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(1)

Book Chapter

Reference

Que vous propose la Faculté des sciences ?

WENGER, Paul Eugène Etienne

WENGER, Paul Eugène Etienne. Que vous propose la Faculté des sciences ? In: La recherche de la vérité et la formation de l'Homme. Genève : Georg, 1949. p. 1-14

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:106580

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1 / 1

(2)

LA RECHERCHF DE LA VETtITtr

ET LA F'ORMATION DE L,I]OMNIE

Q.UE VOUS PROPOSE

LA FACULTE DES SCIENCES

?

Professeur

Paul-E. \MENGER

Doyen ile la Faculté

Extrait des Conférences donnêes

'

au semestre d'hiver aux Cours généraux de 1948-1949 I'Université,

LIBRAIRIE DE L'UNIVERSI'|E

GEORG & OC S. A.

cnnÈvn

1949

(3)

Que vous propose la Faculté des Sciences?

par le

Professeur Paur-E.

\ZENGER

Doyen de la Faculté des Sciences

Si le Doyen de la Faculté des Sciences de

l'an

1900 avait eu à prendre

la

parole

sur le

sujet

qui

m'est imposé ce soir,

j'imagine

qu?il

l'eût fait

avec beaucoup

plus

d'enthousiasme que moi.

Imprégné

des

écrits de

Renan

et

d'Auguste

Comte, il

aurait

cherché

à

ccinvaincre

un

jeune atrditoire

de la

toute puissance

d'une

science orgueilleuse, capable

de tout

com- prendre,

de tout expliquer. Sa

perstrasion communicative

autait

fait

de nombreux adeptes er nos amphithéârres aurâienr

retrouvé I'intérêt

passionné des auditeurs,

tel qu'il

existait,

en fait,

lorsque

j'eus I'honneur d'entrer

dans

cette

<< Alma Mater >> genevoise.

Aujourd'hui, ma

tâche

est plus

ardue,

I'auditoire

plus

'difficile

à convaincre

;

la science moderne, souvent

mal

com- prise, très diverse dans ses

fins,

n'est pas aisée à concevoir et encore

plus difficile à

défendre,

loriqu'elle

n?a;

pour

cela,

qu'un

chercheur

fort

de quarante années d'expérience.

Celui

que

je

considère encore comme

un

contemporain, Lavoisier,

écrit, entre

autres, dans

le

discours préliminaire de son

taité

de Chimie :

<<

Toute

science physique est nécessairement

formée

de

trois

choses

:

la-série des

faits qui

constituenr

la

Science, les idées

qui

les rappellent, les

mots qui

les exprimenr.

Le

mor

(4)

doit faire naître l'idée,

I'idée

doit

peindre

le fait ; ce

sont

trois

empreintes

d'un

même cachet.

Au milieu du XX"

siècle, c'est 1à encore l'axiome que chaque nouvel

initié devrait écrire sur le fronton

de -l'édi-

fice

scientifique

qu'il a I'ambition de

construire.

Nul,

par

conséquent, n'oserait

nier

l'importance de cette Science pour

la culture

tle l'hornme rnoderne

Le .savoir a

pu être

divisé en plusieurs parties

dont

cha- cune

contribue d'une façon qui lui est propre à

notre

formation.

D^--: ^ll^" "^ rr^rlr'ô6r îê ^atê lt^- .-n.lle z. T.r Science >>-

r 4lllrl çrrvùt U! urvslvrre

ou plus

explicitement << Les Sciences

>

physiques'

par

oppo-

sition

aux iciences dites morales

:

lettres, philosophie, droit, etc. Cette appellation ne convient

du

reste pas entièrement.

Le mot

physr,que évoque

le concret et I'inanimé. Ot,

les

sciences comprennent les mathématiques,

qui

âppartiennent

à

l'abstraction

pure et la

biologie

qui

est

l'étude de la

vie

et

des êtres

vivants. Ce qui

distingue les diverses sciences, ce n'est pas

tânt l'objet

qu'elles se proposent

d'étudier,

que

l'esprit

dans lequel

le

sujet entreprend cette étude. C'est par

la

nécessité

oir

elles

le mettent d'acquérir cet esprit, de

le

former à un

cçrtain mode de raisonnement' que les sciences

apportent leur part originale à la formation de

I'homme ; les mathématiques représentent

le

raisonnement scientifique

pur. Partant d'un axiome de

base, <<

admettons

que... >>'

(2 et 2 font

4

par

exemple), le mathématicien

déduit

de cet axiome

une

conséquence

et celle-ci

deviendra

par la

suite la cause d'une nouvelle conséquence. Par ce procédé d'induc-

tion et

de déduction successives, s'édifie

l'une

des créations les plus harmonieuses de

l'esprit

humain.

Le

mode de raisonnement établi,

il s'agit

de I'appliquer à

la

recherche de

la

vérité ou, disons plus modest€ment, d'uu des aspects de

cette

vérité. Pendant des siècles,

I'on n'a

pas

osé se

servir de ce

raisonnement

pour

.

explorer

certains domaines

; il était

considéré comme sacrilège

de

sonder les

(5)

-3-

mystères de

la vie et

de l'univers. Puis,

vint

une époque, le

XIX"

siècle, où

I'on fut

persuadé, au contraird, que

tout

serait

un jour, clair et

compréhensible.

L'attitude

actuelle diffère de ces deux opinions extrêmes

;

l'homme de science

ne

cesse

de

construire

de

nouvelles hypothèses

qui lui

permerrenr

d'approfondir

sa connaissance

du

monde,' mais.

il sait

que le monde

a

autant d'aspecùs

différents

que

l'esprit

de l'homme est. capable

d'en

concevoir

et qu'il n'est donc

pas

le

seul à

avoir raison.

Certes,

celui qui

aime

la

science

et qui la pratique

en

humaniste

(le mot

est peut-être

prétentieux),

se souviendra que celle-ci

doit

rester modeste

et à la

mesure de l'homme.

Sans doute,

par

le

fait

que nous vivons dans une période

les progrès

ont été

rapides,

constate-t-on une sorte

de décalage

entre

les réalisations

er les

possibilités

que

norre

<< moi >> possède de les imaginer. Mais cela

suffit-il pour

qu'un

esprit

cultivé et

supérieur se sente

troublé

parce que l'image

du

monde que

lui monrre le

savant

lui paraît être

hors cle

proportions,

ou

encore parce que les

mots où

lcs symbolcs,

dont parlait tout à

I'heure Lavoisier,

lui sont

étrangers ? Qu

'il

consente

à s'initier

il

se rendra compte qu'une formule mathématique

ou

chimique est

tout

aussi évocatrice

pour

le savant

qu'une

poftée musicale

pour Ie

compositeur Par contre

le plus

beau poème chinois sera,

pour moi,

lettre

morte, tânt

que

je

n'aurai pas appris

à déchiffrer

les signes peints,sur une poriche de l'époque des Mings.

C'est parce que

le

poète ramène

la nature

à l'échelle de l.'homme

qu'il la lui

rend sens'ible. I1

fait

de

lui le ceiitre

du monde, créé

pour

son usage,

pour

sa

glorification. La

pein-

ture, la

musique, la sculpture, la poésie,

impriment

une trace

toujours vivante et

lumineuse

du

passage

de l'homme

dans I'LJnivers. Le scientifique ne le nie pas, parce que modeste et aussi parce

qu'il conçoit, mieux que

quiconque,

qu'il

peut

être le

creuset

(il s'agit de I'homme), où

se prépare cetre

(6)

synthèse

qui

semble impossible

entre le qualificatif et

le

quantitatif.

Je pense aux grands cerveaux de l'histoire,

et.je

m'aper-

çoir -

que plusieurs d'entre eux

ont

réalisé

cet

arnalgame.

i.t

jardins de Babylone, les p;'ramides, l'Athène antique, le Colisée et les temples de Rome, ne sont-ce pas là les preuves de I'esprit de synthèse dont I'hornme est capable ?

Mi"h.l-Attge,

poète de

la

peinture, peignant

la

Chapelle Sixtine, et Michel-Ànge, mathématicien et architecte, édifiant les plans de

la

Coupole de Saint-Pierre de Rome' nous donna ainsi la basilique de pierre

dont

les proportions harrnonieuses, dans

le

concret, révèlent l'élégance

et

l'exactitude

du

raison- nement mathématique dans l'abstrait.

Mais I'homnr.e de science

doit'sonder cet

univers, clans lequel nous évoluons

I

alors

qu'il

se sent

infime

devant sotl

irnmensité,

ii

a conscience de sa grandeur parce

qu'il peut

le

concevoir

et qu'il peut parfois le

reproduire

ou I'imiter

en

certaines de ses parties.

Le

savant

s'exclut-il du

monde

?

Je ne le pense pas

; il

s'efforce

d'abolir

en

lui

I'idée

qu'il

en est

le

eentre.

Vis-à-vis

de

son

<< moi >>,

il le

reste, Duisqu'il ne

peut sortir de

lui-même, mais

il

s'essaie

à imaginer que

le monde

peut

exister sans

lui et veut,

alors,

le

décrire comme tel.

Il connaît

cependant

les limites du

possible,

et

c'est

pour

cela que l'homme de science moderne, authentique, doit être et rester modeste.

Telles

sont,

quoique

bien mal

exprimées, les réflexions que

m'a

suggérées une carrière de chimiste déjà longue.

Je

voudrais que mes jeunes auditeurs accueillent cette confession avec bienveillance

et

puissent ainsi se mieux péné-

trer de I'influence

immense

que leur

séjour, dans

I'une

ou

I'autre de nos

Facultés des Sciences,

peut

exercer

sur

la

formation

de

leur

esprit

et

certainement aussi de

leur

cceur.

Il me paraît

que,

trop

souvent

aujourd'hui, on

entre

à I'Université pour acquérir

les connaissances nécessaires à

(7)

-r-

l'exercice

d'une

profession

; l'étudiant

moderne

vit

dans un

monde où la

lutte

est sâns merci, où

l'argent

(qu'on I'admette

donc une fois franchement), joue le

premier

rôle et où

les

applications de

la

technique

sont

nombreuses

et

âttrayantes.

De là à

con{ondre << Faculté >>

et

<< Ecole >>,

il n'y a

qu'urt pas

; et

cependant que

l'on

{asse

retour

au passé

et

que

l'on

se souvienne des philosophes

et

des savants

qui

nous précé- dèrent. Ceux

qui ont

laissé

leur

empreinte nous clonnent un exemple

à imiier.

Certes,

la

science est

multiple et

diverse,

et I'esprit

de I'homme n'est

plus

capable d'assimiler I'ensem-

ble

des connaissances

d'une façon

approfondie, mais, néan- moins, nous

ne

sommes

plus à

l'époque

or)

des

murs

très élevés séparaient

les divers

domaines.

Les frontières vont

disparaître,

et

déjà maintenant,

la

biologie,

la

physique, la

chimie et les

mathématiques

ne peuvent vivre pour

elles-

mêmes. Elles doivent s'entr'aider et contribuer à la découverte de royaumes nouvellement créés, laissant pressentir des mer- veilles

;

cela,

à condition

que

l'homme (et

vous

voyez

bien

qu'il

collabore), fasse a,bstraction

de

.ses passions ma,rrvaises.

Au point

de vue philosophique,

il

ne peut

y

avoir qu'une

<< Science >>

;

<<

La

Science )>,

eui

nous donne

I'explication

de

tous

les phénomènes auxquels

notre moi est lié. Pour

le

moment,

hélas, nous sommes

'très

éloignés

de

réaliser cette science idéale

; on a donc, par

raison

d'opportunité,

subdi-

visé

l'ensemble

de

nos connaissances

en un certain

nombre

de

compartiments, choisis, d'ailleurs,

d'une façon

arbitraire.

Je me permets de reprendre ce que C.

E.

Guye appelle :

<<

la

classification métaphysique des sciences >>,

où l'ordre

est

identique

à celui

de

la

classification théorématique d'Adrien

Naville (1901). Cette

classification repose

sur les

norions primordiales

:

<<

le

nombre, I'espace,

le

temps,

la

matière, la

vie, la

pensée >>. Celles-ci

sont en réalité

des énigmes pour nous

; le

resteront-elles toujours ?

Et là,

Guye de se deman-

der

:

<< Ces

notions

sont-elles

réellement irréductibles,

ou

doivent-elles,

un jour,

s'éclairer les unes par les autres

;

enfin, II

I

! I

l I

l

(8)

dérivent-elles peut-être

d'un

seul

et

même

principe

que nous ne pouvons, encore entrevoir ? >> 1.

'Déjà

le principe

de

relativité qui

repose sur, une corré- lation entre la mesure du temps et de I'espace semble montrer que ces deux notions deviennent inséparables

l'une

de l'autre.

C'est donc

un

premier élément

d'unité

entre divers domai- nes.

Je ne veux

pas m'engager

plus avant

dans

la

défense ou la critique de ce principe de relativité. Retenons setrlcmcnt que nous constatons, 1à,

un

progrès métaphysique

qui

relie entre elles des notions fondamentales, bases de

la

classification des sciences.

En bref,

les sciences,. telles que nous les avons classées

avec Guye sont << séparées les unes des autres

par le

nombre plus ou moins grand des notions métaphysiques qu'elles com-

port.nt

>>

:

I'arithmétique ne faisant appel

qu'à la notion

de

nombre

; la

géométrie, au nombre

et

à I'espace

; la

physique

et la

chimie,

aux

notions de nombre, d'espace,

de

temps et

de nnatière

;

alors que celles de vie

et

de pensée nous condui- sent à la biologie

et

à la psychologie.

r 1\ 1 n - I-1 l-- c\^:^--^^^:-^^-:! I -^--

Ef, C est

ra

ce que

la raculle

ucs ùçrglrçcs lrluLtlL

i,

ù(,Ir programme.

Elle le fait, me semble-t-il, dans deux

buts èssentiels,

l'un et

l'autre.

,

1o

La

recherche,

qui doit

tendre

à établir

des relations

<< basées sur l'expérience >> entre les diverses notions métaphy-

siques.qui paraissent irréductibles

tout

d'aborcl, mais

qui

sont solidaires

(principe

cle

la relativité, par

exemple).

Cette'recherche nous donnera l'occasion de

continuer

la

route,

s'élevant

très

ientement, vers

ce

sommet inaccessible

qui

est

la

<< Science >> avec majuscule.

Ainsi

se

forme

I'esprit

de l'homme

au

raisonnement scientifique,

à'la

logique

et

à

I'emploi

des idées

qui peindront

les

faits et rendront lumi-

neux

et

clairs les mots

et

les symboles

qui

les expriment.

1 Gilye

:

u L'Evolution physico-chimique

,,

2e édition.

(9)

-7 -

2u

La priparation

des candidats

à la

mise en æuvre des découverter et-des principes établis au cours de I'histoire des

sciences expérimentales

;

cette histoire

qui

nous enseigne que'

pour

relier entre eux des phénomènes' nous disposons de deux inode,

de

faire

, or,

"o*iliquer le

phénomène

qui pardît

le

plus simple,

ou simplifier

celui

qui

semble

le

plus général.

Et,

puisque nous sommes encore

loin d'avoir âtteint

ce sommet :escarpé

qu'est la

science

pure,

voyons,

si vous

le

perrnettez, quelques-uns des domaines, tous issus d'une origine commune qui, après avoir évolués, au cours des âges, de façons très

divtrsei,

s'ignorant souvent les uns les autres, tendent à

se conjuguer maintenânt pour le plus grand bien de la recher- che

et

de l'évolution.

Les ruathétn'atiqu'es,

tout

d'abord, abstraction pure, mais

qui

peuvent aussi

être I'instrument précieux des

sciences expérimentales.

Celui qui s'y

adonne,

peut le faire pour

des

fins multiples, dont la plus pure

I'amèrLera cettainernent à

confondre

le

monde de ses symboles

et

de ses formules avec

la

ré.alité,

ou,

clu moins, prêcer

aux

théorèltles

ulle

sorte de réaLité.

Mais,

comme

le dit

Poincaré

:

<< les mathématiques

doivent plutôt

représenter

un

langage,.

ou mieux un

vête-

ment, qui

peur épouser

le

corps de

la

réalité >.

Si nous songeons à des réalités physiques, les gaz, si vous

le voulez bien, le

langage mathématique

peut prendre

des

formes différentes

:

C.

E.

Guye choisit

un

exemple

particu' lièrement

convaincant

:

<<

A l'échelle

macroscopique, la

< réalité

>

des

g^z

sera exprimée

par la loi

< Mariotte-Gay Lussac >),

ou l'équation

d'état de

van der Vaals,

etc.

>.

<<

A

l'échelle moléculàire, cette même réalité sera habillée des for.- mules de

la

théorie cinétique des gaz, basée sur

le calcul

des

probabilités" >

<<

Enfin, à l'échelle intraatomique, ce serait à

I'aide

d'équations relatives à ces systèmes d'ondes correspondânt aux éléments constituants des atomes

et

des molécules,

qu'il

con-

(10)

viendrait de

confectionner

le vêtement de la

réalicé

intra

atomique. >>

En

s'exprimant de

la

sorte, Guye souligne très finement l'écueil

qui

peut résulter

d'un

emploi excessif de ce vêtemenc mathématique

;

alors

que celui-ci, prenant de plus en

plus d'ampleur

peut

expliquer

un

nombre

limité

de

faits

expéri- mentaux

par

coïncidence

; la

complexité

parfois

déconcer- tante

peut

devenir

un

grave inconr'énient. IJne théorie trop compliquée ne présente plus d'avantages prâtiques, comparés

à ceux d'une formule

empirique

^yaît

souvent

une

forme

beaucoup plus simple.

A

côté des écueils que

peut

présenter

la

philosophie de

la

science, dominée

trop

exclusivement par les mathématiques,

il

ne

faut

pas oublier les services éminents qu'elles

rendent

actuellement

aux

âutres sciences. Combien

Jécondes et utiles

sont-elles,

lorsqu'il s'agit de

physique

moderne,

ce vêtement mathématique a permis de prévoir des phénomènes

qui

se sont révélés exacts ultérieurement por I'expérience. Mais, là encore, je voudrais exprimer une opinion personnelle

; il

me paraît que l'expérience, dans la

plupart

des ccio-noo Ânit nnAnÀÂon r^irra

^^;-:^- 6riraffianr tLÂ^ni^',^

L'observation des

faits doit guider le

chercheur

qui

aura la joie, par la suite, de formuler d'une manière claire et élé.gante, grâce à l'expression mathématique le résultat de sa découverte.

Je m'excuse auprès des mathématiciens purs, d'avoir mis

'

l'âccent

sur le côté

<<

instrument de leur

science >>

;

mais

qu'ils

soient assurés

que c'est par probité

scientifiqLre que

je

ne puis, ce soir, exprimer l'enthousiasme que

I'on doit

res- sentir

à

évoluer dans les domaines de I'analyse mathématique supérieure, de la topologie, domaines réservés aux seuls initiés,

qui n'ont

que

faire

de

mon

opinion.

Si maintenant, nous abordons

la

physique

et la

clcimie, nous savons de quelle richesse nous disposons, après

la

récolte abondante

de cette

première

moitié du XX"

siècle

:

radio-

activité, physique et chimie nucléaire, ondes hertziennes, rela-

tivité

des phénomènes, chimie biologique, ne

sont

que quel-

(11)

-9-

ques exemples dans les gerbes de

notre

moisson.

Et

c'est alors

.i,r"

"..r" lui

s'adonnent

à

ces domaines'

sont

tentés -

de

ne

voir

que les applications pratiques

: radio, aviation,

chimio- thérapie,

décolvertes

seniationnelles

dans le domaine

des

réahsâtions. Certes, ne décrions pas ce

qui pourrait,

les hom- mes

étant

bons, améliorer

le sort

de I'humanité, mais

il

me

paraît

néanmoins que

le but

idéal,

la

Science, est

voilé

par l'espoir d'une

pluie d'or,

abondante

et

rapide.

Jeune assistant,

je m'étonnai, un jour, qu'Amé

Pictet

regrettât

I'existence

du

diplôme d'ingénieur-chimiste, ân seitt de

,rotr"

Faculté. Je

le

comprends

mieux

aujourd'hui

; il

est

évident que

notre rôle

est

tle former

des chimistes

pour

un avenir prâtique dans I'inclu.strie, mais ceux

qui

nous viennent, devraient,

et je

tiens

à le dire

très

haut,

rester universitaires,

ne

pas suivre

une filière et

âdopter

le

moindre

ef.tott en

ne s'astreignant

qu'à

l'enseignement

obligatoire donné

comme guide dans les programmes. Le

goût

de la recherche,

la

curio- sité'scientifique se perdent de plus en plus, au bénéfice d'un

sport hypertiophié-par

les compétitions

ou'

ce

qui

est plus regrettable encore, par une désaffection des choses de I'esprit.

Le

chimiste

et le

physicien se

trouvent

en

contact et

en

lutte

avec les

faits

expérimentaux, aussi doivent-ils trouver, plus

difficilement

peut-être que le mathématicien,

la

<< vision théorique >>

qui

résulte de leurs recherches, mais ils le peuvent.

La

déformation professionnelle de

tout vouloir

ramener aux

faits

expérimentaux,

âux

phénomènes matériels,

doit

être tempérée

par une

conception

plus

large

et plus

élevée

;

la

philosophie

du

chercheur

devrait lui

rappeler constamment que l'espace,

le

temps

et la

matièrc

qui

suffisent

à

ses

inter- prétations

physico-chimiques,

ne sauraient l"

contenter

lorsqu'il s'agit de

phénomènes

d'ordre intellectuel et

moral,

liés aux

phénomènes

matériels, mais qui n'ont Pâs,

pour

autant, un

aboutissement physico-chimique,

soumis à

un déterminisme fatal.

Je

rappellerai volontiers que

cette

tendance, grâce aux

(12)

succès des sciences physiques, àu sens le plus large

du

rerme, a

imprimé à la

philosophie de

la

seconde

moitié du XIX"

siècle sa tournure matérialiste.

Ces considérations s'appliquent aussi

à la

minéralogie et à

la

géologie

;

sciences éminemment minérales, mais

qui

nous racontent

l'évolution

de

notre planète depuis des

millions d'années. Mais depuis quelques décades,

l'on revient à

une conception plus saine de f idéal scientifique

qui

ne

croit

plus à

un

déterminisme inéluctable

Le biologiste,

lui,

â constamment sous les

yeux

le monde animal ou végétal dans son ensernble.

Il

peut être renté, dans sa conception philosophique, d'appliquer, san.s

un

sens cririque suffisant,

le résultat

de ses recherches

à

I'espèce humaine.

Cependant,

l'on

ne

peur nier

que I'homme se distingue pxr son cerveau des autres espèces connues, ce

qui,

d'ailleurs, Iui donne

i1t'"ii:ïfi; ,orc

que

la morr,

parce

qu,il sait

qu,il meurt

> a

di.t Pascal. Son intelligence

lui

permet

d'utilisàr

à

son

profit, pour le

bien comme

pour

le mal, hélas, les forces de

la

natr-rre

et

de

modifier

les

ionditions

de

la

.,,ie. ir,4nis je crois

utile

de dire

ici, qu'il y

a peu de temps encore, er même actuellement,

le

botaniste

ou le

zoologistè

peut être

amené

à_ considérer,

s'il n'y prend

garde,

la

physiologie comme un aboutissement physico-chimique

;

une

-fois

de

pl.tr. ne

nor.rs

laissons pas

éblouir par

les progrès de

la

physique

er de

la chimie

!

Le côté

humain du

chercheur jouË

,rn iôI" primor-

dial

; il doit éviter l'écueil du travail

scolaire, acq,rdrir urr"

grande habileté certes, mais permettre à

ion

cervea,,

d'"*"rc.,

son esprit critique, sa logique,

pour

atteindre aux conceptions, plus élevées de

la

Science.

Le

rôle des biologisres esr

aujourd'hui

de premier plan ; les progrès réalisés

en

physico-chimie,

en faisùt r".roriit

caractèrç statisrique

de

ses

lois,

les

ont

libérés

de

certains dogmes,

et

c'est âu

tour

de ceux

qui

se

livrent

aux patientes

et

méthodiques recherches

de la

biologie

cellulaire de

nous

(13)

-

11

-

apporter

de

nouvelles clartés

sur le

problème

troublant

des , origines de

la

vie.

C'est

de ces recherches que

l'on peut

attendre les pro- grès les plus immédiats. Les expériences faites sur des espèces

inférieures à l'homme

ont

alors

toute leur

importance.

Notre

collègue, Monsieur le Professeur Guyénot, dans son beau livre

< Les 'problèmes de

la

vie >>,

montre'

rappelat'tt les tra-vaux de VeissÀann, cette conception féconde des biologistes, d'admet-

tre,

dans

tout ânimal, deux

parties

dont

les destinées sont clifférentes :

<<Le sorna périssable

etIe

germ,ett théariquement immor-

tel.

Ce clernier,

formé

des glandes génitales, continue à vivre

une fois la

déchéance

et É mort dtr

soma consommées

; il

assure

la continuité de la

race,

pénétrant

dans l'organisme

du

descendant,,secondairement, comme une sorte de parasite

qui irait

se

fixer

sur son hôte temporaire >>.

<<

tonomie de

cette

lignéc gcrminale âssurant

la continuité

de

la vie >>. Guyénot

dixit.

C'est aussi

par

des recherches expérimentales,

en

liaison avec la physico-ihimie que des découvertes sensetionnelles ont

été faites

dans

le

domaine des colloïdes biologiques,

les

molécules elles-mêmes

jouent un rôle fort important ;

cette

puissance d'action que

doit

exercer

la

molécule isolée montre

I'efficacité, si

souvent constatée

sur un

organisme, de-doses prises

à un très grand

degré

de dilution. Que

dire.

enfin

de

la

chimiothérapie, des hormones, des vitamines

et

des anti- biotiques ?

Solrn.rrt

on

parle de l'âge atornique, à propos

et

hors dc de propos, prévoyant déjà

le

bouleversement que l'utilisation de l'énèrgie de désintégration de I'atome peut provoquer dans

le

mondc régenté

par

les hommes

et leurs

passions, mais, n'oublions pnt,

poni

cela, le bouleversement, ie répète le mot, obtenu déjà grâce aux études biologiques poussées

et

aux syn- thèses de nos savants, qu'ils se disent biologistes

ou

chimistes.

(14)

Le

domaine

de la

psycbologie,

où les facteurs vie

er

pensée sont prépondérants, esr

le plus difficile à

symboliser âu sens étymologique

du mot. La

pensée comprend en effet, toutes les notions métaphysiques qui sonr à la base de la classi-

fication

des sciences, choisie à l'époque de Guye:

Le

psycho- logue expérimental devrait donc étudier simuhanément, avec

le

phénomène psychique rous les phénomènes physiologiques et physico-chimiques qui I'accompagnent.

Le problème est si vaste, si compliqué, qu'aucun homme n'oserait I'entreprendre.

Cette

science,

la plus

générale de

toutes, cloit donc être artificiellernent simplifiée. et, si j'insiste

ici

sur cette approximation,

il faut

se rappeler qu'en biologie également les problèmes

sont très génér".t*, qrr'il

existe un psychisme

de la

planre

er

même

de la

cellule,

et bien

que dépourvus de système nerveux et de cerveau, on ne peut

tran-

cher,

par

la négative,

la

sensibilité des végétaux.

Le

psychologue

doit, à

son

tour,

s'appuyer

sur la

phy- siologie, sans cependant

oublier que

les états- psychologiques

et

physiologiques

sont

inséparables

et réagisient l,un

sur

I'autre. Il me partît

..,ain

de le

prou.,'er

par

les multiplcs exemples de

la vie

des hommes

I

mais

le

spZcialiste,

lui,

àoit

y

penser,

lorsqu'il

aborde

le

domaine de

la

philosophie.

Je ne sais

si j'ai f.ait

comprendre

à

mes auditeurs

tout

ce qu'une Faculté des Sciences peut apporter. Je me suis tentr

aux

problèmes généraux

et je me

suis

efforté de

montrer

combien l'homme

peut

encor

e,

pat sa pensée, s,associer

à

cet univers

qu'il

cherche à sonder.

_ Le champ des connaissances humaines est immense, certes,

et l'on

est tenté, à première vue, de s'enorgueillir des progrès réalisés dans

le

domaine

du

rationnel.

Si

I'on

parcourc I'histoire de

notre

Faculté des Sciences genevoise, nous pourrions nous rendre compte de ces progrès, grâce aux travaux des savants

qui n'étaienl point

des^spÈcia- listes, mais des humanistes

et

des philosophes.

En

1802,

il fut

décidé

qnà l. nombre

des chaires cle

(15)

_73_

I'Académie serait doublé et trois d'entre elles

furent

attribuées

à. la chimie

et

une à la minéralogie

;

les ressources manquânt'

il fut

convenu que les nouveaux professeurs seraient honoraires.

Ce

dévouement assura

la vie à notre Académie

€t,

lorsqu'en

1808,

l'Université Impériale de

France

fut

créée

par

Napoléon, I'Académie

de

Genève

y fut

incorporée. En 1809,

il y

avait 8 professeurs salariés

et 1I

honoraires. Le plus favorisé

avait un traitement

de

Fr. 1200.-, le

nombre des

étudiants était

de

130

et la ville comptait environ

20.00û habitants.

Boissier

qui

débute dans les

lettres,

passe

aux

sciences,

'tttfué par Ia

chimie.

Théodore de Saussurc,

fils

d'Floracc Bénédict,

fait

de l,r géologie,

de la

minéralogie,

puis il devient

célèbre

par

ses

études

de chimie

végétale,

de chimie plrre, et, en

1802,

il

r;eçoit

l'une

des chaires

de ce qui devait

devenir

plus trrd

notre Faculté.

De la

Rive. professeur honoraire de chimie pharmaceuti- quc,

s'illustrc

à

l'étrangcr, dcvicnt l'un dcs fondatcurs

clu Musée

d'Histoire Naturelle et du Jardin

Botanique.

En enfin, pour

ne pas allonger

la

liste de cette brillante phalange, Galissard de Marignac,

l'ami

de Dumas,

le

collègue de Berzélius,

Vohler et Liebig,

consolide

par

ses recherches célèbres,

le

renom des sciences genevoises.

Quel

palmarès depuis lors !

C'est par ces illustres travaux que nous devons compren- dre, avec notre esprit modeme, ce que nous propose la Faculté des Sciences.

Ces

pionniers nous rappellent les

règles

qui

doivent

limiter

ou tempérer la confiance que l'on

pourrait

avoir, vis-à-

r.is

des spéculations métaphysiques,

à

I'heure

où la

science .semble s'élancer vers

I'infini.

Ils

nous donnent également I'exemple d'une

forte

culture

et d'un

grand désintéressement. Le champ actuel des connais-

(16)

sances humaines est vaste, et, cependant que

faudrait-il

encore

pour

résoudre scientifiquement les problèmes .philosophiques.

Admirons, comme elle le mérite, l'æuvre scientifique des hommes, mais sachons rester humbles,

juger

sainement

et

à

leur

échelle, les progrès accomplis,

et

gardons,

comme

un rêve, les grands problèmes philosophiques

dont

semble dépen- dre notre destinée.

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