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Perception du risque des infections sexuellement transmissibles chez les homosexuels sous prophylaxie pré-exposition

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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HAL Id: dumas-01893234

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01893234

Submitted on 11 Oct 2018

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Perception du risque des infections sexuellement

transmissibles chez les homosexuels sous prophylaxie

pré-exposition

David Pinell

To cite this version:

David Pinell. Perception du risque des infections sexuellement transmissibles chez les homosexuels sous prophylaxie pré-exposition. Médecine humaine et pathologie. 2018. �dumas-01893234�

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AVERTISSEMENT

Cette thèse d’exercice est le fruit d’un travail approuvé par le jury de soutenance et réalisé dans le but d’obtenir le diplôme d’Etat de docteur en médecine. Ce document est mis à disposition de l’ensemble de la communauté universitaire élargie.

Il est soumis à la propriété intellectuelle de l’auteur. Ceci implique une obligation de citation et de référencement lors de l’utilisation de ce document.

D’autre part, toute contrefaçon, plagiat, reproduction illicite encourt toute poursuite pénale.

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UNIVERSITÉ PARIS DESCARTES

Faculté de Médecine PARIS DESCARTES

Année 2018

N° 48

THÈSE

POUR LE DIPLÔME D’ÉTAT

DE

DOCTEUR EN MÉDECINE

Perception du risque des infections sexuellement transmissibles

chez les homosexuels sous prophylaxie pré-exposition

Présentée et soutenue publiquement

le 6 avril 2018

Par

David PINELL

Né le 10 novembre 1988 à Paris (75)

Dirigée par M. Le Docteur Arnaud Blanc, PH

Jury :

Mme Le Professeur Cécile Goujard, PU-PH ………….……….……… Présidente Mme Le Professeur Dominique Salmon, PU-PH

Mme Le Professeur Frédérique Noël, PU-PH Mme Le Docteur Caroline Charlier-Woerther, PHU

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Remerciements

Madame la Professeure GOUJARD,

Vous me faites l’honneur de présider le jury de cette thèse, veuillez trouver ici l’expression de ma profonde estime.

Madame la Professeure NOEL, Madame le Professeur SALMON et à Madame le Docteur CHARLIER

Vous me faites l’honneur de participer au jury de cette thèse, veuillez trouver ici l’expression de mon plus grand respect.

Monsieur le Docteur BLANC Arnaud

Pour avoir accepté́ de diriger ce travail. Je te remercie d’avoir partagé́ cette épreuve avec moi et de m’avoir aidé́ tout au long de ce travail.

À toute l’équipe médicale et paramédicale du centre 190, sans qui cette thèse n’aurait pas été possible, merci pour votre aide inestimable

Au Dr SANTINI Arlette, un grand merci pour ton écoute, ta patience et ton aide dans ce travail de thèse.

À tous les participants de cette étude qui ont accepté de me consacrer du temps pour les entretiens.

À mon père pour son aide à la relecture de mes travaux, son aide méthodologique et sa patience. À ma mère et à ma sœur pour leur soutien pendant ces années d’études

À mon équipe de la réanimation du CHIV grâce à qui je m’épanouis dans ma vie professionnelle.

À mes amis qui n’ont jamais cessé de me soutenir dans cette longue épreuve qu’est l’apprentissage de la médecine.

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4 Table des matières

Résumé ... 7

Introduction... 8

I) Contexte historique ... 12

A) Découverte et lutte contre le VIH ... 12

1) Chronologie d’un fléau... 12

B) Moyens de lutte médicamenteuse ... 20

1) Historique des principales avancées thérapeutiques ... 20

2) Les prophylaxies pré-expositions ... 22

2.1) Rappels historiques ... 22

2.2) Les prophylaxie pré exposition dans le monde ... 23

3) Les études validant l’intérêt de l’association ténofovir-emtrictabine ... 26

3.1) iPrEx ... 27

3.2) Proud ... 29

3.3) Ipergay (ANRS) ... 29

3.4) Mode d’action et posologie ... 31

4) Les perspectives de la PrEP ... 33

4.1) La PrEP aujourd'hui ... 33

4.2) La piste du TAF/FTC en PrEP ... 34

4.3) Doxycycline® ... 35

4.4) Le Cabotegravir ... 36

4.5) Les prophylaxies locales ... 36

II) Etude qualitative ... 38

A) Méthodologie ... 38

1) Objectif ... 38

2) Type d‘étude et population ... 38

3) Déroulement des entretiens et analyse ... 39

B) Résultats ... 41

1) Médecine générale et homosexualité ... 42

(6)

5

2.1) Observance ... 43

2.2) Effets secondaires ... 44

3) Consommation de drogues et d’alcool ... 44

4) Infection sexuellement transmissibles... 45

4.1 ) Antécédents d’IST ... 45

4.2) Connaissance IST / changement depuis la prep ... 46

4.3) Moyen de transmission des IST ... 47

4.4) Protection contre les hépatites ... 48

4.5) Dépistages ... 48

5) Sexualité et PrEP ... 49

5.1) Déshinibition ... 49

5.2) Sexualité après la Prep ... 50

5.3) Responsabilisation de la PrEP ... 51

5.4) Remarques dans l’entourage ... 52

6) PrEP et protection ... 54

6.1) Prophylaxie sous Prep ... 54

6.2) Evolution de la prophylaxie ... 55

6.3) Connaissance du préservatif ... 55

6.4) Rapports avec les séropositifs ... 56

6.5) Protection offerte par la prep ... 57

7) Perception du risque et peurs ... 57

7.1) Peur du VIH ... 57

7.2) Peur des IST ... 59

C) Discussion ... 61

1) Perception des IST ... 61

2) Perception du risque ... 62

3) SIDA et histoire sociétale ... 63

4) Sexualité et PrEP ... 65

5) PrEP et prophylaxie ... 66

6) Prep et drogues... 68

(7)

6

8) Médecine générale et PrEP ... 70

9) Limites de l‘étude ... 71

10) Forces de l‘étude ... 72

Conclusion ... 74

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Résumé

Les années 2000 ont été le théâtre d’une recrudescence des infections par le VIH. La communauté homosexuelle, surtout les jeunes populations, a été la plus touchée par cette augmentation.

Malgré d’importantes campagnes de prévention, on assiste à une progression de l’incidence de la maladie dans ces milieux.

A l’aube des années 2010, une nouvelle forme de prophylaxie apparait, la prophylaxie pré-exposition (PrEP), qui offre une protection quasi optimale du VIH.

De nombreuses critiques ont émergé suite à son déploiement dans les différents pays, notamment concernant le risque majoré de transmission des autres infections sexuellement transmissibles (IST) en raison d’une utilisation moindre des préservatifs.

Notre étude, réalisée à Paris, a pour objectif de rendre compte de la perception du risque des IST en général et dans le contexte de la PrEP, de leur danger et des modifications psychosociales et sexuelles, à travers une étude qualitative.

Pour ce faire, nous avons réalisé 10 entretiens semi-dirigés avec des homosexuels bénéficiant du Truvada® à titre prophylactique de la transmission du VIH. Cette méthodologie nous a permis d’évaluer plus justement le ressenti des patients.

L’analyse des résultats a montré que chez ces patients, la PrEP permet d’accéder à une nouvelle sexualité, pratiquement dénuée de toute angoisse liée à la transmission du VIH, bien que la peur du virus reste présente. Les autres IST, en revanche, ne font pas l’objet de stress chez eux. Ils connaissent plutôt bien les différentes maladies et sont unanimes quant à la pertinence des tests biologiques de dépistage répétés afin de surveiller et repérer les infections asymptomatiques. L’utilisation des préservatifs s’est vue modifiée chez la moitié des participants, l’autre moitié utilisant plutôt la PrEP comme méthode de protection supplémentaire.

La consommation de toxique n’a pas été influencée par la prise de la PrEP en dehors de 2 situations où les patients affirmaient vouloir prendre le médicament afin de pratiquer le

chemsex.

Enfin, la PrEP leur a permis de dépasser les éventuelles réticences ou peurs vis à vis des séropositifs et d’aller parfois jusqu’à avoir des relations sexuelles avec eux.

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Introduction

Lorsque le SIDA a fait ses premières victimes, à la fin des années 70, on a assisté à une longue période de sidération. Les premières mesures de lutte contre le SIDA ont mis plusieurs années à se mettre en place, en grande partie en raison du caractère communautaire et initialement restreint de la maladie.

La lutte contre le SIDA, notamment en France dans les années 80, s’est organisée initialement sur la scène sociale et politique dans un climat de conflit.

Au tout début des années 1990, l’apparition d’Act-Up cantonne le SIDA à une vitrine homosexuelle, ce qui sera condamné par de nombreux membres de cette communauté. Certains vivent alors l’émergence de l’association comme une révélation, tandis que d’autres lui opposent une ferme résistance ou hostilité.

Au milieu des années 90, Act-Up va participer à valoriser la figure de l’homosexuel séropositif. Les associations de lutte contre le SIDA vont alors fonctionner comme des espaces de socialisation homosexuelle, encouragées dans ce sens par les pouvoirs publics dans l’optique de la lutte contre l’épidémie (1).

Ces associations vont jouer un rôle majeur dans l‘initiation de la lutte contre le SIDA, d‘abord sur le plan social et politique grâce à sa forte médiatisation, puis rapidement sur le plan médical. Grâce aux nombreuses avancées diagnostiques, thérapeutiques et préventives, le SIDA est passé du statut de « cancer gay » à celui de maladie chronique.

Progressivement, l‘impact de ces associations s‘est appauvri en raison de la chronicisation de la maladie et l’amélioration de l’espérance de vie.

Néanmoins, alors que le nombre de contaminations a considérablement diminué durant les années 90, les années 2000 marquent le début d‘une période pendant laquelle l‘infection progresse de nouveau dans certains groupes à risque, notamment les hommes ayants des relations sexuelles avec des hommes (HSH). (2)

Les années 2000 ont été le théâtre de bouleversements médicaux dans la thérapeutique du SIDA, permettant de transformer radicalement la vie et l’espérance de vie des séropositifs. Cependant, alors que l’incidence de la maladie diminuait d’année en année, le nombre de

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nouvelles contaminations est de nouveau reparti à la hausse dans la communauté homosexuelle à partir des années 2000.

Ainsi, les HSH sont le seul groupe de transmission dans lequel l’incidence des nouveaux cas de séropositifs ne cesse d‘augmenter (3).

L‘incidence du VIH chez les HSH est estimée à 200 fois supérieure à celle chez les personnes contaminées par des rapports hétérosexuels (3).

Le nombre de nouveau cas ne cesse d’augmenter depuis 2003 et encore plus rapidement depuis 2011. En effet, en France, les rapports sexuels entre hommes sont le seul mode de contamination pour lequel le nombre de nouveaux diagnostics d'infection par le VIH ne diminuent pas. En 2014, 6600 nouveaux cas de VIH étaient dépistés en France (4).

42% des nouveaux contaminés sont des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, soit près de 2800 hommes ont découverts leur séropositivité en 2014.

Cette hausse est plus importante chez les jeunes de 15-24 ans, chez qui le nombre de découverte de séropositivité a plus que doublé (240%) en onze ans. Le nombre de nouvelles contaminations est chaque année supérieur au nombre de séropositivités diagnostiquées, pointant ainsi les carences du dépistage (5).

Dans l’enquête EPGL (Enquête Presse Gays et Lesbiennes) de 2011, sur plus de 10 000 hommes interrogés résidant en France, 1333 étaient séropositifs. Parmi eux, seul 18% utilisaient systématiquement le préservatif lors des pénétrations anales. Chez les séronégatifs, seuls 60% utilisaient un systématiquement un préservatif lors de leurs rapports.

Depuis 1997, l’utilisation du préservatif dans la population homosexuelle ne cesse de diminuer, passant de 68% en 1997 à 47% en 2011 (3).

En parallèle, la progression des autres IST (gonococcies et syphilis surtout) se poursuit de manière constante.

Selon une enquête Presse Gay INVS/ANRS, réalisée en 2004, 67% des HSH interrogés déclarent utiliser un préservatif lors de tous leurs rapports sexuels avec des partenaires occasionnels. Selon la même enquête, 86% déclarent s'être fait dépister au moins une fois dans leur vie. En région parisienne, selon l'enquête Prevagay INVS/ANRS de 2009 (6), ce chiffre est de 92%. Les gays sont, parmi les nouveaux séropositifs, dépistés plus tôt et rarement au stade SIDA.

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Dans l’enquête de l’EPGL (3), l’usage systématique du préservatif est proche de 60% chez les répondants séronégatifs, alors que chez les autres répondants son utilisation est moins fréquente Ainsi, seuls 20% des répondants séropositifs utilisent systématiquement le préservatif lors de rapports anaux avec des partenaires occasionnels.

La quasi-totalité des lymphogranulomatoses vénériennes (LGV) rectales, infection à Chlamydia de sérotype L, concernent les HSH (98% des cas). Elles ont augmenté de 47% entre 2013 et 2015, dans cette population. La classe d'âge la plus touchée était les 30-49 ans (66%). Les IST bactériennes continuent à augmenter chez les HSH, Le niveau élevé de co-infection par le VIH chez les HSH présentant une LGV, une syphilis ou une gonococcie (respectivement 76%, 25% et 17% en 2015) reflète une utilisation insuffisante du préservatif chez les HSH séropositifs, observée dans les études comportementales depuis plusieurs années (7).

C’est donc dans un contexte de diminution de l’usage de préservatif que la PrEP commence à voir le jour en France.

Depuis le début des années 2010, apparaissent de nouvelles méthodes de prévention du VIH, avec l’utilisation des prophylaxies pré-exposition (au sens large du terme).

Après plusieurs études (IPREX (8), PROUD (9) et IPERGAY (10) notamment), en janvier 2016, le Truvada® reçoit une recommandation temporaire d‘utilisation (RTU) et devient remboursable à 100% par la sécurité sociale en France.

Initialement prescrite dans les centres hospitaliers universitaire, elle devient accessible dans les principaux CeGGID dans le courant de l’année 2016.

Depuis mars 2017, sa prescription est renouvelable par le médecin généraliste.

Cible de nombreuses critiques dans la communauté médicale (11; 12), notamment concernant le risque de désinhibition et de transmission d’IST (gonococcie, chlamydia ou syphilis), elle est encore peu répandue en France, bien que très efficace sur la diminution du risque de transmission du VIH (jusqu’à 86% selon l’étude IPERGAY).

Une méta-analyse de 18 cohortes alerte sur le risque d’augmentation des IST chez les patients utilisant la PrEP, le risque est multiplié par 11 pour Chlamydia, 25 pour la Gonorrhée et 44 pour la Syphilis (13).

Plusieurs études cliniques (11, 12, 14) ont montré qu’il y avait une diminution de l’utilisation des préservatifs chez les patients sous PrEP, résultats mettant en avant la différence entre

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l’utilisation de la PrEP durant les études principales et la PrEP dans la vie de tous les jours. Néanmoins, de nombreux travaux (15) ont aussi mis en évidence l’impact psychosocial positif de la PrEP dans la vie sexuelle des patients. En effet, le confort de vie qu’offre la PrEP dans la sexualité des patients a des répercutions majeures sur leur qualité de vie.

Selon l’OMS « La santé sexuelle est un état de bien-être physique, mental et social dans le domaine de la sexualité. Elle requiert une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la possibilité d’avoir des expériences sexuelles qui soient sources de plaisir et sans risque, libres de toute coercition, discrimination ou violence ». Ainsi, la prise de la PrEP est responsable d’une diminution de l’anxiété et d’un sentiment de bien être supérieur. Sur le plan social, on assiste aussi à une diminution de la stigmatisation des patients séropositifs grâce à la protection ainsi offerte par le médicament (16; 17).

Peu d’études se sont intéressées à l’évolution de la perception du risque et du danger des différentes IST depuis le début de la prise de Truvada®. Une étude américaine (18) a mis en évidence, parallèlement à une diminution de l’utilisation du préservatif, un confort de vie et une amélioration de la qualité de vie sexuelle. De plus, cette désinhibition initialement observée évolue peu à peu après la lune de miel de la PrEP pour aboutir dans plusieurs cas à une reprise de l’utilisation quasi systématique des préservatifs en raison de la recrudescence des autres IST. Une revue Cochrane a analysé 10 études concernant la PrEP et a révélé l’absence d’élément concluant pour affirmer l’existence d’une véritable désinhibition sexuelle et d’une prise de risque significativement accrue (19).

A travers une étude qualitative nous nous intéresserons à la perception du risque que peuvent représenter les différentes infections sexuellement transmissibles depuis le début de prise du Truvada® et à la modification de l’utilisation de préservatif.

Nous étudierons la place que peut avoir le VIH dans la sexualité des participants, comment celle-ci a évolué ainsi que la perception du VIH et son évolution.

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I) Contexte historique

A) Découverte et lutte contre le VIH

1) Chronologie d’un fléau

À la fin de l’année 1979, des cas étranges de syndrome mononucléosique sont décrits au sein de la communauté gay de Californie. Des cas atypiques de muguet oral et anal, décrits par le Dr Weisman associées à des diarrhées abondantes intéressent quelques membres de la communauté scientifique américaine.

Deux de ses patients, en traitement depuis l’automne 1980, ont vu leur état de santé s’aggraver en 1981.

Devant une altération majeure de leur état général et l’apparition de troubles respiratoires, ils furent hospitalisés avant leur décès suite à des complications infectieuses. On attribua cela un déficit immunitaire par disparition des lymphocytes T4 et ce n‘est qu’en post-mortem que le diagnostic d‘infection à pneumocystis carinii fut posé (20).

En juin 1981, 5 cas similaires furent diagnostiqués et, fait insolite, tous les malades étaient de jeunes homosexuels (29-36 ans).

Dans son numéro du 5 juin 1981, le Morbidity and Mortality Weekly Report, hebdomadaire du Center for Disease Control (Atlanta), organisme chargé de la surveillance de différentes pathologies aux Etats-Unis, fait état pour la première fois de cinq cas de pneumonies graves et habituellement rares chez de jeunes homosexuels masculins (21).

On imputa cette symptomatologie à une souche de CMV virulente responsable d’une immunodépression et compliquée d’une pneumocystose.

En parallèle, plusieurs cas de sarcome de Kaposi apparaissent, dans un contexte similaire d’immunodépression.

Une synthèse permit de faire de ces différents symptômes l’expression d’une seule et même pathologie à l’origine d’un effondrement du système immunitaire.

Le 3 juillet 1981, un chroniqueur du New York Times publia sous le titre « cancer rare vu chez 41 homosexuels » le contenu du rapport épidémiologique prévu le lendemain par le Center for

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Disease Control et informa ainsi pour la première fois le public non médical de l‘existence d’un phénomène pathologique curieux intriguant les spécialistes et effrayant la communauté gay (22).

Initialement perçu comme une invention des médecins « homophobes » ou, à la rigueur comme l’effet d’un facteur environnemental et hygiénique non contagieux sans lien quelconque avec le coït anal, les mentalités évoluèrent rapidement devant la progression de ce mal inconnu (21; 23).

Fin aout 1981, le nombre de cas passa à 108 dont 94% d’homosexuels puis 200 début 1982. On signale des cas dans 15 états des États Unis dont la plupart dans les 3 grandes villes américaines de New York (50%), San Francisco et Los Angeles (24).

A New York, on découvre quelques cas similaires de pneumocystose chez des hétérosexuels, tous consommateurs de drogues intraveineuses.

Devant une propagation de la maladie, presque exclusivement restreinte aux homosexuels, on en conclut le caractère infectieux de manière certaine à la fin de 1981.

En Europe, un cas de pneumonie interstitielle est diagnostiqué en 1980 chez un jeune patient homosexuel, à Copenhague.

Néanmoins, ce n’est qu’en juin 1981 qu’on s’intéressa à ce cas, devant les similitudes avec les patients américains. On apprit que ce Danois avait eu des liens directs avec certains homosexuels aux États Unis en 1977 et qu’il avait mentionné une maladie étrange chez l’un de ses partenaires (le sarcome de Kaposi). Entre août 1980 et décembre 1981, quatre nouveaux cas de maladie de Kaposi furent diagnostiqués chez des homosexuels à Copenhague, concomitamment à une pneumocystose rapidement fatale (20).

Ces cas ont été rapidement reliés au « gay cancer » sévissant outre atlantique.

En décembre 1981, au Brompton Hospital de Londres, un cas d’infection à pneumocystis carinii et à CMV est diagnostiqué chez un homme de 49 ans. Ce dernier passait chaque année des vacances à Miami chez des amis et son dernier voyage remontait à 9 mois. (25)

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En octobre 1981, en Espagne, un jeune homosexuel mourut à la suite d’un sarcome de Kaposi associé à une cytomégalie et une candidose. Il avait eu des rapports homosexuels aux états unis en 1974 et en Turquie en 1980 (26).

Au total, fin 1981, d’après l’OMS il y'a avait 36 cas reconnu de ce syndrome sans nom (17 en France).

En France, en août 1981, un jeune homosexuel est hospitalisé à l’hôpital Claude Bernard et mourut en novembre 1981 des suites d’une infection à pneumocystis carinii, à CMV et au bacille de Koch, dans un contexte d’immunodépression avec déficit en lymphocytes T4. On fit alors immédiatement le rapprochement avec les cas similaires aux États-Unis (27)

L’hypothèse d’une origine africaine de l’infection se développa devant l’existence de cas étranges entre 1976 et 1982 de patients morts d’infections « nouvelles » foudroyantes. Ainsi des patients ayant séjourné en Afrique centrale sont décédés dans un tableau clinique conforme à ce qu’on avait pu observer aux États Unis.

Une nouvelle collecte de fond créée par la GMHC (Gay Men’s Health Crisis), première organisation de lutte contre le SIDA début 1982, récolte plus de 50 000 dollars pour la recherche (1)

En 1982, une nouvelle population cible de ce syndrome apparut, les haïtiens. Jusqu’au début des années 80, « Port-au-Prince » était un des hauts lieux du tourisme sexuel. Des homosexuels américains et européens y venaient en nombre. La prostitution bisexuelle a donc permis le passage de la maladie dans la population hétérosexuelle haïtienne. Les conditions sociales et politico-économiques ont poussé les haïtiens à immigrer vers les États Unis, le Canada et l’Europe Occidentale, favorisant ainsi la propagation du virus dans le monde (28).

Les homosexuels sont les premières cibles d’attaques et de critiques visant leur sexualité. Les haïtiens sont aussi rapidement rejetés de manière brutale et efficace. Ils sont expulsés de leurs logements, licenciés et on évite leur contact. Enfin, le tourisme en Haïti s’effondre. En janvier 1982 on diagnostiqua le premier cas d’immunodéficience humaine chez un hémophile puis 2 autres cas d’infection opportuniste furent découverts au début de l’été de la même année. C’est à travers la transfusion de concentrés de facteurs VIII ou IX que ces patients

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furent touchés. En effet, chaque concentré est issu du don de plasma de plusieurs centaines de patients différents, majorant ainsi le risque de contamination des culots (29). C‘est en 1982 que les premiers cas d‘enfants séropositifs apparaissent. A ce moment-là, on ne savait pas comment la transmission se faisait, par voie transplacentaire, lors de l’accouchement ou par l’allaitement. C’est à la fin de 1982 aux États-Unis et en 1983 en Europe que la presse s’empare du nouveau phénomène étrange qui frappe l’humanité. Durant cette période, seules les minorités « stigmatisées » par leur sexualité, leur origine ou leur addiction sont touchées.

Ce n‘est qu‘en 1983 que la transmission du SIDA chez les hétérosexuels fut démontrée chez un couple où le mari, hémophile transmit la maladie à sa femme.

Les rares cas de femmes atteintes se trouvaient principalement chez les usagers de drogues intraveineuses.

Progressivement une paranoïa s’installa. Un simple baiser, un simple contact par une poignée de main ou bien le partage d’un même verre devenait suspect (20).

Avant même d’avoir pu identifier le principal responsable on donna un nom à cette nouvelle pathologie et le sigle A.I.D.S fut adopté en 1983 pour Acquired Immune Deficiency Syndrome (30).

En septembre 83, on dénombrait 250 cas de SIDA avérés ainsi que plusieurs milliers de malades asymptomatiques dans la diaspora haïtienne.

Le nombre total de malades aux États-Unis, selon les Center for Disease Control passe de 200 fin 1981, à 750 fin 1982, puis 3000 à la fin de 1983 pour atteindre 8000 fin1984. Le taux de létalité est de 40%. A la fin de 1985 le nombre de sidéen est de 20000. Initialement le taux d’homosexuels parmi les malades est de 92% en 1982 pour descendre à 72% fin 1984. A l’inverse, les usagers de drogues intraveineuses ne représentent que 3-4% des malades en 1982 pour atteindre 17% en 1984.

En France, 17 cas sont diagnostiqués en 1981 pour atteindre 180 fin 1984 (90% d’homosexuels).

Dans le monde, selon l’OMS, le nombre de cas notifiés passe de 408 début 1982 à 12174 fin 1984 (31).

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Les premières suspicions se tournèrent initialement vers le CMV devant des taux d‘anticorps élevés contre ce virus chez les patients atteints du SIDA. L‘EBV a lui aussi été un candidat idéal pour la même raison mais pourquoi un virus à tropisme humain aurait-il aussi subitement changé son pouvoir pathogène ?

Certains virologues se sont donc tournés vers les oncovirus devant la grande proportion de sarcome de Kaposi dans la population malade (20).

De plus on réalisa l‘analogie frappante entre la nouvelle maladie et la rétrovirose féline (leucémie du chat). Deux chercheurs américains, Myron Essex et Robert Gallo, arrivèrent à la conclusion que le germe du SIDA était un rétrovirus et plus probablement le HTLV-1. On savait qu'il avait une prédilection pour les lymphocytes T4 et sa présence à Haïti renforçait l'hypothèse de son lien étiologique avec le SIDA (32).

Néanmoins, une question se posait : pourquoi un virus aussi répandu dans le monde n'avait-il pas provoqué une telle épidémie plus tôt ? Pourquoi le SIDA ne sévissait il pas au Japon, pays à la prévalence la plus haute de virémie HTLV ?

Bien qu’initialement la mauvaise piste avait été suivie, on avait acquis la certitude que le virus responsable était un rétrovirus « LT4-trope », c’est à dire, à tropisme pour les lymphocytes T4. En janvier 83, l’équipe Luc Montagnier réalisa l’exérèse ganglionnaire d’un jeune homosexuel malade et mit en évidence l’existence d’un virus inconnu, différent des virus I et HTLV-II. À la grande différence de ce dernier, qui provoquait la multiplication des lymphocytes T4, le virus en question les détruisait. Ils le nommèrent LAV (virus associé aux lymphadénopathies) (33).

En avril 1984, Gallo décrivit les caractéristiques d'un nouveau virus qu'on nomma rapidement le HTLV-III qui détruisait lui aussi les lymphocytes T4. En réalité, l'équipe de Gallo avait reçu un échantillon de virus LAV de l‘équipe de Pasteur et les deux virus s‘avérèrent identiques. On décida alors de nommer ce virus HIV (Human Immunodeficiency Virus) (34).

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2) Début de la mobilisation contre le SIDA

Au début des années 80, les organisations homosexuelles connaissent un affaiblissement politique. C‘est cette démobilisation associée à une certaine méfiance des militants à l’égard du SIDA qui expliquerait en partie la progression rapide de l’épidémie en France et la lente organisation du champ associatif et politique.

Vaincre Le SIDA (VLS) est la première association de lutte contre le SIDA à voir le jour en France en 1983. Puis, 1 an plus tard, AIDES fait son apparition et se placera en tête des mouvements associatifs.

L‘enjeu de cette association est d‘éviter que des mesures portant atteinte à la liberté individuelle puisse se développer. Ainsi, elle va lutter contre toute identification de la maladie à l’homosexualité dans le but d‘éviter de voir apparaître des mesures coercitives vis-à-vis des homosexuels (1).

Le virus ayant été identifié, après une mise au point rapide au cours de l’année 1984, le 21 juin 1985, la France autorise la commercialisation du premier test de dépistage du VIH. Après 1985, la pratique de dépistage du VIH, voit émerger une réalité nouvelle : l’existence de personnes apparemment en bonne santé mais porteuses du VIH, avec un résultat de test positif, qui les condamnait à mort.

Un débat s'engage alors, opposant les tenants d’un dépistage systématique à ceux d’un dépistage volontaire et anonyme.

En effet, les effets psychologiquement déstabilisants de l’annonce lorsque le test s’avère positif, n’avaient aucune contrepartie bénéfique en termes de thérapeutiques.

Pourtant, il était indispensable de dépister le plus possible, dans le double but d’améliorer la connaissance sur le virus et son évolution épidémique, et d’informer les personnes contaminées sur le risque de transmission qu’elles représentaient.

La lutte contre la maladie devient progressivement une cause d’intérêt général dont la légitimité se voit renforcée par l’apparition publique des "personnes atteintes par le virus" avec une visibilité sociale croissante de la maladie. (Exemple : Freddie Mercury, Hervé Guibert, Michel Foucault, …).

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18

Il apparait néanmoins indispensable de dépister le plus rapidement possible les individus, dans le but d’informer la personne et tenter de prévenir d’éventuelles autres contaminations mais aussi dans un but épidémiologique, afin d’évaluer l’incidence de la maladie.

Dès le printemps 1986, la décision de faire rembourser le test de dépistage par la sécurité sociale sera prise avec l’inscription du SIDA sur la liste des maladies à déclaration obligatoire. En 1987, toujours dans l’optique de renforcer les diverses mesures préventives, l‘arsenal législatif contre la toxicomanie s‘assouplit et les seringues sont autorisées à être disponibles en vente libre dans les pharmacies.

La même année, la lutte contre le SIDA bénéficie d’un budget en augmentation sensible, incluant la mise en place d’un programme de recherche publique (qui constituera l’ébauche de la future Agence Nationale de Recherche contre le SIDA – ANRS-) et la création des Centres d’Information et de Soins de l’Immunodéficience Humaine (CISIH) chargés de coordonner régionalement les hôpitaux et les professionnels engagés dans le domaine du SIDA.

Viendront ensuite dans le courant de l‘année, la reconnaissance officielle du SIDA comme « grande cause nationale » et le lancement dans les médias notamment à la télévision, de la première campagne publicitaire sur l’épidémie, conçu par le Centre Français d’Éducation pour la Santé (CFES).

Les centres de dépistage anonyme et gratuit (CDAG) apparaissent à cette époque, après de longues discussions (1).

En 1989, trois journalistes créent Act-Up sur le modèle du groupe américain de même nom fondé à New York en 1987.

Cette association, dont les liens avec la communauté homosexuelle va devenir un élément central dans ses actions publiques, va, s’affirmer plutôt comme un acteur contestataire de la lutte contre le SIDA, plutôt que de proposer des services aux personnes touchées.

Elle bénéficiera alors d’une forte médiatisation grâce à ses interventions souvent polémiques, cherchant à marquer les esprits

Quelques exemples de ses actions ;

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En 1989 mise en place de banderole sur les tours de la cathédrale Notre-Dame de Paris pour dénoncer l'attitude de l'Église catholique qui s’opposait à l’usage du préservatif,

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-

En 1991, organisation d’une manifestation au Sénat contre deux amendements criminalisant la transmission du virus du VIH, et rétablissant le délit d’homosexualité,

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En 1993, ils réussissent à poser un préservatif géant sur l’obélisque de la Concorde).

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En 1993, ils obtiennent le remboursement à 100 % du traitement pour les séropositifs. Act-Up bouleversera profondément le champ d’action associatif et jouera un rôle fondamental dans la reconnaissance du SIDA comme problème majeur de santé publique et dans la transformation de la place de l’homosexualité dans l’espace public.

Durant la seconde moitié des années 90, la médecine fait évoluer le statut de la maladie grâce à l’instauration de traitements de plus en plus efficaces dans le contrôle du virus, permettant ainsi de transformer la maladie en pathologie chronique.

En 1996, le contexte épidémique connait un profond changement lorsque de nouveaux traitements apparaissent (les antiprotéases permettant la trithérapie diminuant ainsi de 25% en un an la mortalité de la maladie).

Confrontée à la requalification progressive du SIDA comme « maladie chronique », l’association Act-Up en vient à ajuster et modifier progressivement la définition de son action jusqu‘à opérer un profond renouvellement de ses cadres.

Elle oeuvra dès lors pour un accès équitable aux traitements dans tous les milieux sociaux en France où les inégalités de traitements restent une réalité malgré la disponibilité et la gratuité des trithérapies.

La structuration de la lutte contre le SIDA est passée initialement par des mouvements associatifs (notamment Act-Up). Leurs actions ont oeuvré à sensibiliser les populations face à cette épidémie et a aussi permis de lutter contre les inégalités et la stigmatisation dont souffrait la population homosexuelle.

En donnant une visibilité au SIDA dans l’espace public et une légitimité à la lutte contre cette épidémie, elles ont permis la mise en place de mesure politiques en faveurs des personnes malades, l’accès équitable aux soins ainsi que le développement et la généralisation des moyens de préventions.

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B) Moyens de lutte médicamenteuse

1) Historique des principales avancées thérapeutiques

1985 : Expérimentation de l’AZT. L'AZT (ou zidovudine), première molécule anti-VIH visant

à ralentir la réplication du virus dans l'organisme. La zidovudine a été la première substance approuvée dans le traitement du SIDA. Sa prise était très contraignante (six fois par jour).

1985 : Échec de la cyclosporine malgré des premiers résultats encourageants

1987 : on autorise la mise sur le marché de l'AZT en France, en 1994, une étude

franco-américaine démontre que l'AZT diminue de 2/3 le risque de transmission du virus de la mère à l’enfant.

1991 : Arrêt brutal de l’essai " Imuthiol® " : le laboratoire français Pasteur-Mérieux interrompt

un essai conduit auprès de plus de 2 000 patients, après une analyse mettant en évidence l’inefficacité du traitement

1992 : Autorisation de la ddl, antirétroviral substitut de l’AZT, produit par Bristol-Myers

Squibb, 9 mois après son autorisation de mise sur le marché aux États-Unis.

1992 : Autorisation de la ddC aux États-Unis, peut être prescrit en combinaison avec l’AZT 1994 : Commercialisation de la ddC qui devient le troisième antirétroviral autorisé en France. 1995 : Découverte d'une nouvelle famille de médicaments, les antiprotéases. La protéase du

VIH est une enzyme scindant les précurseurs protéiques du VIH. Elle est indispensable à la production de particules virales par la cellule infectée. Elle est constituée de deux unités identiques. Les antiprotéases sont des médicaments inhibiteurs de l'activité enzymatique de la protéase.

1995 : Les résultats de l’essai Delta confortent ceux de l’essai " ACTG 175 " parus une semaine

plus tôt. Une bithérapie (AZT + ddI ou AZT + ddC) serait plus efficace qu’une monothérapie par AZT pour ralentir l’évolution de l’infection.

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21 1996 : Mise au point des trithérapies incluant des antiprotéases. Diminution de la mortalité due

au SIDA en France de 25 % en un an. En diminuant la charge virale aussi chez la femme enceinte, les trithérapies peuvent ramener sous la barre de 2% le risque de transmission du virus de la mère à l’enfant

1996 : Le 3TC (lamivudine, Épivir®) et le ritonavir (Norvir®) reçoivent une autorisation de

mise sur le marché en Europe. Suit rapidement l’indinavir (Crixivan®)

1997 : Généralisation du traitement post exposition jusque-là réservé aux professionnels de

santé qui consiste à la mise sous traitement dans les 48 heures de toute personne pensant avoir pris un risque d'infection au VIH.

1997 : Annonce de la disponibilité du préservatif féminin en France.

1998 : Le Combivir®, association de deux antirétroviraux, est disponible en pharmacie

hospitalière. Il améliore la qualité de vie des personnes sous trithérapies de part sa simplicité de prise (1 comprimé matin et soir).

1998 : Autorisation de mise sur le marché européen de la nevirapine, premier inhibiteur non

nucléosidique de la transcriptase inverse a en bénéficier.

2003 : Mise sur le marché d'une nouvelle molécule (T-20). L’enfuvirtide (Fuzéon®) est un

inhibiteur de fusion, visant à empêcher le virus de rentrer dans la cellule. À la conférence de l'IAS (International Aids Society) de juillet à Paris, l'accent est porté sur l'accès aux traitements dans les pays en développement (PED)

2004 : Le développement du deuxième inhibiteur de fusion (T-1249). Très attendu, car

prometteur d'une plus grande efficacité que le 20, avec une seule injection par jour, le T-1249 a malheureusement été arrêté en janvier 2004. La firme Roche a expliqué cette décision par des problèmes de formulation du médicament qui n'auraient pas permis la réalisation d'essais à grande échelle. Quant aux autres familles d'antirétroviraux, plusieurs essais sont en cours, notamment dans la classe des anti-intégrases visant à bloquer l'entrée du virus dans le

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22

noyau des cellules, et pour les inhibiteurs de fixation visant à empêcher le virus de se fixer sur les cellules.

Dès lors, une nouvelle approche du VIH et de sa prévention se développe. On voit apparaître de nouvelles études concernant une nouvelle façon de se prémunir du VIH et de lutter contre son expansion : la prophylaxie pré exposition.

En effet, le développement du bareback (qui désigne la pratique de rapports sexuels non protégés et un courant polymorphe prônant le culte et la revendication de cette forme de pratique sexuelle) et du chemsex par exemple, notamment dans les communautés homosexuelles, on se retrouve face à des prises de risques difficiles à prévenir avec l‘usage du préservatif comme seule barrière.

2) Les prophylaxies pré-expositions

2.1) Rappels historiques

Si la prise en charge des malades contaminés a toujours été un objectif primordial, la lutte contre cette pandémie particulièrement meurtrière a été perçue très tôt comme un enjeu de santé publique majeur.

La progression mondiale très rapide du VIH au début de l’épidémie, montre clairement que les modes de contamination font de la maladie un fléau ubiquitaire pouvant toucher tout un chacun. Les campagnes de préventions successives se sont intéressées à tous les modes de transmissions, allant de la promotion publique du préservatif et de sa distribution gratuite dans certains lieux à la vente en libre-service de seringues dans les pharmacies.

Malheureusement, ces messages, basés sur la responsabilisation individuelle et l’adaptation comportementale au risque VIH, n’ont pas eu le même impact dans tous les groupes sociaux. En effet, dans la communauté homosexuelle les découvertes de nouveaux cas de séropositifs ne cessent d’augmenter et l’utilisation des préservatifs ne fait que diminuer.

L’idée de la prévention combinée est née de ce constat. Elle vise à faire converger tous les moyens de prévention existants, dans le but de la réduction de la transmission du VIH.

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Si en 2013 la France a été un des premiers pays à préconiser le traitement universel et immédiat (dépister et traiter) c’est pour améliorer l’évolution des personnes contaminées mais aussi pour réduire le risque de transmission aux autres (TASP : « Treatment AS Prévention ») (35). Parallèlement, la prévention de la transmission de la mère à l’enfant par un encadrement médicamenteux de l’accouchement a très tôt permis de réduire ce risque de façon importante. Il en a été de même pour le traitement post exposition sexuelle ou sanguin.

La notion de traitement pré exposition (PrEP), basée sur une prise médicamenteuse par des personnes non contaminées mais susceptibles de s’exposer, s’est imposée progressivement. Initialement, des études ont été menées sur les singes en 2008 et 2010 pour tester l’efficacité de cette méthode de prophylaxie.

Une première série de test s’est intéressée à la protection offerte par la prise orale de ténofovir-emtrictabine chez les macaques contre le SHIV (simian-HIV) comparé à un groupe témoin. (36)

Ensuite, des tests ont évalués cette protection selon des schémas de prises intermittentes (1, 3 ou 7 jours avant l’exposition puis 2h après) (37).

Ces modes d’administration, grâce à la persistance intracellulaire de forme actives des molécules, se sont avérés aussi efficaces qu’une PrEP quotidienne. La prise orale d’une double dose 2h avant puis 24h après l’exposition au virus s’est révélée elle aussi protectrice.

Devant ces résultats encourageants, des tests ont donc été menés chez les Hommes avec différentes modalités d’administration (gel de ténofovir, du ténofovir disoproxil fumarate plus ou moins associé à l’emtrictabine par voie orale en prise quotidienne).

2.2) Les prophylaxie pré exposition dans le monde

A travers le monde il existe plusieurs essais cliniques se rattachant à la prophylaxie pré-exposition.

Les trois essais les plus importants sont iPrEx (8), PROUD (9) et Ipergay (10). Ils ont tous les trois permis de prouver la très haute efficacité de l’association ténofovir-emtrictabine (Truvada® ) dans un usage quotidien ou à la demande.

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24 iPrEx :

Prise orale quotidienne de ténofovir-emtrictabine

PROUD :

Prise orale quotidienne de ténofovir-emtrictabine

Ipergay :

Prise orale à la demande de ténofovir-emtrictabine

Il existe d’autres essais qui ont néanmoins été des échecs pour diverses raisons ;

Caprisa 004 (38):

Prise gel vaginal de ténofovir, essai randomisé contrôlé versus placebo en double aveugle Les résultats n’ont pas prouvé de supériorité du gel par rapport au placebo. Néanmoins, il existait un problème d’observance majeur.

Partner PrEP (39) :

Prise orale de ténofovir vs ténofovir-emtrictabine vs placebo dans les couples sérodiscordants pour le VIH.

Le ténofovir seul était efficace à 68% chez les femmes et 55% chez les hommes

L’association ténofovir-emtrictabine était quant à elle efficace à 62% chez la femme et 83% chez l’homme.

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25

Les résultats chez l’homme se rapproche de ce que l’on a pu observer dans les principales études. Néanmoins, l’efficacité chez la femme n’est pas assez probante.

TDF2 (40) :

Prise orale de l’association ténofovir-emtrictabine chez des couples hétérosexuels au Botswana. On a obtenu une efficacité de presque 63%. Malheureusement l’étude, ne comportant que peu de patient, ne s’est pas avérée d’une puissance suffisante.

FEM-PrEP (41) :

Étude en phase III sur la prise orale du ténofovir-emtrictabine prévue pour 3900 femmes Africaine à haut risque (1951 inclues).

Le 21 avril 2011 l’étude a été prématurément arrêtée devant l’absence d’efficacité (56 infections dans les deux bras sans différence significative)

VOICE (42) :

Phase IIB d’un essai contrôlé versus placebo sur plus de 5000 femmes Sud-Africaines, Ougandaises et Zimbabwéennes.

Comparaison entre une prise orale de ténofovir, de ténofovir-emtrictabine et de gel vaginal de ténofovir.

Arrêt prématuré du bras ténofovir seul devant l’absence d’efficacité.

Plusieurs éléments peuvent expliquer ces échecs par rapport aux essais principaux connus :

-

La pénétration des médicaments dans le vagin semble être problématique.

-

L’observance a été remise en question.

-

L’exposition au risque est-il le même que dans les autres grandes études ? Il existe des interrogations concernant certains éléments :

-

La toxicité potentielle du produit sur une personne séronégative.

-

L’observance à long terme est difficile à évaluer.

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-

En cas de protection partielle et incomplète de la PrEP, comment vont évoluer les comportements ?

3) Les études validant l’intérêt de l’association ténofovir-emtrictabine

Le Truvada®, malgré des débuts de commercialisation un peu difficile connait rapidement un succès important dans la communauté homosexuelle aux États-Unis.

Linda-Gail Bekker, présidente de la Société internationale sur le SIDA « Aux États-Unis, son développement est assez bluffant : 3 746 personnes l’utilisaient en 2013, 14 756 en 2014 et 30 967 en 2015. »

Scott McCallister, représentant de Gilead Sciences lors de la Conférence international sur le SIDA de Durban en Afrique du Sud (2016) rapporte qu’entre avril 2012 et décembre 2015 près de 80 000 personnes ont commencé une prise de PrEP aux États-Unis. Ce sont majoritairement des hommes (60 000), même si plus de 18 000 femmes ont, elles aussi, utilisé cet outil de prévention.

Connue pour sa politique préventive ambitieuse, San Francisco fait depuis 3 ans figure de « laboratoire » dans le déploiement à grande échelle de l’outil PrEP. Si la diffusion de la PrEP a d’abord été lente, elle est désormais en plein progression, avec cependant une utilisation moindre chez les afro-américains, les travailleur(se)s du sexe, les usager(e)s de drogues et les transfemmes en comparaison des hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes blancs.

Un consortium « Getting to Zero SF » rassemble toutes les parties prenantes avec pour objectif de réduire la transmission du VIH et les décès qui y sont liés de 90% d’ici 2020.

Le rapport de mission produit pour le compte de l’ANRS à la suite d’un voyage de presse à San Francisco en novembre 2015 (43) fait état de files actives de patients suivis en PrEP impressionnantes, jusqu’à 3 000 pour certaines : 700 personnes à la Magnet Clinic, centre de santé sexuelle LGBTQ situé au cœur du quartier Castro, 1 000 personnes à l’hôpital mutualiste de Kaiser dont 99% d’HSH. La demande est telle que certains centres affichent des listes d’attente de plusieurs semaines. Au total, 5 000 à 6 000 personnes seraient actuellement suivies pour une PrEP à San Francisco.

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Publiées dans JAMA par Albert LIU (44), les chiffres de la période 2013-2014 montrent que sur 400 gays et personnes transgenres seules deux séroconversions sont intervenues chez des personnes non observantes.

3.1) iPrEx

Cette étude (8) s’est déroulée de 2004 à 2008 aux États-Unis, au Brésil, au Pérou, en Équateur, en Afrique du Sud et en Thaïlande. 2499 personnes ont été inclues dans l’étude.

Il s’agissait d’une étude utilisant l’association ténofovir-emtrictabine (Truvada®) versus placebo, en double aveugle, multicentrique.

Les résultats de l’essai iPrEx ont montré que la prise orale quotidienne d’antirétroviraux à titre préventif entraînait une diminution de 44% de l’incidence du VIH chez les Hommes ayant des relations Sexuelles avec des Hommes (HSH) traités.

L’essai montre enfin qu’il n’y a pas de signe de « compensation du risque » : les pratiques sexuelles ainsi que l’incidence de la syphilis sont comparables dans les deux groupes avec ou sans PrEP. La prise de médicaments n’a pas entrainé de phénomène de désinhibition accru dans le groupe PrEP.

En effet, l’un des principaux arguments des détracteurs de ce traitement préventif est qu’il existe une prise de risque majorée en raison d’une utilisation beaucoup moins fréquente des préservatifs en raison d’une impression de sécurité conférée par la prise du Truvada®.

Ces résultats ont provoqué évidemment un certain nombre de réactions au sein des milieux associatifs, enthousiastes pour la plupart mais préférant néanmoins adopter une attitude attentiste vis à vis de la PrEP.

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Le collectif TRT-5 a réagi à l'annonce de ces résultats en rappelant qu'ils ne permettaient pas « de recommander l'utilisation de la combinaison ténofovir-emtricitabine (Truvada® ) en prévention », avant de demander que les recherches se poursuivent « pour, si l'efficacité de combinaisons antirétrovirales est démontrée, espérer un bénéfice de stratégies de PrEP, tant à l'échelle individuelle que collective».

Aides se félicite de l'espoir soulevé par iPrEx, mais « appelle à la prudence concernant l'utilisation "sauvage" d'ARV par des séronégatifs pour se protéger du VIH », une pratique minoritaire mais à l’œuvre dans le milieu festif gay.

Une préoccupation partagée par Act-Up Paris qui déconseille « l'usage sauvage d'antirétroviraux en prophylaxie » car, « à ce jour, on ne sait pas quel est le produit le plus efficace et on ne sait pas comment l'utiliser au mieux ». L'association salue néanmoins « un résultat très encourageant pour les chercheurs ».

L’usage sauvage de la PrEP consiste à la prise hors protocole d’essai clinique de la PrEP, prescrite le plus souvent par un médecin mais sans le suivi régulier et la prudence médicale. Il peut aussi s’agir de Truvada® récupéré sur le marché noir.

Enfin, Philippe Adam, chercheur au National Centre in HIV Social Research de Sydney, considère sur Minorités.org que « l'espoir autour de la prévention biomédicale semble bien avoir capoté. Les résultats de l'essai sont très en-deçà de ce qui était espéré », se demandant « qui s'occupera de rectifier les faux espoirs que la PrEP a créé parmi les gays».

L’étude complémentaire iPrEx-OLE présentés en juillet 2014 lors de la Conférence mondiale sur le VIH et publiés dans The Lancet (45).

Il ne semble n’y avoir aucun impact pour les participants prenant moins de deux doses par semaine, 84% de réduction pour ceux prenant deux à trois doses par semaine et aucune infection du VIH observée dans le sous-groupe qui prenait quatre doses ou plus par semaine

L’essai confirme qu’il n’y a pas de signe de "compensation du risque" dans IprEx-OLE, qui a comparé les pratiques sexuelles entre les groupes, avec ou sans PrEP, mais aussi l’incidence de la syphilis, un marqueur important de pratiques favorisant l’infection par le VIH, incidence qui est comparable dans les deux groupes.

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29 3.2) Proud

Cette étude a été réalisé en Angleterre entre novembre 2012 et avril 2014.

- 545 personnes séronégatives exposées à l'infection par le VIH ont été recrutées dans 13 centres de santé sexuelle à Londres, Brighton, Manchester, Birmingham, Sheffield et York. - Ces personnes ont été séparées en deux groupes, un groupe ayant reçu immédiatement un comprimé de Truvada® (ténofovir + emtricitabine), un autre avec un placebo avec un passage au Truvada® prévu 12 mois après.

Les deux groupes se sont vus proposer un ensemble de tests réguliers de dépistage du VIH et des infections sexuellement transmissibles, des préservatifs, des conseils et du suivi autour du safe sex, ainsi que des enquêtes comportementales et la surveillance

L’analyse intermédiaire a en effet montré une très haute efficacité de la PrEP, justifiant la décision de modifier protocole prise par le Comité indépendant de surveillance des données et de la sécurité de PROUD (DSMB). Ainsi les deux bras de l’étude reçoivent donc le Truvada®. Les résultats, publiés dans le Lancet, ont montré une diminution du risque d’infection de 86% chez les personnes traitées (46).

Trois infections par le VIH ont été diagnostiquées dans le bras ayant immédiatement reçu le Truvada® contre vingt dans le bras différé malgré la prescription de 174 traitements post exposition (RR 86%, 90% CI 64–96, p=0·0001).

Aucun évènement indésirable majeur n’est survenu et 28 simples effets secondaires ont été notés, principalement nausées, céphalées et arthralgies.

D’autre part, la fréquence équivalente des IST dépistées dans les deux bras montre que la PrEP n’a pas d’effet négatif sur une éventuelle « désinhibition » des comportements sexuels. Enfin, l’étude PROUD a démontré qu’il est possible d’intégrer la PrEP dans le paquet de services de soins et de prévention offerts par les centres de santé sexuelle en Angleterre

3.3) Ipergay (ANRS)

Historiquement, le concept Ipergay (10) a été discuté dès l’année 2010 pour atteindre sa maturité durant le premier semestre 2011 avec les premières réunions à l’ANRS. Notamment, le 27 avril 2011, avec la constitution, fait unique dans l’histoire des essais ANRS, d’un comité

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associatif, en plus du comité scientifique et du comité indépendant, regroupant 16 associations ou interassociatifs représentant la lutte contre le SIDA et le milieu LGBT.

L’étude, construite en double aveugle a inclus 361 participants en France (Paris, Lyon, Nantes, Nice et Tourcoing) et au Canada qui ont été suivi pendant en moyenne 18,4 mois.

Dans cette étude contrôlée randomisée versus placebo, les candidats devaient prendre deux comprimés dans les 24 heures précédant le rapports sexuel, 1 comprimé après et un dernier 48 heures après. En cas de plusieurs de rapports pendant plusieurs jours successifs, le participant devait prendre le comprimé quotidiennement jusqu’au dernier rapport suivi des deux dernières doses habituelles.

Après la décision prise par l’équipe de l’essai PROUD de donner une PrEP continue par Truvada® à tous les participants, l’ANRS a saisi le comité indépendant de l’essai IPERGAY qui a procédé à une levée d’aveugle pour examiner les données sur l’incidence de l’infection par le VIH dans le groupe recevant la molécule et le groupe placébo

Les premiers résultats de cet essai ont été présentés à Melbourne (47).

En juillet 2014, lors de la Conférence mondiale sur le SIDA, on a dénombré 16 contaminations au VIH durant l’essai : 14 dans le bras placebo et 2 dans le bras Truvada®. Les auteurs font remarquer que les deux personnes infectées dans le bras Truvada® avaient interrompu leur traitement plusieurs semaines avant leur infection. L’essai n’a pas observé de désinhibition tant

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en termes de nombre de partenaires, de nombre de rapports sexuels que de rapports anaux réceptifs non protégés.

En effet, 86% des participants déclaraient avoir eu des rapports anaux non protégés à la fin des 18 mois de suivi contre 77% au début de l‘étude.

En termes de tolérance, il y a un bon profil de tolérance du Truvada® et le taux d’évènement était similaire dans les deux groupes (si on excepte les troubles digestifs). En conséquence, l’étude a été arrêtée plus tôt que prévu afin que tous les participants de l’essai puissent bénéficier de la PrEP par Truvada® « à la demande » au moment de l’exposition sexuelle.

Les résultats présentés à la CROI 2016 de la seconde phase de l’étude (10) montrent que sur les 361 volontaires suivis, un seul (qui avait interrompu sa PrEP depuis plusieurs mois) a été infecté par le VIH. Le traitement préventif est resté plutôt bien toléré avec un seul arrêt pour effet secondaire. Les comportements sexuels des participants ont été peu modifiés avec un nombre inchangé de partenaires et de rapports sexuels

Les équipes qui mettent à disposition la PrEP aux États-Unis ont rapporté que si le nombre constaté d’IST restait très élevé (gonorrhées, chlamydiae et syphilis), un pourcentage important de ces infections étaient silencieuses et n’étaient détectées qu’au moyen d’examens biologiques (48).

3.4) Mode d’action et posologie

L’emtricitabine est un analogue nucléosidique de la cytidine. Le fumarate de ténofovir disoproxil est converti in vivo en ténofovir, un analogue nucléosidique monophosphate

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(nucléotide), analogue de l’adénosine monophosphate. L’emtricitabine et le ténofovir sont tous deux dotés d’une activité spécifique sur le virus de l’immunodéficience humaine (VIH-1 et VIH-2) et sur le virus de l’Hépatite B.

L’emtricitabine et le ténofovir sont phosphorylés par des enzymes cellulaires pour former respectivement l’emtricitabine triphosphate et le ténofovir diphosphate.`

L'emtricitabine triphosphate et le ténofovir diphosphate inhibent de façon compétitive la transcriptase inverse du VIH-1, aboutissant à l'arrêt de l'élongation de la chaîne d’ADN. L’initiation d’un traitement par Truvada® dans le cadre de la PrEP est contre-indiquée en cas de :

- Séropositivité au VIH ou sérologie VIH inconnue,

- Présence de signes ou symptômes d’infection aiguë par le VIH (signes grippaux, ganglions, etc.),

- Troubles rénaux caractérisés par une clairance à la créatinine < 50 ml/min, - Allaitement,

- Hypersensibilité à l’un des principes actifs ou des excipients du produit.

La première consultation (J0) ne donne pas lieu en général à prescription du Truvada®. En effet, des examens sont nécessaires pour vérifier que l’on n’est pas déjà porteur du VIH. Les délais entre le premier rendez-vous et la première prescription sont d’environ trois semaines à un mois.

Deux modalités d’administration sont possibles, « à la demande » ou en prise « continue ». La première, que l’on retrouve dans l’essai IPERGAY, consiste à prendre deux comprimés Truvada® dans les 24 heures précédant le premier rapport sexuel (et au plus tard deux heures avant) puis un comprimé toutes les 24 heures après chaque rapport pendant la période d’activité sexuelle et enfin un dernier comprimé 24 heures plus tard.

Lors de la prise en « continu », le patient prend tous les jours le comprimé de Truvada®. Par ailleurs il est recommandé de considérer que l’efficacité optimale protectrice chez les HSH est obtenue après 7 jours de prise quotidienne

Les patients bénéficient d’un suivi trimestriel, clinique et biologique avec la surveillance biologique de la tolérance hépatique et néphrologique du médicament ainsi qu’une surveillance

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des différentes IST auxquels ils sont exposés. De plus, un examen clinique est réalisé tous les 3 mois à la réception des résultats biologiques.

4) Les perspectives de la PrEP

4.1) La PrEP aujourd'hui

En janvier 2017, le Pr Molina dressait un premier bilan à 1 an de l’introduction de la PrEP sur le marché français (49)

Ce sont 3000 personnes qui sont protégées par la PrEP en France dont 1500 à Paris. Aux États Unis, ce sont plus de 100 000 personnes qui la prennent régulièrement (20% de la population homosexuelle du pays).

La moyenne d’âge est de 37 ans.

80% d’entre eux sont suivi dans les centres hospitaliers, contre 20% dans des centres de santé sexuelle.

Près de 60% des patients utilisent le schéma à la demande. 20% d’entre eux pratiquent le chemsex.

Il n’y a pas encore de donnée sur le taux de contaminations par les autres IST. On note 2 cas de séroconversion malgré une observance rigoureuse.

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Malgré la grande efficacité du traitement contre l’infection, il existe une grande méfiance en France et la PrEP ne rencontre pas encore le succès escompté (seulement 3000 patients sous PrEP presque 2 ans après son AMM).

De nombreuses critiques sont apparues concernant le médicament, notamment sur le risque de désinhibition et la prise de risque majorée avec la baisse drastique de l’utilisation du préservatif. Ces critiques persistent malgré l’existence de nombreuses études prouvant qu’il n’y a pas de compensation du risque (50). On a assisté à des débuts similaires aux États-Unis et il a fallu plusieurs mois pour faire évoluer les mentalités à ce propos.

La moralisation des comportements a toujours été un enjeu des discours de la prévention. Le concept du « Truvada whore » a aussi franchi les frontières et semble établit en France. Cette notion, développée par le blogueur David Duran dans le Huffington Post, expose l’idée que, en raison de la prise de risque majorée des patients sous PrEP, ils allaient de ce fait propager plus facilement différentes IST. En effet, la PrEP, favorisant le barebacking, semble être, selon ce blogueur, le catalyseur de toute forme d’activité sexuelle à risque « but for gay men who just like bareback sex, Truvada® is just an excuse to do what they want to do » (51). Cette attitude-là rejoint les réactions adoptées lors de l’autorisation de la pilule contraceptive en 1967 qui risquait de provoquer « une flambée inouïe d’érotisme entretenue et attisée par la propagande politique ».

La PrEP est aussi critiquée pour les risques de « chemsex ». Selon Michael Weinstein, président de AIDS Healthcare Foundation « Si quelque chose de mieux que le préservatif apparaît, je suis totalement en accord, mais ce n’est pas le cas du Truvada® (…) Soyons honnêtes, c’est un médicament de soirée ».

4.2) La piste du TAF/FTC en PrEP

Contrairement au TDF, le TAF (ténofovir alafénamide) ne s’accumule pas dans le sang mais est absorbé par les cellules du système immunitaire. En théorie, comme ces cellules constituent des cibles pour le VIH, le fait qu’elles contiennent du TAF (et du FTC) pourrait les protéger contre l’infection par le VIH.

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Une étude du Center for Disease Control américain (52) dont les résultats ont été présentés à la CROI 2016, s’est attachée à évaluer la nouvelle combinaison TAF + FTC chez des singes dont ils ont exposé le rectum à de faibles concentrations du virus de l’immunodéficience simienne (VIS). Au cours de l’étude, tous les animaux traités par placebo ont été infectés, alors qu’aucun des animaux traités par TAF + FTC n’a contracté l’infection. Ces résultats valident sur un modèle animal la protection par le TAF+FTC.

Lors d’autres expériences menées chez des femmes (53) on a constaté que, comparativement au TDF, le TAF donnait lieu à des concentrations de ténofovir de deux à dix fois moins élevées dans les tissus vaginaux et rectaux sur une période de 48 heures, ce qui peut mettre en doute l’équivalence d’efficacité préventive, du TAF+FTC vs TAF+FTC.

4.3) Doxycycline®

A la CROI de février 2017, l’équipe du Pr Molina de l’Hôpital Saint Louis a présenté une étude préliminaire sur le rôle de la prophylaxie par Doxycycline® chez les patients sous PrEP. Il s’agit d’une étude randomisée en double aveugle Doxycycline® versus placebo avec 2 groupes de 116 hommes (108 à la fin du suivi de 9 mois) entre juillet 2015 et janvier 2016. Les patients devaient prendre 2 comprimés de Doxycycline® de 100mg dans les 72h après un rapport sexuel non protégé (sans dépasser 6 comprimés par semaine).

A la fin de l’étude, 28 patients du groupe traité et 45 du groupe non traité avaient contractés une IST (dans 71% des cas, ces IST étaient asymptomatiques).

La prise de Doxycycline® a entrainé une réduction du risque infectieux de 70% contre le Chlamydia, 73 % contre la syphilis et 27 % le gonocoque.

Globalement la prise de l’antibiotique a été bien tolérée, les événements gastro-intestinaux étant, comme prévu, les plus fréquents (53% versus 41%).

Cette étude est cependant préliminaire, on ne sait pas, par exemple, quel peut être le profil de résistance, c’est à dire, par quels mécanismes bactériens les résistances à la Doxycycline® apparaissent.

Il sera nécessaire de mener des études à plus long terme avant de pouvoir dire si cette méthode de prophylaxie vis-à-vis des IST peut être efficace.

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36 4.4) Le Cabotegravir

L’étude ECLAIR (54), une étude présentée à la CROI 2016 en phase 2A s’est intéressée à l’injection intramusculaire trimestrielle du carbotegravir comme prophylaxie pré exposition chez les patients non infectés par le VIH. L’objectif était d’évaluer la tolérance et la pharmacocinétique.

Il s’agit d’une étude randomisée multicentrique en double aveugle en phase 2A, cabotegravir (CAB) versus placebo (PBO), réalisée sur des individus sains de sexe masculin. Les patients à haut risque de transmission du VIH étaient exclus de l’étude.

Durant les 4 premières semaines, les patients recevaient un comprimé de 30mg de cabotegravir ou un placebo puis recevaient des injections intramusculaire trimestrielle de 800mg de cabotegravir.

Le suivi a duré 41 semaines.

Sur 127 patients randomnisés, 126 ont été traités (105 dans le groupe CAB et 21 dans le groupe PBO. La tolérance du médicament a été, dans la grande majorité, excellente. On a recensé seulement 3 cas de neutropénie, d’élévation des CPK et de fatigue. 59% des patients ont rapporté des douleurs aux sites d’injection.

Cependant l’étude n’a pas été conçue pour évaluer l’efficacité en prophylactique, mais pour viser

Néanmoins, l’étude LATTE-2, actuellement en phase III, se penche sur l’innocuité et l’efficacité du cabotégravir associé à la rilpivirine dans le traitement des patients séropositifs et semble confirmer l’excellente tolérance et l’efficacité du médicament.

4.5) Les prophylaxies locales ASPIRE (55)

Étude de phase III, qui visait à évaluer l’efficacité d’un anneau vaginal contenant la dapvirine versus placebo. 2629 femmes de 18 à 45 ans ont été inclues dans l’étude, réalisée entre aout 2012 et juin 2015, réparties dans 15 sites au Mlawai, en Ouganda et au Zimbabwe.

Le risque était diminué de 27% dans le groupe anneau vaginal (37% après une seconde analyse après exclusion de 2 sites où le taux d’observance était jugé trop faible).

Références

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