Sécheresse édaphique et concentrations
en
quelques solutés organiques des tissus foliaire et racinaire de trois espèces de conifères :
Cedrus atlantica Manetti, Pseudotsuga
macrocarpa (Torr) Mayr, Pseudotsuga menziesii (Mirb.) Franco
Ph. GRIEU, de
Sylvicultu
G.
AUSSENAC,
et de Production,
F. LARHER Centre de Recher
ZNRA, Station de
Sylviculture
et de Production, Centre de Recherches de Nancy,Champenoux,
F 54280Seichamps
* Laboratoire de
Biologie végétate, Campus
de Beaulieu,Université de Rennes I, F 35042 Rennes Cedex
Summary
Effect of
soildrought
on concentrationsof organic
solutes in needles and rootsof
threeconiferous species (Cedrus
atlanticaManetti, Pseudotsuga
macrocarpa(Torr) Mayr., Pseudotsuga
menziesii(Mirb.) Franco).
The authors describe variations in concentrations of some
organic
solutes for three conifers.Results were obtained from two
experiences,
one in the fieldtesting
9species
and various provenances ofdouglas
fir, and a test under controlled conditions for the 3following species : Pseudotsuga
macrocarpa,Pseudotsuga
menziesii, Cedrus atlantica. Stress level isexpressed
aspredawn xylem
waterpotential,
the concentrations of thefollowing organic
soluted were measuredon each foliar or root
sample : glucids, polyols,
soluble amino acids andproline.
Solutesconcentrations vary between
species
for a same water stress level, rates ofchanges
in concentra-tions for different water stresses levels also differ from one
specie
to another. Fordouglas
fir,amounts of soluble sugars are
increasing along
with water stresses while nospecific
trends wereobserved for Cedrus atlantica.
Foliar extractions of
polyols
were similar notwithstanding
the stress levelapplied ;
howeversignificant
differences in roots concentrations ofpolyols
are observed between the threespecies.
For
douglas
fir submitted to apredawn xylem
waterpotential
below - 2.0 MPa, there is a strong increase in free amino acids andproline
contents. Amounts of amino acids andproline
extracted from roots of all
species
and needles of cedar are small and do not increase with stress.Weak responses and
changes occuring
athigh
levels of stresses(beyond -
2.0MPa)
suggestthat other solutes,
possibly
minerals, may intervene, in the osmoticadjustements following
waterstress.
Key
words : Waterdeficit, organic compounds
aceumulation,proline,
amino acid,polyol,
glucide,
conifers.Résumé
Dans cette étude, les auteurs
présentent
les variations de concentration dequelques composés organiques
chez troisespèces
de conifères. Deux études ont été réalisées, l’une en forêt sur 9espèces et provenances de
douglas,
l’autre en conditions contrôlées sur 3espèces : Pseudotsuga
macrocarpa,
Pseudotsuga
menziesii, Cedrus atlantica. Le niveau de contraintehydrique
est déter-miné par la mesure du
potentiel hydrique
de base.Chaque
échantillonvégétal (aiguilles
etracines)
a fait
l’objet
d’une déterminationquantitative
descomposés organiques
suivants :glucides, polyols,
acides aminés solubles,
proline.
Les résultats montrent des différences entreespèces,
d’une part dans les teneurs en éléments dosés pour un même niveau de contraintehydrique,
d’autre part dans leurs variations de concentration en relation avecl’augmentation
de la contraintehydrique.
Lesteneurs en sucres solubles augmentent avec l’accentuation de la contrainte
hydrique
chez lesdouglas,
alors que chez le cèdre aucune tendance nette ne sedistingue.
Pour les
polyols,
aucune variation de teneurs dans lesaiguilles n’apparaît
au cours del’installation de la sécheresse. Par contre, des différences
statistiquement significatives
dans lesteneurs en
polyols
dans les racines existent entre les 3espèces.
Dans lesaiguilles
desdouglas,
lesteneurs de la fraction acides aminés libres et de la
proline
augmentent très nettement en dessous d’unpotentiel
de base de - 2.0 MPa. Par contre, aucune accumulation de cescomposés n’apparaît
dans les
aiguilles
du Cèdre, ainsi que dans les racines des troisespèces
étudiées.En définitive, les
réponses
de faibleamplitude
ou desréponses
intervenant à des niveaux de contraintehydrique
très élevés(au-delà
de -2.0 MPa)
laissent supposer uneparticipation
peut- être déterminante d’autres solutés, notamment minéraux, àl’ajustement osmotique
lié au déficithydrique.
Mots clés :
Déficit hydrique,
accumulation de composés organiques,proline,
acide aminé,polyol, glucide,
conifères.1. Introduction
La contrainte
hydrique
constitue leprincipal
facteur limitant de laproduction
forestière. L’installation d’une sécheresse
impose
à laplante
des contraintes accompa-gnées
dechangements adaptatifs.
L’accommodationpeut
mettre en oeuvre desajuste-
ments
osmotiques
pour éviter uneperte
deturgescence,
ellepeut
aussi relever du maintien del’intégrité
des membranes cellulaires et d’un ralentissement de latranspira-
tion.
Différents auteurs
(B ASKARAN
etal. , 1985 ; N GUYEN , 1986 ; K OUADIO , 1986)
ontmontré que les déficits
hydriques
entraînaient l’accumulation de diverscomposés organi-
ques
solubles,
notammentglucides
et acidesaminés,
cescomposés apportant
leur contribution àl’osmorégulation.
L’accumulation de sucres solublespeut
avoir pourorigine
l’inhibition de certaines voiesmétaboliques
d’élaboration de structures nouvelles(I
MAMUL Hu Q , 1984).
En dehors de leur rôleosmotique,
lesglucides pourraient
assurerune
protection
des structures membranaires notammentchloroplastiques
et mitochon-driales
(H SIAO , 1973 ; B EWLEY , 1979).
Parailleurs,
diverspolyols,
tels que lepinitol, l’inositol,
lesorbitol,
ontégalement
étésignalés
commepouvant
constituer des osmoti-cum
lorsque
lesplantes
subissent un stress(F ORD , 1982 ; S MITH , 1982 ;
SMITH &PHILLIPS, 198Z ;
BRIENS &L ARHER , 198Z ;
DITTRICH &K ORAK , 1984 ; N GUYEN , 1986).
Les
composés
azotés solubles sont aussi concernés par les processus liés àl’adaptation
osmotique :
les concentrations des acides aminéslibres,
des amides et des amines dansles
plantes
soumises à un stress sont souvent modifiées(H SIAO , 1973 ; H E r. LESUST , 1976 ;
STEWART &L ARHER , 1980).
Cette accumulation decomposés
azotés estgénérale-
ment
accompagnée
d’une baisse de teneur enprotéines (H UBAC
& VIEIRA DAS ILVA , 1980 ;
DUBROCA &B ORY , 1981).
Il y aurait un retard dans lasynthèse protéique
et/ouune stimulation de la
protéolyse. Cependant,
cephénomène
ne suffit pas àexpliquer
l’accumulation sous forme libre de certains acides aminés
particuliers
tels que laproline qui pourrait
êtreexpliquée
par l’inhibition de sonoxydation plutôt
que par le ralentis- sement de lasynthèse protéique [un pool
deglucides
solublespourrait,
deplus,
ralentircette
oxydation (S TEWART , 1972)].
Une autreexplication
serait que le stress stimule l’activitéd’enzymes spécifiques impliqués
dans labiosynthèse
de laproline (BoGGESS
&S TEWART
, 1980 ;
AselrrAr.L &P ALEG , 1981). Néanmoins,
les taux deproline
dans lesplantes
soumises à la sécheresse sont très variables selon lesespèces.
Certainesplantes possèdent,
même en absence de toutecontrainte,
un taux deproline
libre très élevé etqui
reste invariable enprésence
de déficithydrique.
D’autresespèces
neprésentent
uneaccumulation
qu’au-delà
d’un certain seuil de déficithydrique :
laproline
est considéréealors comme un marqueur de stress
(H ELLEBUST , 1976 ;
GREENWAY &MuNS, 1980 ;
S TEWART
&
L ARHER , 1980).
Enfait,
les teneurs élevées enproline
librepeuvent
être moins liées à lasimple
résistance à la sécheressequ’à
lacapacité
dereprise après
celle-ci
(D UBROCA
&B ORY , 1981).
Très peu d’informations existent sur les variations de ces
composés
dans les tissus des arbres forestiers soumis au déficithydrique.
Dans leprésent travail,
nous avonsdonc étudié pour
quelques espèces
et provenances derésineux, Pseudotsuga menziesü, Pseudotsuga
macrocarpa et Cedrusatlantica,
pour des niveaux de contrainteshydriques
variées et de
large amplitude,
les variations de teneurs desglucides solubles,
despolyols,
des acides aminés et de laproline
libres. Ces troisespèces occupent
des airesgéographiques
d’étendue très différentes. Elles sedistinguent
par leurréponse
au déficithydrique :
différences dans les processus dephotosynthèse
et detranspiration,
diffé-rences dans les niveaux de contrainte
hydrique
affectant la croissance(A USSENAC
&F INKELSTEIN
, 1983 ;
GxlEU etal., 1988).
Sur ces bases et afin de tenter de
compléter
les informationsdéjà disponibles,
ons’est donc
proposé,
d’unepart,
d’évaluerl’importance
et le sens des variations des concentrations de cescomposés
lors d’une contraintehydrique
d’intensitécroissante,
et d’autrepart, d’essayer
d’identifier d’éventuelles différences entreespèces
et entreprovenances d’une
espèce
donnée.2. Matériels et méthodes
Deux
expérimentations
ont été réalisées : l’une enforêt,
l’autre en chambreclimatisée.
Première
expérience.
Elleporte
sur des échantillonsprélevés
sur des arbres installés dans deuxdispositifs expérimentaux
trèsproches situés,
l’un dans le canton duTreps
enforêt domaniale de Collobrières
(Var),
l’autre en forêt domaniale de Lambert(Var).
Trois
espèces
ousous-espèces
sont retenues pour l’étude : ledouglas
vert(Pseudotsuga
menziesii
(Mirb.)
var.menziesii, Franco),
ledouglas
bleu(Pseudotsuga
menziesii(Mirb.)
var.glauca, Franco),
etPseudotsuga
macrocarpa(Torr.) Mayr. L’origine
de cematériel est
précisée
dans le tableau 1.Des échantillons
d’aiguilles
ont étéprélevés
sur trois rameaux de l’année pourchaque arbre, puis broyés
surplace
aumortier-pilon
enprésence
de sable de Fontaine-bleau,
22 arbres constituent l’échantillon(tabl. II).
Lesbroyats repris
dans l’alcool à 80 p. 100 sont en fin dejournée
conservés en chambre froide(4 °C).
Ces extraits ont étépréparés
le matin avant l’aube et à 16 heures. Leprélèvement
des échantillons a été effectué dans lapériode
du 29juillet
au 7 août1983 ;
pourchaque
arbreéchantillonné,
il a été mesuré sur des rameaux voisins et
homologues
des rameauxéchantillonnés,
lepotentiel hydrique
de base(PB)
et lepotentiel
minimum(A USSENAC
&GxAmEx, 1978).
On sait
qu’à
cetteéchelle,
la variabilité dupotentiel hydrique
est faible(A USSENAC
&VALETTE, 1982).
Deuxième
expérience.
L’étude est effectuée sur desplants
de troisespèces :
Pseu-dotsuga
menziesii(Mirb.)
var. menziesii(Franco),
provenance Ashford(Washington USA,
lat. 46°48’N, long. 123 °W,
ait. 458m), Pseudotsuga
macrocarpa(Torr.) Mayr.
(provenance
CalifornieUSA,
lat.34°3’ N, long. 117°7’ W,
ait.1 315 m),
et Cedrusatlantica
(Manetti)
provenance Ventoux(France).
Les
plants âgés
de deux ans sont installés dans une chambre climatisée : éclaire- ment100-120 u.E.m!-s’, température
21 °Cjour/18°C nuit,
humidité relative50 p.
100
jour/95
p. 100 nuit. Ils sont soumis à une sécheresseédaphique
d’intensité crois- sante(potentiel hydrique
de basede - 0,5 à - 3,3 MPa)
obtenue par arrêt del’arrosage (sol
brun ocreuxhumifère).
Chacun desplants
a été successivement sacrifié et on aprélevé
pouranalyse
lesaiguilles
des rameaux de l’année et les racines. Lepotentiel hydrique
de base des rameaux a été mesuré pour chacun desplants
avantarrachage.
Détermination
quantitative
descomposés organiques.
Lesbroyats
sontépuisés
àl’alcool à 80 p. 100 par
lavages
etcentrifugations
successifs. Les extraitshydroalcooli-
ques sont
évaporés
à sec et le résidu concentré sous vide estrepris
dans l’eau. Lesglucides
solubles sont dosés par la réaction à l’anthrone selon la méthode d’IRRI(1976).
Les teneurs en
polyols
solubles sont déterminées par le suivi de leuroxydation
par lemétapériodate
de sodium selon latechnique
de VtrrrrtNC & TABER(1974).
Les acidesaminés solubles
réagissent
avec laninhydrine
et sont dosés par colorimétrie. Laproline
libre est dosée selon la méthode de TROLL & LlrrDSLEY
(1955).
3. Résultats
3.1. Concentrations de
différents
solutésorganiques
dansl’appareil foliaire
desespèces
et provenances de
douglas
soumis à la sécheresse dans les conditions naturelles(tabl. II)
Les valeurs obtenues
(tabl. II, expérience 1)
montrent des teneurséquivalentes
englucides
solubles et enpolyols
totaux dans lesaiguilles
des différentesorigines
dedouglas ;
la diminution dupotentiel
de base ne semble pas modifier les contenus. Pour la fraction acides aminés et amideslibres,
les valeurs fluctuent defaçon
trèslarge.
Ilapparaît cependant
une netteaugmentation
de ce taux au-delà d’une valeur seuil depotentiel hydrique
de basecomprise
entre -1,6
et -2,5
MPa. Laproline
libre n’estprésente qu’à
l’état de tracejusqu’à
unpotentiel
de base de -1,6 MPa
et ce pourtoutes les
espèces
et provenances. Elle ne devient dosable dans lesaiguilles
de laprovenance Claveisolle que pour une valeur de
potentiel
de base de -2,5 MPa.
Lemême résultat a été mis en évidence sur le chêne par LARHER
(résultat
nonpublié).
Notons que les déterminations effectuées sur des échantillons recueillis
l’après-midi
nesont pas
significativement
différentes de cellesprésentées
dans le tableau II.Il
n’apparaît donc,
enréponse
à lasécheresse,
aucune variation des teneurs enmétabolites dosés
jusqu’à
unpotentiel
de base de l’ordre de -1,6
MPaqui témoigne déjà
d’une contraintehydrique importante.
Il n’a pas étépossible
d’identifier àpartir
de ces résultats un effet provenance ou
espèce
pour ledouglas.
3.2. Evolution des concentrations de
différents
solutésorganiques
dans lesaiguilles
et les racines de deux
espèces
dedouglas
et du cèdre soumis à une sécheressed’intensité croissante
Les données relatives aux
glucides
et auxpolyols
sur les racines et lesaiguilles
destrois
espèces comparées
sontprésentées
dans le tableau III.Dans les
aiguilles
de P. macrocarpa, les teneurs englucides
solublesaugmentent
au-delà d’une valeur seuil depotentiel hydrique
de base de -2,0
MPa. Pour P.menziesii
Ashford, l’augmentation
est linéaire. En revanche pour lecèdre,
aucunetendance nette ne se
dégage
des résultats à cause des valeurscorrespondant
aux PB-
1,2
et -3,3
MPa.Dans les
racines,
les teneurs englucides
solubles sontlégèrement plus
faibles que dans lesaiguilles,
et elles subissent des variations deplus
faibleamplitude. Toutefois,
une tendance à une
augmentation
de la concentration englucides
enréponse
à la contraintehydrique
semble se dessiner.Dans les
aiguilles,
les teneurs enpolyols
pour P. menziesii Ashford et P. macro-carpa sont fluctuantes. Pour le
cèdre,
les teneurs desaiguilles
et des racines semblentdiminuer
progressivement
avecl’augmentation
de la sécheresse. Dans les racines des deux autresespèces,
les valeurs restent sensiblement constantes. La différence essen-tielle
apparaît
dans la valeur moyenne durapport
des concentrationsaiguilles/racines.
Le
rapport
des teneurs entreaiguilles
et racines estd’environ,
2 pour P. menziesiiAshford, 0,6
pour P. macrocarpa,supérieur
à 5 pour Cedrus atlantica Ventoux. Deplus,
P. macrocarpapossède
les taux racinaires lesplus
élevés enpolyols (2
foissupérieur
à ceux de P. menziesiiAshford).
Les
paramètres
relatifs auxcomposés
azotés solubles sont réunis dans lafigure
1.Dans les
racines,
les deuxespèces
dedouglas
neprésentent
pas de différence dans les teneurs relatives en acides aminés. Par contre, les teneurs enproline augmentent progressivement
avec la sécheresse, selon une évolutionidentique
pour les deuxespèces :
la teneur estmultipliée
par 10 pour P. menziesii Ashford et 12 pour P.macrocarpa. En
revanche, le
cèdre neprésente
aucune accumulation deproline
dans lesracines,
les teneurs en acides aminés étantcomparables
à celles des deux autresespèces.
, ,
Dans les
aiguilles
des deuxespèces
dedouglas, l’augmentation
de teneur de lafraction totale en acides aminés libres est faible
jusqu’à
unpotentiel
de base de- 2 MPa environ.
Au-delà,
une accumulationimportante
estobservée,
surtout pour P.macrocarpa. La même remarque
s’impose
pour laproline,
avec néanmoins une augmen- tationplus importante
pour P. menziesii. Pour lecèdre,
aucune accumulationn’apparaît
dans les
racines,
et le taux deproline
reste très faible.Ainsi,
les résultats des deuxexpériences
montrent que chezPseudotsuga
les teneursrelatives en acides aminés
solubles,
etparticulièrement
enproline, augmentent
considé- rablement au-delà d’une valeur de déficithydrique
élevée. Mais cette observation ne sevérifie pas pour le cèdre
capable
desupporter
des PB très bas sans que le métabolisme des acides aminés soitperturbé
defaçon apparente.
4. Discussion et conclusion
Ces résultats mettent en évidence certaines différences entre les trois
espèces comparées,
d’unepart
dans les teneurs en éléments dosés pour un même niveau de déficithydrique,
d’autrepart
dans leurs variations de concentrations en condition de contraintehydrique édaphique.
Nos travaux ne montrent pas de corrélation entre accumulation de
glucides
etaugmentation
de l’intensité du déficithydrique
pour Cedrus atlantica. Au-delà d’une valeur de PB de -2,0 MPa, correspondant
à un déficithydrique élevé,
on observe uneaccumulation sensible de
glucides
solubles pour P. macrocarpa. L’accumulation de sucre estprogressive
chez P. menziesii et ilapparaît
que ce genre, contrairement àCedrers,
fait
partie
desglycophytes, plantes
danslesquelles l’adaptation osmotique
met enjeu
des
glucides. Cependant,
iln’y
a pas de différence clairementquantifiable
entre lesdiverses provenances de
Pseudotsuga
en cequi
concerne les teneurs encomposés
doséspour un même
potentiel
de base : la variabilité interindividuelle sembleplus importante
que les écarts entre provenances.
Il faut aussi tenir
compte
del’importance
de la localisation tissulaire duproduit
dosé dans la
comparaison
desespèces
de conifères. En cequi
concerne lespolyols,
aucune accumulation
n’apparaît
au cours de l’installation de la sécheresse. Les concen-trations de
polyols
solubles dans lesaiguilles
sontidentiques
pour les3 espèces
deconifères,
alors que des différences de teneurs entre racines etaiguilles
ont été mises enévidence à l’intérieur de
chaque espèce.
Notons que P. macrocarpa,espèce adaptée
audéficit
hydrique prononcé grâce
à sondéveloppement
racinaire(G RIEU
etA USSENAC , 1987), présente
lesplus
fortes concentrations enpolyols
dans les racines. Ce résultatpeut
êtrelié,
comme lesuggère
CROWE et al.(1984),
à un rôle de stabilisation et deprotection
de structures enprévision
decontraintes, plus qu’à
un rôleosmorégulateur
direct. Le
cèdre,
très tolérant vis-à-vis des déficitshydriques (Ftrr K Fr.sTEirr, 1981),
etprésentant
uneaugmentation graduelle
de la résistancestomatique
auxpertes
d’eau(Ga!FU et al., 1988), possède quant
àlui,
de faibles teneurs racinaires enpolyols.
Ceux-ci ne semblent donc pas intervenir dans les mécanismes de résistance à la contrainte
hydrique
pour cetteespèce.
La distribution intracellulaire des
principaux polyols
resteinconnue,
et il sembledifficile de corréler les teneurs mesurées à l’évolution du
potentiel hydrique
desespèces
étudiées. Eeccssorr
(1979)
pour Pinussylvestris
et NcuYFrr(1986)
pour Pinuspinaster
aboutissent aux mêmes conclusions.
Les teneurs de la fraction acides aminés solubles et de la
proline
mesurées dans lesaiguilles
des deuxespèces
dePseudotsuga
évoluent au-delà d’unpotentiel hydrique
debase d’environ -
2,0 MPa,
cequi correspond
à un déficithydrique important.
Aucuneétude,
à notreconnaissance,
n’a été réalisée à des intensités de déficithydrique
aussiélevée : NEWTON et al.
(1986)
utilisant dupolyéthylène glycol atteignent - 1,6
MPa depotentiel hydrique
sur Pin us taeda. Sachant que la croissance aérienne dudouglas
s’annule à
partir
d’une valeur depotentiel
de base de —1,5 MPa (G RIEU , 1986)
l’accumulation d’acides aminés n’est donc notable
qu’en
cas deperturbation
sévère dela croissance. KOUADIO
(1986)
observe sur lechêne,
une accumulation deproline
tantque subsiste un minimum de
croissance, puis
une diminution au-delà de l’arrêt de croissance. Sur des cultures cellulaires desorgho,
BHASKARAN et al.(1985)
ont mis enévidence une accumulation maximale de
proline
alors que la croissance cellulaire acessé,
cette concentration diminuelorsque
l’intensité du déficitaugmente.
Ces diffé- rentesréponses expliquent
le fait que le rôle de laproline
dans lesplantes
subissant unstress
hydrique
n’est pas établicompte
tenu des seuils depotentiel hydrique
à atteindre pour déclencher l’accumulation de cette substance àlaquelle
on nepeut
donc attribuer de rôleadaptatif
réel. Si l’accumulation d’acides aminés et d’amides libres reflète uneperturbation
de laprotéogénèse
due à une contrainte dumilieu,
alors lePseudotsuga
etle Cèdre
apparaissent
comme desespèces tolérantes, capables
de maintenir uneprotéo- synthèse
normale en condition de sécheresse.Il ressort de cette étude que les arbres
forestiers,
etplus particulièrement
lesconifères,
sont desplantes
tolérantes à lasécheresse,
notammentplus
tolérantes que les herbacéespuisqu’il
semble que la sollicitation des mécanismesbiochimiques
concernéspar
l’osmorégulation
estbeaucoup plus
tardive chez les conifères étudiés en terme depotentiel
de base seuil. La mise àjour
des fonctions réelles descomposés
dosésprésentés
dans ce travail devraitprendre
encompte
leur localisationcellulaire,
c’est-à- dire larépartition cytoplasme/vacuole,
ceciayant déjà
été abordé chez lesplantes
herbacées
(W YN
JONES etal., 1977).
Si l’onconsidère,
parexemple,
que pour lesespèces étudiées,
la matière sèchereprésente
1/4 de la matière fraîche àpleine turgescence
et environ 1/3 à 1/2 en situation de contraintehydrique
élevée(G RIEU , 1986),
les teneurs en sucres solublescomprises
entre 134 et 273f .Lmol.g- 1
MS correspon- dent à des concentrationscytoplasmiques
de l’ordre de 450 mM à1 820 mM,
enadmettant que le
cytoplasme représente
10 p. 100 du volume duprotoplaste. Compte
tenu de ces volumes
élevés,
il estplus
vraisemblable de penser que ces sucres solublesparticipent
àl’ajustement osmotique
dans la vacuole. Lespolyols
dont les teneurs sont nettementmoindres, joueraient
éventuellement un rôleosmorégulateur plutôt
dans lecytoplasme. Qu’il s’agisse
d’effecteursosmotiques,
de substances de réserves ouprotec-
trices des structurescellulaires,
cette étude nepermet
pas de déterminer les rôles des différentscomposés organiques
dosésqui peuvent
différer d’uncompartiment
cellulaireà l’autre.
En
définitive,
lesréponses
de faiblesamplitudes
observées conduisent àsuggérer
une
participation peut-être plus
déterminante des solutés minéraux àl’ajustement osmotique
en relation avec l’accentuation de lasécheresse,
notamment dupotassium
comme le
suggère
NGUYEN(1986).
Reçu
le 4janvier
1988.Accepté
le 6juin
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