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Quelle stratégie thérapeutique chez les patients de plus de 80 ans présentant un NSTEMI ?

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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MISE AU POINT

Quelle stratégie

thérapeutique chez

les patients de plus de 80 ans présentant un NSTEMI ?

What therapeutic strategy in patients over 80 years old with NSTEMI?

G. Barone-Rochette1,2, 3, G. Vanzetto1,2, 3

1 Clinique universitaire de cardio- logie, Pôle thorax et vaisseaux, CHU Grenoble-Alpes, Grenoble.

2 Cardiologie interventionnelle et imagerie cardiaque, université Grenoble-Alpes, UMR Inserm 1039, Grenoble.

3 FACT (French Alliance for Cardio- vascular Trials).

L

a prise en charge d’un patient âgé de plus de 80 ans est devenue fréquente dans nos unités de cardiologie et même dans nos unités de soins intensifs. Ces 20 prochaines années, l’Or- ganisation mondiale de la Santé prédit une aug- mentation de la morbimortalité cardiovasculaire de 120 à 137 %, en raison du vieillissement de la population. Les syndromes coronariens aigus (SCA) y tiendront une bonne place avec l’infarctus du myo- carde sans élévation du segment ST (NSTEMI), qui est la présentation de l’infarctus la plus fréquente.

La prise en charge des NSTEMI chez les patients âgés reste une question difficile pour plusieurs raisons

− présentations cliniques atypiques, comorbidités associées, autonomie limitée, etc. − mais au final, nos difficultés viennent surtout d’un manque cruel de données factuelles fondées sur des études ran- domisées. Nous discuterons dans cet article des données scientifiques à notre disposition et des interrogations qui persistent. Nous présenterons ensuite une étude française qui se met en place et qui, nous l’espérons, répondra à certaines de ces interrogations.

Diagnostic

Les données des registres montrent que la propor- tion de patients âgés de plus de 75 ans représente 27 à 34 % de l’ensemble des patients présentant un NSTEMI (1). Cependant, on peut penser que ce chiffre est sous-estimé car le diagnostic de NSTEMI chez un patient âgé est parfois difficile à réaliser.

La douleur angineuse reste le signe d’appel le plus fréquent, mais les manifestations atypiques comme

la dyspnée, la syncope ou bien même des vertiges, une confusion, des troubles digestifs, une asthénie avec altération de l’état général ne sont pas rares.

Les difficultés sont aussi liées à un interrogatoire difficile (surdité, troubles des fonctions supérieures) et, dans ce contexte, il ne faudra pas hésiter à inter- roger l’entourage. L’électrocardiogramme ici sera rarement normal, et souvent associé à d’autres ano- malies (hypertrophie ventriculaire, bloc de branche, électro-entraînement), le sous-décalage du segment ST typique étant moins fréquent. Le dosage de la troponine cardiaque garde une excellente valeur diagnostique, même si la spécificité de ce test est moins élevée chez ces patients du fait de la pré- sence de comorbidités, mais une interprétation d’une cinétique ascendante sur 2 prélèvements à 3 heures d’intervalle en fonction du contexte clinique permettra de conclure. Une cinétique des troponines authentifiant un NSTEMI se fait souvent lorsqu’une autre pathologie aiguë concomitante est présente, comme une infection pulmonaire, une décompen- sation cardiaque ou autre. Il est difficile de faire la part entre un véritable SCA de type 2 et l’intri- cation de plusieurs maladies dans un contexte de comorbidités importantes. L’échographie cardiaque permettra surtout de mettre en évidence un diag- nostic différentiel mais permettra aussi d’évaluer la fraction d’éjection systolique du ventricule gauche et de dépister un rétrécissement aortique fréquent chez les personnes âgées. Un bilan biologique stan- dard sera utile pour caractériser les comorbidités des patients (numération de la formule sanguine, CRP [protéine C réactive], numération plaquettaire, coagulation, ionogramme sanguin, créatininémie) et radiographie du thorax.

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» Le dépistage de la fragilité au cours d’un épisode de NSTEMI est important, il permet de prévenir le risque d’entrée dans la dépendance.

Revascularisation Imagerie coronaire Évaluation gériatrique

Highlights

»The management of non-ST segment elevation myocardial infarction (NSTEMI) in 80 years remains controversial because of the lack of factual data from randomized studies.

»The identification of good candidates for revasculariza- tion needs to be improved in this context. Non-invasive tests made under certain conditions may help depending on the extent of ischemia.

»Screening for frailty during an NSTEMI episode is important, it helps to prevent risk of entry into the dependency.

Keywords

Myocardial infarction without ST segment elevation Elderly patients

Coronary revascularization Coronary artery disease imaging

Geriatric evaluation

Prise en charge et données scientifiques disponibles

Une fois le diagnostic de NSTEMI fait, une prise en charge classique pourrait être proposée, avec la prescription d’un traitement médical optimal, une évaluation du risque ischémique et, en fonction de celui-ci, la réalisation d’une coronarographie plus ou moins rapidement avec revascularisation coro- narienne si nécessaire. Pourtant, en pratique, la prise en charge n’est pas aussi simple. Cela s’explique par le fait que cette population présente de nombreuses comorbidités associées à une maladie coronarienne, qui présente elle-même des lésions coronariennes plus sévères et diffuses en comparaison aux popu- lations plus jeunes. En outre, les complications liées à la revascularisation par angioplastie coronarienne ou au pontage coronarien sont plus fréquentes chez les personnes âgées, comme l’infarctus du myo- carde, l’insuffisance cardiaque, l’accident vasculaire cérébral (AVC), l’insuffisance rénale et les saigne- ments, selon les données observationnelles (2, 3).

Ainsi, l’équilibre risque/bénéfice des thérapeutiques reste incertain car les données disponibles découlent en grande partie des analyses de sous-groupes des essais cliniques randomisés et des registres.

Traitement médical

La présence de multiples pathologies va entraîner des modifications pharmacocinétiques et/ou pharmacodynamiques s’ajoutant à celles dues à l’âge, entraînant une efficacité et une tolérance des thérapeutiques variables. Bien que peu d’études médicamenteuses aient inclus des patients de plus de 75 ans, on retiendra que les analyses en sous- groupes de ces études et les données des registres suggèrent un bénéfice à la prescription du traitement médical optimal type BASIC associant bêtabloquant, antiagrégant, statine, inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), contrôle des facteurs de risque malgré la hausse des effets indésirables (4). On notera une résistance au clopidogrel plus fréquente chez les personnes âgées (5), et on préfèrera une association aspirine-ticagrélor pour diminuer le risque ischémique aux dépens d’un risque hémor-

ragique augmenté. L’héparine non fractionnée sera l’anticoagulant à privilégier dans ce contexte où les altérations de la fonction rénale ne sont pas rares.

Même les statines, sujet à polémique actuelle- ment, sont, comme les bêtabloquants et les inhi- biteurs de l’IEC, recommandées avec un niveau de preuves limité. Une attention particulière devra être portée sur l’évaluation de la tolérance de ces théra- peutiques.

Revascularisation coronarienne

La morbimortalité péri-opératoire des procédures de pontage coronarien augmente chez le sujet âgé d’au- tant plus qu’il présente un NSTEMI, et l’angioplastie coronarienne sera considérée comme la technique de choix de reperfusion. Les données des registres montrent que le taux d’angioplastie coronarienne suivant l’admission diminue progressivement de 71 % chez les hommes de 55 ans à 61 % chez les 75-84 ans (6). Malgré le taux de revascularisation plus faible chez les personnes âgées, une analyse ajustée par score de propension du registre alle- mand des SCA a suggéré que, chez les patients âgés de plus de 75 ans, la stratégie invasive améliorait la mortalité hospitalière (6,0 % versus 12,5 % ; OR = 0,55 [IC95 : 0,35-0,86], p = 0,001) et le taux d’infarctus du myocarde non mortel (9,6 % versus 17,3 % ; OR = 0,51 [IC95 : 0,35-0,75], p = 0,001), ainsi que le taux de mortalité à 1 an (OR = 0,56 [IC95 : 0,38-0,81]) par rapport à une stratégie conservatrice initiale (traitement médical seul) [1].

Dans les essais randomisés, les patients de plus de 75 ans sont sous-représentés (soit 13 % dans l’étude TRITON-TIMI 38 et 15 % dans l’étude PLATO) [7-8]. Plusieurs études analysant les sous-groupes provenant d’essais randomisés montrent un avantage de la revascularisation par rapport à une stratégie conservatrice initiale (traitement médical seul) chez les patients âgés (9-11). Mais, en raison du biais de sélection, les personnes âgées incluses dans les essais cliniques randomisés ne représentent pas la grande partie des patients pris en charge dans la pratique clinique quotidienne. En effet, sont incluses dans ces études des personnes âgées peu fragiles avec un nombre de comorbidités faible. Les quelques rares

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MISE AU POINT

études randomisées, dans le domaine exclusif des SCA chez les personnes âgées, qui comparent stra- tégie conservative initiale (traitement médical) et stratégie invasive précoce avec une angiographie coronarienne et, le cas échéant, une revascularisa- tion, ont des résultats contradictoires.

Un essai italien portant sur les NSTEMI des personnes âgées a randomisé 313 patients d’au moins 75 ans avec soit une stratégie de routine invasive précoce comprenant angiographie coronarienne et revas- cularisation dans les 72 heures, soit une stratégie conservative initiale (traitement médical et angio- graphie uniquement pour l’ischémie récurrente).

Le critère principal composite associant la mort toutes causes, l’infarctus du myocarde non fatal, l’AVC non fatal, l’hospitalisation répétée pour des causes cardiovasculaires ou des saignements sévères à 1 an n’a pas été significativement différent entre les groupes invasif et conservateur (27,9 % versus 34,6 % ; HR = 0,87 [IC95 : 0,49-1,56]) [12].

Le dernier grand essai contrôlé randomisé After Eighty Study (13) a montré de son côté une réduction des événements cardiovasculaires majeurs ou MACCE (Major Adverse Cardiac and Cerebral Events) que sont l’infarctus du myocarde non fatal, la revascularisa- tion urgente, l’AVC et le décès toutes causes chez les patients bénéficiant d’une stratégie invasive par rapport à une stratégie conservatrice (traitement médical seul). Le résultat principal s’est produit chez 93 (40,6 %) des 229 patients affectés au groupe invasif et 140 (61,4 %) des 228 patients affectés au groupe conservateur (HR = 0,53 [IC95 : 0,41-0,69], p = 0,0001). Les hazard-ratios pour les 4 composantes du critère d’évaluation principal composite étaient 0,52 (IC95 : 0,35-0,76 ; p = 0,0010) pour l’infarctus du myocarde, 0,19 (IC95 : 0,07-0,52 ; p = 0,0010) pour la nécessité d’une revascularisation urgente, 0,60 (IC95 : 0,25-1,46 ; p = 0,2650) pour l’AVC, et 0,89 (IC95 : 0,62-1,28 ; p = 0,5340) pour les décès toutes causes.

Néanmoins, cette étude présentait plusieurs limites dont la principale était l’absence de description de la fragilité et des comorbidités gériatriques des patients inclus. Pourtant, la fragilité a été identifiée comme un fort prédicteur indépendant de la mortalité hospita- lière et de 30 jours chez les patients âgés présentant un NSTEMI (14). Il est donc essentiel de l’évaluer afin de connaître la nature de la population étudiée.

Évaluation de la fragilité

La notion d’évaluation de la fragilité gériatrique est devenue importante dans le domaine de la car-

diologie car des thérapeutiques invasives sont de plus en plus proposées aux patients âgés. Le TAVI (Transcatheter Aortic Valve Implantation) en est un bon exemple sur ces dernières années. La fragilité est un syndrome clinique qui est un marqueur de risque de mortalité, de perte d’autonomie, de chutes, d’hospitalisations et d’institutionnalisation. La perte d’autonomie avec l’entrée dans la dépendance a des répercussions médico-économiques impor- tantes pour notre système de santé ; sa prévention est donc nécessaire. Le dépistage de la fragilité pourra conduire à instaurer des procédures pré- ventives. Il revient au médecin traitant d’initier et de conduire cette démarche, avec l’appui des autres professionnels de santé et en lien avec une exper- tise gériatrique. Mais chaque médecin pourra avoir un rôle important à jouer dans ce dépistage de la fragilité et le cardiologue pourra intervenir lors de l’hospitalisation pour NSTEMI. Cette évaluation est souvent difficile à réaliser entièrement en situation d’urgence ; elle sera donc complétée en période de stabilité. En effet, un syndrome confusionnel secon- daire au NSTEMI initial peut perturber cette éva- luation bien codifiée et comprenant une étude des facteurs somatiques, fonctionnels, psychologiques et sociaux associés au risque de perte d’autonomie.

En France, une procédure d’évaluation de la fragilité, validée par la Haute Autorité de santé, a été mise en œuvre (https://www.has-sante.fr/portail/upload/

docs/application/pdf/2014 01/fps_prise_en_charge_

paf_ambulatoire.pdf).

Avec l’accord du patient et après consultation de ses proches, les résultats de cette évaluation per- mettront de proposer un plan personnalisé de santé (PPS). Ni l’initiation ni la réalisation ni la validation du PPS ne peuvent avoir lieu sans la participation du médecin traitant. Le PPS est élaboré pour coor- donner la prévention. Il vise à réduire les déter- minants médicaux et sociaux de la fragilité. Les actions de ce plan peuvent être multiples comme la promotion d’une activité physique adaptée pour lutter contre la sédentarité ou les conseils pour une alimentation adaptée aux besoins de la personne âgée.

Si la prise en charge d’une personne âgée avec NSTEMI autonome sans pathologie associée importante est identique à celle d’un adulte plus jeune, celle d’un sujet âgé dépendant et poly- pathologique cherchera à préserver les fonctions et à éviter la iatrogénie. Lors de l’évaluation initiale d’un patient âgé avec NSTEMI, il est donc important de recueillir l’âge, les comorbidités ou les scores, le CIRS-G (Cumulative Illness Rating Scale Geria-

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tric) par exemple, qui sont utiles pour comparer les patients, évaluer leur autonomie/dépendance et donc leur fragilité. Les cardiologues ne sont pour la plupart que très peu familiarisés à ces notions, alors que le nombre de patients pris en charge dans nos services correspondant à ces critères ne fait qu’augmenter. Le mieux est bien sûr de confier ces patients à une équipe gériatrique qui réalisera une évaluation gérontologique standardisée et initiera les démarches de prévention. L’utilisation d’outils simples pour repérer une fragilité dans le cadre d’une démarche clinique permettra aux cardiologues d’an- ticiper les situations à risque et de commencer les démarches de prévention.

Les éléments à prendre en considération et à évaluer sont multiples.

Les fonctions cognitives

Un MMS (Mini-Mental State Examination) ≤ 25/30 entraînera la demande d’une consultation mémoire.

La mobilité et l’équilibre

Les facteurs favorisant les chutes comme l’hypo- tension orthostatique doivent être recherchés. Le risque de chutes doit être apprécié, par exemple en évaluant si le patient est capable de rester 5 secondes en équilibre sur un pied (test Unipodal).

Il peut s’agir aussi de rechercher une maladie neuro- logique ou rhumatologique nécessitant une prise en charge spécifique. Des conseils pratiques pour bouger au quotidien, afin de maintenir la force musculaire, l’équilibre et la mobilité peuvent être ensuite donnés. Un programme adapté d’activité physique (individuel ou collectif) avec un kiné- sithérapeute et une évaluation du domicile par un ergothérapeute sont encore des solutions à notre disposition.

L’état nutritionnel

Les états de dénutrition (IMC < 21 kg/m2) doivent être repérés et pris en charge. Des scores, par exemple MNA (Mini Nutritional Assessment) peuvent être utilisés à cet effet.

L’état buccodentaire

Un bon état buccodentaire est nécessaire pour préserver la qualité de l’alimentation. Une prise en charge par un chirurgien-dentiste peut améliorer ces éléments.

Les déficits sensoriels visuels et auditifs Ils peuvent être très handicapants, et une expertise ophtalmologique et ORL peut offrir des solutions.

La souffrance psychique et la dépression Toutes ces difficultés peuvent entraîner une souf- france psychique allant jusqu’à la dépression, qui aura des répercussions sur le pronostic. Des tests dédiés à la personne âgée sont disponibles, le mini- GDS (Geriatric Depression Scale) par exemple, et là encore une prise en charge spécialisée est possible.

L’autonomie/dépendance

L’analyse du degré d’autonomie se fera en utilisant les échelles simplifiées IADL/ADL (Activities of Daily Living/Instrumental Activities of Daily Living).

En cas d’isolement, l’intervention des services d’aide à domicile est demandée pour assister la personne dans les tâches ménagères, les courses et les sorties.

Pour cela, il faut compléter la grille AG-GIR (Auto- nomie gérontologie – Groupe Iso Ressources) pour déterminer le degré de dépendance et les aides financières nécessaires au maintien à domicile (APA [aide personnalisée à l’autonomie]) ou à l’entrée en établissement d’hébergement pour personne âgée dépendante (EHPAD).

Le statut économique et social

Il est important d’avoir une idée de ce statut pour recueillir les caractéristiques de l’habitat (salubrité), de la situation financière (revenus, couverture sociale) et de l’entourage du patient. Le dépistage de problèmes sociaux sera ainsi réalisé. En fonction du degré d’autonomie, il faudra voir si les aides sont suffisantes et envisager si besoin le soutien d’une assistante sociale.

L’hospitalisation pour NSTEMI sera l’occasion d’op- timiser les traitements, en évaluant leur bénéfice/

risque et leur posologie, et en les adaptant à la fonction rénale.

La difficulté est que ces évaluations prennent du temps, ce dernier étant devenu une denrée pré- cieuse dans nos institutions souvent débordées.

Les professionnels peuvent donc utiliser des outils intégrés comme la grille SEGA (http://www.geron- to-sud-lorraine.com/docs/Grille_SEGA_A_validee.

pdf) qui permet d’évaluer rapidement l’ensemble des critères. Un score supérieur à 11 identifie les personnes très fragiles, pour lesquelles des procé- dures de prise en charge adaptées doivent être mises en place avec les équipes locales de gériatrie. Les conclusions de cette évaluation doivent toujours être transmises au médecin traitant.

Le coût de la dépendance

En 2014, la prise en charge des personnes âgées dépendantes par les pouvoirs publics (Sécurité

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MISE AU POINT

sociale, État, collectivités locales) et les ménages était estimée à 34,2 milliards d’euros (Md€), soit 1,6 % du PIB. Le financement de la dépendance s’effectue, entre autres, grâce aux impôts et aux cotisations sociales des Français. La journée de solidarité a été mise en place pour faire face à la rapide augmentation de ces prestations. Si la santé et la prise en charge spécifique de la perte d’autonomie sont majoritairement financées par les pouvoirs publics, les trois quarts des dépenses d’hébergement en établissement sont à la charge des ménages, après déduction des aides reçues. La somme consacrée par les ménages aux dépenses de dépendance se monte à 7,2 Md€, en plus des aides publiques. Ce chiffre devrait plus que doubler d’ici 2060 pour atteindre 16,6 Md€, d’après le rapport du ministère de la Santé et des Affaires sociales de 2014. Toujours à l’horizon 2060, la dépense publique consacrée à la perte d’autonomie devrait passer, en l’absence de réforme, à 35 Md€, soit 1,77 point de PIB. L’accroissement, continu sur la période, serait plus marqué entre 2025 et 2040 du fait de la démo- graphie. Une hausse de 63 % des bénéficiaires de l’APA est attendue à l’horizon 2040. Le coût de l’APA doublera donc pour atteindre 11,2 Md€ (+112 %).

Sa part du PIB augmentera de 0,26 à 0,6 point. Il faut donc poursuivre les efforts pour anticiper les premiers facteurs de perte d’autonomie et améliorer la prise en charge de ces patients.

Sélectionner le bon candidat

pour la revascularisation coronarienne, le rôle de l’imagerie coronaire

Les recommandations européennes mentionnent que le choix de la stratégie des NSTEMI des personnes âgées est “une décision qui doit être basée sur le risque hémorragique, l’espérance de vie estimée, les comorbidités, la qualité de vie, le souhait du patient et l’estimation du bénéfice/risque de la revasculari- sation” (15). Cependant, cette évaluation est actuel- lement trop subjective, et les recommandations européennes ne précisent pas les modes d’évaluation que le clinicien doit utiliser pour tous ces éléments.

Le plus souvent, les études cliniques déjà peu nom- breuses incluent des patients à faible degré de fragilité et de comorbidité. Il est légitime de poser la question du bénéfice/risque d’une procédure d’intervention invasive de première ligne chez ces patients âgés fra- giles. Dans l’étude After Eighty, il a été montré que la revascularisation percutanée dans le bras “invasif”

n’était réalisée que pour moins d’un patient sur deux,

ce qui présentait une inadéquation dans la stratégie de sélection des candidats à la revascularisation.

Par conséquent, en dépit des lignes directrices de la Société européenne de cardiologie (ESC), la gestion de NSTEMI chez les patients de plus de 80 ans fragiles n’est pas encore fondée sur des données probantes, et les recommandations actuelles ne fournissent pas de règle de décision clinique claire indiquant une stra- tégie à suivre. Par exemple, si on utilise les échelles conventionnelles pour évaluer le risque ischémique de NSTEMI comme le score GRACE chez les patients de plus de 80 ans, il semble que tous aient un risque élevé et doivent subir une coronarographie. Il est certain que ces échelles de risques conventionnels sont peu adaptées aux patients âgés, d’autant plus s’ils présentent une fragilité et des comorbidités importantes. D’autres stratégies doivent être alors développées.

Pour les patients fragiles, une stratégie alterna- tive consiste à sélectionner les candidats pour une coronarographie guidée en fonction de l’étendue de l’ischémie myocardique identifiée par une imagerie non invasive et quantifiable par les techniques les plus validées dans le domaine, au moyen de la scinti- graphie myocardique pharmacologique (SPECT) ou de l’échocardiographie de stress à la dobutamine.

On préfèrera coupler l’imagerie à un test pharmaco- logique plutôt qu’à une épreuve d’effort. Les patients atteints d’ischémie significative malgré un traite- ment médical (tests maquillés) bénéficient d’une coronarographie en vue d’une revascularisation.

Cette approche, fondée sur l’étendue de l’ischémie myocardique, est la pierre angulaire du traitement de la maladie coronarienne stable, sur laquelle reposent les recommandations européennes de l’angor stable, conformément à la littérature internationale confirmant la valeur pronostique de l’étendue de l’ischémie. Ces critères, appliqués à une population âgée fragile avec des formes instables de maladie coronarienne (NSTEMI), pourraient permettre de mieux évaluer le risque ischémique pour ces patients et d’identifier ceux qui bénéficie- raient au mieux d’une procédure invasive de revas- cularisation. Cette stratégie est particulièrement utile dans le contexte où le patient présente une cinétique des troponines authentifiant un NSTEMI dans un contexte où une autre pathologie aiguë concomitante est présente. Selon l’expérience du CHU de Grenoble, cette stratégie évite la corona- rographie pour un tiers des patients et améliore le taux de revascularisation. Couramment utilisée dans la pratique de routine, elle n’a cependant jamais été évaluée dans un essai clinique.

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Patient âgé ≥ 80 ans Hospitalisé pour NSTEMI

Stabilisation par traitement médical Oui

Non Non éligible

Randomisation

Stratégie guidée par l’imagerie

de l’ischémie myocardique Coronarographie

systématique

Ischémie < modérée Ischémie ≥ modérée

Coronarographie Coronarographie

Traitement médical Traitement médical ou traitement médical

+ revascularisation Suivi sur 1 an

Critère principal (non-infériorité) : décès toutes causes, infarctus du myocarde et AVC non fatal Traitement médical ou traitement médical

+ revascularisation

Figure. Diagramme de flux de l’étude EVAOLD.

L’étude EVAOLD, originalité et aspect innovant

Financée par un programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) national et soutenue par

le groupe FACT (French Alliance for Cardiovascular Trial), cette étude a pour objectif de comparer la morbidité et la mortalité à 1 an chez les patients fragiles atteints de NSTEMI de plus de 80 ans, bénéficiant soit d’une stratégie invasive guidée par l’imagerie de l’ischémie non invasive (SPECT ou échographie de stress dobutamine), soit d’une stra- tégie invasive première (tableau et figure). Notre hypothèse est que la stratégie guidée par l’imagerie de l’ischémie ne sera pas inférieure en termes de MACCE à 1 an et sera coût-efficace en réduisant les complications iatrogènes. Une gestion moins invasive des NSTEMI pourrait être parti culièrement pertinente pour les personnes âgées fragiles, mais renoncer à la revascularisation pourrait également représenter une perte d’opportunité et une réduc- tion de l’espérance de vie, d’où l’intérêt de réaliser un essai randomisé.

L’originalité de l’étude EVAOLD repose d’abord sur une évaluation de l’autonomie, de la fragilité et des comorbidités à l’aide de différents outils validés d’une population de plus de 80 ans hos- pitalisée pour NSTEMI. Ensuite, la stratégie de revascularisation coronarienne guidée par l’ima- gerie de l’isché mie non invasive pourrait être un compromis pertinent entre les stratégies médicales seules et les stratégies invasives ; bien qu’elle soit utilisée en pratique clinique par plusieurs équipes, elle n’a jamais été évaluée scientifiquement. Enfin, les critères d’évaluation de l’efficacité de nos théra- peutiques peuvent être différents de ceux que nous utilisons habituellement, comme la survie ou l’ap- parition d’événements cardiovasculaires. En effet, dans ce contexte, la perte d’autonomie et l’entrée dans la dépendance seront des éléments impor- tants à prendre en compte, ainsi que la qualité de vie et les aspects médico-économiques. Cette évaluation est prévue dans l’étude EVAOLD avec une analyse coût-efficacité des stratégies évaluées en QALY (quality-adjusted life year, “année de vie pondérée par la qualité”).

En outre, les traitements médicaux pour NSTEMI ont considérablement évolué ces dernières années, avec l’utilisation de nouvelles molécules, et nous man- quons de données comme nous l’avons vu. Ce que l’on peut dire pour l’angioplastie aussi, c’est que lors des phases aiguës, la voie radiale semble préférable, mais pour le sujet âgé, nous manquons là encore de données. Les techniques de revas cularisation ont également évolué, avec l’utilisation de stents coronaires à élution médicamenteuse de 2e, 3e et 4e générations. Mais là encore, il faut des études cliniques évaluant ces traitements chez les patients Tableau. Critères d’inclusion et de non-inclusion de l’étude EVAOLD.

Critères d’inclusion

– Patients âgés de 80 ans ou plus

–  Hospitalisation pour NSTEMI avec ou sans dépression du segment ST sur ECG et avec une concentration sanguine élevée de troponine T ou I. La troponine élevée a été définie comme une valeur supérieure au 99e percentile d’une population normale au laboratoire local à chaque site participant. Un cardiologue local a évalué l’éligibilité du patient et son état clinique compatible avec un doute pour la réalisation d’une coronarographie première en raison d’une fragilité

– Consentement écrit Critères de non-inclusion

– Douleur thoracique récurrente ou continue, réfractaire au traitement médical – Instabilité hémodynamique ou choc cardiogénique

– Arythmies mortelles ou arrêts cardiaques – Complications mécaniques de l’infarctus

–  Contre-indications à la coronarographie : insuffisance rénale (clairance de la créatinine

< 15 ml/mn MDRD), problèmes de saignement actif au moment du diagnostic – Rétrécissement de la valve aortique sévère

– Patients sous protection juridique – Aucune assurance maladie

ECG : électrocardiographie ; MDRD : modification of Diet in Renal Disease.

(7)

MISE AU POINT

de plus de 80 ans, et plus encore chez les personnes âgées fragiles.

Conclusion

Le nombre de patients de plus de 80 ans présentant un NSTEMI à prendre en charge dans nos unités est actuellement important, et dans les années à

venir, il ne fera que croître. De nouvelles données seraient nécessaires pour montrer le bénéfice d’une stratégie invasive initiale chez les patients fragiles.

L’évaluation de la fragilité est primordiale dans ce contexte et les cardiologues doivent s’y intéresser.

Pour améliorer nos connaissances, il faudrait déve- lopper les études dédiées aux patients âgés. EVAOLD en est un exemple. De nombreux centres français pourraient apporter leur contribution. ■

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec le sujet de l’article.

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