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LES FRAGMENTS DES MÉMOIRES DE MIECZYSŁAW ROSENZWEIG D'ARTUR SANDAUER, ENTRE JUDÉITÉ ET POLONITÉ

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LES FRAGMENTS DES MÉMOIRES DE MIECZYSŁAW ROSENZWEIG D’ARTUR SANDAUER, ENTRE JUDÉITÉ ET POLONITÉ

Stanislaw Fiszer

To cite this version:

Stanislaw Fiszer. LES FRAGMENTS DES MÉMOIRES DE MIECZYSŁAW ROSENZWEIG

D’ARTUR SANDAUER, ENTRE JUDÉITÉ ET POLONITÉ. Cultures juives. Europe centrale et

orientale, Amérique du Nord, 2012. �hal-02495001v3�

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LES FRAGMENTS DES MÉMOIRES DE MIECZYSŁAW ROSENZWEIG D’ARTUR SANDAUER, ENTRE JUDÉITÉ ET POLONITÉ

Stanisław FISZER Université de Lorraine

Les circonstances de la création des Fragments des mémoires de Mieczysław Rosenzweig (Urywki z pamiętników Mieczysława Rosenzweiga) d’Artur Sandauer

1

sont intéressantes à plus d’un titre. La nouvelle a été esquissée lors du séjour de l’auteur à Paris, en été 1948, l’année de la proclamation de l’État juif. À cette nouvelle Sandauer hésite entre le retour en Pologne et l’émigration en Israël, l’idée de rester en Occident ayant été écartée par cet écrivain et critique littéraire proche de la gauche polonaise

2

. Finalement, en 1949, Sandauer retourne en Pologne. Les Fragments des mémoires de Mieczysław Rosenzweig, qui témoignent en quelque sorte de l’hésitation de leur auteur entre la polonité et la judéité, ne furent publiés qu’en 1965 comme une partie intégrante des Notes d’une ville morte (Zapiski z martwego domu), écrites entre 1948 et 1962. Pourtant l’avant-dernier chapitre des Fragments des mémoires… tournant en dérision le stalinisme dans les territoires polonais occupés par les Soviétiques dans les années 1939-1941, parut seulement en 1983.

Dans l’Introduction des Fragments… Sandauer les qualifie de parabiographie pour les distinguer d’autres parties des Notes… qui sont autobiographiques. En fait, le personnage de Mieczysław Rosenzweig est une projection et une caricature de l’auteur lui-même. Et comme celui-ci, malgré les distances qu’il prend avec celui-là, lui ressemble à plusieurs égards, ce que souligne d’ailleurs l’emploi de la première personne, il est tout à fait légitime d’interpréter cette parabiographie à la lumière des parties biographiques des Notes… D’autre part, au dire de l’auteur, Les Fragments… constituent une polémique avec les Réflexions sur la question juive (1946) de Jean-Paul Sartre. Il serait donc intéressant de voir l’ouvrage de l’écrivain polonais à travers le prisme de celui de l’écrivain français. Sandauer, du reste ami et cicérone de Sartre lors de sa visite à Varsovie, en 1961

3

, conteste en particulier la thèse suivante de ce dernier : pour faire preuve d’authenticité dans un milieu de non-Juifs, le Juif devrait « vivre jusqu’au bout sa condition de Juif »

4

et en même temps être « responsable dans et par sa propre personne du destin et de la nature même du peuple juif »

5

. Selon Sandauer, cela revient à dire que pour rester « authentique » le Juif, tel que le voit Sartre, aurait à résister à l’assimilation ; mais comment en ce cas-là, demande Sandauer, devrait se comporter un Juif déjà assimilé, qui vit aux confins de deux cultures et de deux peuples ? Auquel d’entre eux

1

Artur Sandauer (1913-1989), essayiste, critique littéraire, traducteur, professeur de l’université de Varsovie.

2

Dans Byłem (J’ai été), Warszawa, PIW, 1991, A. Sandauer dit à ce propos : « Retourner ou ne pas retourner ? Il n’était pas question de m’intégrer dans l’émigration polonaise que j’ai toujours ressentie comme quelque chose d’étranger. Le choix, s’il en avait un, était entre l’Israël et la Pologne : je n’en connaissais et n’en voulais connaître nul autre », p. 114.

3

Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir visitèrent Varsovie, en 1961, de leur retour de Moscou. Ils y assistèrent, entre autres, à une représentation d’un théâtre expérimental (Teatr Osobny) de Miron Białoszewski.

4

Jean-Paul Sartre, Réflexions sur la question juive, Gallimard, 2005, p. 97.

5

Ibidem, p. 96.

(3)

doit-il rester fidèle ? La fidélité « ne doit-t-elle pas être celle à son propre déchirement, à sa propre inauthenticité ? »

6

.

Le milieu d’origine trace déjà ethniquement et socialement les limites entre les deux mondes dont parle Sandauer. Sambor, petite bourgade à l’est de la Pologne de l’entre-deux- guerres, où il est né en 1913, est identique, par son organisation spatiale, à celle où vit son double, Mieczysław Rosenzweig. Tous les deux habitent le quartier de Targowica

7

. Il se trouve entre Rynek

8

, situé plus haut, et Blich

9

, situé plus bas. Celui-ci est séparé de Targowica par le canal appelé Młynówka

10

, qui sert d’égout à la ville haute. Rynek est un quartier élégant, principalement polonais, où il y a des églises, des bureaux, des lycées et des villas occupées par l’intelligentsia locale. Blich est un quartier principalement juif, à proprement parler un shtetl, fermé sur lui-même, sur son mode de vie, ses coutumes et ses croyances. La population hassidique y parle quotidiennement le yiddish, l’hébreu étant la langue de la loi et du culte. La synagogue domine quelques dizaines de petites habitations misérables. Même si du point de vue ethnique et économique le quartier de Targowica, avec ses cordonniers, couturières et chapelières qui travaillent pour les besoins des deux autres quartiers, se rapproche de Blich, il occupe une position intermédiaire non seulement géographiquement, mais encore et surtout culturellement. Car, outre le yiddish, on y parle polonais et, les jours de foire, on y entend l’ukrainien.

Cependant aucun quartier n’est imperméable aux influences des deux autres. Des Juifs polonisés, représentants des professions libérales, qui habitent Rynek, une fois par an, en automne, descendent, en leur tenue de ville – ironise le narrateur – à la synagogue de Blich.

Les habitants de ce dernier montent fréquemment à Targowica, comme le fait l’arrière-grand- père de Sandauer, Israël, pour y parler avec son fils Aron, tous les deux Juifs orthodoxes. En revanche, leur respectivement petit-fils et fils, Abraham, alias Adolf, qui avait rompu avec la tradition juive pour se convertir, aux alentours de 1909, au socialisme polonais, au lieu d’étudier la Bible et le Talmud, lit le journal Robotnik (L’Ouvrier) et rêve de déménager à Rynek. C’est aussi le rêve de son fils, Artur, qui entend parfois des invectives certaines, exprimées d’ailleurs en yiddish, entre son père et son grand-père :

Je me souviens – dit le narrateur – avec quelle furie entrait chez nous mon grand-père Israël, vieillard à la barbe de bouc. Quelle sera ta fin Abraham, criait-il […] Pendant longtemps mon père a supporté ces invectives en silence, jetant furtivement un coup d’œil sur un numéro de Robotnik posé devant lui. Un jour tout de même le sourire a disparu de son visage […]. Mon père a blêmi et avant que je n’aie pu m’en rendre compte – la nappe et ce qui était sur la table s’est trouvé par terre. Par la même occasion le livre de prières est également tombé. C’était une profanation rendue à une autre profanation. À partir de là les invectives cessèrent mais les visites aussi.

11

Avec Artur, ses parents parlent polonais, considérée comme une langue de la modernité, et l’envoient au collège, puis au lycée de Rynek, les écoles publiques étant le facteur principal de la polonisation des enfants d’origine juive dans la Pologne de l’entre- deux-guerres

12

. En outre, le polonais continue de véhiculer, en particulier aux confins

6

Artur Sandauer, Proza (La Prose), Warszawa, Czytelnik, 1983, p. 141.

7

Le nom de Targowica vient du nom targ qui signifie la foire. En fait, des foires se tenaient deux fois par semaine, sur la place de Targowica.

8

Rynek signifie le marché en polonais.

9

Le nom de Blich vient de ce qu’autrefois on y blanchissait (blichować) des draps.

10

Le nom de Młynówka vient de młyn, le mot qui signifie le moulin en polonais. En fait, Młynówka était un canal reliant la ville au Dniestr et faisant travailler des moulins.

11

Artur Sandauer, Proza, op. cit., p. 116-117.

12

En 1931, près de 60% des élèves d’origine juive fréquentent les écoles publiques polonaises ou, dans une

moindre mesure, des sabatówki, écoles publiques adaptées aux exigences du sabbat et des fêtes juives. Voir à ce

(4)

orientaux du pays, la culture occidentale, et la connaissance des classiques grecs et latins, que l’auteur allait étudier, est impensable sans avoir maîtrisé cette langue. Il est donc tout à fait naturel que pour l’enfant, formé dans une telle atmosphère familiale, nourri de mythe de déménagement, reporté sans cesse pour des raisons matérielles, Blich devienne synonyme d’enfer, Targowica de purgatoire où les Juifs doivent passer un certain temps avant de monter au paradis de Rynek.

Pour y monter, il faut cependant se poloniser. L’envie d’intégration à la société polonaise, entachée d’antisémitisme, qui va se renforçant dans les années trente, crée la tentation de faire oublier l’inoubliable : son identité première. Sous la plume de Sandauer, inspiré sans doute par Gogol, cette crise d’identité prend des allures aussi grotesques que profondément ironiques. À la différence de l’auteur, son personnage, sous la pression sociale, assimile la culture polonaise dans sa variante réactionnaire et raciste, représentée par son professeur de polonais, une piètre spécialiste de Mickiewicz, Słotwicki, et la fille de celui-ci, Stasia. Pour Rosenzweig se faire reconnaître par ces deux personnes qui incarnent à ses yeux la polonité à l’état pur, ce serait devenir un vrai Polonais. Et s’il ambitionne à être accueilli dans la villa de Słotwicki, qui pourrait, faute de mieux, passer pour une gentilhommière, il le fait pour avoir une preuve palpable de sa reconnaissance en tant que Polonais.

À cet effet il élabore toute une stratégie à commencer par l’assimilation de la littérature romantique et l’imitation de grands poètes nationaux, dont Mickiewicz ; mais ses productions littéraires pêchent par leur académisme et formalisme, qui résultent de la prétention d’égaler les modèles

13

. Ne pouvant pas entrer par ce biais dans la villa de Słotwicki, Rosenzweig réussit à en faire sortir Stasia. Avant chaque promenade à deux à Rynek, il dresse son visage devant le miroir pour effacer certains traits qu’il considère à tort ou à raison comme propres au type sémite. Autant ses cheveux blonds et la forme de son nez peuvent le faire passer pour un Aryen, autant ses oreilles décollées trahissent, selon lui, sa judéité. Pour la dissimuler, il apprend à les aplatir. Pourtant ses efforts s’avèrent vains : dans la rue il est traité de Juif par les militants des jeunesses fascistes de l’endecja

14

. Quant à Stasia, elle n’aime ni l’apparence et les manières par trop « européennes » de son cavalier, ni sa langue par trop correcte et émaillée d’expressions « sarmates ». À vrai dire, elle préférerait qu’il fasse des fautes et qu’il se comporte en vrai Juif, c’est-à-dire conformément à sa représentation de la judéité. Car Stasia, excitée par sa propre audace et perversité, est attirée par le Mal que Rosenzweig incarne à ses yeux, par l’image démoniaque du ghetto d’où il vient et elle ne cesse de lui rappeler sadiquement ses origines. Aussi du masochisme entre-t-il dans les sentiments de Rosenzweig : humilié, il se voit conforté dans sa judéité qu’il voudrait fuir, mais conscient de ne pas pouvoir conquérir Stasia, il n’abdique pas.

Une occasion idéale de rentrer dans de bonnes grâces de celle-ci se présente au moment où l’Armée rouge occupe, en 1939, la Pologne orientale et quelques officiers soviétiques s’installent dans la villa de Słotwicki. Comme cette situation réactualise le mythe messianique de la « Pologne Christ des nations »

15

, qui implique la souffrance rédemptrice,

propos Alexandre Kurc, « Langue, culture et identité juives », in Identitée(s) de l’Europe centrale, sous la direction de Michel Maslowski, Institut d’Études Slaves, 1995.

13

En expliquant, dans l’Introduction, la genèse des Fragments des mémoires de Mieczysław Rosenzweig, A. Sandauer affirme que le caractère académique et imitateur de ses propres poèmes, créés avant la guerre et relus dans un hôtel lors de son séjour à Paris, en 1948, l’a poussé à écrire cette nouvelle parabiographique.

14

Endecja, terme forgé à partir des initiales du parti de la Démocratie nationale, fondée en 1897, par Roman Dmowski et les militants de la Ligue polonaise (Liga polska). Cette formation nationaliste et cléricale prônait une Pologne ethniquement homogène, une thèse qui est à l’origine de l’antisémitisme des courants droitiers de la scène politique polonaise entre les deux guerres.

15

Selon ce mythe la Pologne, tel un nouveau Christ, fut crucifiée pour racheter ses propres fautes et celles de

l’Europe corrompue. Ainsi les Polonais deviennent un peuple élu de Dieu. Ils tireront également de cette vision

(5)

mais aussi le devoir de résistance, Rosenzweig voudrait manifester son patriotisme par l’incarnation du paradigme romantique. Or, d’après celui-ci l’amant, tel Gustaw des Aïeux, doit se métamorphoser en héros national et martyr des persécutions russes, tel Konrad de la même pièce de Mickiewicz. Ainsi, en résistant à l’occupant et en passant par des geôles de Sibérie, Rosenzweig compte accéder une fois pour toutes aux valeurs nationales et mériter le bonheur de s’unir avec Stasia, incarnation d’un autre mythe, celui de la « Mère polonaise » souffrante ; mais avant même de mettre son projet à exécution, il est sollicité par Słotwicki : ce dernier lui demande la protection contre les bolcheviques dont les Juifs, d’après lui, sont des suppôts naturels et inconditionnels. Pour Rosenzweig c’est un comble ! La nouvelle se termine par une scène de reniement de soi-même : se regardant dans un miroir des yeux de Słotwicki, Stasia et de tous les antisémites, Rosenzweig croit voir dans son visage les traits somatiques et psychologiques attribués aux Juifs et, désespéré, il se gifle.

Il en résulte que bien avant l’occupation Rosenzweig se laisse emprisonner par une certaine représentation que d’autres ont de lui. C’est précisément pour connaître en soi et nier sa judéité qu’il la scrute dans le regard d’autrui. Ainsi s’explique, d’après Sartre la qualité particulière de l’ironie juive qui « s’exerce le plus souvent aux dépends du Juif lui-même et qui est une tentative perpétuelle pour se voir du dehors »

16

. Pourtant cette objectivité à son propre égard, sinon acquise au moins accentuée pendant le processus d’assimilation

17

, rend celle-ci très problématique. Car en se regardant avec les yeux d’autrui, qu’il soit ou qu’il ne soit pas antisémite, on ne croit voir qu’une seule chose : sa judéité.

Le héros de Sandauer en est parfaitement conscient. Comme son nom juif, Rosenzweig, et son prénom polonais, Mieczysław, l’indique, c’est un personnage déchiré et profondément contradictoire. Cette contradiction se reflète sur le plan du récit : d’une part, Rosenzweig voudrait nier sa judéité, d’autre part, il en parle à la première personne. Aussi exhibe-t-il ce qu’il cherche à dissimuler. Au dire de l’auteur, si Rosenzweig « était assez bête pour avoir honte de sa judéité, il ne serait pas assez sage pour la faire apparaître »

18

. À l’instar de Heine, poète allemand d’origine juive converti au catholicisme, qui n’a jamais cessé de se moquer de cet acte, Rosenzweig tourne en dérision toutes les tentatives manquées de s’intégrer dans la société polonaise en effaçant son identité première ; mais il a beau se montrer ironique à son propre égard, il a beau avoir une conscience de plus en plus aiguë de soi, il reste enfermé dans son dilemme. Peut-on en sortir ?

Sandauer revient à cette question dans De la situation de l’écrivain polonais d’origine juive au XX

e

siècle (O sytuacji pisarza polskiego pochodzenia żydowskiego w XX wieku).

Dans ce petit livre, publié en 1982, il résume différentes attitudes que les écrivains polonais d’origine juive adoptent à l’égard de cette dernière. Certains d’entre eux cherchent à la dissimuler, d’autres la passent sous silence, d’autres encore, dont Adolf Rudnicki ou Julian Stryjkowski, après une période de tâtonnements et d’hésitations, finissent, d’après la formule de Sartre, par « réaliser [leur] condition juive »

19

dans leur œuvre littéraire consacrée au passé lointain et récent de leur peuple. Sandauer lui-même redécouvre et repense l’histoire et la culture juives pendant l’occupation allemande qu’il passe dans des conditions dramatiques, enfermé tout d’abord dans le ghetto de Sambor et, après sa liquidation, en 1942, sauvé avec sa mère et sa sœur par un Ukrainien, père de son ancien élève. Ce qui témoigne de cette redécouverte de l’identité juive, c’est exactement la prose autobiographique dont on parle,

des faits le sentiment irrépressible que leur rachat passe par un devoir de résistance, de la culture chrétienne en particulier, face à la force sauvage de barbares généralement venus de l’Est.

16

Jean-Paul Sartre, Réflexions sur la question juive, op. cit., p. 104.

17

Voir à ce propos J. Stora-Sandor. « L’humour juif », in Mythes et symboles politique en Europe centrale, sous la direction de Chantal Delsol, Michel Maslowski, Joanna Nowicki, PUF, 2002.

18

Artur Sandauer, O sytuacji pisarza polskiego pochodzenia żydowskiego w XX wieku (De la situation de l’écrivain polonais d’origine juive au xx

e

siècle), Warszawa, Czytelnik, 1982, p. 96.

19

Jean-Paul Sartre, Réflexions sur la question juive, op. cit., p. 146.

(6)

mais également la traduction de la Genèse en polonais et les études qui lui sont consacrées sous le titre Dieu, Diable, Messie et…

20

.

Pourtant, dès son enfance, Sandauer nourri de la culture polonaise lui consacre l’essentiel de son travail d’écrivain et de critique littéraire avant et après la guerre. Avec cette différence qu’avant la guerre le futur auteur des Notes d’une ville morte s’efforçait de se hisser à Rynek, symbole de cette culture, du côté de Targowica, après la guerre, il y accède du côté de Blich, par « le sang et la boue » du ghetto qui s’y trouvait lors de l’occupation. Pour Sandauer donc et pour les écrivains qui revendiquent à la fois leur origine juive et leur héritage culturel polonais, tels Julian Tuwim ou Bruno Schulz, ses maîtres à penser et ses amis

21

, être fidèle à soi, c’est d’être fidèle à son propre déchirement. Et c’est dans ce déchirement entre la judéité et la polonité, en se maintenant dans un équilibre instable des forces contradictoires, qu’ils puisent leur inspiration. En ce sens Sandauer dit qu’alors que l’assimilation a pratiquement échoué, la création artistique a réussi

22

. En paraphrasant ces mots on peut dire que si l’assimilation s’est soldée par un échec relatif, l’analyse de cet échec a réussi. Pour preuve Les fragments des mémoires de Mieczysław Rosenzweig dont nous venons de parler et qui font partie de la culture polonaise et juive en même temps.

20

Artur Sandauer, Bóg, Szatan, Mesjasz i... (Dieu, Diable, Messie et…), Kraków, Wydawnictwo Literackie, 1977.

21

Avant la guerre, A. Sandauer rendit à plusieurs fois visite à Julian Tuwim, dans son appartement à Varsovie, et à Bruno Schulz, dans sa maison à Drohobycz. Après la guerre, il contribua à faire connaître l’œuvre de ce dernier en France.

22

Voir à ce propos Artur Sandauer, O sytuacji pisarza polskiego pochodzenia żydowskiego w XX

e

wieku, op. cit.,

en particulier le chapitre consacré à Julian Tuwim, p. 26-30.

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