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Développement rural dans la petite région rurale de Mouzaki (Grèce) : du territoire identitaire au territoire- réseau Goussios D. in

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Academic year: 2022

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Développement rural dans la petite région rurale de Mouzaki (Grèce) : du territoire identitaire au territoire- réseau

Goussios D.

in

Chassany J.P. (ed.), Pellissier J.-P. (ed.).

Politiques de développement rural durable en Méditerranée dans le cadre de la politique de voisinage de l' Union Européenne

Montpellier : CIHEAM

Options Méditerranéennes : Série A. Séminaires Méditerranéens; n. 71 2006

pages 153-167

Article available on lin e / Article dispon ible en lign e à l’adresse :

--- http://om.ciheam.org/article.php?ID PD F=6400067

--- To cite th is article / Pou r citer cet article

--- Goussios D . Développemen t ru ral dan s la petite région ru rale de Mou zaki ( Grèce) : du territoire iden titaire au territoire-réseau . In : Chassany J.P. (ed.), Pellissier J.-P. (ed.). Politiques de développement rural durable en Méditerranée dans le cadre de la politique de voisinage de l'Union Européenne . Montpellier : CIHEAM, 2006. p. 153-167 (Options Méditerranéennes : Série A.

Séminaires Méditerranéens; n. 71)

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http://www.ciheam.org/

http://om.ciheam.org/

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DŽveloppement rural dans la petite rŽgion de Mouzaki (Gr•ce) :

du territoire identitaire au territoire-rŽseau

Dimitris GOUSSIOS

UniversitŽ de Thessalie, Ecole Polytechnique

DŽpartement dÕAmŽnagement, dÕUrbanisme et de DŽveloppement rŽgional Laboratoire de lÕEspace rural

RŽsumŽ. CÕest dans le cadre de la rŽorganisation territoriale de 1997 en Gr•ce quÕil faut situer les dynamiques de dŽveloppement actuelles. De fait, la Gr•ce a procŽdŽ ˆ un regroupement de 6000 communes en 1000 D•mes, les 13 RŽgions initiales restant sous le contr™le de lÕEtat du moins pour ce qui concerne la rŽpartition des ressources et lÕexŽcution des programmes nationaux et europŽens. De fait les Žchelles pertinentes pour une croissance endog•ne ne sont pas toujours assurŽes faute de correspondance entre les limites administratives des nouveaux d•mes et la rŽalitŽ des territoires en Žmergence de sorte quÕil nÕy a pas de reprŽsentation institutionnelle adŽquate des forces vives ˆ lÕÏuvre. Il faut nŽanmoins tenir compte de la crŽation d•s les annŽes 1980 dÕAgences de DŽveloppement (ANKA) dont les principaux actionnaires sont les municipalitŽs et les CoopŽratives. Ces agences dŽpassent les limites administratives des collectivitŽs territoriales. Le r™le des AD a ŽtŽ confortŽ par les Programmes dÕInitiatives communautaires (PIC) de type LEADER. MalgrŽ ces rŽformes des difficultŽs subsistent, portant sur le dŽveloppement des collaborations intercommunales, la rigiditŽ des mŽcanismes Žtatiques pour passer des politiques structurelles sectorielles aux politiques territoriales et pour intŽgrer sans les normaliser les formes et les rŽseaux informels caractŽristiques des sociŽtŽs et des syst•mes productifs de lÕespace rural grec actuel.

Le territoire de Mouzaki recouvre deux zones de 553 km2, lÕune de 171 km2 (24000hs en 1951 et 13500 dans la montagne dÕArgithea, lÕune des rŽgions les plus dŽpeuplŽes de Gr•ce, (9000 habitants en 1952 et 2500 en 2000).

Le dŽclin de Mouzaki est du ˆ la perte dÕinfluence de Mouzaki entre les deux capitales ottomanes voisines de Trikala et Karditsa, notamment ˆ partir du dŽveloppement urbain des annŽes 1960. NŽanmoins, en hiver la population des montagnes rŽside ˆ Mouzaki, lui faisant ainsi jouer un r™le de centre de services et de rŽsidence dÕhiver. La rŽforme des D•mes en 1997 coupe la rŽgion en 4 d•mes alors que la cohŽsion et le fonctionnement de ce territoire sont fondŽs sur la coexistence de 2 syst•mes : lÕun de nature spatiale comprend 12000hs et 450 entreprises, lÕautre de type relationnel rassemble la population de la micro rŽgion et sa diaspora prŽsente par intermittence. Ce lien est structurŽ par les liens socio-culturels et Žconomiques Žtablis par la diaspora avec son territoire dÕorigine. Une grande partie de cette diaspora rŽside dans les villes de Thessalie, de Salonique et dÕAth•nes, voire aux Etats Unis, Canada, Australie ou Allemagne (500 environ). Les habitants de la montagne Žmigrant en hiver ˆ Mouzaki participent aussi de cette diaspora. Le maire lui-m•me en Žtant attentif ˆ cette diaspora renforce par ce biais la cohŽsion du territoire. LÕagriculture (autrefois tenue par de tr•s petites exploitations familiales), sÕest restructurŽe gr‰ce aux aides de la PAC, avec baisse du nombre dÕexploitation, accroissement de la taille des exploitations restantes et intensification en plaine. La rŽhabilitation ou lÕinstallation par la diaspora de rŽsidences secondaires a renforcŽ les relations socio-culturelles et le dŽveloppement des entreprises locales dans le domaine du b‰timent, du tourisme et de la transformation agro alimentaire et ce dÕautant plus que les marchŽs Žmergents dans les villes voisines sont contr™lŽs par cette diaspora. Entre 1952 et 1996 deux plans de dŽveloppement local ont ŽtŽ ŽlaborŽs selon lÕapproche participative LEADER (mŽthode GOPP) avec le soutien dÕANKA, lÕagence de dŽveloppement. Les actions mises en place, basŽes sur la valorisation des ressources naturelles et des savoir-faire artisanaux locaux ont conduit au renforcement des rŽseaux et ˆ la crŽation /modernisation dÕindustries.

Les rŽsultats couvrent trois volets : i) le renforcement de 2500 exploitations familiales de la plaine ˆ la montagne, fournissant le marchŽ local liŽ ˆ la diaspora et les petites villes voisines, ii) le renforcement de 480 entreprises commerciales locales, iii) la modernisation des entreprises du bois en relation avec le marchŽ allemand o• la diaspora est implantŽe, avec Žchange de savoir faire et de technologies et dŽveloppement de la commercialisation.

Les relations inter entreprises se sont dŽveloppŽes au point de dŽboucher sur un syst•me productif plus large et consŽquent dans lÕOuest de la Thessalie. LÕagro alimentaire, lÕhabillement et les transports sont les autres secteurs en croissance. Pour lÕavenir si la dynamique formelle institutionnelle appara”t tr•s sectorielle et sŽlective, le maintien dÕun rŽseau informel, accompagnŽ de la mise en place de formations adaptŽes pour les jeunes ch™meurs sous lÕimpulsion de la diaspora elle-m•me, constitue un ŽlŽment moteur ˆ ne pas nŽgliger. La question dÕune meilleure coordination entre les programmes opŽrationnels gŽrŽs par le Minist•re de lÕAgriculture et les actions plus intŽgrŽes au niveau territorial dÕANKA demeure. CÕest ce qui explique actuellement les difficultŽs pour faire aboutir une dŽmarche de labellisation des produits avec un cahier des charges traduisant la cohŽsion du territoire m•re. En dŽfinitive les acteurs se mobilisent dans et hors du cadre institutionnel et politique et contribuent au renforcement de cette micro rŽgion devenue territoire identitaire et symbolique : rŽactivation des relations avec la montagne, effet multiplicateur des rŽsidences secondaires, Žlargissement de la client•le via la diaspora installŽe dans les grandes villes, autant dÕŽlŽments ˆ lÕorigine dÕavantages concurrentiels nouveaux. LÕavenir de la rŽgion dŽpendra du maintien de la cohŽsion actuelle entre les groupes sociaux comme objectif stratŽgique. En tout Žtat de cause la globalisation de lÕŽconomie ne conduit pas forcŽment ˆ lÕeffacement de toute originalitŽ territoriale.

Abstract. Current development dynamics should be seen within the framework of the 1997 territorial reorganisation in Greece. Indeed, Greece grouped 6000 communes in 1000 demes, the 13 initial regions remaining under state

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control at least as regards the distribution of resources and the implementation of national and European programmes. The appropriate scales for endogenous growth are not always present because of lack of matching of the administrative boundaries of the new demes and the real emerging areas and so active resources are not sufficiently represented in institutions. However the creation in the 1980s of development agencies (ANKA), whose main stakeholders are municipalities and cooperatives, should be taken into account. These agencies go beyond the administrative boundaries of territorial authorities. The role of the development agencies was consolidated by community initiative programmes (CIP) of the LEADER type. Difficulties remain in spite of these reforms and concern the development of intercommunal collaboration, the rigidity of state mechanisms for moving from sectoral structural policies to territorial policies and to integrate without standardising them the informal forms and networks that are characteristic of societies and production systems in rural Greece today.

The Mouzaki region covers 553 km2 consisting of two zones, one of 171 km2 within the deme of Mouzaki and another of 382 km2 in the mountainous Argithea region, one of the most depopulated areas in Greece (9000 inhabitants in 1952 and 2500 in 2000). The decline of Mouzaki was caused by the loss of its influence between the two neighbouring Ottoman centres Trikala and Karditsa, especially from the beginning of urban development in the 1960s. However, the mountain people live in Mouzaki in the winter and it thus plays the role of centre for services and winter residence. The reform of the demes in 1997 divided the region into four demes while the cohesion and functioning of the region are founded on the coexistence of two systems, one spatial and covering 12000 ha and 450 enterprises and the other of a relational type grouping the population of the micro region and its diaspora, present from time to time. This relation is structured by the sociocultural and economic links between the diaspora and its area of origin. A large proportion of the diaspora lives in the cities of Thessaly, Salonika and Athens and also in the United States, Canada, Australia and Germany (about 500 people). The inhabitants of the mountains who emigrate to Mouzaki in the winter also form part of this diaspora. The mayor himself is attentive to the diaspora and thus strengthens regional cohesion. Farming used to be in the form of very small family holdings and has been restructured thanks to CAP aids. The number of holdings has decreased, the remaining ones are larger and intensive farming is practiced in the plain. The rehabilitation or installation by the diaspora of second homes has strengthened sociocultural relations and the development of local businesses in the fields of building, tourism and the agrifood industry, especially as the emerging markets in neighbouring towns are controlled by this diaspora. Two local development plans were drawn up between 1992 and 1996 using the LEADER participatory approach (GOPP method) with the support of the development agency ANKA. The actions set up and based on the use of natural resources and local crafts skills have resulted in the strengthening of networks and the creation and modernisation of industries.

The results cover three areas: i) strengthening 2500 family farms in areas ranging from plain to mountain and supplying the local market linked to the diaspora and small neighbouring towns, ii) strengthening 480 local commercial businesses, and iii) modernising wood businesses in relation to the German market where the diaspora is established with exchange of know-how and technology and the development of sales. Relations between businesses have developed to the point of leading to a broader, more substantial system in western Thessaly. The other growth sectors are the agrifood industry, clothing and transport.

Although the formal institutional dynamics seems very sectoral and selective, the maintaining of an informal network accompanied by the setting up of appropriate training for young unemployed persons with encouragement from the diaspora itself would seem to be a driving force for the future that should not be ignored. The question of better coordination between the operational programmes managed by the Ministry of Agriculture and the actions by ANKA that are more integrated at the regional level remains. This currently explains the difficulties in achieving a labelling procedure for products with specifications indicating the cohesion of the source region. Finally, players are mobilised within and outside the institutional and political framework and contribute to strengthening this micro region that has become a territory with identity and symbolic valueÑthe reactivation of relations with the mountains, the multiplying effect of second homes and broadening of the customer base via the diaspora installed in cities. All these are features that confer new competitive advantages. The future of the region will depend on the maintaining of the present cohesion between social groups as a strategic objective. In any case, the globalisation of the economy does not necessarily lead to the erasing of any regional originality.

Introduction

LÕespace rural est soumis ˆ deux dynamiques exog•nes juxtaposŽes: celle de la concurrence dÕun marchŽ agricole mondialisŽ, et celle de lÕintŽr•t croissant de la sociŽtŽ pour le rural. La tendance ˆ la transformation de cet espace de production en un espace de consommation, et la recherche constante dÕune gestion plus durable de lÕenvironnement prennent des dimensions Žconomiques, politiques et symboliques spŽcialement importantes pour le monde rural, Žlargissant ses fonctions et activitŽs. Ces nouveaux enjeux conduisent les territoires ruraux ˆ se positionner dans ce processus. Un territoire ˆ dominante agricole, peut-il, dans ce cadre, valoriser ses propres forces, relations et rŽseaux ou bien doit- il passer par une intŽgration plus poussŽe dans une Žconomie urbaine de Çtype nouveauÈ?

Le mouvement gŽnŽral de dŽcentralisation permet la mise en place dÕun nouveau cadre institutionnel et administratif, pour lÕespace rural. Cependant, en MŽditerranŽe, au-delˆ dÕun strict dŽveloppement agricole, les tentatives de dŽveloppement intŽgrŽ, ne peuvent se fonder, pour des raisons historiques, sur les seuls processus institutionnalisŽs. Les relations informelles qui caractŽrisent le fonctionnement des

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sociŽtŽs locales et qui sont mises en valeur par ces derni•res, constituent en fait un avantage face ˆ la concurrence (Zaoual 2005). La rŽalisation dÕun tel objectif est souvent liŽe ˆ une dŽmarche originale que le monde rural doit inventer et ˆ une certaine flexibilitŽ que lÕadministration doit adopter dans lÕŽlaboration et lÕapplication des projets. Cette originalitŽ dŽpend de la mani•re dont la sociŽtŽ locale en tant quÕacteur va recomposer des syst•mes socio-Žconomiques en les agen•ant efficacement avec les rŽseaux informels, les relations avec la ville, la gouvernance locale et le syst•me productif (Di Meo 2000). Ce type dÕagencement appara”t constitutif de lÕidentitŽ locale.

Il existe en Gr•ce des petits territoires, auparavant marginalisŽs, qui sont parvenus ˆ renforcer leur position et leur cohŽsion au sein de lÕespace rŽgional, transformant leurs relations socioculturelles en rŽseaux Žconomiques solidaires (Pecqueur 1989, Goussios 1999). La micro rŽgion de Mouzaki (carte en annexe), caractŽrisŽe dans un passŽ rŽcent par la perte de son r™le historique et la petitesse de son centre rural (4.000 habitants), est devenue aujourdÕhui un tel territoire identitaire. Les vingt derni•res annŽes, ses 500 entreprises ont dŽmontrŽ leur capacitŽ ˆ valoriser, au travers dÔactivitŽs traditionnelles (bois, construction, commerce..), le dŽveloppement de rŽsidences secondaires dans lÕarri•re-pays montagneux portŽ par la diaspora. Le caract•re novateur de cette reprise rŽside dans la valorisation de facteurs immatŽriels (liens, rŽseaux..) liŽs ˆ lÕidentitŽ locale, sur un champ Žlargi dÕactions qui correspond ˆ la nouvelle rŽpartition spatiale de sa communautŽ. CÕest ce qui explique, dÕailleurs, lÕinsertion des entreprises sur de nouveaux marchŽs. Si il sÕagit donc dÕun processus de construction de territoire (Pecqueur 2005) ne faudrait-il pas voir comment les rapports de cette communautŽ organisŽe en rŽseau socio-culturel sÕy organisent et sÕy spatialisent? Comment ce rŽseau se mŽtamorphose-t-il en rŽseau ˆ finalitŽs productives? De quelle fa•on les acteurs affrontent-ils lÕabsence de proximitŽ physique pour permettre une coordination efficace de leurs actions? (Rallet, Torre 2004) Les politiques europŽennes et la dŽcentralisation favorisent-elles la rencontre des dynamiques formelles et informelles?

Quoi quÕil en soit, le dŽveloppement localisŽ qui en rŽsulte, peut •tre caractŽrisŽ comme un mouvement de nŽo-ruralisation puisque cet espace rural marginalisŽ semble parvenir ˆ valoriser en sa faveur des ressources spŽcifiques quÕil a pu rŽvŽler et construire (Pecqueur 2005) ˆ travers lÕintŽgration de sa diaspora, sans passer par la ville. CÕest donc ce processus spŽcifique de reterritorialisation qui est examinŽ dans cet article.

I - LÕŽvolution de lÕespace rural en Gr•ce

LÕespace rural grec sÕest fortement Ç agricolisŽ È. Son Žvolution traduit aujourdÕhui la difficultŽ pour un Etat centralisŽ dÕintŽgrer au-delˆ des politiques sectorielles, lÕŽmergence des dynamiques de recomposition socio-Žconomiques et spatiales voire des nouvelles solidaritŽs gŽographiques (Guigou 1997). En Gr•ce ce processus europŽen dÕagricolisation prŽsente certaines diffŽrences concernant la place et le r™le spŽcifique de la population rŽsidente et des originaires dans la transformation rŽcente de lÕespace rural: elles rel•vent du maintien de la propriŽtŽ fonci•re au sein de la famille, du mouvement dÕexode rural quelque peu retardŽ (1960), du r™le traditionnel de la pluri-activitŽ source de revenus complŽmentaires pour les familles agricoles et de lÕorganisation des ŽmigrŽs en communautŽs maintenant dÕŽtroites relations avec leur territoire dÕorigine.

A la fin des annŽes 1950, les villages connaissent leur plus grande croissance dŽmographique immŽdiatement suivie par la premi•re grande vague dÕexode rural. Ë la veille de son entrŽe dans lÕU.E., la Gr•ce a restructurŽ et modernisŽ son syst•me productif, notamment lÕagriculture familiale de plaine parvenant ainsi ˆ accro”tre fortement les rendements. A lÕinverse, les zones de montagne restŽes en dehors du champ dÕaction des politiques, maintiennent essentiellement leurs syst•mes traditionnels dÕŽlevage extensif ovin-caprin. On admet alors que la montagne ne peut se dŽvelopper face ˆ la concurrence de la plaine. La plaine en effet semble en mesure, de rŽpondre seule aux objectifs de lÕŽpoque: autosuffisance alimentaire, productions de mati•res premi•res pour l'industrie et entrŽes de devises via lÕexportation.

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Durant la m•me pŽriode, les politiques rŽgionales visent ˆ promouvoir la croissance des capitales, petites et moyennes, des 52 Nomes45 du pays et ˆ les transformer en p™les de dŽveloppement et lieux dÕaccueil des populations provenant de lÕexode. L'ƒtat grec ach•ve relativement t™t (1965-85) dans les zones rurales de plaine et de piŽmont, les travaux dÕinfrastructures de base (transports, tŽlŽcommunications, approvisionnement en eau potable, Žlectrification) mais Žgalement les infrastructures sociales (Žducation, santŽ).

L'intŽgration du pays ˆ l'UE (1981) et les retombŽes de la PAC ont permis de stabiliser les revenus agricoles, lÕexode ralentissant. Mais, en lÕabsence dÕune politique spŽcifique en faveur de lÕartisanat local, seuls le commerce de proximitŽ, lÕartisanat familial basŽ sur un savoir-faire traditionnel, la construction et lÕagroalimentaire ont subsistŽ. Ainsi, les petits centres ruraux commen•ant ˆ Žmerger, surtout apr•s la crise pŽtroli•re des annŽes 73-75, prennent un nouvel essor au travers du dŽveloppement des activitŽs commerciales et de services sociaux. Les familles46 agricoles investissent dans l'Žducation des jeunes et la qu•te de revenus supplŽmentaires. Elles se tournent vers la petite ville voisine Žmergente47 et mobilisent ˆ lÕŽchelle locale leurs relations interpersonnelles, Il en rŽsulte une solidaritŽ locale dŽbouchant sur le contr™le du marchŽ local (Goussios 2001).

LÕaccentuation du r™le des petites villes rurales ˆ lÕintŽrieur des syst•mes spatiaux quÕelles polarisent, constitue le principal produit de la recomposition de lÕespace rural des trente derni•res annŽes. Ce cadre territorial est caractŽrisŽ de nos jours par des initiatives endog•nes de diffŽrenciation de lÕŽconomie locale rŽpondant ˆ lÕabsence de politiques dÕamŽnagement et de dŽveloppement appropriŽes. Elles se traduisent par lÕexpansion de formes atypiques de collaboration et la mise en place de rŽseaux avec le monde extŽrieur (Goussios 2001 et 1999).

1. Politiques structurelles, rŽformes administratives, gouvernance locale

Les programmes europŽens (1981-87) et leurs modalitŽs dÕapplication ont ignorŽ cette recomposition de lÕespace rural. Les rŽformes administratives (dŽcentralisation), survenues dix ans plus tard, nÕont pas permis la mise en place, en temps voulu, de formes (outils) de gouvernance locale-territoriale.48. Ces m•mes rŽformes, ont permis un certain dŽveloppement des services ŽlŽmentaires ainsi quÕune meilleure efficacitŽ dans la gestion de l'espace. NŽanmoins les Žchelles pertinentes pour une croissance endog•ne nÕŽtaient pas assurŽes faute de correspondance entre limites administratives du nouveau D•me et rŽalitŽ spatiale (territoires en Žmergence, polarisŽs par un centre agricole), les privant de la possibilitŽ dÕune reprŽsentation institutionnelle unique face ˆ lÕAdministration.

Vers la fin des annŽes 1980, de nombreuses Agences de DŽveloppement (AD) furent fondŽes gr‰ce ˆ un cadre lŽgislatif spŽcifique : ce sont des sociŽtŽs anonymes dont les principaux actionnaires sont les MunicipalitŽs et les CoopŽratives ou leur Union Locale. Tr•s vite, ces AD sont devenues les catalyseurs du dŽveloppement local49. La loi rŽgissant lÕintercommunalitŽ est encore trop rŽcente (2001) pour fournir de vŽritables rŽsultats. Les D•mes soucieux dÕachever leur organisation interne, sont encore rŽticents pour prendre des initiatives dans cette direction.

45. Ancienne division administrative constituant aujourdÕhui une collectivitŽ territoriale du 2eme degrŽ et dont la surface moyenne se situe entre 2 et 3 mille km$, sa population moyenne oscillant entre 150 et 200 000 habitants.

46. Cette stratŽgie familiale prŽsuppose la modernisation de lÕexploitation agricole, le fonctionnement dÕun syst•me local de production agricole reposant sur des pratiques collectives et de coopŽration et dÕun syst•me de proximitŽ et de parentŽ qui permet ˆ lÕexploitant pluriactif dÕaccŽder ˆ lÕinformation concernant lÕactivitŽ agricole tout en assurant ˆ ses membres une certaine flexibilitŽ, en termes de temps de travail nŽcessaire ˆ la pluri-activitŽ (Goussios D. et Duquenne M.N. 2003).

47. LÕabsence de financement des initiatives locales, portant sur des investissements plus productifs, mais Žgalement le risque limitŽ que reprŽsente une entreprise commerciale sur un marchŽ local contr™lŽ par les relations interpersonnelles, a poussŽ lÕentreprenariat familial local vers le commerce de dŽtail.

48. En 1994 lÕadministration prŽfectorale (le prŽfet nommŽ) se transforme en administration locale du 2•me degrŽ gr‰ce ˆ un Conseil Žlu au suffrage universel. Suite ˆ diffŽrentes tentatives (Associations de Communes, Conseils Territoriaux (1986)), une rŽforme radicale est engagŽe en 1997 qui aboutit au regroupement des 6000 communes initiales en un millier de D•mes. Les 13 RŽgions restent nŽanmoins sous le contr™le de l'Etat puisque le SecrŽtaire GŽnŽral, responsable de la rŽpartition des ressources et de lÕexŽcution des programmes nationaux et europŽens, sÕest nommŽ par le gouvernement.

49. Un inventaire des AD montre que depuis 1990, la valorisation des politiques europŽennes, le soutien aux initiatives innovantes et m•me le transfert de nouvelles technologies sont directement liŽs ˆ leur dynamisme.

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2. Politiques de dŽveloppement rŽgional - local et programmes europŽens

Pour combler le dŽficit en mati•re de politiques de dŽveloppement dans le monde rural, les politiques structurelles de la CEE-U.E. sont passŽes du financement de projets isolŽs au financement de grands programmes intŽgrŽs. Mais, la conception et lÕexŽcution de ces programmes furent organisŽes par les services centraux et rŽgionaux : les actions planifiŽes pour rŽpondre aux objectifs stratŽgiques (revenu, emploi, qualitŽ de la vie), exigeaient lÕimplication de plusieurs autoritŽs de gestion, ce qui emp•cha toute flexibilitŽ dans la mise en Ïuvre de ces actions. En fait, cette planification du dŽveloppement rŽgional visait une meilleure rŽpartition gŽographique des financements et des projets d'investissement sans chercher ˆ les inclure dans des projets de dŽveloppement intŽgrŽ de ces territoires polarisŽs par un centre agricole. Cette rŽalitŽ et le manque de flexibilitŽ des procŽdures de planification et d'exŽcution, expliquent que les programmes europŽens nÕont pas toujours pu contribuer ˆ prendre en compte les dynamiques rurales Žmergentes. Les mŽcanismes intermŽdiaires indispensables nÕont pas ŽtŽ mis en place ˆ temps. Les anciens organes et cadres nÕŽtaient pas con•us et formŽs pour promouvoir une autre dimension que sectorielle. Les dimensions spatiale et territoriale Žtaient hors de leurs prŽoccupations et le local nÕŽtait pas acteur. Les Pouvoirs Publics cherchant ˆ utiliser la totalitŽ des fonds europŽens disponibles, ont alors privilŽgiŽ les investissements favorisant la modernisation et l'agrandissement de l'exploitation, ainsi que lÕintensification, au dŽtriment des financements qui auraient contribuŽ localement, ˆ l'accroissement de la valeur ajoutŽe des produits agricoles.

Par contre les initiatives communautaires de type Leader ont confortŽ le r™le des AD et ont permis lÕorganisation et la mise en Ïuvre de programmes intŽgrŽs sur des territoires spŽcifiques faisant comprendre lÕimportance des procŽdures participatives. Les GALs50 ont pu dŽvelopper des actions qui ont favorisŽ l'apparition de nouvelles activitŽs Žconomiques dans les rŽgions de montagne de m•me que la valorisation et la commercialisation des produits agricoles. Ces interventions pilotes dissŽminŽes ont davantage jouŽ le r™le dÕinitiateur des acteurs locaux ˆ une nouvelle perception de leur espace comme bien de consommation et aux micro-amŽnagements nŽcessaires, plut™t quÕˆ promouvoir la construction de territoires cohŽrents au sein de l'espace rural.

3. Nouvel Žtat des lieux et perspectives

Au vu des Žvolutions rŽcentes, la survie du syst•me socio-Žconomique de ces territoires ruraux dŽpend de leur capacitŽ ˆ passer de la pluriactivitŽ basŽe sur le commerce ˆ des activitŽs ˆ plus grande valeur ajoutŽe. Cependant, la diversification de lÕŽconomie de ces territoires ruraux est contrariŽe par la discordance entre lÕespace de vie et lÕespace de projets, et entre dynamiques informelles et politiques dÕamŽnagement et de dŽveloppement. LÕEtat et ses structures intermŽdiaires, manquent de flexibilitŽ pour contribuer ˆ une meilleure concordance entre :

le nouveau cadre institutionnel et administratif dŽterminŽ par les nouvelles politiques concernant les initiatives locales (orientation de la PAC vers le dŽveloppement rural, programmes type Leader) et la relative autonomie de l'administration locale face ˆ lÕadministration centrale rendue possible par la dŽcentralisation, ainsi que le progr•s constatŽ au niveau de la gouvernance territoriale comme moyen de renforcement des procŽdures participatives et du pouvoir local,

le dynamisme latent constituŽ de ressources humaines, de relations et d'initiatives entreprenariales, favorisŽes et soutenues au plan local par l'expŽrience familiale acquise au niveau de la gestion d'une entreprise commerciale, (capital initial, gestion de lÕemploi, de la client•le) mais Žgalement par la mobilisation de rŽseaux de solidaritŽ et de collaboration.

Dans ce contexte, les obstacles que rencontrent ces dynamiques Žmergentes au sein de ces territoires ruraux, portent sur les difficultŽs de dŽveloppement de la collaboration intercommunale, la rigiditŽ des mŽcanismes Žtatiques pour passer des politiques sectorielles ˆ des politiques territoriales et pour

50. Groupes dÕAction Locale, crŽŽs dans le cadre de lÕinitiative communautaire Leader

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incorporer sans les normaliser les formes et les rŽseaux de coopŽration informels qui caractŽrisent les sociŽtŽs et les syst•mes productifs de lÕespace rural grec actuel. LÕexemple de lÕŽvolution et du dŽveloppement de Mouzaki est rŽvŽlateur de ces discordances mais aussi du fait que des dynamiques bien appuyŽes sur des ressources spŽcifiques peuvent ne pas se limiter aux espaces bornŽs administrativement ni sur des proximitŽs naturelles et gŽographiques.

II - Le cas du territoire rural de Mouzaki

La petite ville de Mouzaki et le bourg proche de Mavromati, formant un bip™le, sont le centre dÕun territoire identitaire de 553 km$ qui comporte deux zones : les 11 communes localisŽes entre la plaine (2) et la montagne (9), contenues dans les limites de lÕactuel D•me de Mouzaki (171 km%2), le pays intŽrieur dÕArgithea51 (), une des zones de montagne les plus dŽpeuplŽes de Gr•ce, sur 382 km2 (cf. carte en annexe). Historiquement, Mouzaki constitue un de ces petits centres dont lÕexistence et lÕessor ont ŽtŽ liŽs ˆ la valorisation de leur situation dÕintermŽdiaire entre l'Žconomie montagnarde dÕArgithea et les villes ottomanes voisines (Prevelakis 1994). Le dŽclin de Mouzaki a ŽtŽ liŽ ˆ l'affaiblissement de ce rŽseau traditionnel d'Žchanges.

En effet les deux capitales voisines des dŽpartements Žponymes, Trikala et Karditsa, sÕŽtaient dŽjˆ transformŽes progressivement, apr•s le dŽpart des Ottomans en 1881, en concurrent commercial, profitant apr•s 1960, des politiques de dŽveloppement urbain et rŽgional. Ainsi, d•s la pŽriode de l'entre- deux-guerres, la proximitŽ gŽographique de ces deux villes, avantageuse dans le passŽ pour Mouzaki se transforme, en dŽsavantage (Sivignon 1992). La phase finale de dŽclin date de lÕoccupation allemande et de la guerre civile (1940-49) entra”nant un fort exode rural et l'Žclatement du tissu Žconomique et social des rŽgions de montagne. Le r™le de centre rural s'effondre par perte de ces deux p™les du rŽseau d'Žchanges quÕil contr™lait historiquement.

Tableau 1. Population rŽsidente et intermittente de la micro-rŽgion de Mouzaki

Recensement de population de 2001. Service National de Statistique de Gr•ce. Enqu•te effectuŽe par AN.KA en 2002

La rŽpartition actuelle de la population refl•te cette Žvolution: on y dŽnombre (enqu•te ANKA 2002), 13.432 habitants contre 24.000 en 195152. 84% de la population (11.050) est concentrŽ dans et autour de Mouzaki. Le pays dÕArgithea ne compte plus que 2.380 habitants contre 9.140 en 1951(tableau 1). Les densitŽs vont de 2 ˆ 61 hab. par km2% de la haute montagne vers la plaine. Cependant, il faut ajouter ˆ cette population quelques 7.000 habitants qui, dÕAvril ˆ Octobre, y rŽsident continuellement ou par intervalles, dont 6.000 pour la seule rŽgion dÕArgithea (tableau 1). Dans leur grande majoritŽ, ils sont membres de la diaspora, retraitŽs, plus quelques Žleveurs pratiquant la transhumance.

Dans ce contexte, Mouzaki, tout comme la majeure partie des petits centres ruraux de la Gr•ce, voit sa population augmenter substantiellement apr•s 1980. Il se transforme en centre de prestation de services et de rŽsidence durant lÕhiver pour une partie de la population des villages de montagne mais Žgalement

51. D•me dÕArgithea et dÕAcheloos, Commune dÕArgithea Orientale.

52. Recensement de la population de 1951. Service National de Statistique de Gr•ce.

Nombre dÕhabitants D•me

Recensement

2001 Enqu•te 2002 <6 mois

D. Argithea 2.627 603 3.385

D. Aheloos 1.690 1.510 1.040

D. Mouzaki 10.148 11.055 1.425

C. Argithea Est 1.767 264 1.387

Ancien territoire 16.232 13.432 7.237

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en site o• les membres des familles rurales des villages avoisinants peuvent exercer la pluriactivitŽ. En hiver la population du bip™le dŽpasse, 7.000 habitants contre 4.000 selon les donnŽes du recensement officiel.

Ë cette nouvelle rŽpartition de la population, la rŽforme administrative de 1997 apporte une rŽponse par sa division en quatre unitŽs ŽlŽmentaires53. Cependant l'organisation, le fonctionnement et la cohŽsion de ce territoire sont conditionnŽs en grande partie par la co-existence de deux syst•mes, spatial et relationnel "informels": le syst•me spatial polarisŽ par le centre Žconomique de Mouzaki (dont les limites dŽpassent celle de lÕactuel D•me Žponyme) et le syst•me relationnel entre lÕensemble de la micro-rŽgion et sa diaspora. Le premier fonctionne dans un cadre spatial comprenant plus de 12.000 habitants54 et 450 entreprises, avec de multiples formes de coopŽration au sein dÕune Žconomie locale assez diversifiŽe et une grande mobilitŽ dÕune population agricole pluriactive: celle-ci constitue un potentiel humain assez flexible et qualifiŽ pour lÕentreprenariat local, notamment pour les besoins en main dÕÏuvre. Le syst•me relationnel est fondŽ sur les relations quÕentretient ce territoire avec la diaspora prŽsente physiquement par intermittence (triplement de la population) et par les liens socioculturels et Žconomiques que la diaspora a Žtablis de fa•on structurŽe avec son territoire dÕorigine.

1. Le r™le de la Diaspora

Les membres de la diaspora (5.500 plus les membres rapportŽs des familles) sont organisŽs en communautŽs et associations culturelles dont le si•ge est situŽ lˆ o• ils rŽsident (les petites et moyennes villes de Thessalie, Salonique et Ath•nes, sans oublier les 500 ŽmigrŽs entre 1955-1970 aux Etats-Unis, au Canada, en Australie et en Allemagne). Une partie de cette population est rentrŽe au pays constituant, avec lÕapport dÕinstallŽs exog•nes, une population relativement jeune non nŽgligeable (tableau 2). Ces associations sont officiellement reconnues, disposent dÕŽcoles, organisent des f•tes et des manifestations dans les traditions de leur rŽgion d'origine o• ils conservent des terres et la maison familiale.

Tableau 2. ƒmigration et retour au pays de Mouzaki

Enqu•te effectuŽe par ANKA. 2002

De fait une partie (2500 habitants) de la population des rŽsidents permanents des villages de montagne habite ˆ Mouzaki durant lÕhiver et constitue le lien entre la diaspora, ces villages et le centre rural. Cette population frŽquente "ses propres" cafŽs, lieux d'Žchange d'informations, de rencontre avec la diaspora, de contact entre les clients (diaspora) et les entrepreneurs de la rŽgion, de contact avec ANKA et le pouvoir municipal. La municipalitŽ contribue Žgalement, ˆ la cohŽsion du territoire : le maire reprŽsente cette population originaire des villages de montagne et indirectement les villages situŽs au delˆ des limites de la nouvelle municipalitŽ. Il conc•de de ce fait ˆ ce territoire symbolique, la fonction politique que le syst•me administratif n'a pas assurŽe, renfor•ant ainsi les effets de solidaritŽ et de cohŽsion, mais aussi son pouvoir de revendication.

53. Voir carte en annexe

54. DÕautres villages de la plaine sÕint•grent aussi dans la zone dÕinfluence de Mouzaki-Mavromati

Groupes dÕages

ƒmigration Nouvelles

installations Total

0-18 19-64 65 +

Gr•ce 4.815 Retour dÕŽmigrŽs 329 3 104 212

Etranger 436 DÕautres rŽgions 142 2 140 0

Total 5.251 Total 471 5 244 212

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2. Le syst•me productif local

Durant la pŽriode de dŽclin rural et dÕagricolisation de la petite rŽgion, Mouzaki a rŽussi ˆ maintenir de tr•s petites entreprises familiales valorisant les ressources locales, spŽcialisŽes dans le bois (38 dont 31 artisanales), la ma•onnerie (40) et dans une moindre mesure dans lÕagroalimentaire.

Par contre, on remarque la forte baisse du nombre des petites exploitations agricoles (EA) dÕŽlevage (35% entre 1981-2001) compensŽe par un effort de restructuration du syst•me productif entrepris avant m•me que la PAC et les contraintes mondiales ne lÕimposent.

Cette restructuration confortŽe par la PAC et les politiques structurelles, a permis dÕaccro”tre les rendements et a favorisŽ l'adaptation des producteurs ˆ la demande locale et rŽgionale. La taille des Žlevages extensifs (ovin, caprin, apiculture) augmente : en 1995, la rŽgion compte 80.000 ch•vres et moutons dont 55% dans la montagne dÕArgithea pour environ 1000 EA. Les syst•mes de production en plaine (tomate, coton, lŽgumes..) se sont intensifiŽs.

Cette tendance ˆ la restructuration des EA pourrait favoriser les relations entre les producteurs et la manufacture locale. Relations qui sont devenues tr•s importantes dans le cadre dÕune Žconomie agro- alimentaire de la qualitŽ (certification, marques rŽgionales).

3. L'Žvolution informelle (1980)

A Mouzaki, le dŽmarrage du processus de dŽveloppement est du essentiellement au fait que la diaspora a investi la montagne en tant quÕespace de consommation (rŽsidence secondaire). Durant cette pŽriode, le financement des politiques structurelles et de la PAC sÕest limitŽ aux infrastructures (routes, etc.), ˆ la modernisation des EA et au financement de sŽminaires de formation (Fonds Social EuropŽen).

L'intŽr•t gŽnŽral pour la montagne a dŽveloppŽ un climat favorable pour des micros investissements. Le secteur du b‰timent et des travaux publics en a ŽtŽ le principal bŽnŽficiaire. Puis dÕautres secteurs dÕactivitŽ (tourisme de week-end, produits agroalimentaires locaux) ont ŽtŽ touchŽs, trouvant ainsi de nouveaux dŽbouchŽs. Les entreprises locales injectent alors dÕimportants capitaux dans la rŽgion, cependant que la diaspora renforce ses relations avec Mouzaki devenue le centre de tout ce mouvement.

Le renforcement des liens entre le territoire-m•re et la diaspora via les rŽsidences secondaires et leur transformation dans un premier temps en agents Žconomiques (consommateurs), a favorisŽ la transformation des relations socioculturelles en rŽseaux ˆ dimension Žconomique. Ces rŽseaux ont permis aux entreprises locales de contr™ler le marchŽ Žmergent et de crŽer des avantages concurrentiels par rapport aux centres urbains voisins.

Cet essor des spŽcialisations artisanales locales a conduit certaines petites entreprises ˆ chercher ˆ conquŽrir de nouveaux marchŽs supra locaux. L'infiltration limitŽe dans une premi•re phase, aux localitŽs o• vit la diaspora, a ŽtŽ confortŽe par le soutien apportŽ par de nouvelles formes de gouvernance et par les diffŽrentes possibilitŽs de financement offertes par les politiques europŽennes et nationales. On entre alors dans la 2•me pŽriode que lÕon peut qualifier de pŽriode dÕouverture, de planification et d'intŽgration aux politiques nationales et europŽennes. Les nouvelles questions posŽes sont celles de la participation des acteurs locaux dans lÕŽlaboration des projets de dŽveloppement et les institutions qui vont les reprŽsenter.

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4. La qu•te officielle des facteurs exog•nes

A. La planification

Pour la premi•re Žtude de DŽveloppement Local, indispensable afin que la petite rŽgion puisse sÕintŽgrer aux programmes communautaires, ŽlaborŽe par AN.KA entre 1992-1993, le processus participatif s'est limitŽ aux contacts entre responsables de lÕŽtude et population locale pour collecter les donnŽes quantitatives et qualitatives.

Avec LEADER la plus grande participation souhaitŽe se concrŽtise, en 1996, lors dÕune deuxi•me intervention-Žtude. La sociŽtŽ locale participe ˆ toutes les phases de la planification. Cette Žtude dŽfinit des objectifs simples et comprŽhensibles pour la sociŽtŽ locale: repŽrer les probl•mes, prŽsenter les visions de la rŽgion, identifier ce quÕil faut changer. Des actions concr•tes correspondant ˆ des sources de financement possible sont identifiŽes. Ce progr•s est directement liŽ ˆ l'expŽrience accumulŽe dans ce domaine par ANKA55. Il en rŽsulte alors la consolidation du capital social local gr‰ce ˆ l'information, la sensibilisation, le savoir-faire acquis, la prise de conscience par la population de la nŽcessitŽ du changement. Le r™le dÕANKA est lŽgitimŽ et reconnu par son soutien ˆ la population rurale. Enfin, et surtout cette action sÕinscrit dans les fronti•res historiques du territoire de Mouzaki. La diaspora en bŽnŽficie et y participe indirectement : infrastructures et services dans lÕespace quÕil consomme, rŽunion de ses associations dans leurs villes dÕinstallation pour dŽcider ˆ propos des stratŽgies et des actions ˆ suivre dans leur village dÕorigine.

B. LÕexŽcution

Le plan de dŽveloppement qui en rŽsulte est simple : il vise la mise en valeur des ressources locales, du savoir-faire et la spŽcialisation dans certaines activitŽs artisanales pour assurer localement un accroissement de la valeur ajoutŽe, prenant en compte lÕintŽr•t croissant des consommateurs pour lÕespace rural et les produits de qualitŽ. Un tel objectif per•u positivement par la sociŽtŽ locale est garant dÕun vŽritable processus participatif. Suite ˆ lÕinsertion de la rŽgion dans le programme LEADER II en 1998, deux programmes complŽmentaires, LEADER+ (orientŽ vers des actions Ç soft È, mise en rŽseauÉ) et PIDER (actions plus lourdes comme la crŽation et la modernisation dÕindustries) furent mis en oeuvre (2002). Les financements ont portŽ sur 21 projets dŽposŽs par 17 entreprises dont 7 pour le secteur du bois et 8 pour la transformation des produits de lÕŽlevage [Voir tableau 3].

Tableau 3. RŽpartition des entreprises ayant bŽnŽficiŽ dÕun financement par branche

Enqu•te effectuŽe par ANKA en 2002

55. ANKA emploie aujourdÕhui 70 personnes de formations diverses et se divise en 5 dŽpartements : DŽveloppement rural, Environnement, Action Sociale, Innovation Entreprenariat et Planification.

Branches

Bois/meubles fromagerie Charcuterie tomate Abattoir mŽtaux htels boisson Aliments tail TOTAL

Nombre dÕentreprises 7 3 3 1 1 2 2 1 1 21

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5. Les rŽsultats

Un quart de si•cle apr•s lÕapplication de la PAC et 10 ans apr•s lÕintervention dÕ ANKA dans le cadre des programmes europŽens, le potentiel productif de la rŽgion de Mouzaki est basŽ sur trois piliers :

! les quelques 2500 exploitations familiales (EF), spŽcialisŽes dans lÕŽlevage extensif dans les zones de montagne et de piŽmont et les EA grandes cultures (coton, ma•s..) en plaine. Une grande partie de ces productions est ŽcoulŽe par des rŽseaux commerciaux externes vers des marchŽs extra locaux. Dans le domaine de lÕŽlevage, une petite partie des laitages est absorbŽe par les fromageries locales et par la production fermi•re pour rŽpondre aux besoins dÕun petit marchŽ Žtroitement liŽ ˆ la diaspora. Il existe Žgalement un marchŽ local concernant la viande, spŽcialement lors des mois dÕŽtŽ. Les lŽgumes sont quant ˆ eux ŽcoulŽs directement sur les marchŽs des villes voisines tandis que lÕapiculture en expansion, bŽnŽficie de ses propres marchŽs,

! les quelques 480, parmi 503, entreprises commerciales locales ainsi que les entreprises familiales dÕartisanat traditionnel recensŽes. Toutes ces entreprises sÕadressent au marchŽ local quÕelles contr™lent, au sein duquel est incorporŽ celui de la diaspora (construction de rŽsidences secondaires, achat de viandes par les visiteurs, client•le affluant rŽguli•rement les week-ends dans les tavernes). Nombreux sont les petits entrepreneurs de ce groupe qui ont refusŽ de participer aux diffŽrents programmes de financement, non pas tant par manque de capital propre initial (faibles taux dÕintŽr•t apr•s 1998), mais beaucoup plus par manque dÕaudace,

! les entreprises restantes qui se sont modernisŽes et dont la majoritŽ a ŽtŽ intŽgrŽe dans les programmes de financement sous lÕŽgide dÕANKA. On y distingue deux sous-groupes :

- le plus important appartient au secteur du bois (meubles, menuiserie, cuisine). Ces entreprises embrassent la conception, la fabrication et la diffusion des produits, tandis quÕelles ont la possibilitŽ de recruter localement une main dÕÏuvre qualifiŽe et flexible.

La prŽsence dÕŽmigrŽs en Allemagne a permis le dŽveloppement dÕŽchanges de savoir- faire et de technologie entre entreprises, locales et allemandes. Actuellement leur stratŽgie vise lÕŽlargissement des marchŽs par le biais de la coopŽration avec des entreprises du b‰timent et des entreprises de commercialisation de leurs produits. Ces derni•res appartiennent bien souvent ˆ des originaires du pays, installŽs dans les centres urbains de la rŽgion et m•me ˆ Ath•nes, et prennent en charge la commercialisation et la pose du produit. Elles offrent de la sorte aux entreprises de Mouzaki une meilleure efficacitŽ (temps de livraison, spŽcialisation). Les relations inter entreprises sont Žgalement dŽveloppŽes : il sÕagit de renforcer la diversification et la spŽcialisation dans certaines activitŽs (charpentes, cuisines, meubles) en marge de contrats communs. Ce type de coopŽration semble favoriser lÕŽmergence dÕun syst•me productif localisŽ dans le secteur du bois dans lÕOuest de la Thessalie (Kalambaka, Trikala, Karditsa, Mouzaki). ANKA sÕest dŽjˆ engagŽe dans la voie de la valorisation et du soutien de cette dynamique en proposant la mise en place de clusters gr‰ce auxquels il sera alors possible pour les entreprises locales dÕŽtendre leurs marchŽs.

Ce sous-groupe est composŽ dÕentreprises agroalimentaires (charcuterie,boissons, fromageries, concentrŽ de tomates) dont les marchŽs sont aussi bien locaux, rŽgionaux que nationaux. Les mati•res premi•res proviennent en partie de la production locale56. On notera lÕimportance des fromageries pour valoriser et stabiliser un potentiel productif de grande qualitŽ ainsi que le savoir-faire traditionnel local. Les perspectives sont dÕautant plus positives quÕˆ partir de 2007, la feta bŽnŽficiera de lÕappellation dÕOrigine ProtŽgŽe.

- Les entreprises du secteur de lÕhabillement sont un cas ˆ part. Bien quÕelles nÕaient pas encore bŽnŽficiŽ des programmes europŽens, elles parviennent ˆ Žcouler leur production sur le marchŽ de Thessalie et ˆ promouvoir leurs produits gr‰ce au rŽseau

56. Une grande entreprise produisant de la charcuterie installŽe ˆ Mouzaki, tirant profit des financements du Programme Structurel du Minist•re de lÕAgriculture et de lÕinitiative Leader, sÕapprovisionne en mati•res premi•res en Hollande (porc) et en France (bÏuf), tandis quÕelle Žcoule Žgalement ses produits sur le marchŽ local estival.

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de distribution quÕa dŽveloppŽ la petite ville agricole voisine de Palamas, (ˆ 30km)57. Enfin le secteur des transports (voyageurs et marchandises) est Žgalement important.

Tableau 4. Variation du nombre dÕentreprises entre 1996 et 2005

NOMBRE DÕENTREPRISES

1996 2005 %

Ville de Mouzaki 185 287 55

Mavromati 45 98 117

Le reste 110 118 7

Total 330 503 52

Enqu•te effectuŽe par le Laboratoire de lÕEspace Rural. UniversitŽ de Thessalie. 2005

Entre 1995 et aujourdÕhui (tableau 4), le nombre dÕentreprises locales sÕest accru de 52%. Cette augmentation concerne avant tout Mouzaki et encore plus le bourg voisin de Mavromati (117%) et beaucoup moins le reste de la rŽgion. Ces entreprises couvrent toute la gamme des services, sociaux, commerciaux et prestations individuelles. Durant la m•me pŽriode, le nombre de petites unitŽs artisanales au sein du D•me de Mouzaki est passŽ de 44 ˆ 57 (voir tableau 6).Le plus important est lÕessor que connaissent certaines petites unitŽs au travers de leur relatif accroissement de taille et en raison de leur modernisation. En consŽquence, en 2005, Mouzaki dispose dÕun nombre dÕentreprises de commerce, de services et artisanales, disproportionnŽ par rapport ˆ la population et ˆ son rayon dÕinfluence.

6. Les perspectives

Derri•re ces processus on distingue deux dynamiques : formelle (celle des programmes europŽens) et informelle (Žmergente avec la participation de la diaspora) dŽterminantes pour le dŽveloppement de Mouzaki ces 20 derni•res annŽes. Leur rencontre a permis lÕouverture du territoire vers lÕextŽrieur, et lÕaccession ˆ de nouveaux marchŽs (Pecqueur 1989). Cela a crŽŽ un nouveau contexte favorable aux relations entre les groupes de producteurs et avec le marchŽ. AujourdÕhui ces deux forces coexistent et sont complŽmentaires. Dans lÕavenir elles peuvent diverger voire devenir concurrentes.

Tableau 6. RŽpartition du nombre dÕentreprises industrielles et artisanales de Mouzaki selon le secteur dÕactivitŽs

Industries

artisanales Fromagerie Boulangerie Aliments de

bŽtail Charcuterie Boissons Textiles Tomates V•tements Chauffage Briques Traitement du

marbre Tentes Bois Total

Bipole 1 5 3 1 1 1 - 3 1 1 3 1 24 45

Villages 1 - - - 1 1 2 - - - - - 7 12

Total 2 5 3 1 2 2 2 3 1 1 3 1 31 57

Enqu•te effectuŽe par le Laboratoire de lÕEspace Rural. UniversitŽ de Thessalie. 2005

La dynamique formelle est plus sŽlective que lÕinformelle vis a vis du syst•me productif local car elle rŽpond ˆ des objectifs, des crit•res et des Žchelles rŽgionales dÕŽvaluation plus sectoriels. La cohŽsion de ce territoire dŽpendra de lÕosmose entre ces deux dynamiques. La collectivitŽ territoriale appara”t dans un premier temps, la mieux placŽe pour veiller ˆ ce que cette osmose puisse permettre au territoire-

57. En effet, les habitants de cette petite ville du dŽpartement de Karditsa ont mis en place un rŽseau local de production et commercialisation Ç porte ˆ porte È de v•tements sur toute la Thessalie.

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rŽseau de maintenir au moins ses capacitŽs dÕinnovation et dÕŽvolution. Mais que faut-il Žviter pour y parvenir ?

Si le projet local cherche un acc•s aux facteurs exog•nes (financement, marchŽÉ), sa rŽussite dŽpendra du degrŽ dÕautonomie dont la sociŽtŽ locale se sera pourvue, afin de concrŽtiser les objectifs quÕelle se sera fixŽs. Le renforcement des relations entre les acteurs de la gouvernance locale et la sociŽtŽ locale de m•me que la flexibilitŽ dÕexŽcution que permettront les programmes, constituent finalement les ŽlŽments essentiels qui permettront aux dynamiques socioculturelles endog•nes de sÕexprimer tout en sÕappuyant sur une coopŽration avec les acteurs de la diaspora.

ANKA et lÕAdministration locale peuvent renforcer leur r™le essentiel dÕintermŽdiaires entre tous les niveaux impliquŽs dans le choix dÕactions de dŽveloppement et entre les deux dynamiques. La nouvelle stratŽgie suivie par ANKA se traduit par un dialogue continuel avec les jeunes (ch™meurs, entrepreneurs potentiels), par des programmes de formation et par une amŽlioration des relations entre lÕInstitut de Formation Professionnelle et lÕIUT de Karditsa, tous deux spŽcialisŽs dans la menuiserie. Cette stratŽgie rŽsulte du constat que, dŽsormais, ce potentiel relationnel a besoin de formation et de qualification pour renforcer la collaboration entre les entreprises et maintenir des liens entre ces derni•res et la sociŽtŽ locale. Un autre objectif porte sur la prise en compte dans les projets locaux des initiatives Žmanant des entrepreneurs de la diaspora. La volontŽ de crŽer une chambre industrielle des entrepreneurs de la diaspora peut •tre interprŽtŽe comme lÕexpression institutionnalisŽe du territoire-rŽseau / site symbolique.

Dans la mise en Ïuvre des programmes, lÕexpŽrience rŽcente de la rŽgion montre que le manque de coordination entre le niveau local et les niveaux supŽrieurs ne favorise que la dimension sectorielle, y compris dans le cas des politiques de dŽveloppement territorial. LÕintŽgration verticale de groupes isolŽs nÕŽtant pas suivie par des actions de transformation des produits locaux de qualitŽ, contribue finalement ˆ lÕaffaiblissement de la cohŽsion locale horizontale. CÕest pourquoi le processus centralisŽ de planification (top-down) sÕav•re peu apte ˆ prendre en compte le r™le socio-Žconomique jouŽ par les EA et les petites entreprises au sein du syst•me productif local. La planification rŽgionale prŽsente des rigiditŽs, spŽcialement pour les fili•res de produits, pour prendre en compte les conditions et dynamiques liŽes aux ressources gŽnŽriques et spŽcifiques dÕun territoire tel Mouzaki. Les disfonctionnements remarquŽs ˆ ce niveau de coordination influencent particuli•rement les actions combinŽes (par exemple exploitations dÕŽlevage et fromagerie). LÕexemple des difficultŽs de collaboration entre les programmes type Leader porte sur des activitŽs de transformation et de mise en rŽseau et les programmes opŽrationnels du Minist•re de lÕAgriculture (plans de dŽveloppement des EA). Ces disfonctionnements prennent leurs racines dans les conflits bureaucratiques (Žviter lÕattribution de doubles subventions) et sont renforcŽes par la non intŽgration des plans de dŽveloppement des EA dans les projets de dŽveloppement local (tels ceux de ANKA- transformation et mise en rŽseau)58..

Ce dŽphasage entre agriculteurs et petits entrepreneurs, provoquŽ par la non cohŽrence des programmes, a retardŽ lÕadoption dÕun cahier des charges pour les produits locaux, celui-ci Žtant per•u plut™t comme une dŽmarche bureaucratique par les agriculteurs (AOC). Pourtant celui-ci leur donnerait des possibilitŽs de mieux contr™ler ainsi le marchŽ local en plein essor (rŽsidents + diaspora + tourisme de qualitŽ). La nouvelle PAC permet dŽsormais une meilleure collaboration entre programmes mis en Ïuvre ˆ lÕŽchelle locale.

Un tel contrat de qualitŽ ne se limite pas ˆ la dimension environnementale et Žconomique : il permet de contribuer ˆ une meilleure cohŽsion des groupes de producteurs locaux et donc celle du territoire-m•re.

La participation de la sociŽtŽ locale ˆ un tel contrat de qualitŽ couvrant toute la gamme des produits locaux, assurerait une meilleure articulation de lÕŽconomie ˆ la culture et ˆ la communautŽ locale. Le produit local acquiert une valeur supplŽmentaire en tant quÕŽlŽment matŽriel constitutif de lÕidentitŽ du territoire, reconnu par la client•le et la diaspora. En dŽfinitive, ce mouvement lŽgitime non seulement les fronti•res culturelles du local face ˆ un marchŽ concurrentiel mais Žgalement la dynamique locale informelle dans sa rencontre avec lÕextŽrieur. Si cÕest une des clŽs dÕune meilleure osmose entre les deux

58. Cela explique pourquoi les tentatives de modernisation des exploitations dÕŽlevage en montagne et par voie de consŽquence lÕimplantation dÕune fromagerie ont ŽchouŽ alors m•me quÕil existe une race croisŽe de ch•vre tout ˆ fait exceptionnelle. ANKA nÕa finalement rŽussi quÕˆ installer des tanks rŽfrigŽrŽs ˆ lait pour amŽliorer la qualitŽ du lait.

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dynamiques, cela permet Žgalement de conforter lÕidentitŽ m•me du territoire et du site symbolique de cette sociŽtŽ gŽographiquement dispersŽe (Zaoual 2005).

Conclusion : Le r™le de la diaspora dans la dynamique du territoire

Le dŽveloppement de Mouzaki et de son territoire sÕest fondŽ face aux enjeux de lÕactualitŽ (le mouvement vers le rural, la qualitŽ..) sur une valorisation combinŽe de lÕidentitŽ, du capital social et spatial ainsi que du potentiel humain et productif dÕune communautŽ dont une partie est en diaspora.

LÕattachement au pays dÕorigine et ˆ lÕidentitŽ crŽent des proximitŽs autres que gŽographiques et facilite la fluiditŽ des interactions ainsi que la coordination des acteurs ˆ distance (Rallet et Torre 1994). Ses acteurs se mobilisent dans et hors du nouveau cadre institutionnel, administratif et politique qui rŽgit de plus en plus les rapports entre le niveau local et les Žchelons supŽrieurs59.

Le rŽsultat de ce ÇmouvementÈ fut avant tout le renforcement de cette micro-rŽgion devenue territoire identitaire et symbolique gr‰ce ˆ quoi le centre agricole de Mouzaki a retrouvŽ son r™le dÕintermŽdiaire entre lÕarri•re-pays montagneux et les marchŽs urbains et ce, sur une nouvelle base : a) il renoue ses relations avec lÕarri•re-pays en le valorisant en tant quÕespace ˆ consommer, b) il contr™le par le biais des rŽseaux informels (auxquels est intŽgrŽe la diaspora), les effets multiplicateurs du phŽnom•ne des rŽsidences secondaires et il le met en valeur ˆ lÕŽchelle locale, c) il Žlargit son marchŽ et sa client•le ˆ lÕensemble de la rŽgion gr‰ce ˆ lÕaide apportŽe par la diaspora, la gouvernance locale et les programmes de type Leader. Il sÕagit en rŽalitŽ dÕun syst•me-rŽseau qui agit au sein et au-delˆ des limites du territoire historique. Cette Žvolution est doublement bŽnŽfique pour la rŽgion : elle renoue les liens socioculturels entre la diaspora et le territoire-m•re, lui donnant en m•me temps une dimension Žconomique.

Les avantages concurrentiels actuels du territoire de Mouzaki reposent sur la force et la soliditŽ de ces liens correspondant ˆ un fort sentiment dÕappartenance au pays, ce qui alimente ˆ son tour, la solidaritŽ au sein de rŽseaux de nature Žconomique. Pour que ce dŽveloppement soit durable il faut que ces liens et rŽseaux se maintiennent et gardent leur efficacitŽ pour sÕadapter aux situations futures. Or, dans le cas de Mouzaki, lÕintŽgration Žconomique de la diaspora a contribuŽ ˆ renforcer et Žvidemment ˆ reproduire continuellement ces liens et relations avec son territoire et par consŽquent, lÕidentitŽ de celui-ci. Cette Žvolution qui alimente la cohŽsion locale, la solidaritŽ et la mise en rŽseau, constitue la vŽritable valeur ajoutŽe du territoire puisquÕelle garantit un processus durable de reproduction et accumulation de son capital socioculturel. Les acteurs de la gouvernance locale ayant pris conscience de la portŽe de ce capital dont ils sont eux-m•mes partie prenante, contribuent de plus en plus ˆ une meilleure osmose entre les dynamiques informelles et celles qui ont un caract•re formel. La valorisation de cette vitalitŽ de la culture et de lÕidentitŽ locale permet en effet, (i) aux acteurs locaux de renforcer leur capacitŽ ˆ reproduire- en les transformant - lÕespace et la sociabilitŽ, et (ii) au territoire dÕentreprendre son dŽveloppement en dehors dÕune hiŽrarchie reposant sur des principes gŽnŽraux inspirŽs par le mod•le centre-pŽriphŽrie (Di Meo 2000, Pecqueur 1989).

Or, si cet espace rural rŽussit ˆ sortir de son Žtat de dŽ territorialisation et de marginalisation, cÕest gr‰ce ˆ lÕŽmergence dÕun territoire-rŽseau. Celui-ci valorisant le mode dÕorganisation en rŽseau de sa communautŽ et son capital social (syst•me de r•gles et de valeurs), il parvient ˆ rŽintŽgrer en sa faveur son potentiel humain et lÕinsŽrer ˆ son syst•me productif. Il se dote ainsi dÕune capacitŽ qui lui permet dÕengendrer des activitŽs productives dans un temps et un espace, qui ne sont pas toujours ceux de son espace gŽographique limitŽ dÕorigine.

Mais, dorŽnavant, ce territoire-rŽseau ne doit pas perdre sa capacitŽ endog•ne de rŽgŽnŽration et dÕinnovation. Le maintien de la cohŽsion devient lÕobjectif stratŽgique puisque cÕest cette m•me cohŽsion qui peut renforcer la confiance gr‰ce ˆ laquelle les liens et rŽseaux qui se sont dŽveloppŽs prennent consistance. Or justement, le r™le de ces derniers sÕest avŽrŽ primordial pour cette Žconomie relationnelle de Mouzaki (Zaoual 2005) : ils expliquent comment, prise dans ce mouvement de re territorialisation de Mouzaki, la diaspora sÕest transformŽe en agent Žconomique et acteur, mais aussi, comment ce territoire- rŽseau a pu surpasser les ŽlŽments dŽterminant sa position dŽfavorisŽe dÕhier: (i) distance-proximitŽ par

59. Les rŽalitŽs du territoire font Žclater des rŽalitŽs administratives parfois vieilles. Ç Le dŽveloppement local global et la participation des acteurs Žconomiques et sociauxÈ. Maryse Brimont-Mackowiak. In G. Loimger et J. Nemery (1997 p. 208).

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