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La santé au travail

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Academic year: 2021

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HAL Id: anses-01569030

https://hal-anses.archives-ouvertes.fr/anses-01569030

Submitted on 26 Jul 2017

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Nathalie Ruaux

To cite this version:

Nathalie Ruaux. La santé au travail. 2014. �anses-01569030�

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La santé au travail

Comprendre où en est la recherche

Édition scientifique MAI 2014

ahiers

De La

recherche

Santé, Environnement, Travail

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  Éditorial  

 

D’après l’Organisation Internationale du Travail (OIT), « le terme « santé », en relation avec le travail, ne vise pas seulement l'absence de maladie ou d'infirmité ; il inclut aussi les éléments physiques et mentaux affectant la santé directement liés à la sécurité et à l'hygiène du travail »1. C’est une démarche interdisciplinaire qui associe non seulement les employés et les employeurs mais aussi, les aspects environnementaux, sociaux, ergonomiques et organisationnels de l'activité professionnelle.

Des progrès indéniables ont été accomplis en matière de santé et sécurité au travail depuis une dizaine d’années. Pourtant, l’évolution de la société (mondialisation, précarité…), mais aussi celle des technologies et des métiers et leur impact sur le monde du travail suscitent de nouvelles questions. C’est pourquoi la santé au travail demeure un axe fort de l’activité de l’Anses qu’il s’agisse d’expertise, de veille ou de soutien à la recherche.

Le développement de la recherche en santé travail et son impact sur la connaissance des risques au poste de travail dépendent d’une part, de la qualité des travaux menés sur les grandes thématiques prioritaires (Ex.

agents chimiques cancérogènes mutagènes et reprotoxiques dits « CMR », risques émergents tels les nanomatériaux, les perturbateurs endocriniens…) et, d’autre part, de la structuration de cette recherche. C’est dans ce contexte que l’Anses lance annuellement des appels à projets dans le cadre du Programme national santé environnement travail grâce aux financements des ministères chargés de l’écologie et du travail auxquels s'ajoutent les fonds provenant du produit de la taxe sur les émetteurs radiofréquences et de partenaires : l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), l'Institut thématique multi‐organismes cancer (ITMO Cancer) dans le cadre du Plan cancer, le ministère chargé de l’agriculture au titre du Plan écophyto (en lien avec l’Onema, l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques).

Depuis 2009, 182 projets ont été financés dans le cadre du Programme national santé environnement travail.

Entre 30 % et 40 % de ces projets apportent des connaissances directement utilisables dans le domaine de la santé au travail. Les sujets traités sont très variés compte tenu de la diversité des nuisances possibles et plus généralement de la multiplicité de situations rencontrées dans le monde du travail. Sont ainsi concernés, les agents biologiques, l’impact sanitaire d'expositions à des agents chimiques tels que les pesticides ou les perturbateurs endocriniens, à des agents physiques comme le bruit, les UV, les radiofréquences, les nanoparticules. Sont aussi traités des sujets plus génériques comme l'organisation du travail. Certains de ces sujets font l’objet de controverses et on attend de la recherche qu’elle apporte des connaissances permettant de progresser. Pour ne citer que quelques sujets : pesticides et santé des travailleurs agricoles, exposition aux champs électromagnétiques des professionnels en bibliothèques et médiathèques, nouveaux modes d’organisation du travail. Cet ensemble de projets fait appel à des disciplines très variées, biologie (connaissance des mécanismes d’action de toxique), expologie (connaissance des expositions), épidémiologie et sciences humaines et sociales.

Parfois, mener à bien une expertise demande des réponses sur des sujets plus ciblés. La question peut alors être traitée par des conventions de recherche et de développement, passées avec différents organismes, dans le but d’obtenir des données d’utilité directe pour les différents travaux spécifiques d’évaluation des risques ou de caractérisation d’expositions professionnelles. Cela fut le cas lors, par exemple, de l’évaluation des risques liés à l’exposition au bitume et produits bitumineux (achevée en 2013).

      

1 Convention 155 de l’OIT, 1981. 

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Attachée à la valorisation de ces travaux et dans le cadre de ses Rencontres scientifiques, l'Anses organise deux fois par an, une restitution du Programme national de recherche santé environnement travail pour permettre aux équipes de recherche de présenter publiquement leurs travaux. Tel est le cas des Rencontres organisées le 20 mai 2014 sur les « Environnements de vie et du travail : risques sanitaires complexes ». C’est pourquoi ce numéro vise à donner un éventail des questions que se posent les chercheurs dans le domaine de la santé au travail et des approches qu’ils adoptent pour tenter de trouver des réponses.

Marc MORTUREUX

Directeur Général, Anses

                                                     

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  Sommaire 

 

Introduction  ... 5

Le monde agricole ... 7

La génotoxicité des pesticides chez les agriculteurs ... 8

L’exposition aux pesticides : risque de lymphome et de leucémie ... 10

Maladie de Parkinson et pesticides ... 12

SocioAgriPest : pesticides et santé des travailleurs agricoles ... 15

La qualité de l’air des élevages de poules pondeuses  ... 17

L’industrie et les services) ... 19

La gêne acoustique dans les bureaux ouverts ... 20

Prévoir les nuisances sonores dans les bureaux ouverts ... 22

Les champs électromagnétiques dans les espaces multimédia... 24

L’exposition professionnelle aux UV ... 27

Étude de l’asthme chez les personnels hospitaliers et de ménage ... 29

L’organisation de la Santé au travail ... 32

Modélisation des risques de TMS ... 33

Retour au travail après maladies chroniques, l’exemple de la lombalgie chronique ... 35

Les bronchopneumopathies chroniques obstructives d’origine professionnelle ... 37

Vers une approche pluridisciplinaire de la santé au travail ... 39

Les activités de l’Anses  ... 42

Les Plans nationaux ... 44

Mentions légales ... 46

Avertissement à l’attention des lecteurs

Les fiches de présentation des projets de recherche reflètent les points de vue des équipes scientifiques partenaires et n’engagent ni les Ministères de tutelle ou l’Anses et les partenaires associés. Pour toute question, les contacts sont indiqués à la fin de chaque fiche.

   

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Retrouvez les Cahiers de la Recherche sur le site de l’Agence !

www.anses.fr/fr/content/les‐cahiers‐de‐la‐recherche  

                         

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  Introduction

 

La variété des dangers auxquels les travailleurs sont confrontés et l’intensité potentielle des expositions associées, ainsi que l’importance de la population concernée (28,4 millions d’actifs en France métropolitaine en 20112) confèrent à la thématique santé travail, une place particulière en matière de santé publique. On cite souvent comme jalon emblématique l’essai sur les maladies des artisans de Bernardino Ramazzini, publié en latin en 1701. De manière générale, des travaux réalisés dans ce cadre ont souvent été précurseurs dans la connaissance des risques et dans la mise au point des moyens de protection. C’est ainsi que la première mise en évidence, en 1775, du lien entre cancer et exposition aux suies vient du domaine santé travail avec l’étude menée chez les ramoneurs de Londres par le chirurgien britannique Percival Pott.

En France, c’est suite aux travaux de Louis René Villermé (1782‐1863) sur la santé des moissonneurs puis sur

« l’État physique et moral des ouvriers employés dans les manufactures de coton, de laine et de soie » que les premières mesures règlementaires de protection des travailleurs les plus fragiles sont prises, notamment la loi sur le travail des enfants dans les manufactures en 1841, suivie par la création de l’inspection du travail.

Depuis, l’attention s’est portée sur les notions de danger, de risque et de sécurité. De l’indemnisation des accidents du travail (loi du 8 avril 1898) à la mise en place de dispositifs de prévention, les risques aigus dus aux substances dangereuses présentes sur les lieux de travail ont été réduits significativement.

Depuis la seconde Guerre mondiale, la santé au travail a évolué en raison, notamment, du drame de l’amiante que notre pays a connu. La santé et la sécurité des personnes ne se limitent plus au cercle médical ni au colloque singulier (relation médecin‐malade). Comme l’a indiqué le Conseil d’État, le 3 mars 2004, sur l’affaire de l’amiante : « Il incombe aux autorités publiques […] d’arrêter, en l’état des connaissances scientifiques, au besoin à l’aide d’études ou d’enquêtes complémentaires, les mesures les plus appropriées pour limiter et si possible éliminer ces dangers ». Cet arrêt de principe a montré la nécessité de renforcer la législation, de développer les connaissances scientifiques et restructurer la coopération entre les différents acteurs de la santé au travail (dont, les entreprises). Ainsi, la santé au travail a été notamment introduite dans le champ des agences de sécurité sanitaire et relève aujourd’hui de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail). Des réseaux de surveillance comme le Réseau national de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P) complètent le dispositif pour identifier les risques émergents.

Bien des facteurs ont des conséquences sur la santé et le bien‐être au travail3 ; ils peuvent être de nature physique (Ex. bruit, radiations ionisantes, UV…), chimique (caractère néfaste des substances dites « CMR » : cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques) ou biologique (Ex. micro‐organismes pathogènes). Leurs effets se combinent parfois avec ceux des nouveaux modes d’organisation du travail qui peuvent être à l’origine de stress ou de maladies émergentes (Ex. risques psycho‐sociaux, troubles musculo‐squelettiques…). Ces expositions varient fortement d’un secteur d’activité à l’autre, selon le risque considéré, du fait notamment des métiers et contraintes spécifiques à chacun de ces secteurs.

Le domaine santé travail reste un domaine de recherche très actif, notamment lorsqu’il s’agit de faire le lien entre exposition et pathologie. Une question importante est « comment corréler des expositions sur le lieu de travail à des effets sur la santé ? ». Ces travaux sont rendus complexes en raison des difficultés plus grandes que par le passé, rencontrées lorsqu’il s’agit de reconstituer des expositions au travail (Ex. diversité des parcours       

2 Insee, Tableau de l’économie française, édition 2013. 

3 D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la santé se définit comme « un état complet de bien‐être physique, mental et 

social, qui ne consiste pas seulement en l’absence de maladie ou d’infirmité » (Préambule de sa charte constitutive, signée à San  Francisco, le 22 juillet 1946. 

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professionnels, évolution rapide des technologies, des substances utilisées…). D’autre part, faire la preuve qu’une maladie est la conséquence directe d’une exposition survenue au travail est difficile. En effet de nombreuses maladies ont des origines multifactorielles comme les cancers broncho‐pulmonaires, associés aux particules inhalées (Ex. fumées, produits irritants, vapeurs…) mais aussi au tabagisme actif ou passif4. Parfois aussi, ces effets sont différés dans le temps (parfois à très longue échéance comme l’illustre dramatiquement le cas de l’amiante). En outre, on observe des situations de co‐exposition dans les secteurs de l’agriculture et de la construction notamment, où les ouvriers sont exposés à plusieurs produits chimiques.

Dans ce numéro des cahiers de la recherche sont présentés 14 projets de recherches dont la plupart sont menés dans le cadre du Programme national de recherche santé environnement travail (PNR EST). Trois aspects seront successivement abordés :

La recherche sur les risques dans le monde agricole

La recherche sur les risques dans l’industrie et les services

La recherche sur l’organisation de la santé au travail en France.

 

  La Santé au travail

(Auteur : Nathalie Ruaux)  

 

      

4 Voir le projet de recherche pp. 36‐37. 

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  Le monde agricole

Au début des années 1960, la France était dépendante de pays extérieurs pour son approvisionnement alimentaire. Depuis les lois d’orientation agricole qui datent de cette même époque, l’agriculture s’est développée dans l’objectif d’augmenter sa productivité et de garantir aux consommateurs la disponibilité de produits alimentaires à des prix raisonnables, notamment à travers un usage généralisé des engrais chimiques et des pesticides, des améliorations foncières, le recours à l’irrigation.

 

Les années qui ont suivi ont constitué une période charnière pour le développement des structures agricoles et celui des filières agroalimentaires. Cette restructuration de l’agriculture a été accompagnée d’efforts pour diminuer la pénibilité du travail et intégrer la sécurité du travailleur (Ex. sécurité des machines et tracteurs agricoles ou forestiers…). Plus récemment, les aspects environnementaux ont également été pris en compte. Si la tendance générale de ces dernières années est une réduction lente mais continue de la sinistralité, le secteur agricole connaît encore des taux de fréquence et de gravité des accidents du travail comparables à ceux du bâtiment et des travaux publics (BTP) avec, dans certains secteurs, des valeurs qui y sont deux à trois fois plus grandes. Risques élevés, troubles musculo‐squelettiques (TMS), tâches pénibles, horaires atypiques… Les professions agricoles comptent parmi les plus éprouvantes. Pour cette raison, le domaine de la santé au travail fait l’objet de recherches variées. Cinq projets sont décrits dans ce présent numéro des Cahiers de la Recherche qui se répartissent en deux grands domaines de recherche.

Le premier domaine est l’exposition aux pesticides. Quatre projets portent sur ce thème et illustrent la diversité des angles d’attaque possibles.

Deux d’entre eux visent à mieux appréhender les modes d’action sur l’homme de principes actifs utilisés dans les pesticides. On traite ainsi, d’une part de la génotoxicité, c'est‐à‐dire la capacité de certaines molécules à altérer l’ADN et, d’autre part, de la dégradation d’une protéine située dans le cerveau, phénomène qui pourrait être à l’origine de la maladie de Parkinson.

Un troisième projet est une étude épidémiologique, c'est‐à‐dire qu’on tente de corréler l’apparition d’une maladie avec l’exposition à des pesticides, en suivant de vastes populations exposées ou non. Dans ce cas, ce sont certains types de cancers qui sont étudiés.

Le quatrième projet traite de la manière dont le risque est sous estimé (« invisibilisé »).

Le second domaine est lié à l’inhalation de poussières ou d’agents pathogènes. Ce sujet avait déjà été abordé dans les cahiers de la recherche numéro deux sur les « Risques sanitaires liés à la pollution des milieux aériens et hydriques », avec trois projets traitant de contaminations par des bactéries ou des champignons. Un projet supplémentaire est présenté dans ce numéro, qui porte sur le travail dans des milieux très chargés en poussières.

     

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La génotoxicité des pesticides chez les agriculteurs

Évaluation de nouveaux biomarqueurs indicatifs de la génotoxicité des pesticides chez les agriculteurs Marc AUDEBERT

 

Mots‐clés : agriculteurs, biomarqueur, cancer, génotoxicité, leucémie, lymphome, pesticides, phytosanitaires  

Si les pesticides ont constitué un énorme progrès dans la maîtrise des ressources alimentaires et l'amélioration de la santé publique (en particulier dans la lutte contre les insectes, vecteurs des maladies), le revers de la médaille est apparu rapidement : des phénomènes de résistance chez les insectes5, puis des troubles de la reproduction chez les oiseaux6, ont montré les limites et les dangers de ces substances pour l'environnement et pour les écosystèmes. Dans ces conditions, on a cherché à limiter l'exposition de la population aux pesticides.

Ainsi, la commercialisation d'une nouvelle substance est désormais soumise à une procédure rigoureuse d'homologation, qui implique l’évaluation des risques pour l'environnement et la santé humaine et leur mise en regard avec les bénéfices du nouveau produit.

L’exposition à ces produits affecte en premier lieu les agriculteurs. D’après la Mutualité Sociale Agricole (MSA), une personne sur cinq qui pulvérise ou applique un produit phytosanitaire ressent des troubles lors de l’utilisation de ces produits : irritations, maux de tête, nausées, troubles respiratoires7. Cette exposition est complexe et concerne souvent plusieurs substances. Pour mieux caractériser les dangers et l’estimation des expositions des utilisateurs de pesticides, développer des méthodologies pour l’évaluation des effets combinés (dits « effets cocktails ») et des risques sanitaires associés, la recherche nécessite le développement de nouveaux outils pour une

approche globale des risques, centrée sur la mesure de l’exposition de l’individu.

La génotoxicité

Ce corps professionnel est exposé à des risques d’autant plus élevés que certains des pesticides sont aussi des produits génotoxiques c’est‐à‐dire qu’ils peuvent altérer l’ADN, ce qui peut entrainer des cancers. Plusieurs études montrent une corrélation entre l’exposition à des pesticides et l’incidence de cancers (Ex. leucémie, lymphome non‐Hodgkinien…) chez les agriculteurs8. Pour mieux appréhender les effets génotoxique liés à de telles substances, il serait utile de disposer d’un biomarqueur, c'est‐à‐dire d’une molécule dont la présence signale des dommages à l’ADN.

Les différents dommages à l’ADN (Source : Marc Audebert) Les principaux tests de génotoxicité chez l’Homme concernent l’étude de l’altération et/ou du changement du nombre de chromosomes (Ex. test d’aberration chromosomique, test du micronoyau…)  

Inra, Toulouse       

5 Cahiers de la Recherche, Les résistances aux insecticides, antiparasitaires, antibiotiques…, Anses, octobre 2013. 

6 Cahiers de la Recherche, Les perturbateurs endocriniens en 12 projets, Anses, décembre 2012. 

8 Voir notamment l’expertise collective sur les effets des pesticides sur la santé, juin 2013 : 

http://www.inserm.fr/actualites/rubriques/actualites‐societe/pesticides‐effets‐sur‐la‐sante‐une‐expertise‐collective‐de‐l‐inserm    

8 Voir notamment l’expertise collective sur les effets des pesticides sur la santé, juin 2013 : 

http://www.inserm.fr/actualites/rubriques/actualites‐societe/pesticides‐effets‐sur‐la‐sante‐une‐expertise‐collective‐de‐l‐inserm    

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et l’altération primaire de l’ADN (Ex. test des comètes). Mais, ces tests présentent des limites. Ils sont notamment d’interprétation délicate, ce qui se traduit par exemple par des résultats qui peuvent varier d’un laboratoire à l’autre. Ils ne sont pas facilement adaptables à de grandes séries d’échantillons.

Il existe de nombreux types de dommages à l’ADN.

L’ADN est une double hélice dont l’un des brins peut se briser. On parle alors de cassure simple brin (CSB). C’est un phénomène courant (cela peut arriver de l’ordre de dix mille fois par cellule et par jour). Il existe d’autres types de dommages, induits par une large gamme de mécanismes. Dès lors, comment déterminer l’impact des pesticides sur la santé dans ce fond de dommages à l‘ADN ?

Le projet de recherche : PESTIMPACT

Un des problèmes récurrents de la santé au travail est la capacité potentielle des substances chimiques (comme les pesticides) à entraîner des effets génotoxiques chez les utilisateurs : en l’occurrence, les travailleurs agricoles.

Objectifs

Le but de l’étude de faisabilité « PESTIMPACT » est de développer des méthodes sensibles et robustes de détection de la génotoxicité des produits chimiques chez l’Homme qui soient adaptées à la réalisation de tests en grande quantité (on parle de haut débit). À partir de deux cohortes9, des tests sont effectués à partir d’échantillons de sang. Deux types de tests sont prévus :

Le test « H2AX ». Ce test porte sur les histones.

Ce sont des protéines étroitement liées à l’ADN dans le noyau des cellules. On a observé que, en cas de cassure de l’ADN, un élément de ces

histones appelé H2AX est phosphorylé (ajout d’un groupement phosphate). L’observation de cette réaction permet de mettre en évidence des dommages à l’ADN. Le test H2AX est plus sensible et plus robuste que le test « Comet »10. Ce test permet la détection de différentes classes de composés génotoxiques (Ex.

bisphénols, mycotoxines, pesticides…)11.

La mesure de la fréquence des mutations du gène Pig A. Ce gène détermine les caractéristiques d’une protéine présente à la surface des cellules. Une mutation de ce gène se traduit par une modification de la surface des cellules.

Des équipes de recherche aux expertises complémentaires (Ex. biologie cellulaire, épidémiologie, toxicologie…) vont travailler ensemble pour répondre aux problèmes d’atteinte de l’ADN liés aux pesticides.

Retombées

La mise en œuvre des biomarqueurs et des stratégies de « criblage» développés dans le projet

« PESTIMPACT » contribuera à améliorer la santé au travail et celle des consommateurs en disposant de produits chimiques plus sûrs.

   

      

9 Une cohorte est un ensemble de personnes qui est suivie pendant une étude (par exemple mesures d’expositions, dosages,  suivi médical). La première cohorte correspond à 15 agriculteurs sur lesquels des prélèvements biologiques ont été faits avant et  après l’utilisation de pesticides. La deuxième est constituée de 750 individus exposés ou non aux pesticides. 

10 Le test des comètes consiste à détruire les membranes et protéines d’une cellule qu’on veut tester après exposition à l’agent 

potentiellement génotoxique puis à faire migrer l’ADN qui forme une sorte de sphère sous l’influence d’un champ électrique. En  cas de cassure de l’ADN, un halo de fragments d’ADN migre de manière différente en formant comme une queue de comète (cf. 

Graillot EMM 2012). 

11 Cf. Khoury EMM 2013. 

L’équipe:

M. Audebert et V. Graillot

Dr. D. Zalko (Responsable de l’équipe)

Pr. B. Salles (Supérieur hiérarchique de l’équipe) Inra, Toulouse

Durée : 12 mois Financement : 40 K€

Contacts : marc.audebert@toulouse.inra.fr

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L’exposition aux pesticides : risque de lymphome et de leucémie

Exposition aux pesticides et risque de lymphome et de leucémie au sein du consortium AGRICOH : analyse combinée

Maria LÉON‐ROUX  

Mots‐clés : cancer, exposition professionnelle, leucémie, lymphome, pesticides, risque  

La France est le premier consommateur européen de produits phytosanitaires ou « pesticides » avec environ 62.000 tonnes de substances actives vendues pour l’année 2011. Ces produits sont destinés à lutter contre les nuisibles, qu’il s’agisse de végétaux (herbicides), de moisissures (fongicides) ou encore d’insectes (insecticides).

L’agriculture (les cultures spécialisées de plein champ intensives, le maraîchage, les pépinières, l’arboriculture, l’horticulture et la viticulture) constitue le secteur d’activité utilisant le plus de pesticides en France car ils améliorent le rendement moyen des terres cultivées.

Le métier d’agriculteur fait donc partie des professions les plus exposées aux pesticides. Or il existe des présomptions sur le fait que cette exposition chronique aux pesticides puisse avoir des effets sur la santé12. Parmi ces effets figurent certains cancers.

Les lymphomes et les leucémies

Par rapport à la population générale, les agriculteurs exploitants dans la plupart des pays souffrent moins des maladies chroniques (Ex. maladies cardiovasculaires et certains cancers, comme ceux du poumon, de la vessie et du côlon), mais ils affichent des taux plus élevés de cancers de la lèvre, de la peau, du cerveau, de sarcomes des tissus mous et de cancers des systèmes lymphatique13 et hématopoïétique14 que le reste de la population.

L’objectif principal de ce projet de recherche est d’estimer le risque de sous‐types de lymphomes et de leucémies associés à l’exposition aux pesticides chez des agriculteurs, recrutés dans trois pays différents.

Comment différencier ces deux maladies ?

Les lymphomes sont des cancers du système lymphatique qui se développent à partir des cellules lymphatiques qui jouent un rôle central dans notre défense immunitaire. On distingue la maladie de Hodgkin des autres lymphomes dits non‐hodgkiniens. Ainsi, le lymphome non hodgkinien est le sixième cancer le plus fréquent en France15 et son incidence a augmenté, dans le monde ;

Les leucémies (gr. leukos, blanc et haima, sang) sont des cancers des cellules de la moelle osseuse, qui peuvent être de deux types : aigu ou chronique.

International Agency for Research on France, Lyon       

12 Voir l’expertise collective de l’Inserm de juin 2013.  

13 Circulation des cellules immunitaires. Le système lymphatique comprend l’ensemble des ganglions et des vaisseaux  

lymphatiques, la moelle osseuse, la rate, le thymus, les amygdales... 

14 Création et renouvellement des cellules sanguines. 

15 Globocan 2012 : http://globocan.iarc.fr/Default.aspx  

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Elles se développent à partir des cellules de la moelle osseuse, qui produisent des cellules sanguines. La prolifération des globules blancs est caractéristique.

Le consortium d’études : AGRICOH

Le consortium AGRICOH16 regroupe vingt‐huit études de cohortes agricoles. Lancé par le National Cancer Institute (NCI) des États‐Unis, il est coordonné par le Centre international de recherche sur le Cancer (Circ) depuis octobre 2010. Ce consortium regroupe des cohortes de douze pays différents17 et permet la mise en commun de données pour déterminer les dangers potentiels pour la santé qui peuvent affecter les agriculteurs, entre autres populations : notamment, le risque de lymphomes et de leucémies associé à l’exposition aux pesticides.

Les études sur les agriculteurs dans la littérature scientifique n’ont pas montré d’effets des pesticides sur la santé, de façon uniforme et constante. L’une des raisons en est sans doute les difficultés à remonter à des expositions parfois anciennes.

D’autre part, la précision des estimations du risque devient problématique car le nombre de cas exposés à des produits spécifiques est souvent faible. Les résultats sont très hétérogènes et nécessitent d’affiner les analyses par culture, par profession, par sous‐type de maladies et par sexe par exemple. D’où la volonté des chercheurs de regrouper, à travers le monde, des données qui proviennent d’études avec un niveau de documentation similaire. Ainsi, pour caractériser l’excès de risque pour certaines tumeurs malignes en liaison avec les pesticides, des informations telles que les cultures (Ex. maïs, pommes de terre, fruits…) et l’étendue cultivée, l’utilisation de pesticides, les types et les taux d’application, les années d’utilisation, les méthodes d’application, etc., font partie des paramètres pris en compte, lorsque l’information est disponible.

Ce projet original permet d’évaluer l’excès de risque pour ces maladies dans une population active fréquemment exposée aux pesticides : les travailleurs agricoles incluant les agriculteurs actifs et les retraités. Plus précisément, il évalue si les agriculteurs exposés (les applicateurs de pesticides) ont un excès de risque par rapport aux moins ou non exposés, en utilisant des matrices d’exposition liées à certaines cultures (Ex. les fruits, le maïs, les pommes de terre…). L’information produite par ces matrices de cultures permet de quantifier l’exposition aux pesticides (fongicides, herbicides, insecticides, familles chimiques et les agents actifs spécifiques) des agriculteurs et de distinguer les facteurs professionnels et environnementaux, du mode de vie.

 

      

16 Site internet : http://agricoh.iarc.fr/  

17 Afrique du Sud (2), Canada (3), Chili (1), Costa Rica (2), États‐Unis  (7), Australie (2), Corée (1), Nouvelle‐Zélande (2), Danemark 

(1), France (3), Norvège (3) et le Royaume‐Uni (1). 

Les équipes:

Maria Léon‐Roux et Joachim Schüz

Centre International de Recherche sur le Cancer, Lyon Pierre Lebailly

Centre François Baclesse GRECAN, Caen Hans Kromhout

Utrecht University, Utrecht Isabelle Baldi

LSTE – Université Victor Segalen Bordeaux 2, Bordeaux

Durée : 28 mois

Financement : 87 K€ (Onema) Contacts : leonrouxm@iarc.fr

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Maladie de Parkinson et pesticides

Pathologie moléculaire de l’alpha‐synucléine, relations potentielles avec la maladie de Parkinson Thierry BARON

 

Mots‐clés : alpha‐synucléine, dopamine, maladies neurodégénératives, maneb, neurones, paraquat, parkinson, pesticides, roténone

 

Les maladies neurodégénératives affectent le fonctionnement du cerveau ou plus généralement le système nerveux. L’une des plus connues est la maladie de Parkinson, décrite pour la première fois en 1817 par un médecin anglais qui lui donna son nom. Cette maladie entraîne la destruction lente et progressive des neurones dopaminergiques qui se situent dans la substance noire du cerveau18. Cette maladie se manifeste par des tremblements (au repos), une lenteur et une rigidité musculaires, et des symptômes secondaires (Ex. constipation, douleur, hypersudation, troubles du sommeil…). En France, 150.000 personnes sont atteintes de la maladie de Parkinson. C’est la deuxième cause de handicap moteur chez l’adulte.

Les origines de cette maladie sont méconnues.

Plusieurs pistes ont été étudiées. La piste génétique : des formes héréditaires ont été observées mais la maladie de Parkinson intervient le plus souvent de manière sporadique. Depuis les années 1990, la piste environnementale est aussi favorisée et plusieurs études épidémiologiques cherchent et trouvent souvent des corrélations entre l’apparition de cette maladie et l’exposition aux métaux lourds (Ex.

mercure, plomb…) et/ou pesticides. Depuis mai 2012, un décret classe, sous certaines conditions, la maladie de Parkinson comme maladie professionnelle pour les personnes exposées à des pesticides.

Le rôle de l’alpha‐synucléine dans la maladie de Parkinson

Identifiée en 1988 par Luc Maroteaux19, l’alpha‐

synucléine est une petite protéine présente dans le système nerveux. Sa forme dépliée lui donne une grande flexibilité qui lui permet d’interagir avec d’autres protéines et de nombreuses molécules. Bien qu’elle soit présente chez tous les vertébrés, son activité est mal connue et beaucoup de recherches sont initiées pour comprendre son rôle. On sait que l’alpha‐synucléine joue un rôle régulateur dans la sécrétion/neurotransmission de la dopamine20 et serait impliquée, d’après plusieurs études, dans des mécanismes de protection des cellules en préservant les neurones d’une « mort cellulaire programmée » ou apoptose.

Alpha‐synucléine

 

Unité Maladies Neuro‐Dégénératives, Laboratoire de Lyon, Anses

      

18 C’est une structure du cerveau. Elle est un peu sombre car elle est riche en neuromélanine, une substance noire qui se trouve  dans les neurones dopaminergiques (voir ci‐dessous). 

19 Université de Stanford en Californie, États‐Unis. 

20 Précurseur de l’adrénaline et de la noradrénaline, la dopamine est aussi un neurotransmetteur, c'est‐à‐dire une substance qui  permet de transmettre l’influx nerveux entre deux neurones. Les neurones qui utilisent la dopamine comme transmetteur sont  dits « dopaminergiques ». La maladie de Parkinson est caractérisée par une diminution des quantités de dopamine dans le  cerveau. 

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Historiquement, ce sont les rares cas héréditaires de maladie de Parkinson qui ont permis en premier de faire le lien entre l’altération de l’alpha‐synucléine et l’apparition de troubles neurologiques. Puis, des analyses post‐mortem de cerveaux d’autres patients atteints de la maladie de Parkinson, sous forme sporadique, ont révélé également des lésions caractéristiques dans les neurones dopaminergiques de la substance noire, témoignant de l’agrégation de l’alpha‐synucléine sous une conformation21 inhabituelle, qu’on appelle les corps de Lewy. Cette agrégation de protéines est également caractéristique d’autres maladies neuro‐

dégénératives comme la maladie d’Alzheimer ou les maladies à prions. Une hypothèse avancée pour expliquer les maladies de Parkinson d’origine non génétique est qu’une substance chimique encore non identifiée pourrait mener à une agrégation de l’alpha‐synucléine, et que cette déformation pourrait ensuite se propager.

Le projet de recherche :

Des études épidémiologiques suggèrent que l’exposition d’un sujet à des pesticides comme le maneb (molécule fongicide)22, le paraquat (molécule herbicide non sélectif)23 et la roténone (insecticides)24 ou, de manière générale, à certains agents chimiques toxiques augmente le risque de développer la maladie de Parkinson. Comment la neurotoxicité de ces substances se manifeste‐t‐elle ? Pour essayer de comprendre les mécanismes, des cellules proches de celles présentes dans la substance noire ont été exposées à ces substances. Il s’agissait de cultures de cellules de neuroblastome, souvent utilisées dans les travaux sur la maladie de Parkinson. Pour certaines d’entre elles, on a simulé la maladie de Parkinson dans sa version héréditaire en introduisant à l’aide d’un vecteur viral un gène muté d’alpha‐synucléine humaine.

Les tests ont été menés à forte dose, puisque pour chaque substance, on a ajusté la concentration sur un taux de survie à 72h des cellules de 50% ou 75%.

Parmi les résultats obtenus :

On observe une forte hausse de la quantité d’alpha‐synucléine dans les cellules exposées en présence de paraquat (x2,8) et dans une moindre mesure avec le maneb et la roténone (1,7‐1,8), le glyphosate n’ayant pas d’effet. Deux explications sont avancées : une moindre efficacité des mécanismes d'élimination des protéines mal repliées interne à la cellule, ou/et une exacerbation de la synthèse de la protéine.

 

Les méthodes développées lors de ce projet ouvrent la voie à des tests pour évaluer la neurotoxicité de diverses substances chimiques.

Dans le cas de la maladie de Parkinson, des dépôts d’alpha‐synucléine, sous une forme insoluble fibrillaire, caractérisent les corps et neurites de Lewy (neurites dystrophiques)25 , inclus de façon caractéristique dans les neurones atteints. Or, le maneb, le paraquat et la roténone favorisent la formation de ces petites fibres (fibrilles) d’alpha‐

synucléine in vitro.

L’étude des effets de ces pesticides chez la souris a parfois permis d’observer à la fois l’accumulation progressive d’alpha‐synucléine dans la substance noire du cerveau et la perte progressive des neurones dopaminergiques et de la dopamine. Cela a mené au développement de modèles in vitro où on expose une culture de neurones dopaminergiques qui réagissent à ces substances. On observe plusieurs effets sur la lignée neuronale :

      

21 Les propriétés des protéines sont en grande partie dues à leur conformation, c'est‐à‐dire la forme qu’elles prennent en se  repliant naturellement. Dans certaines circonstances les protéines peuvent être mal repliées et devenir inactives voire nocives.  

22 Selon des travaux publiés en 2009 par   Sadie Costello, professeur d’épidémiologie   à l’Université de Californie, 2009 et ses  collaborateurs.  

23 Selon les études publiées en 1997 par Liou,  en 2006 par Kamel,  en 2008 par Dhillon et en 2009 par Costello. Sur le plan de la 

réglementation des produits phytosanitaires, le paraquat est une substance active interdite par l’Union européenne depuis 2007. 

24 Étude : Dhillon, 2008. Sur le plan de la réglementation des produits phytosanitaires, la roténone est une substance active  interdite par l’Union européenne depuis 2008. 

25 Dépôts anormaux d'une protéine (Ex. alpha‐synucléine) qui se forment à l'intérieur des cellules nerveuses du cerveau. 

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la perturbation des mécanismes dans lesquels sont impliqués les neurotransmetteurs ;

le blocage du transfert des substances via des vésicules à l’intérieur des neurones du réticulum endoplasmique vers l’appareil de Golgi.

La maladie de Parkinson ne se réduit pas à la seule présence de la protéine alpha‐synucléine qui se révèle parfois toxique ou neuroprotectrice. Les hypothèses varient sans que les études puissent établir les mécanismes précis d’accumulation de l’alpha‐synucléine : prolifération accrue des dépôts à l’intérieur des cellules nerveuses et/ou dégradation ralentie ?

Au‐delà du rôle de la protéine alpha‐synucléine dans certaines maladies neuro‐dégénératives, il subsiste des interrogations. Ainsi, une corrélation entre les quantités et/ou les formes de la protéine et la maladie de Parkinson ne peut être établie avec certitude qu’après autopsie du patient : analyse des lésions post‐mortem. La surexpression de l’alpha‐

synucléine est un facteur de risque de maladies neurodégénératives fréquentes. D’où la nécessité de trouver un marqueur qui pourrait contribuer à l’établissement d’un diagnostic pre mortem de la maladie de Parkinson.

 

   

         

Les équipes: Thierry Baron

Unité Maladies Neuro‐Dégénératives, Laboratoire de Lyon, Anses

Thibault Andrieu Inserm, Lyon

Financement : Anses

Contacts : thierry.baron@anses.fr

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SocioAgriPest : pesticides et santé des travailleurs agricoles Entre mise en visibilité et invisibilisation

Nathalie JAS  

Mots‐clés : agriculteurs, cancers, intoxication, herbicide, parkinson, pathologies, pesticides, protection, victimes

 

Les quinze dernières années ont été marquées par la montée des préoccupations relatives aux effets délétères des pesticides sur la santé des agriculteurs en France. Des programmes de recherche sur les expositions professionnelles aux pesticides et les maladies chroniques susceptibles d’en résulter (maladie de parkinson, cancers du sang…) ont été développés. Parallèlement, quelques dizaines d’agriculteurs ont obtenu une reconnaissance en maladie professionnelle en lien avec leur exposition aux pesticides. L’un d’entre eux a de plus obtenu en première instance la condamnation de la firme ayant fabriqué le produit à l’origine de son intoxication. En 2011, une partie de ces agriculteurs se sont réunis pour fonder l’association Phyto‐victimes, qui milite pour un contrôle plus strict des pesticides et une meilleure reconnaissance de leurs effets sur la santé des travailleurs qui y sont exposés.

Pesticides : les mécanismes de contamination Ces tendances émergentes ont contribué à alerter les pouvoirs publics, qui ont initié une série d’actions en faveur d’une meilleure protection des travailleurs exposés aux pesticides et d’une meilleure reconnaissance de maladies qu’ils peuvent induire :

vérification de l’efficacité des équipements de protection, création de tableaux de maladies professionnelles…

En dépit de ce phénomène d’émergence, l’exposition et les maladies professionnelles liées à l’usage agricole des pesticides restent largement méconnues du point de vue scientifique, et sous‐reconnues du point de vue institutionnel et social. Le projet SocioAgriPest a pour objectif de comprendre les déterminants de cette ignorance persistante. Prenant ses distances avec des approches analysant cette dernière uniquement comme le produit de dispositions psychologiques ou l’expression de cultures professionnelles de « déni du risque », le projet SocioAgriPest montre comment l’ensemble des dynamiques contribuant à rendre visibles les maladies professionnelles induites par les pesticides produisent simultanément des angles morts autour de cette question. Il s’agit dès lors de comprendre comment les différents acteurs qui participent à l’actuelle prise de conscience de la dangerosité des pesticides pour les professionnels approchent ce problème, les types de savoir qu’ils mobilisent, les relations qu’ils nouent les uns avec les autres. Pour cela, les équipes associées au projet explorent plus particulièrement quatre mondes sociaux dans lesquels sont produites des connaissances sur les liens entre pesticides et santé des travailleurs :

La recherche scientifique, et notamment les programmes de recherche en épidémiologie, en toxicologie, en ergonomie ou en expologie qui, depuis une quinzaine d’années, produisent des données sur cet enjeu en France.

 

RiTME, Inra, Ivry‐sur‐Seine

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Le monde des institutions de prévention qui déploient des instruments pouvant contribuer à rendre visibles les effets délétères des pesticides sur les travailleurs exposés (réseau Phyt‐attitude de la MSA, Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles de l’Anses…)

Le monde des mobilisations « profanes » produisant des savoirs sur les expositions des professionnels aux pesticides (Phyto‐

victimes, Générations futures…)

Le monde agricole « ordinaire », et les diverses institutions jouant un rôle dans les prescriptions relatives à l’usage des pesticides (coopératives d’achats, chambres d’agriculture, conseillers en prévention, groupements de producteurs ou distributeurs imposant des cahiers des charges comportant des exigences relatives aux pratiques phytosanitaires…)

Le projet SocioAgriPest permettra d’identifier à travers ces différents mondes sociaux quelles sont les dynamiques qui portent et celles, au contraire, qui fragilisent ou contraignent l’acquisition de connaissances approfondies sur l’exposition aux pesticides en milieu professionnel agricole et les effets sur la santé des travailleurs agricoles.

     

           

Les équipes:

Nathalie Jas et Christian Nicourt RiTME, Inra, Ivry‐sur‐Seine François Dedieu

SenS, Inra, Marne‐la‐Vallée Jean‐Noël Jouzel

CSO, CNRS/Sciences Po, Paris Jorge Munoz

ARS, Université de Bretagne Occidentale, Brest Giovanni Prete

Iris, Université Paris XIII Gilles Tetart

LEA, Université de Tours/RiTME, Inra, Ivry‐sur‐Seine Durée : 36 mois

Financement : 197 K€ (Onema) Contacts : nathalie.jas@ivry.inra.fr

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La qualité de l’air des élevages de poules pondeuses

L’exposition aux poussières aériennes des travailleurs en productions avicoles Adeline HUNEAU

 

Mots‐clés : air, ammoniac, asthme, élevages, essoufflements, expectorations, œufs, pondeuses, poulaillers, poules, poussières, sifflements, toux

 

L’Ouest de la France (Bretagne, Basse Normandie et Pays de la Loire) constitue la principale région de production d’œufs, fournissant 47,3 % de la production nationale française d’œufs en 2008. Suite à la directive européenne 1999/74/CE, le parc de poulaillers de pondeuses a connu une évolution importante, avec le développement des cages aménagées et de volières. En effet, depuis le 1er janvier 2012, les poules ne peuvent plus être logées en cages conventionnelles en Europe. Elles peuvent être élevées en cages aménagées où elles disposent de plus d’espace (750 cm2 par poule), d’une aire de grattage et de picotage, d’un nid et de perchoirs, ou au sol avec de la litière. En France, sur un cheptel de 48 millions de pondeuses, environ 30 millions de places en cages conventionnelles étaient à remplacer, dont 16 millions juste en Bretagne.

La qualité de l’air en élevage avicole soulève des interrogations en matière de protection de la santé des travailleurs. L’air dans ces bâtiments se caractérise par des taux élevés de poussières et de certains gaz, principalement l’ammoniac.

L’exposition à ces polluants peut entraîner une altération de la santé respiratoire des travailleurs.

C’est dans ce contexte qu’une étude épidémiologique a été menée dans les élevages de poules pondeuses de l’Ouest de la France pour :

Étudier la qualité de l’air dans ces élevages et identifier les pratiques d’élevage qui l’influencent ;

Estimer l’exposition des éleveurs aux poussières aériennes ;

Mesurer l’impact de cette exposition sur la santé des éleveurs.

Le projet de recherche : AIRPOUL

Depuis 2005, l’étude épidémiologique AIRPOUL suit une cohorte de 60 éleveurs de poules pondeuses afin d’évaluer leur exposition aux poussières aériennes et son impact sur leur santé respiratoire. La moitié des éleveurs travaille dans des poulaillers avec des cages et l’autre moitié dans des bâtiments où les poules sont au sol.

Les élevages de poules pondeuses (Source : Maryse Guinebretière, Ploufragan) La santé respiratoire des éleveurs

Tous les éleveurs participants ont été reçus en visite médicale par les médecins de la Mutualité Sociale Agricole, en 2006 puis 2011. Le suivi de leur santé respiratoire fait clairement apparaître une augmentation de la fréquence des maladies allergiques, notamment de l’asthme. Quant aux symptômes respiratoires chroniques, leurs fréquences sont plus élevées chez les éleveurs que dans la population générale française : 7,1 % des éleveurs souffrent de toux,

 

Laboratoire de l’Anses, Ploufragan

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