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L’histoire de l’enseignement du polonais en France

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Academic year: 2021

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CENTRE DE CIVILISATION POLONAISE UNIVERSITÉ PARIS-SORBONNE

POLONICUM, CENTRE D’ENSEIGNEMENT DE POLONAIS LANGUE ÉTRANGÈRE UNIVERSITÉ DE VARSOVIE

LE

POLONAIS

LANGUE ÉTRANGÈRE

ENSEIGNER ET APPRENDRE

SOUS LA DIRECTION DE Leszek Kolankiewicz ETD’Andrzej Zieniewicz

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aPPrenants

formations

cursus

aPPrenanTs -FormaTions -cursus

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kingA siAtkowskA-cALLeBAt

l’histoire de l’enseignement

du Polonais en france

Cela fait plus de 173 ans que l’apprentissage de la langue et de la culture polonaise est institutionnalisé en France. Cette longue histoire des cours de « polonais », à différents niveaux et avec des objectifs très divers, reste cependant méconnue et mériterait qu’on s’y intéresse davantage. À l’initiative de Maria Delaperrière, les prochaines Assises de l’Enseignement du polonais en France, organisées depuis par la Société française d’études polonaises, devraient se pencher sur l’étude de cette histoire qui reste indis­ sociable de l’enseignement du polonais langue étrangère d’au­ jourd’hui. L’objet de ma contribution est de proposer un aperçu synthétique, nécessairement sommaire, comme prolé gomènes à ce domaine qui n’a jusqu’ici fait l’objet que d’études ponctuelles 1.

Je traiterai des différents niveaux d’apprentissage, du primaire au supérieur, limitant mon information aux structures institutionna­ lisées : la très large palette des cours, proposés par des organismes associatifs, dépasse en effet les limites de cette brève présentation.

Lorsque l’on considère dans son ensemble l’histoire de l’ensei­ gnement du polonais en France, plusieurs traits majeurs se dé­ gagent : les liens étroits, d’une part, qui unissent le rayonnement de la langue et de la culture polonaises à la situation politique du pays, à commencer par ses débuts, désormais mythiques, au Collège de France, en passant par les créations des principales chaires de polonais dans les universités ou des postes de moni­ teurs de langue dans les écoles primaires, jusqu’à l’ouverture du concours de l’Agrégation. Cette résurgence de la grande Histoire dans la petite histoire de l’enseignement du polonais est certai ­

1 Si les débuts au Collège de France ont suscité la curiosité de nombreux chercheurs

polonais et français, et si une monographie a été consacrée à l’enseignement du polonais dans le Nord Pas­de­Calais, il reste encore beaucoup à écrire sur cette histoire.

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nement plus frappante que pour d’autres langues étran gères en­ seignées aux Français ; elle tient compte des relations politiques étroites des deux pays, mais aussi de la forte présence polonaise dans l’Hexagone. D’autre part, les variations de l’offre s’accom­ pagnent souvent de changements de profil d’élèves ou d’étudiants. Le public qui suivait les cours de polonais en 1840 n’est pas le même que celui qui les suivait en 1981 ou qui les suit en 2014. Les méthodes utilisées s’adaptent à ce public, tout en suivant l’évolu­ tion méthodologique de la pédagogie des langues vivantes dans leur ensemble. Enfin, comme pour d’autres langues de la diaspo­ ra, les études de polonais se déroulent sous deux auspices : d’une part, celui du système scolaire et universitaire français, régi par les autorités françaises ; celui, d’autre part, qui émane aussi bien d’organismes privés que d’organismes officiels polonais. Cela mène parfois à des situations assez complexes et inédites par rapport à d’autres langues étrangères 2.

En présentant les grandes lignes de l’évolution de cet ensei gne­ ment, nous nous arrêterons d’abord sur l’enseignement uni ver­ sitaire, puis sur l’enseignement primaire et le secondaire.

L’enseignement supérieur :

du collège de france aux départements de polonais

Jacques Veyrenc, auteur de l’Histoire de la slavistique en France 3,

ouvrage consacré avant tout à l’enseignement du russe dans le pays de Voltaire, établit un constat qui nous importe au premier chef : le fait que l’attrait pour les études slaves en général est apparu en France sous l’influence de l’intérêt et de la sympathie de la France pour la Pologne. En effet, la Russie de Pierre le Grand ou,

2 Par exemple l’organisation de l’école polonaise à Paris ou, plus récemment, le statut des

moniteurs de langue polonaise ou la gestion complexe des sections internationales.

3 Jacques Veyrenc, « Histoire de la slavistique française », in Beiträge zur Geschichte der

Slawistik in nichtslawischen Ländern, éd. Josef Hamm, Günther Wytrzens, Wien, Verlag

der Österreichischen Akademie der Wissenschaften (Schriften der Balkankommission, Linguistische Abteilung, t. XXX), 1985, p. 245­303. Disponible en ligne http://www. etudes­slaves.paris­sorbonne.fr/IMG/pdf/J._Veyrenc_Histoire_de_la_slavistique_ francaise_Wien_OAW_1985_. pdf (consulté en janvier 2014).

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davantage encore, celle de Catherine II intéresse les Français, et, à partir de 1800 paraissent nombre d’ouvrages consacrés à la langue et à la culture russe 1. L’enseignement du « russe », compris comme

un enseignement de langue et de culture, ne débutera toutefois qu’en 1840 avec l’élaboration de la chaire de « Langue et littéra­ ture slaves », où langue et littérature restent au singulier 2 et, plus

étonnant encore, cette chaire sera dédiée au grand poète polonais Adam Mickiewicz (1798­1855). Sa création est par ailleurs le fruit de la collaboration de l’Hôtel Lambert, à l’initiative d’Adam Jerzy Czartoryski (1770­1861), et des autorités françaises 3. Elle n’aurait

sans doute pas vu le jour, ou en tout cas pas sous cette forme, s’il n’y avait pas eu à l’époque près de dix milles réfugiés polo­ nais accueil lis en France après l’échec de l’insurrection de 1830. Mickiewicz, au terme de quatre années d’un enseignement que caractérise un panslavisme certain 4, se voit écarté de cette chaire 5.

L’enseignement de « la » langue et de « la » littérature slaves est alors confié à Cyprien Robert (1807­1865) auquel succédera en 1857 Alexandre Chodźko (1804­1891). Celui­ci assure les cours au Collège de France jusqu’en 1883. Autrement dit, durant plus de 40 ans, l’enseignement des langues et littératures slaves s’effectue sous une enseigne essentiellement polonaise, même si les études comparatistes y occupent une place importante.

1 Idem, p. 245­246.

2 Cette formule est un choix politique imposé par la Russie. Mickiewicz n’a d’ailleurs

jamais été nommé sur cette chaire qui ne deviendra la chaire de Langues et littératures slaves (au pluriel) qu’en 1884, cf. Zofia Mitosek, « Mickiewicz vu par les Français » in Romantisme n° 72, 1991, p. 49­74, François­Xavier Coquin, « Un regard sur Mickiewicz » in Le verbe et l’histoire. Mickiewicz, la France et l’Europe, F.­X. Coquin et M. Maslowski (dir), Paris, Institut d’études slaves, 2002, p. 31, F.­X. Coquin, Leçon inaugurale, Paris, Collège de France, 1994, p. 7.

3 Coquin, F.­X, « Un regard sur Mickiewicz », op. cit., p. 31.

4 Les cours de Mickiewicz sont publiés sous le titre Les Slaves : cours professé au Collège

de France, vol 1 (1840­41) et vol 2 (1842­1844).

5 Mickiewicz se voit écarté du Collège de France, selon certains à cause de son caractère

mystique abscons, influencé par la pensée de Towiański (cf. Veyrenc, op. cit. p. 247, Coquin, op. cit., p. 32), selon d’autres à cause d’un panslavisme dangereux, car prorusse (S. Fiszman, « Materiały mickiewiczowskie w paryskich Archives Nationales »,

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C’est seulement en 1917, lorsque Zygmunt Lubicz­Zaleski (1882­1967) commence à assurer des cours de polonais à l’Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO) qu’il sera possible d’apprendre le polonais dans un établissement supérieur français. Zygmunt Lubicz­Zaleski poursuit cet enseignement jusqu’en 1920. En 1921, ce même établissement se voit doté d’une chaire de polonais confiée à l’éminent grammairien et historien Henri Grappin (1881­1959), auteur de l’unique grammaire polonaise complète éditée en français 6.

C’est à Zygmunt Lubicz­Zaleski, Délégué du ministre polonais des Cultes et de l’Instruction, chargé de veiller à la diffusion de la langue et de la culture polonaises en France, qu’on doit quelques années plus tard, en 1927, la création d’un enseignement de polonais à la faculté de Lille, dans une région où vit une impor­ tante minorité polonaise. Le premier responsable en est Antoine Martel (1899­1931), suivi par Wacław Godlewski (1906­1996) 7.

La même année un lectorat de langue polonaise est créé à l’Université de Lyon, où il faudra attendre le début du XXIe siècle

pour qu’un cursus plus complet de polonais soit proposé (dans le cadre de LEA). Puis, l’enseignement du polonais est initié en 1935 à Toulouse, à la Faculté de lettres qui donnera plus tard naissance au Département de Langues slaves de l’Université du Mirail.

En 1924 la France et la Pologne signent une convention qui auto rise l’ouverture de chaires de littérature polonaise et de lecto rats dans sept villes (Paris, Lille, Strasbourg, Nancy, Lyon, Montpellier et Toulouse) 8. Ces lectorats deviennent des lieux

où se développent les études polonaises à l’époque de l’entre­

6 Grammaire de la langue polonaise, Paris, Institut d’études slaves, 1942, est rééditée

encore au début du XXI e siècle (dernière édition 2003).

7 Maître de conférences de langues et littératures polonaise et russe, auteur de deux

thèses : « Michel Lomonosov et la langue russe », « La langue polonaise dans les pays

ruthènes : Ukraine et Russie blanche, 1569-1667 », (cf. http://evenements.univ­lille3. fr/80ans­polonais/?Historique, consulté en mai 2013).

8 Cf. http://documents.univlille3.fr/files/pub/www/formations/ufr/erso/polonais/ infos_complementaires.pdf aPP renan T s -Forma T ions -c ursus

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deux­guerres, avec des chercheurs dont les noms resteront dans l’histoire de la slavistique française : Wacław Jan Godlewski à Lille, Zygmunt Markiewicz (1909­1991) à Lyon, Léon Kołodziej à Montpellier, Edmond Marek à Toulouse et Maria Szurek­Wisti (1914­1980) à l’INALCO 1. Lorsqu’on évoque l’époque de l’entre­

deux­guerres, il faut également mentionner le nom de l’ « am­ bas sadeur des lettres polonaises », Paul Cazin (1881­1963), traducteur et spécialiste de la littérature polonaise qui a enseigné au Centre d’études polonaises à Paris, et à partir de 1957 à Aix­ en­Provence 2.

Si les études polonaises connaissent à la veille de la guerre une croissance considérable, l’immédiat après­guerre sera une période difficile pour le développement de l’enseignement du polonais en France, essentiellement pour des raisons politiques. Il faudra attendre la fin des années 1950 pour que la situation évolue favorablement. C’est notamment les échanges entre les intellectuels français et polonais au lendemain du « dégel » qui prépareront un climat favorable à leur développement 3. L’année

1961 est particulièrement fructueuse, puisque deux chaires de professeur de polonais sont créées : l’une à la Sorbonne, où des cours de littérature polonaise sont dispensés à partir de 1952 par Jean Fabre (1904­1975) dans le cadre de la littérature comparée, et où cette première chaire sera occupée par Jean Bourrilly (1911­ 1971) 4, et la seconde à Nancy, un autre lieu fort de l’immigration

polonaise, où le poste de professeur sera confié à Zygmunt

1 J. Veynrenc, op. cit. p. 273. 2 Ibid. p. 272.

3 Cf. Marcin Frybes, « L’Octobre polonais et ses conséquences pour les relations franco­

polonaises », in 1956, Georges Mink et al. (dir.), Une date européenne, Lausanne et Paris 2010, Les Éditions Noir sur blanc et Société historique et littéraire polonaise, p. 253­262.

4 L’Esquisse de l’histoire du Département de polonais à l’université de Paris­Sorbonne

est présentée dans le volume Le Département de polonais 1961-2011, Paris 2011, publié à l’occasion du jubilé (Kinga Siatkowska­Callebat, avec la collaboration d’Anne­ Elisabeth Clef), disponible sous http://www. paris­sorbonne.fr/IMG/pdf/50_ans_PL. pdf.

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Markiewicz. Un an plus tard, en 1962, le Centre de civilisation polonaise, dirigé par Bronisław Geremek (1932­2008), commence son activité auprès de la Sorbonne.

Un autre moment où l’Histoire joue un rôle important est l’année 1981 et l’instauration de l’état de guerre par le général Jaruzelski en Pologne. Cette année voit la création de trois postes (contre un seul annuel 5) être pourvus au concours de l’agréga­

tion, ainsi que la création de plusieurs postes d’assistant associé, destinés aux réfugiés politiques, et qui seront par la suite trans­ formés en postes de maître de conférences, permettant ainsi aux équipes universitaires d’assurer une plus grande cohésion à l’enseignement 6.

Au début des années 2000, période qui représente un véritable âge d’or de l’enseignement du polonais dans les universités fran çaises, aussi bien par les services offerts que par le nombre des étudiants, il existait en France quatorze établissements d’enseignement supérieur, dont quatre assurant un cursus complet de polonais Langue littérature et civilisation étrangères (LLCE), allant jusqu’au Doctorat. À la rentrée 2013, ils ne sont plus que trois à proposer le cycle LMD­LLCE : l’Institut national des langues et cultures orientales (INALCO) et l’université Paris­Sorbonne dans la capitale, ainsi que l’université Charles de Gaulle à Lille. L’Université de Picardie (anciennement de Nancy 2) propose le cycle LEA en présentiel, alors que la licence, le Master et les études doctorales LLCE sont assurés depuis 2009 par un cursus de téléenseignement. Par ailleurs, la licence de polonais LLCE est proposée par l’université de Toulouse­le ­Mirail, et de nombreux centres proposent le DU de polonais et/ ou l’enseignement de cette langue dans le cadre des études en

5 Cf. à ce sujet le chapitre consacré à l’enseignement primaire et secondaire.

6 Cf. Włodarczyk, Hélène, « Les études et les recherches de polonais et sur la Pologne »

in La slavistique française 1980-2000, Pierre Gonneau et al., Contribution à l’histoire

de la slavistique dans les pays non slaves, Travaux publiés par l’Institut d’études slaves,

Tom XLVI, 2005, p. 317­360. aPP renan T s -Forma T ions -c ursus

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LEA, ainsi que les UE découverte : l’université de Bourgogne à Dijon, les universités de Caen, d’Aix­Marseille, de Bordeaux et de Lyon, alors que des modules optionnels proposant l’initiation à la langue sont assurés également par l’Université de Picardie, celles de Strasbourg, de Grenoble et de Montpellier. Enfin, dans le cadre de la formation continue, les cours de polonais sont assurés par le Centre de civilisation polonaise auprès de Paris­Sorbonne. Il faut cependant noter que nombre de ces enseignements présentent un caractère précaire : reposant sur le seul poste de lecteur, ils sont menacés de disparition avec la suppression de ces postes, alors que chaque départ à la retraite dans les départements les mieux représentés exige une lutte difficile pour leur sauvegarde 1.

L’enseignement primaire et secondaire : des « cours militaires » au polonais LV3

La vocation première des établissements supérieurs est de familiariser le public francophone avec le polonais en tant que langue étrangère parmi d’autres. Cependant, la langue polonaise est également une langue de la diaspora en France. Plusieurs vagues successives, à commencer par celle d’après l’insurrection de 1830, en passant par l’émigration économique des années 1920, jusqu’à l’émigration les années 1980, ont amené sur le sol français des familles avec des enfants en âge d’être scolarisés. Sans entrer dans les détails de cette histoire complexe – pour plus de précisions, on peut consulter un ouvrage publié en 1994, qui est le fruit des minutieuses recherches d’Edmond Gogolewski de l’Université Lille 3 2 ­, nous pouvons diviser la longue période

qui va des années 1830 jusqu’à nos jours en deux périodes : la première, où l’enseignement du polonais (qui comprend souvent bien plus que la seule langue) est essentiellement entre les mains

1 Pour la seule année universitaire 2014­2015, deux postes de lecteurs (Grenoble et

Caen) et deux postes de professeurs (Nancy et Paris­Sorbonne) sont menacés de disparition.

2 Gogolewski, Edmond, La langue polonaise dans l’enseignement élémentaire et

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des Polonais, c’est­à­dire de différents organismes religieux ou laïcs aidés par les Polonais vivant dans le pays ; et la deuxième, où les autorités françaises mettent en place, de manière progressive, un enseignement institutionnalisé, notamment à partir de la mise en place du concours de l’agrégation de polonais.

C’est encore à l’initiative du prince Adam Jerzy Czartoryski que la Société de Secours aux Étudiants, fondée en 1832, créa les premiers « cours militaires » de polonais à Bourges, Besançon, Dijon, Avignon, Châteauroux, Cahors et Paris et que des écoles polonaises ont été ouvertes à Nancy en 1833 et à Orléans en 1834. Ces premières institutions n’ont cependant pas pu œuvrer longtemps, faute de moyens financiers suffisants, et la Société elle­même cessa ses activités en 1847. En revanche, une nouvelle institution, financée cette fois par les Polonais de Pologne, et fondée par la Société d’Éducation nationale des enfants des émigrés polonais 3, ouvrit ses portes en 1844, d’abord rue des

Fossés­Saint­Jacques, puis dans le faubourg des Batignolles (d’où son nom d’École polonaise des Batignolles). Après la chute de l’insurrection de Janvier 1863, les dons versés pour les besoins de l’école diminuèrent de façon catastrophique. C’est alors que le gouvernement français accepta de lui venir en aide en lui versant une subvention, (en lui attribuant ainsi la qualité d’un établissement public), tout en lui laissant le statut d’une école privée. Après 1874, l’École, durement éprouvée par la défaite de la France et les événements de la Commune de Paris, fut transférée au 15, rue Lamandé, ses locaux actuels 4.

À partir de ce moment, les deux acteurs, français et polonais, vont œuvrer de concert dans le domaine de l’enseignement primaire et secondaire en France qui connaîtra des périodes de clandestinité relative, une clandestinité cependant tolérée par les

3 Towarzystwo Wychowania Narodowego Dzieci Wychodźców Polskich, présidée par

A. Mickiewicz dans les années 1854­1855.

4 Gogolewski, E., op. cit., p. 19. Un bref historique de l’école est présenté également sur

le site http://mairie17.paris.fr/mairie17/jsp/site/Portal.jsp?page_id=431. aPP renan T s -Forma T ions -c ursus

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autorités françaises, et qui bénéficiera d’une aide régionale, plus marquée notamment dans le Nord­Pas­de­Calais, en Normandie ou à Paris…1

À la veille de la Deuxième Guerre mondiale, l’enseignement du polonais bénéficie d’une situation relativement privilégiée qui se concrétise par la création, le 29 juillet 1938, du concours de l’agrégation de polonais, recrutant les enseignants du secondaire 2 ;

celui­ci ne sera cependant opérationnel que quarante années plus tard, soit en 1978, proposant un poste par an jusqu’en 1992 (exception faite de l’année 1981, où trois postes sont pourvus), puis un poste tous les deux ans jusqu’en 2004, et depuis de façon aléatoire (uniquement en 2005 et en 2010).

Tout comme les études polonaises dans le supérieur, les cours de langue dans les écoles subissent les aléas de l’Histoire, faisant parfois l’objet de pressions politiques. C’est ainsi qu’aux lendemains de la Seconde guerre mondiale, les écoles privées des anciennes compagnies minières passent sous le contrôle de Varsovie et que, en raison de leurs activités politiques, les enseignants polonais sont priés de quitter la France. La Pologne riposte à cette décision par le renvoi des professeurs français, exerçant dans le pays. C’est alors que les organisations polonaises de France interviennent auprès du Ministère de l’éducation français pour qu’un enseignement du polonais, destiné aux enfants polonais scolarisés en France, soit assuré par des moniteurs indépendants, n’entrant pas dans les rapports de force instaurés par la guerre froide 3. En 1949, un statut particulier est proposé

aux moniteurs de polonais qui feront exception dans le paysage de l’éducation nationale en France jusqu’à nos jours. Actuellement, sept monitrices assurent des cours de polonais facultatif dans les

1 Idem., p. 10­12.

2 Une proportion non négligeable d’agrégés de polonais intègre aussi les universités (à

ce jour six détachés au supérieur sur un total de vingt­quatre d’agrégés, sans compter ceux qui sont chargés de cours dans le supérieur, tout en gardant leur enseignement dans le secondaire).

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écoles primaires, plus rarement dans les collèges, en conduisant parfois leurs élèves jusqu’au baccalauréat, si aucun enseignement n’est proposé dans le secondaire de leur secteur. Elles sont réparties entre le Nord­Pas­de­Calais, Strasbourg et l’Ile­de­France. Mais leur statut particulier pose un certain nombre de problèmes administratifs et rend leur enseignement très précaire. En effet, bien que le nombre d’élèves soit important, certaines monitrices intervenant dans une dizaine d’établissements et pouvant avoir jusqu’à 200 élèves, depuis quelques années, chaque départ à la retraite entraîne la fermeture des cours ou la répartition des élèves entre d’autres monitrices de la région. C’est ainsi que l’enseignement du polonais a disparu en Normandie, alors qu’une forte minorité polonaise y était encore présente au milieu du XXe siècle, et il s’épuise progressivement dans la région du Nord­

Pas­de­Calais 4.

L’enseignement du polonais en tant que troisième langue vivante (LV3) existe dans les lycées publics depuis les années 1950. L’instauration du concours d’agrégation en 1978 a contribué à la relative pérennisation de ces cours qui, actuellement, sont assurés dans huit lycées et un collège du secteur public (Lille, Lens, Neoux­les­Mines, Béthune, Fouquières­lès­Lens, Paris, Vanves, Bordeaux et Toulouse), ainsi que dans plusieurs établissements privés, sous ou hors contrat. Il est également possible de présenter le polonais au baccalauréat en tant que première ou deuxième langue vivante, mais aucun enseignement spécifique, en dépit des démarches émanant de l’inspection générale, n’a jusqu’ici été proposé de manière officielle 5. Tous les agrégés, actuellement en

poste, ont le statut de TZR (titulaire zone de remplacement), ce qui fragilise leur présence dans les établissements où ils exercent, et les amène parfois à proposer des cours du type LIE (langue

4 Sur douze monitrices en 2007, il ne reste plus que la moitié aujourd’hui.

5 Les enseignants prennent en charge la préparation des élèves présentant le polonais

LV1 ou LV2 au baccalauréat de manière individuelle.

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inter­établissements), dispensés en dehors d’un cursus classique, en cours du soir, et regroupant les élèves d’une zone plus large 1.

Il faut ajouter à cela quatre établissements internationaux dotés de sections polonaises à Lyon, Strasbourg, Saint­Germain­en­ Laye et Paris. Les deux premiers proposent un cursus complet allant du Cours Préparatoire jusqu’au baccalauréat, les deux autres l’enseignement au collège et au lycée. Le projet d’une ouverture de section polonaise dans le primaire est envisagé à Saint­Germain­ en­Laye. Il s’agirait d’une formation d’excellence, destinée à des élèves maîtrisant bien la langue polonaise, c’est pourquoi un test de niveau déterminerait l’admission dans la section. Les élèves de ces lycées présentent l’Option Internationale du Baccalauréat (OIB) qui est composée d’un baccalauréat français complété par des épreuves de langue et de littérature polonaises, ainsi que d’histoire et géographie polonaises, enseignées dans la langue. L’OIB français est reconnu par la majeure partie des universités polonaises, permettant ainsi aux élèves d’entreprendre des études supérieures en Pologne. Très actives et appréciées par les établissements qui les accueillent, les sections internationales polonaises comptent de plus en plus d’élèves, et de nouvelles initiatives de création (comme celle du lycée Charles de Gaulle à Dijon) démontrent l’intérêt croissant des Français pour ce type d’enseignement.

Bilans et perspectives

Comme nous venons de le voir, l’enseignement du polonais en France a connu une évolution importante par rapport à ses débuts au XIXe siècle ; en effet, le nombre des établissements de

tous niveaux a connu une croissance importante tout au long

du XXe siècle. Notons que, pour bien mesurer l’ampleur du

phénomène, il faudrait mentionner les cours privés ou associatifs, qui sont très nombreux et qui ne pouvaient pas être pris en compte

1 Il s’agit d’une pratique mise en place dans la région parisienne, où les cours, communs

aux académies de Paris, Versailles et Créteil, pour les classes de la seconde à la terminale sont proposés au lycée Montaigne (Paris) et pour les classes préparatoires et les BTS au lycée Michelet (Vanves).

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dans cette présentation, pas plus que les prestations proposées par les autorités polonaises 2.

Créée en 1983, présidée dans un premier temps par l’his­ torien Daniel Beauvois (1938) en tant que Société des profes­ seurs de polonais, devenue en 1992, sous la présidence d’Hélène Włodarczyk (1950), la Société française d’études polonaises (SFEP) a joué un rôle prépondérant en encourageant la colla­ boration entre enseignants, chercheurs, journalistes, et tous les passionnés de la Pologne, et en veillant au maintien de l’offre de l’enseignement du polonais en France. La SFEP sera par la suite présidée par Maria Delaperrière (1941), Michel Masłowski (1944) et Marek Tomaszewski (1947). Elle constitue un lien utile entre les enseignants à tous les niveaux, et ce notamment grâce à l’orga­ nisation des Assises de l’enseignement du polonais en France 3.

Il apparaît par ailleurs que le statut de la langue polonaise durant toutes ces années a évolué : autrefois langue de la dias­ pora, méconnue des Français, elle est désormais devenue la langue étrangère d’un grand pays de l’Union Européenne, véritable par­ tenaire politique et économique de la France. Du fait de réformes visant avant tout à réaliser des économies budgétaires, le main­ tien de l’offre d’enseignement du polonais dans les écoles et les universités françaises s’avère cependant extrêmement difficile. Chaque année apparaissent des difficultés d’ordre administra­ tif et des menaces de fermeture de « petites sections ». On doit en outre affronter le problème de réactivation de l’agrégation de polonais : depuis l’entrée de la Pologne dans l’Union Européenne, le concours n’a été proposé que deux fois et « suspendu » depuis. Dans le contexte des départs à la retraite des premiers agrégés de polonais, ce « gel » s’avère catastrophique.

2 Outre l’école parisienne, il existe des écoles auprès des consulats polonais. Il faut aussi

évoquer les cours regroupés autour des paroisses polonaises et des écoles privées, très actives, comme Nova Polska à Paris.

3 Les Assises ont été organisées en 2001, 2006 et 2012.

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En matière d’économies budgétaires, on pourrait certainement tirer des leçons de l’exemple de la réussite des sections inter­ na tionales qui sont d’obédience mixte, l’enseignement et les program mes étant approuvés conjointement par les ministères français et polonais, les locaux offerts par le partenaire français et les enseignants rémunérés par la Pologne (ce qui n’est d’ailleurs pas sans poser de problèmes aux professeurs résidant en France).

Pour conclure, il semblerait qu’une collaboration étroite entre les autorités polonaises et françaises soit tout à fait indispensable pour pérenniser la présence et le développement de la langue polonaise en France. Cette collaboration donne en effet de très bons résultats dans le supérieur. Le double Master franco­polonais proposé depuis 2007 par l’université de Paris­Sorbonne et celle de Varsovie connaît une évolution importante. Sur son exemple vient d’être créée une structure comparable à Bruxelles. L’Institut des Sciences Politiques de Paris, avec son antenne à Dijon, pro­ pose également un double diplôme Science Po – Szkoła Główna Handlowa de Varsovie. Sans verser dans une vision idéaliste, car la préoccupation de la sauvegarde de l’offre existante nous voile parfois son évolution, on ne peut que constater que cette collabo­ ration polono­française est particulièrement réussie, et que c’est dans ce sens qu’il faudrait sans doute œuvrer dans les années à venir.

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