÉIlESa u<piÀav'to. iJll&~

[o]ùv 1tapay~voIlÉVCOV O[t]EÀÉcSa[t]

4 ZPE 37 (1980) 255-259.

(32)

20 [0 'tE] C 't08011't1C 'tn Éau'toû ÔUV<Xlll1tE-. ' . [1t ]'!8ffic È1tE1tftÔT]CëV Kat 1t~T]-

[yCxC] où 'tCxc 'tuxoùwc 'hIlE1V ~1tft­

[VEYK]~V. 08EV àÇ1?~I-!-EV àX811vm

[aù'to]~~ [È]1tt c[È] 'A6yov [Ôwco]v'tac 1tEpt Mv]

25 ['hllâ]~ ?~'tO)( Ô1E1tp<xça[ v'to]. Ô1EU'tUXEl.

[(Ë'touc) ] '~UpT]ÀtffiV 'AV'tffiVtVOU Kat KOll1l6[ô]ou ['tm]:, ~u I?tffiV CE~ac'tmv, effi8 Ky.

1 I1p6KÀcp 4-5 "CO\) 1tpOYEypaIlIlÉVOU ... 1tœtpoc ... 'tEÀEU'tftcaV"COc 6 iwîv 8-9 Ka'taÀEt-

<p9Eîcav 13-14 <X1tÉKEt'tO 15 È1ttKEtIlÉvrov 16 È1ttKEtIlÉvac 17 c<ppayî8ac 18 u<pElÀav'to 20 C 'to'toftnc 8uvUIlEt 20-211tE1tot9roc 22 iwîv

À Furius Proculus, centurion, de la part de Pabous et Harpalos, tous deux fils de Melas, prêtres de Socnopéonèse. Notre père, mentionné ci-des- sus, Seigneur, est mort en laissant pour héritiers nous-mêmes ainsi que Stotoetis et Tanephronis. Nous deux avons mis en dépôt le contenu de la mai- son laissé par lui. Sans aucun motif, Stotoetis, mentionné ci-dessus, s'est introduit en notre absence sur le terrain avec Tanephronis, mentionnée ci- dessus, là où se trouvait déposé le contenu de la maison. Nos sceaux étaient placés de façon visible de tous. Ayant enlevé les sceaux, ils sont entrés et ont emporté tout ce que nous avions déposé. Comme nous étions là pour effectuer le partage, Stotoetis, ayant eu le dessus sur nous par laforce, nous a attaqués et nous a infligé des coups particulièrement violents. C'est pourquoi nous demandons qu'ils soient amenés à comparaître devant toi pour rendre comp- te de ce qu'ils nous ont fait. Porte-toi bien.

La ( .. .)" année de nos maîtres Aurelius Antonin et Aurelius Commode, Augustes, le 23 Thoth.

1 <I>POUptcp ITpWKÀcp. Le nom en <I>poupwc n'est attesté nulle part ailleurs dans ies 'papyrus sous sa forme complète. On le trouve sous une forme abré- gée, généralement <I>po( ). Cf p. ex. O.Bodl. II 1172, 3-4 (33 ap. J.-c.):

1.l1t(Èp) 1 <I>po(uptou) ITaKû~lc; O.Cair. l 102, 4 (60 ap. J.-c.): K61t'tou

<I>po(uptou) Tap?u8(tvac). La restitution semble toutefois arbitraire. On

(33)

trouve également de nombreuses attestations de quartiers d'Hermopolis avec la mention de <PPOÛptov, cf CaldemilDaris, Dizionario dei nomi geografici, s.v. <ppoupiou At~ôc, <ppoupiou 'A1tllÀuÎYCOU et <POtVtK<ÎlVOC <PPOÛptov.

Notre centurion s'appelle donc, selon toute vraisemblance, Furius Proculus.

Le nomen Furius est attesté en Égypte par le préfet Titus Furius Victorinus, cf P. Bureth, ANRW II 10.1 (1988) 486. Dans le cas de 3, il semble par consé- quent préférable de postuler une erreur du scribe.

Éxœwv'tapxn. Sur le rôle du centurion, cf 16, introduction.

2 I1a~oû'toc. Dans SB VI 8979, ce même personnage porte le nom grec de Satyros, cf Samuel (art. cit.) 257-258. Mais l'identité du plaignant ne fait pas de doute.

6-7 Tavê<ppôlvt. Cette femme apparaît dans SB VI 8979 sous le nom de Tanouphis, qui pourrait être une variante du même nom; cf Samuel (art.

cit.) 257.

9 èv8ollêviav. Sur ce terme, cf P.Diog. 9, 11-12 n. Pour O. Montevecchi, Aeg. 22 (1942) 77-84, il faut distinguer deux termes: le premier, èv80llêvia désignant des ustensiles de ménage, avec pour étymologie ëv80v + IlÉVêtV; le second, èv8ullêvia désignant la garde-robe, avec pour étymologie èv{)ûro.

21-22 1t~lll[yCxc] où 'tCxc 'tuxoûwc. Samuel (art. cit. 255 et 259) a appa- remment compris cette expression comme « sans succès» [« unsuccessful(ly)>>].

Or l'expression OÙK 0 'tÛXrov signifie littéralement «qui n'est pas le fruit du hasard», autrement dit «hors du commun», «extraordinaire»; cf LSJ s. v. 'tuYXavro, A.2. La réussite de l'assaut (du moins du point de vue des agres- seurs) constitue, pour les victimes, une circonstance aggravante dans cette affaire.

26 [(ë'touc) ]. Sur la date, cf introduction.

(34)

P.Gen. inv. 21 Planche IV BLI156

24 x 13 cm autour de 87 ap. J.-c.

nome arsinoïte

La partie inférieure de ce papyrus est perdue. La portion conservée est en bon état, à l'exception de quatre trous disposés à intervalles réguliers. Marge s\lpérieure: 3,5 cm;

marge gauche: 2 cm; pas de marge droite ni inférieure. L'écriture suit le sens des fibres; le dos est vierge. Le texte est écrit dans une onciale exercée, dépourvue d'élégance, typique du 1er s. ap. J.-C.1

Akousilaos se présente comme un métropolite de la cité des Arsinoïtes.

Il s'adresse au iuridicus Alexandreae Gaius Umbrius afin de faire corriger ce qu'il considère comme une fausse inscription: l'amphodarque l'aurait inscrit par malveillance comme originaire d'un village du nome, le privant ainsi du statut privilégié de métropolite. Akousilaos prie par conséquent le iuridicus de donner des instructions au stratège du district d'Héraclide, afin qu'il examine le cas et rétablisse la situation.

Le statut de métropolite (àno 1:f1c 1lT\1:pOn6ÀëoK) permettait à son déten- teur de jouir de certains privilèges (droits de préemption, taux de taxation favo- rable, exemption de certaines liturgies)? Ce statut étant héréditaire, les fils de métropolites devaient se faire reconnaître comme tels. Dès l'an 90/91, la docu- mentation papyrologique nous atteste des déclarations d'Ènh:plctc (examen du statut civique) pour les jeunes métropolites du nome arsinoïte ayant atteint l'âge de l'éphébie, soit leur 14e année.3 L'établissement de la catégorie des métropolites daterait néanmoins déjà du règne d'Auguste (cf Montevecchi 229 [= 217]). Les métropolites étaient recensés dans un registre, tenu à jour par les autorités de la métropole. Dans le cas de notre plaignant, c'est l'amphodarque (àllqloBâpXT\c, autorité compétente au niveau du quartier de la cité des Arsinoïtes) qui aurait dû l'inscrire dans le registre.4 Cette plainte n'est pas un

1 Pour des parallèles, cf. p. ex. P.Ryl. II 150 (pl. 6; 40 ap. l-C.); P.Ryl. II 95 (pl. 9; 71/72 ap. J.-c.); P.Merton 1 12 (59 ap. J.-C.).

2 Cf. C.A. Nelson, Status Declaration 10-25, en particulier 22; A.K. BowmaniD. Rathbone, JRS 82 (1992) 120-125.

3 Cf. SB VI 9163; O. Montevecchi, Proe. XIV Int. Congr. of Pap., Oxford 1974 231 [= Seripta Seleeta 219]. Cf. également 18 et 19.

4 Cf. BGU XI 2088 (Ptolemaïs Euergetis, 76/77 ap. J.-c.), une déclaration de recensement (Ka,,' OiKtaV à1toypa(111) d'un métropolite adressée au stratège et au secrétaire royal du nome,

(35)

cas isolé: on en trouve un parallèle assez proche dans P.Oxy. IX 1202 (= Sel.

Pap. II 300; Oxyrhynque, postérieur à 218 ap. J.-C.). Un père se plaint de ce que son fils n'a pas été inscrit par le secrétaire de quartier (à:J.upoôoypalllla'tEuc) dans la liste des éphèbes.5 Ce document présente toutefois plusieurs différences avec 4: a) la pétition émane du père d'un éphèbe, alors que, dans 4, la plainte est envoyée par la personne lésée elle-même, dont nous ne connaissons pas l'âge;

b) dans 4, le plaignant explique l'omission comme un geste hostile de la part de l'amphodarque (9: Ka't' ÈmlPElaV), tandis que dans P.Oxy. IX 1202, le péti- tionnaire suggère explicite~ent tin acte d'ignorance (22: [tlcc.oc à:YV011WC);

c) enfin, l'autorité de recours est différente, puisque le plaignant de 4 s'adresse au iuridicus, alors que, dans P.Oxy. IX 1202, le pétitionnaire écrit à un épistra- tège par intérim.

La prosopographie (cf. lignes 1-2 et 17-18, n.) permet de daterIe papyrus aux alentours de l'an 87 ap. J.-c. Akousilaos ne précise pas explicitement son âge, mais il mentionne le fait que son père et son grand-père sont également enregistrés comme métropolites (6-7). Il paraît peu probable que le grand-père d'Akousilaos ait pu figurer parmi les métropolites de la première liste établie encore sous le règne d'Auguste. La proximité temporelle entre 4 et la première attestation d'une ÈnlKptctc pour les métropolites arsinoïtes en 90/91 (cf. supra) suggère que la mise en place d'une procédure d'ÈnlKptctc a pu être motivée par le besoin de répondre à des plaintes du type de celle-ci. Si 4 datait d'après l'ÈnlKptctc de 90/91, on s'attendrait à ce que le plaignant fasse référence à la nouvelle procédure mise en place pour contrôler le statut des métropolites.

ralc.ot <?ù~~e[lc.ot ('tân)] ~e[a't]~~~c.ot Ôt~~to()6't11t

napà 'AK[O]'?~t~~[o]u 'toû 'Apt~~[o-]

ôfU.lOU 'trov à:n[o] 'tftc IlTl'tpo- 5 n6Â.Ec.oc 'toû ['APct]~O[EF~ou

VOIlOÛ. à:no na'tP?c Kat mln- nou à:vayeaq>oIlÉVOU 1l0U

ainsi qu'au secrétaire de la cité (ypcxllllœtEÙc 1tOÀEOOC) et à l'amphodarque. Mais ces déclara- tions de recensement peuvent être adressées à d'autres autorités, comme les archivistes (~t~ÀtQ(pUÀaK&) de la cité, cf. p. ex. P.Mich. IX 540 (Karanis, env. 53 ap. J.-C.).

5 La tenue du registre des métropolites incombait à divers magistrats (lillcpoMpJCl1c, lillCPoBo- ypcxllllcx'tEuc, YPCXIlIlCX'tEÙC 1tOÀEOOC), sans que l'on dispose de renseignements suffisants pour expliquer ces disparités; cf. Bowman/Rathbone 120.

(36)

È1tt TTlC /ll1'tP[

°

]1tôÂeroc, Ka't' È1t~ pêta~

?

'tOÛ 'tÔ1tOU 10 /lOU à/lCPo~[ ap ]X11c

'üvll-

Cl/lOC àveypa\jla'tô /le È1tt KOO/lll[c] 'ApyeaÔoc' o~ x[a]- ptv È1tt cÈ Ka'tÉcpuyov 'tov 1tav'trov ~ol1 [8ôv], ~a~ [à] ~tro, 15 Èa[v] ~Ot ~<?Çllt, K[e]~eûcat ypa-

[cpfl]vat 'tro 'tflc 'HpaKÂeŒou

.

. \

[/lept]ôo~ [c't]P0'tlly[rot] '~<?":lÂtrot '1[ c ]<?Kpa~~[ t] Èçe'ta~0v'tt È1t' à- [Â118]eta[ t] ÔtKatoÔO~~cat

À Gaius Umbrius, iuridicus, de la part d'Akousilaos, fils d'Aristodemos, tous deux originaires de la métropole du nome arsinoïte. Alors que j'ai été inscrit depuis mon père et mon grand-père dans la métropole, Onesimos, l' amphodarque de ma localité, m'a inscrit, pour me nuire, dans le village d'Argeas,' c'est pourquoi j'ai pris refuge auprès de toi, le secours de tous, et je demande, si cela te semble bon, d'ordonner que l'on écrive au stra- tège du district d'Héraclide Iulius Isokratès, pour qu'il mène l'enquête et rende la justice conformément à la vérité (. .. ).

1-2 ratrot 9ù~~e[trot ('trot)] ~e[a'tF~~rot 1 Ôt~0toÔÔ'tllt. La lacune ne laisse pas la place pour l'article 'trot, lequel est néanmoins usuel dans ce type d'en-tête. Cf. p. ex. BGU 1327, 1 (= M.Chr. 61; 176 ap. J.-C.); BGU XI 2013, 1 (postérieur à 147 ap. J.-c.); P.Oxy. XLII 3048, 11 (246 ap. J.-c.). Le iuridi- cus Alexandreae est un procurateur, et porte le titre de vir egregius (= Kpa'ttc'toc). C'est un haut fonctionnaire de l'administration de la province, aux côtés du préfet, dont il peut parfois assurer les fonctions par intérim.

Cf. A. Stein, APF 1 (1901) 445-449; P.Diog. 18,2 n.; D. Hagedorn, YCS 28 (1985) 184. Gaius Umbrius est attesté en qualité de iuridicus également dans P.Oxy. II 237, vii 39; ce document date de 186 ap. J.-c., mais fait référence aux minutes du iuridicus Gaius Umbrius, datant de la 6e année de Domitien (= 25.02 - 26.03.87 ap. J.-c.).

(37)

10 à/-lcpoù[ap]XT\c. Ce magistrat exerce son activité dans un quartier de métropole, 'de manière analogue à un KCO/-lapXT\c dans un village;

cf S.L.R. Wallace, Taxation in Egypt 99. Il agit ici en qualité d'officier d'état civil, puisque la question tourne autour de l'attribution du statut de métro- polite. Sur la procédure d'enregistrement menée par l'amphodarque, cf Stud.Pal. IV, p. 58-83 passim [= P.Lond. II 261 (p. 53; l. 1-278); P.Lond. II 260 (p. 42; l. 507-703); W.Chr. 61 (l. 432-488); env. 73 ap. J.-C.].

11-12 e1tt 1 KcO/-lT\[c] 'ApYEaÙOc. Ce village se trouve dans le nome arsinoïte, district de Themistos, à la frontière avec le district de Polemon (cf P.Tebt. II 341), non loin de Théadelphie; cf CalderinilDaris, Dizionario dei nomi geografici (+ Suppl.), s. v. 'ApYEac.

16-17 't& 'tftc 'HpaKÀEiùou 1 [/-lEpt]ÙOC [c't]pa'tT\y[&t]. Le stratège du .

,

.

. .

district d'Héraclide a la haute main sur le contrôle de la population de la métropole, même si l'inscription dans le registre relève des compétences de l'amphodarque. Le rôle du stratège du district d'Héraclide dans les affaires des métropolites est mis en évidence par les déclarations de recensement, cf p. ex.

P.Harr. 170 (= SB XVIII 13324; 77 ap. J.-C.); BGU XI 2088 (76/77 ap. J.-C.);

PSI IX 1062 (104/105 ap. J.-c.); CPR XV 24 (119 ap. J.-C.). Le recours ne sera donc pas traité par le stratège du district de Themistos, où se trouve le vil- lage d'Argeas.

17-18 'IouÀtcot 1 'I[c]oKpa'tE[t]. L' editio princeps proposait le texte sui- vant: T\ÀtcP

i i

Kt a1tav.' J. Ni~ole a cru reconnaître la présence d'un stra- tège Aurelius Hierax. Cette lecture a été toutefois rapidement corrigée par U. Wilcken [APF 3 (1906) 380], qui a proposé T\ÀtCO (excluant AÙPT\Àtcp!) 'I[1t]1toKpa'tEt. Un examen attentif du papyrus

p~~et ~aintenant

de restituer le gentilice du stratège: 'IouÀtcot. On reconnaît en effet la partie inférieure du iota, munie d'un crochet ~rienté à gauche (comme dans 'HpaKÀEŒou de la ligne précédente); il ne reste qu'une tache d'encre de l'omicron; quant à l'up- silon, sa partie supérieure gauche est clairement lisible. Le cognomen, tel qu'il a été déchiffré par Wilcken, pose cependant des difficultés. Si le iota initial est relativement facile à lire, en revanche la place disponible pour -1t1tO- est insuf- fisante. Il faut sans doute chercher la solution à ce problème dans l'attestation d'un autre stratège, figurant dans P.Vindob. Boswinkel 1, 35: CcoKpa'tT\c c'tpayrlYôc. Le terminus post quem de ce document est fixé à

8i

ap.' i.~C.

L'activité du iuridicus Gaius Umbrius (4, 1) se situe elle aussi autour de l'an 87, cf 1-2, n. Ces divers liens chronologiques autorisent un rapprochement entre le ÇCOKI?~~T\C de P.Vind. Bosw. 1, 35 et notre 'I[1t]1toKpa'tEt de lecture incertaine: il faut placer les deux stratèges autour de l'an 87. Il devient alors

(38)

évident que ces deux personnages n'en font qu'un seul, appelé 'Ic01(pâ'tl1c! La lecture CffiKpâ'tl1c avait été confirmée initialement par H. Harrauer (Oster- reichische Nationalbibliothek, Vienne) pour Bastianini/Whitehome, Strategi and Royal Scribes (22, s. v. CffiKpâ'tl1c, n. 2). Notre collègue a toutefois accepté de faire sa palinodie: «in P.Vindob. Bosw. 1,35 heisst der Stratege Isokrates ».

Nous profitons de l'occasion pour le remercier de son aide toujours précieuse.

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