Le rôle du territoire dans l’émergence de l’entrepreneuriat touristique : cas de la commune de Tigzirt

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Revue TADAMSA D- UNEGMU Volume 1 n°: 1, Mars 2021 ISSN : 2773 – 3289. PP : 147 - 172

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Le rôle du territoire dans l’émergence de l’entrepreneuriat touristique : cas de la commune de Tigzirt

The role of the territory in the emergence of tourism entrepreneurship: the case of the municipality of Tigzirt

SABOUN. Lamia¹, ABRIKA. Belaid², AKNINE. Rosa³ 1. Docteur en « sociologie de développement social et

local », université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou.

lsaboun@yahoo.com

2. Professeur université Mouloud Mammeri de Tizi- Ouzou. belaidamazigh@yahoo.fr

3. Professeur à l’université de ‘mouloud Mammeri de Tizi Ouzou r_aknine@yahoo.fr

Date de réception : 06/02/2021 Date d’acceptation: 03/03/2021 Date de publication : 05/03/2021

Résumé

L’objectif principal de cet article est d’expliquer l’émergence de l’entrepreneuriat touristique par des composantes et des indicateurs territoriaux. En s’appuyant sur une approche socioéconomique, nous analysons le rôle que peut jouer le territoire dans la création des entreprises touristiques.

Sur le plan empirique, la présente étude est portée sur le territoire de la commune de Tigzirt. Un territoire recelant des potentialités touristiques diverses pesant sur son niveau d’attraction. Une caractéristique qui semble être nécessaire

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mais pas suffisantes pour donner lieu à un territoire porteur de projets touristiques.

Mots clés : territoire, entrepreneuriat touristique, construction territoriale, ressources relationnelles, coordination des acteurs.

Abstract

The main objective of this paper is to explain the emergence of tourism entrepreneurship through territorial components and indicators. Based on a socio-economic approach, we analyze the role that the territory can play in the creation of tourism businesses. Empirically, this study is carried out on the territory of the municipality of Tigzirt. A territory concealing various tourist potentials weighing on its level of attraction. A characteristic which seems to be necessary but not sufficient to give rise to a territory carrying tourism projects.

Keywords: territory, tourism entrepreneurship, territorial construction, relational resources, coordination of actors.

1. Introduction

Replacer l’entrepreneur touristique dans le territoire dans lequel il émerge reste un sujet peu traité par les chercheurs. Il s’agit d’expliquer l’émergence et la performance de l’entrepreneuriat touristique par des indicateurs et des composantes territoriales. C’est à dire, lier le développement de l’entreprise touristique à la qualité des ressources que peut

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lui fournir son territoire d’émergence. Il convient de donner à l’entrepreneuriat touristique une dimension territoriale.

Sur le plan théorique, certains auteurs (Koh, Hutten et Crouch) qui ont opté pour une approche managériale ont essayé de caractériser l’entrepreneur touristique en lui donnant une spécificité par rapport aux autres entrepreneurs. D’autres chercheurs, comme Truchet, a enchâssé l’entrepreneur touristique dans le territoire duquel est issu en ayant une vision et une approche territoriale.

Avec sa dotation en potentialités (ressources naturelles, ressources financières, connaissance, ressources relationnelles…), le territoire peut créer des opportunités d’affaire pour les initiateurs de projets touristiques. Néanmoins, à elles seules, ces potentialités semblent être insuffisantes pour qualifier une quelques zone comme étant une destination porteuse de projets touristiques. La présence des acteurs territoriaux s’avère nécessaire pour l’activation et la valorisation de ces ressources. Au fait, le territoire ne saurait se construire sans la mobilisation et la cohésion des acteurs locaux qui exploitent les ressources pour la réalisation des projets de développement territorial. L’organisation des acteurs territoriaux détermine les valeurs et les normes communes au sein d’un territoire. Le partage de normes et de valeurs sociales renforce la liaison entre l’ensemble des acteurs de la communauté et favorise par conséquent l’émergence des initiatives locales.

Notre analyse est portée sur le territoire de la commune de Tigzirt. Un territoire doté d’un gisement de potentialités

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touristiques et attire un nombre important de visiteurs. L’objet de cet article est de chercher quel est le rôle que joue le territoire de la commune de Tigzirt dans la création des entreprises touristiques ? Cela, en partant d’une hypothèse qui suppose l’existence d’acteurs territoriaux exploitant les potentialités offertes par le territoire de la commune et favorisant le lancement de projets touristiques à travers le tissage des relations d’entraide et de complémentarité.

2. Entrepreneuriat touristique et son insertion territoriale

La création de l’entreprise est fortement liée au milieu social et économique dans lequel elle émerge et évolue. C’est encore plus vrai dans le secteur touristique où l’entreprise est basée sur les potentialités (naturelles, culturelles et sociales) dont il dispose le territoire.

2.1. L’entrepreneuriat touristique et ses spécificités

L’entrepreneuriat dans le secteur touristique reste un sujet peu traité par les chercheurs. Il se définit comme « Activities related to creating and operating a legal tourists enterprise. Legal enterprises refer to those businesses that operate on a profitable basis and seek to satisfy the needs of tourists and visitors, these enterprises include, among others, hotels, guest houses, travel agencies and tour operators” (Melodi et autrs, 2006). Selon cette définition, l’entrepreneuriat touristique intègre l’ensemble des activités liées à la création et l’exploitation d’une entreprise touristique légale. Un phénomène qui se réfère à toutes les

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entreprises cherchant à satisfaire les besoins des touristes et des visiteurs, ces entreprises incluent, entre autre, les hôtels, maisons d’hôtes, agences de voyages et tours opérateurs.

L’entreprenariat touristique se distingue de l’entrepreneuriat traditionnel. Il tire sa spécificité de la nature de l’activité touristique et ses caractéristiques.

2.1.1. La périodicité

La plupart des entreprises touristiques se caractérisent par la saisonnalité de leur activité. En fait, la saisonnalité de l’activité touristique est liée directement à l’évolution du niveau de la demande qui varie selon les diverses périodes de l’année. Elle constitue un enjeu qui agit essentiellement sur la rentabilité des entreprises et qui augmente le risque de s’engager dans un tel secteur.

2.1.2. Les ressources mobilisées

Les entrepreneurs touristiques mobilisent des ressources qui sont généralement issues du milieu local. Créer une entreprise touristique c’est de capter et, puis, exploiter et mettre en valeur une potentialité offerte localement.

2.1.3. Offre consommée localement

L’offre touristique provoque une rencontre directe entre l’entreprise et la clientèle. Le produit touristique ne peut être consommé que localement, l’offre des entreprises touristiques est destinée à la population locale et aux visiteurs.

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2.1.4. Le poids de la société et de la culture

D’autres facteurs rentrent en jeu dans la création de l’entreprise touristique à savoir les valeurs et les aspects socioculturels. La culture par ses différentes composantes constitue une matière première pour les entreprises touristiques.

Ainsi, le respect de la culture, les normes et les valeurs propres au milieu local est vital pour la réussite et le développement de ces entreprises. Toutefois, dans certains cas, la culture locale peut défavoriser et inhiber la création de certaines entreprises touristiques comme en témoigne l’exemple de quelques pays musulmans où la création des bar-restaurants est fortement interdite et mal vue sur le plan moral et culturel.

L’entrepreneur touristique est le produit de sa société, il est fortement encastré dans la réalité sociale. Le regard que porte la société pour cet entrepreneur détermine la légitimité de ses actions et ses affaires. C’est en étant socialement reconnu que l’entrepreneur peut relativement réussir son activité et ses projets.

2.2. La notion de territoire

Longtemps omis et négligé dans les études scientifiques, le territoire est aujourd’hui au cœur des préoccupations des chercheurs. Le territoire ne se limite pas à un simple espace physique ou à un point géographique, il s’étend pour prendre d’autres composantes qui y font partie. Il renferme l’espace géographique (physique), économique et social.

Contrairement à la notion d’espace qui n’a pas de contenu concret ni de spécificité économique ou de particularisme

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socioculturel, le territoire apparait comme une portion géographique ayant un contenu précis et concret « …le territoire n’a pas grand chose en commun avec l’espace. S’il partage avec celui-ci la consistance physique, il s’en écarte sensiblement par son contenu économique concret et, surtout, par sa dimension socioculturelle très forte … » (Ferguène, 2013, P : 36).

Certains auteurs à l’image de Y.Pesqueux, considèrent le territoire comme étant un réservoir et une combinaison de ressources naturelles et humaines. Mais, ils ajoutent à cela que le tressage des ressources dépend du contexte socioculturel, institutionnel et ethnique du territoire. En effet, le territoire correspond non seulement à une configuration économique au sens des ressources et l’ensemble d’activités qui s’y trouvent mais aussi, à une configuration sociale au sens de la collectivité humaine et du système culturel et identitaire qui renforce les liens et la cohésion au niveau de la communauté. (Ferguène, 2013, P : 36).

Le territoire n’est pas une donnée a priori, c’est le résultat d’un long processus historique et social. A.Ferguene considère le territoire comme « un produit de l’action des hommes, une construction socio-institutionnelle des acteurs qui y vivent et qui y évoluent » (Ferguène, 2013, P : 36). Selon cette définition, le territoire s’impose comme une construction collective d’acteurs, un système de valeurs sociales et des normes institutionnelles partagées entre ces acteurs. En d’autre terme, le territoire est perçu comme une résultante d’un

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processus de coordination des acteurs liés entre eux par des rapports sociaux, ces derniers sont régis par un logiciel référentiel commun.

2.3. Le territoire, un milieu entrepreneurial

La création de l’entreprise est un choix individuel ou familial fortement lié et ancré dans une identité locale. Bien que les facteurs personnels puissent être déterminants dans la création d’entreprise mais cela n’écarte pas l’idée selon laquelle l’entrepreneur est fortement lié au milieu dans lequel est né et grandi.

Le potentiel entrepreneurial prend son existence dans un milieu incubateur et fertile. Avant de se lancer dans une activité ou se localiser dans un lieu, les entrepreneurs étudient et évaluent, en premier lieu, des espaces potentiels qui peuvent les accueillir et ils ne choisissent que les lieux qui peuvent leur offrir des potentialités et des avantages pour leurs entreprises.

Le territoire est ce milieu qui offre des opportunités pour la création d’entreprises et auquel l’entrepreneur est indissociable

« Plus les offres de territoires et les demandes des firmes seront en adéquation, plus l’entreprise s’ancrera durablement ».

(Frimousse, 2006)

Dans son action, l’entrepreneur prend l’initiative et le risque, ce qui donne l’importance à la quantité et à la qualité des ressources disponibles sur un territoire donné, comme les moyens de financement, les connaissances et notamment le capital social.

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Au fait, la naissance et la réussite de l’entrepreneur sont fortement liées à son mentorat et à ses relations interpersonnelles qu’il entretient avec d’autres entrepreneurs et d’autres individus appartenant à la même tribu ou région.

L’entrepreneur choisit d’entreprendre là où les réseaux de relations (professionnelles, familiales, amicales) sont les plus denses, car cela lui permet d’en tirer d’autres ressources (financières, technologiques …) pour mener à bien leurs projets. Le partage d’une même identité territoriale et un même référentiel social (constitué de valeurs et de normes) renforce la liaison entre les entrepreneurs et les autres acteurs territoriaux. Cela, instaure également des mécanismes de régulation locale qui pourront, en contrepartie, gérer les situations conflictuelles entre l’ensemble des parties prenantes.

En effet, « le territoire dégage une atmosphère dans laquelle les acteurs entretiennent des relations particulières, notamment au niveau de la coopération et du partage de l’information, ce qui stimule le phénomène de la création de l’entreprise » (Ait Sidhoum, 2011). L’action et l’organisation des acteurs territoriaux restent primordiales pour la valorisation des potentialités et la construction des valeurs et des liens socioéconomiques au sein du territoire. La création d’entreprise n’est pas un projet uniquement individuel mais il est le produit de la coalition et les efforts de l’ensemble des acteurs socioéconomiques appartenant au milieu local. L’esprit de solidarité et de complémentarité semblent être des moteurs de la contribution des acteurs à la mise en marche des projets locaux.

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2.4. Le territoire : un site touristique

A travers les ressources multiples (naturelles, historiques, culturelles, patrimoniales, relationnelles …etc.) dont dispose le territoire, celui-ci peut devenir par excellence un lieu d’attraction touristique. Le territoire acquiert une image à la base de ces ressources « En effet, une fois investie socialement, une ressource permet une différenciation du territoire et lui donne une image. L’image une fois identifiée par le touriste, donne naissance à la destination » (Dujardin, 2008). Ainsi, le territoire se transforme en un site touristique par l’activation des ressources qu’il recèle. Ce qui exige un effort d’identification des potentialités latentes et leur exploitation par les acteurs qui font partie du territoire pour qu’elles puissent se transformer, enfin, en ressources qui seront capables de faire l’objet d’une visite. Donc, un territoire peut devenir un site touristique et porteur de projet par la présence des potentialités qu’elle offre mais aussi par l’action collective des acteurs qui le composent.

Le patrimoine (manifesté par les produits artisanaux tels que le savoir-faire local, la gastronomie, etc.) et la culture locale qui se distinguent d’un territoire à un autre, peuvent être une source d’attraction, mais surtout, ils peuvent procurer un avantage comparatif pour la destination. Ils constituent également une matière première pour les entreprises affiliées au secteur touristique et une plateforme pour les nouveaux projets. Leur exploitation peut donner lieu à une offre touristique (hébergement, restauration, équipements, lieu de

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loisirs, etc.) pouvant provoquer la curiosité des visiteurs potentiels, et par conséquent, créer une demande touristique.

2.4.1. La demande touristique et la pertinence du territoire

L’existence de la demande touristique et la perception du touriste conditionnent le succès d’un lieu touristique, en effet « la qualité des sites s’apprécie en fonction de l’intention des touristes » (Violier, 2008, P : 87). La qualité d’un lieu et son attractivité sont déterminées par le degré de la fréquentation et l’intention des touristes. Cela amène à dire, qu’un lieu touristique doit d’abord être connu par les touristes qui choisissent de se déplacer vers le lieu le plus attractif et qui leur semble le plus pertinent, « Pour cela ils disposent d’un ensemble des lieux possibles : le répertoire des lieux ; c’est-à- dire la liste des lieux avec leur caractéristiques essentielles dont ils ont connaissance par différents canaux ». (Violier, 2008, P :94) Faire connaitre les atouts du territoire pour ces touristes apparaît donc nécessaire pour la notoriété et l’attractivité du site. Attirer, satisfaire, fidéliser la clientèle sont des éléments sur lesquels les entreprises touristiques doivent veiller, afin de garantir la naissance, la croissance et la perpétuité de leur destination. Cela appelle à se lancer dans une démarche du marketing et de promotion touristique par des entrepreneurs touristiques, mais surtout par des acteurs appartenant au même territoire.

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2.4.2. Le marketing touristique et la notoriété d’un lieu touristique

Face au nombre important de destinations qui ne cesse pas de croitre, les territoires d’aujourd’hui sont confrontés au défi d’obtenir et de maintenir un avantage concurrentiel. La démarche marketing apparait comme l’outil principal qui permet aux destinations touristiques de se positionner sur le marché.

C’est à travers cette démarche que la destination peut construire et se doter d’une marque sur le marché et se différencier. Le marketing touristique renforce l’attraction et la notoriété de la destination par la mise en place de différentes techniques qui permettent de communiquer et influencer les visiteurs potentiels.

Le marketing touristique implique les acteurs de la communauté ayant une relation avec la promotion de la destination qui se fixent comme objectif la promotion de la destination comme les acteurs privés (les entreprises touristiques) et les acteurs publics (les pouvoirs publics, la collectivité locales, etc). Attirer de nouveaux clients pour une destination peut procurer des opportunités d’affaires et de nouvelles occasions d’investissement, ce qui pourra encourager l’émergence de micro-entreprises.

3. Etude de cas : Entrepreneurs touristiques et le territoire de la commune de Tigzirt

Notre étude de cas est portée sur la commune de Tigzirt¹ qui se caractérise par sa richesse en potentialités touristiques

1 Tigzirt est un mot Amazigh qui signifie l’ilot.

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(historiques, naturelles, patrimoniales), capables d’être une source de motivation pour les entrepreneurs de cette localité. A cela s’ajoute, le nombre important de visiteurs que reçoit celle- ci chaque année et qui viennent des autres régions du pays.

Mais cela, suffit-il pour que la commune soit porteuse de projets touristiques ?

3.1. Présentation de la commune de Tigzirt

Tigzirt est une zone côtière située au nord de la wilaya de Tizi- Ouzou du côté de la mer méditerranée ; elle joue le rôle de porte régionale de cette wilaya. Elle est distante de 39 Km du chef-lieu de wilaya et située à 124 km à l’est d’Alger et à 130 km à l’ouest de Bejaia². Le territoire de la commune de Tigzirt se présente comme le produit de différentes transformations et évolutions qu’il a connues au fil de temps. C’est aussi un réservoir de richesses diverses.

3.1.1. La commune de Tigzirt : un construit historique et urbain

Le territoire de la commune de Tigzirt est un construit d’un long processus historique et urbain. Il a connu plusieurs évolutions à travers le temps. Chaque transformation correspond à une étape de formation de ce territoire. D’après les données historiques, la première civilisation qu’a connue Tigzirt est celle des phéniciens. A cette époque, Tigzirt, nommée Rusurcurus, fut l’un des comptoirs d’échange. Il a connu des

2 Plan directeur d’aménagement et d’urbanisme (PDAU) de la commune de Tigzirt, 1995

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échanges commerciaux (le troc), ce qui a donné lieu à la naissance d’une petite ville. Avec l’occupation romaine, vers le 2 ème siècle après J.C, celle-ci s’est transformée en une ville moderne. La présence d’un port érigé par les phéniciens et la disponibilité des terres agricoles ont poussé les romains à s’y installer. Ils ont commencé par délimiter la ville et définir ses limites avec une muraille percée par deux portes et puis la deviser en deux axes ; le Cardo (côté nord-sud) et le Documanus (le coté est-ouest). Ce changement a été accompagné par une densification de la population surtout avec l’avènement du christianisme durant le 4 ème siècle caractérisé par la construction des temples. A côté des édifices religieux, les romains ont consacré des lieux pour les jeux et les loisirs. Toutefois, l’envahissement des vandales en 5 ème siecle, a détruit la plupart de constructions édifiées par les romains, ce qui a provoqué un dépeuplement massif dans la région. Avec l’arrivée des Byzantins, la ville de Tigzirt a connu des restructurations sur le plan architectural. Par contre, la période de l’occupation française s’est caractérisée par la mise en place d’un plan cadastral qui a divisé la ville en trois niveaux ; le niveau agricole, le niveau préurbain et le niveau urbain. Puis, et suite à la saturation du tissu urbain, la ville de Tigzirt a connu une extension. Après l’indépendance, et avec l’augmentation de la demande de logements la région a connu des élargissements dans tous les sens et la mise en place des outils d’aménagement et d’urbanisation.

Tigzirt constitue le produit de ces différentes étapes et transformations. Ce sont ces multiples restructurations

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historiques qui la forment, la structurent et la constituent comme un lieu de vie commune et de mémoire collective.

3.1.2. La commune de Tigzirt : un réservoir de potentialités touristiques

Le territoire d’étude recèle un gisement de potentialités touristiques très riche et diversifié. La position géographique de la commune de Tigzirt la caractérise par un climat méditerranéen favorable au confort et à l’activité touristique.

Elle est dotée d’un couvert végétal représenté par les forêts d’El- Azaib et située sur un massif qui offre des vues panoramiques sur la mer. Elle compte aussi 4 plages autorisées à la baignade: Tassalast, la grande plage, la plage du port, plage de Feraoun avec un sable doré. A cela s’ajoute, la richesse de ce territoire en faune maritime. Il est connu par plusieurs sortes et espèces de poissons (notamment l’espadon) qui peuvent créer une curiosité pour les visiteurs potentiels.

Comme nous l‘avons présenté ci-dessus, les civilisations (phénicienne, romaine byzantine et française) qu’a connues cette localité à travers le temps ont laissé des traces historiques qui se matérialisent en vestiges témoignant notamment après le passage des Romains, comme le casernement, le temple de génie, le cardro, la place dallée, etc. Ces vestiges ont fait souvent l’objet de visites touristiques.

Elle recèle aussi un patrimoine matériel et immatériel qu’elle a hérité de ces origines berbères, nous citons à titre d’exemple le patrimoine gastronomique connu par la cuisine traditionnelle ancestrale, comme le « couscous ». Ce qui

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pourra être une opportunité pour développer le tourisme culinaire.

En matière d’infrastructures, cette commune est accessible par plusieurs voies routières, à cela s’ajoute le nouveau port de pêche et de plaisance qui est devenu parmi les lieux les plus visités au niveau de cette localité et qui constitue une source de rentabilité et de création d’emplois pour les pécheurs et pour d’autres visiteurs.

Les entreprises touristiques de la commune de Tigzirt Le nombre d’entreprises touristiques disponible dans la zone d’étude reste insuffisant comparativement aux potentialités qu’offre cette dernière et au nombre de touristes qu’elle reçoit chaque saison. Au niveau de toute la commune, on compte 8 hôtels dont 4 sont fermés, une seule agence de voyage, quelques restaurants qui ne sont pas classés, une seule auberge de jeunesse et des entreprises de transport qui sont un peu plus développées par rapport aux autres entreprises³.

En matière de capacité d’accueil, les entreprises touristiques notamment hôtelières n’arrivent pas à couvrir même la moitié des touristes que reçoit la commune chaque année ; les huit hôtels existants offrent uniquement 233 lits. A noter que le nombre de lits était inférieur à 233 lits durant la saison 2013 après la fermeture de 4 hôtels. Malgré l’implication des

3 SABOUN. L. « Le rôle du territoire dans l’émergence de l’entrepreneuriat touristique : Cas de la commune de Tigzirt », mémoire de master, université de Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, 2013.

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résidences secondaires, comme une autre formule d’hébergement, le niveau de la demande reste toujours supérieur par rapport aux infrastructures d’accueil (SABOUN, 2013) Quant aux restaurants disponibles, aucun d’entre eux ne répond aux normes de classement reconnues, ils se limitent à des Fast Food et à des petits restaurants.

3.2. Les entrepreneurs hôteliers et leur milieu : analyse des résultats de l’enquête

Pour dévoiler le rôle que joue le territoire de la commune de Tigzirt dans la création de l’entreprise touristique nous avons réalisé une enquête de terrain basée sur les entretiens effectués avec les responsables des administrations et des organismes ayant un rapport avec l’activité touristique ( la direction du tourisme, l’assemblée populaire communale de Tigzirt, l’office du tourisme, l’agence foncière, la direction du transport, le commissariat national du littoral, le centre de formation professionnelle de Tigzit…) et sur les entretiens que nous avons effectués au niveau des entreprises hôtelières. Sur les quatre hôteliers actifs au niveau de la commune d’étude, nous avons réussi à faire parler trois d’entre eux, suite au refus de l’un des hôteliers. Pour présenter les résultats de notre enquête de façon anonyme, nous avons nommé les trois hôteliers

« A », « B » et « C ».

3.2.1. Identification des entrepreneurs enquêtés : Etude du profil des entrepreneurs

Afin d’identifier le profil des entrepreneurs ainsi que leurs motivations, nous avons collecté quelques informations

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portant sur le sexe, l’âge, le niveau d’instruction et les motivations des entrepreneurs.

Le sexe

Par rapport au sexe des hôteliers on compte parmi eux deux hommes (les hôteliers « A » et « B ») et une femme (l’hôtelier

« C »). Le sexe féminin représente un tiers de l’ensemble des hôteliers ce qui donne 33% du total. Dans la société locale, gérer un hôtel par une femme, constitue un des plus grands défis sur le plan social et culturel. La nature de l’activité (le contact courant avec les gens et des étrangers) inhibe le sexe féminin de s’aventurer dans ce type d’affaire.

L’Age

Le plus âgé des hôteliers c’est l’hôtelier « A », il a 63 ans, par contre les deux autres hôteliers « A » et « B » sont âgés respectivement 49 ans et 53 ans, sachant que le premier est le créateur de l’hôtel alors que les deux autres ils ont déclaré qu’ils ont eu le contrôle de leur entreprise suite à une succession familiale.

Niveau d’instruction

Quant au niveau d’instruction des entrepreneurs, l’hôtelier

« A » possède le niveau scolaire primaire, l’hôtelier « B » a un niveau d’étude secondaire, par contre l’hôtelier « C » nous a informés qu’il ne possède aucun niveau d’instruction. Le faible niveau d’instruction pour les hôteliers « A » et « B » ne les a pas entravés à continuer dans l’activité ni à communiquer avec la clientèle et le monde extérieur.

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Motivations des entrepreneurs

Les trois entrepreneurs interrogés ont avancé qu’ils sont plus motivés par des facteurs non économiques. Entre le profit et la promotion de la destination, les entrepreneurs donnent une priorité et optent pour la promotion de leur localité tout en cherchant à être reconsidérés au niveau de la société locale.

Bien que leur rôle dans le développement soit modeste, les entrepreneurs affirment que cela constitue leur première préoccupation.

3.2.2. Absence d’actions collectives des entrepreneurs touristiques avec un réseau de relations retreint Les formes d’interactions et d’actions collectives des hôteliers sont rarement mises en avant. On a constaté, à travers nos entretiens, l’absence de flux ou de transfert d’informations, de connaissances ou de savoir-faire entre les entrepreneurs.

Les entreprises enquêtées déclarent qu’elles n’ont jamais contribué à des actions collectives avec d’autres entreprises ou d’autres acteurs, leur engagement dans les actions collectives reste inexistant.

De surcroit, l’absence d’un tissu relationnel ou de capital social se fait ressentir. Le lieu d’étude est marqué par un manque de cohésion sociale entre les entreprises. En effet, le réseau de relations des hôteliers semble être restreint. En cas de besoin d’aide financière, de soutien ou de conseils les trois hôteliers avancent qu’ils recourent souvent à leur famille. Par contre, ils se méfient des personnes n’appartenant pas au cercle familial. Cela peut être expliqué par l’absence de confiance

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entre les entrepreneurs et leur entourage. Ces dernières avouent qu’ils ne ressentent jamais de confiance entre eux, alors que la présence de cette dernière pourra créer des liens de solidarité et de complémentarité entre les entrepreneurs. Concernant le niveau de concurrence, les entreprises enquêtées affirment qu’elles ne se mettent pas en concurrence, à partir du moment que la demande est toujours supérieure à leurs capacités d’hébergement (153 lits), alors que le mouvement concurrentiel pourra créer un environnement d’excellence.

3.2.3. Inexistence d’interaction et de coordination entre les acteurs territoriaux

Chaque action de développement s’accompagne d’une logique d’acteurs disposant de prérogative, de légitimité et d’une capacité financière pour agir sur le terrain. Les acteurs locaux de Tigzirt ne s’adossent sur aucune viabilité économique et financière. Citant à titre d’exemple, les collectivités locales, elles ne disposent d’aucune souveraineté financière ou fiscale qui leur permet de mener des projets de développement local et de promouvoir des destinations touristiques. Elles sont chargées juste à gérer les problèmes quotidiens des habitants.

L’assemblée populaire communale (APC) de Tigzirt

A l’instar de la plupart des communes du pays, le rôle de l’APC dans le développement de la destination de Tigzirt reste modeste. D’après le secrétaire général de l’APC, durant la saison estivale 2013, l’APC avait l’initiative d’organiser des soirées et de créer une vie nocturne, après avoir désigné une

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commission culturelle pour l’animation. A cela s’ajoute les opérations de nettoyage qui sont menées par le service d’hygiène afin de mieux présenter la commune durant la saison estivale. Toutefois, ce rôle limité joué par l’APC de Tigzirt, reste insuffisant par rapport à ce qu’elle doit mener comme projets et actions pour développer l’activité touristique et encourager les entrepreneurs à se lancer dans des projets à vocation touristique.

La société civile

Le rôle de la société civile demeure négligeable et loin de contribuer au développement de la région. L’office de tourisme par exemple, n’exerce pas toutes les fonctions qui lui sont attribuées dans le cadre de la promotion touristique. Cela peut s’expliquer par le manque de moyens financiers qui lui permettraient d’assurer ses fonctions d’une part, et d’autre part, les enquêtes qui sont effectuées par le SDATW⁴ de la wilaya de Tizi Ouzou révèlent la méconnaissance des touristes de l’apport de l’office pour l’information touristique (hébergement, visites, sites, circuits..).

Il existe d’autres associations comme : les comités de villages ou de quartiers, l'association sportive communale, l'association des activités de jeunes (AAJ), l’association Eco

4 Schéma directeur d’aménagement touristique de Wilaya (Sdatw) de Tizi Ouzou.

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Planète, l'association Cap Mer. Mais la plupart d’entre-elles ne jouent pas leur rôle à cause du manque de moyens financiers nécessaires à la réalisation d’un programme riche et diversifié.

Ce sont des associations qui restent sans mouvement et sans programme d’action. Certaines initiatives ont été menées durant la saison estivale 2013, mais elles restent modestes et loin d’être professionnelles. Il y a lieu de signaler aussi, l’initiative de l’association « AMINIR » (qui n’est pas de la région) avec son programme d’action qui vise à rendre le littoral kabyle propre. Elle a contribué durant la même saison à rendre les plages du littoral plus propres en collaboration avec le commissariat national du littoral qui a mis en place des agents qui veillent sur la propreté des plages et contribuent à la sensibilisation des estivants et les citoyens de la région.

Le centre de formation professionnelle de Tigzirt

Le capital humain joue un rôle fondamental dans l’industrie touristique d’où l’importance de la formation, de la diffusion des connaissances et du renforcement des compétences pour le développement du secteur en général et de chaque entreprise en particulier.

La commune de Tigzirt dispose d’un seul centre de formation. C’est un établissement public à caractère administratif créé en 1986. Il a pour mission la formation d’ouvriers hautement qualifiés et éventuellement des techniciens supérieurs selon le mode de formation résidentielle ou par l’apprentissage. Il dispose de 15 spécialités et chacune ouvre 30 postes pour chaque année. Selon la conseillère du

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centre, le nombre de stagiaires connait des déperditions. La moyenne annuelle est de 20 stagiaires.

Le centre offre des spécialités qui ont un rapport avec le tourisme à savoir : l’hôtellerie (option réception), cuisine, boulangerie, pâtisserie au mode apprentissage. La conseillère de ce centre de formation à laquelle nous nous sommes adressés souligne que le nombre de stagiaires option « réception » est en diminution du fait que la demande de cette spécialité sur le marché du travail régresse.

Il est à noter que, les intervenants publics, privés professionnels de tourisme, associations activant au niveau de la commune de Tigzir doivent se mettre en coopération et en collaboration pour mener des projets et des actions qui peuvent créer une dynamique de l’activité touristique ou chacun agit avec et pour l’autre. Toutefois, et à l’instar de la plupart des régions du pays, on a constaté au cours de notre enquête, une absence totale d’un cadre de coordination opérationnelle pour une mise en cohérence des actions à engager par chaque acteur sur le terrain, avec une absence de liens et de rapports entre les différents responsables et organismes. De même, on assiste à des conflits et des litiges entre les responsables de différents organismes où chacun se plaint de la mauvaise gestion de l’autre. De plus, la quasi majorité des organismes considère que le tourisme est une activité qui relève, uniquement, de la responsabilité de la direction du tourisme.

D’après notre constat, il n’existe aucune vision ou programme collectif qui vise à promouvoir l’activité touristique et à encourager le lancement des projets touristiques, en signalant

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l’inexistence des prémices d’une gouvernance locale basée sur une vision commune et un compromis entre les différents acteurs.

4. Conclusion

A partir de tout ce que nous venons de présenter, on peut effectivement conclure que l’émergence de chaque initiative locale nécessite en premier lieu, la disponibilité de liens sociaux solides basés sur une confiance et une mobilisation des différents acteurs. L’entrepreneur, lui seul, ne peut se lancer dans un projet ni même réaliser un changement sans l’existence d’une volonté partagée entre les différentes parties prenantes appartenant au même territoire. La dotation de la commune de Tigzirt en potentialités touristiques n’a pas donné lieu à une destination touristique porteuse de projets. Ce contresens peut être expliqué par l’absence de liens sociaux et de concertation entre les acteurs et par l’absence de cohérence des actions engagées, chacun agit tout seul et mène des actions en rupture avec celles des autres.

Chaque territoire possède toutes ses chances et capacités de réussit et de promotion des projets, à partir du moment qu’il n’existe pas de territoire exclu du développement. Mais une bonne gouvernance locale et l’existence d’un réseau social basé sur le partage de mêmes valeurs et normes semblent être une condition vitale pour le développement des territoires et notamment pour le lancement et la réussite de chaque initiative issue du milieu local.

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5. Bibliographie

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- SABOUN. L. (2013) « Le rôle du territoire dans l’émergence de l’entrepreneuriat touristique : Cas de la commune de Tigzirt », mémoire de master, université de Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou.

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17-28.

Autres documents

 Plan directeur d’aménagement et d’urbanisme de la commune de Tigzirt, 1995.

 Schéma directeur d’aménagement touristique de Wilaya (Sdatw) de Tizi Ouzou.