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CITOYENNETE ET JEU POLITIQUE EN CÔTE D IVOIRE

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Alfred BABO Laboratoire d’Economie et de Sociologie Rurales

Université de Bouaké RESUME

La crise militaro-politique que connaît la Côte d’Ivoire, depuis septembre 2002 révèle la diffi cile modernisation de la conception anthropologique de la nationalité dans la société ivoirienne. Devant la persistance de la crise économique depuis les années 1980, des opérations de rupture de l’ordre ancien deviennent des moyens de clarifi cation des droits des populations. Or, ce processus de clarifi cation semble induire l’élaboration d’une politique moderne - accompagnée d’un appareillage juridique - de l’immigration dans un environnement social très politisé. Mais, du fait des intérêts de chaque acteur, cette politisation de la vie sociale et économique n’a-t-elle pas débouché sur une instrumentalisation de la nationalité liée aux enjeux politiques ? De fait, à partir de l’analyse stratégique du jeu politique ivoirien, il apparaît que depuis les années 1990, la rhétorique sur l’étranger et la nationalité ne traduit qu’une stratégie de conquête et/ou de conservation du pouvoir par l’ensemble des acteurs politiques.

Mots -lés : Crise politique, Nationalité, Etranger, Pouvoir, Côte d’Ivoire.

Rev. ivoir. anthropol. sociol., KASA BYA KASA, n°8 - 2005

©EDUCI 2005

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INTRODUCTION

«Je m’appelle Sankara, né en Haute-Volta en 1946. Je suis arrivé en Côte d’Ivoire en 1966 et je me suis installé ici en 1968. J’ai eu dix enfants. J’ai travaillé comme manœuvre déballeur à partir de 1970 (…) c’était les belles années de la Côte d’Ivoire. On vivait bien dans ce pays sans histoires. Il n’y avait pas de différences entre les peuples habitants sur une même terre» (Duval & Kouakou, 2003 :176).

Ce propos est révélateur de la pensée répandue chez de nombreux immigrés en Côte d’Ivoire en rapport avec les questions de la nationalité soulevées ces dernières années. Le rapport est fondé sur les pratiques traditionnelles d’intégration d’un étranger dans les communautés ivoiriennes. Ainsi, des liens forts générés par ces pratiques entre ces immigrés et leurs sociétés d’accueil s’établissent, leur donnant par la même occasion le sentiment d’appartenance à la nation d’accueil en dehors de toutes autres considérations juridiques modernes. Certes, dans les nations démocratiques, le libéralisme dont s’instruit les politiques publiques devait induire un multiculturalisme (Taylor, 1992). Mais, si le multiculturalisme fait l’apologie de la diversité, de la liberté et de l’égalité entre les individus, dans les Etats-nations modernes il ne s’émancipe pas des modes de régulation de la citoyenneté et de l’immigration. C’est ainsi que les pays occidentaux, notamment les Etats-Unis et l’Europe, mettent en œuvre de sévères lois d’immigration (De Rivero, 2003). La dernière vague d’immigration du désespoir – dans les enclaves espagnoles du Maroc - vers l’Europe, de même que la crise des banlieues de novembre 2005 en France ont provoqué des débats, mais surtout de nouvelles mesures plus restrictives en matière d’immigration. Mais, en Côte d’Ivoire, toute la diffi culté d’une politique d’immigration semble aujourd’hui résider dans la transformation des pratiques et représentations traditionnelles en actes régis par les lois modernes sur la citoyenneté. Autrement dit, comment passer des pratiques traditionnelles à la régulation moderne de la citoyenneté dans une Côte d’Ivoire où le jeu politique se crispe sur les questions de nationalité ? La question est de savoir la place des liens étroits et permanents qui rattachent les étrangers à la nation ivoirienne dans la mise en œuvre de la loi sur l’étranger. Face à ces interrogations, l’Etat ivoirien, par les régimes successifs, tente de donner des réponses par l’élaboration de politiques d’immigration, qui sont aussitôt remises en causes par les acteurs politiques. De ce fait, la crise de la citoyenneté s’est accrue avec les enjeux politiques qui ont noyauté le débat sur la nationalité en Côte d’Ivoire.

L’analyse du contenu de la presse écrite (Prior, 2003) ivoirienne et de l’abon- dante littérature sur la crise ivoirienne, permet de décrire comment les enjeux politiques rendent complexe la mise en œuvre d’une politique de l’immigration en Côte d’Ivoire qui puisse concilier les conceptions anthropologiques et juridiques de la nationalité. Le contenu de la presse ivoirienne se présente comme l’un des

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meilleurs analyseurs des stratégies élaborées dans le champ politique ivoirien.

Elle représente, en effet, un vecteur de la communication politique et reste un lien majeur entre les leaders et leurs électorats, en tant que support de diffusion de leurs idéaux, leurs images, leurs projets de société.

LA PLACE PRÉPONDÉRANTE DES ÉTRANGERS DANS L’ESPACE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

La Côte d’Ivoire a été très tôt positionnée par l’administration coloniale comme un pôle économique important dans la sous-région. Pour Albert Sarrault1 il fallait mettre à la disposition de la colonie ivoirienne, une main-d’œuvre abondante et disciplinée, qui seule lui manque pour insuffl er une vigueur prometteuse à son économie (Kouassi, 2001). Pour ce faire, la Haute-Volta (actuel Burkina-Faso), a été momentanément rattachée en septembre 1932 à la colonie de Côte d’Ivoire en vue de favoriser et accentuer le recrutement de sa main-d’œuvre pour les plantations et les chantiers (Cordell & Gregory, 1982). Après les indépendances des pays africains, l’immigration en direction de la Côte d’Ivoire s’est intensifi ée.

L’approche néo-classique (Prothero & Chapman, 1985) de ces mouvements met l’accent sur la nécessité pour les migrants d’améliorer leurs conditions économiques matérielles. Mais le plus souvent, les populations ne se déplacent pas uniquement dans l’objectif de fuir des conditions naturelles austères, mais aussi pour optimiser des stratégies de survie complexes (Droz & Sottas, 1997;

Parnwell, 1993). En réalité, les frontières héritées de la colonisation sont restées artifi cielles. Même, la volonté révolutionnaire du président Sankara de matérialiser la frontière ivoiro-burkinabé dans les années 1980 n’a pas rencontré l’adhésion du président ivoirien Houphouët-Boigny. Elle n’aurait sans doute pas rencontrée celles des populations qui se trouvent de chaque coté de la frontière. Ainsi, les frontières n’ont pu empêcher les échanges économiques entre les groupes transnationaux à cheval sur plusieurs pays. Cependant, si à la pratique, la migration semble défi er les barrières érigées entre les peuples, ce phénomène traduit surtout « la volonté des populations de maximiser les avantages comparatifs des entités nationales » (Akindès, 2003 : 10). Au recensement général de la population de 1998, la Côte d’Ivoire compte 15 366 672 habitants dont 4 000 047 de non nationaux. Elle se présente donc comme une terre d’accueil pour les ressortissants des autres pays, principalement ceux de l’Afrique de l’Ouest. La population d’origine étrangère a connue un progression, passant de 22 % en 1975 à 25% en 1993 puis à 26 % en 1998. Ces immigrants ont contribué, par leur travail dans le secteur primaire (agriculture, élevage, pêche) et tertiaire (à caractère informel), au développement

1- Ministre français des colonies en 1930.

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économique de la Côte d’Ivoire. En 2001, ces deux secteurs d’activité mobilisaient 56,9% des non nationaux selon l’Institut national de la statistique. Et la communauté étrangère avait une participation plus active à l’économie nationale au niveau quantitatif avec un taux d’activité de 57,9 % contre 47,7 % pour la population ivoirienne. De fait, en raison du poids de la population étrangère (Bouquet, 2005) tant au niveau économique que social dans la société ivoirienne, la nationalité est devenue une question au cœur de l’analyse sociologique, mais surtout politique.

De plus, depuis les années 1990, la politisation des régimes de justifi cation d’une crise à l’origine économique, va mettre la citoyenneté ivoirienne et les étrangers au cœur des stratégies de pouvoir. En effet, si la question migratoire, avec elle des poussées xénophobes, n’est pas nouvelle en raison des confrontations qu’elle a alimentées par le passé (1958, 1968), son instrumentalisation politique est récente (Janin, 2000). Ainsi, le modèle d’intégration par l’économique jusque là «réussie»

des étrangers va être bousculé, puis montrer ainsi ses limites.

DE L’INTÉGRATION TRADITIONNELLE AU MODÈLE D’INTÉGRATION HOUPHOUÉTISTE

Le modèle d’intégration des étrangers dans les sociétés ivoiriennes repose, majoritairement, sur le «tutorat». Le tutorat correspond à une convention agraire caractéristique de l’«économie morale» des sociétés paysannes ouest-africaines dans laquelle se met en place une relation de dépendance entre un tuteur et «son étranger» (Chauveau, 2002). Dans le pays gwendégué, à l’Ouest du Burkina Faso, les obligations dans la convention ont aussi et surtout un caractère social et moral (Jacob, 2003). Dans les villages ivoiriens également, l’étranger est d’abord accueilli chez un tuteur qui assume toutes les responsabilités relatives à son intégration. Il s’établit de cette façon des rapports entre le tuteur et ses dépendants qui s’expriment dans le langage de la parenté : le tuteur étant associé au « père » du migrant. Le migrant, parce qu’il occupe et exploite un patrimoine familial, s’est donc subordonné aux mânes et rites des ancêtres de son tuteur. Il est alors considéré comme un membre de sa famille. Progressivement, des cas de mariage entre étrangers et autochtones renforcent ces relations de parenté rituelle en les transformant en parenté par alliance. En défi nitive, le migrant s’installe dans sa communauté d’accueil dont sa famille et lui deviennent membres à part entière. Dans certaines localités, telles que Méagui, Grabo et Soubré dans le Sud-Ouest forestier, les migrants intègrent les structures sociales et politiques villageoises et en deviennent parfois des autorités, sinon des chefs de villages ou de campements. Dans les villes et villages, les autochtones désignent cette forme achevée de l’intégration des étrangers à leur communauté par l’expression :

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«nous sommes frères». C’est l’aboutissement de la construction de ce que Dembélé appelle la «fraternité ouest africaine» par une culture et une esthétique de l’étranger (Dembélé, 2002:144). Cela se constate également au niveau de la politique étatique de la période coloniale à 1990.

En effet, Houphouët-Boigny, lui-même ancien député au Parlement français avec l’appui de la chefferie mossi (Grah-Mel, 2004) prônait dès l’indépendance, une intégration totale des communautés étrangères dans la société ivoirienne. Elle devrait être l’aboutissement de la politique d’ouverture de l’économie (main-d’œuvre et capitaux) ivoirienne sur l’extérieur. Par ailleurs, le contexte de compétition entre leaders africains2 au lendemain des indépendances a poussé Houphouët-Boigny à donner une forme plus pragmatique à son modèle panafricaniste. Préférant l’intégration des peuples à celle des Etats naissants. Ainsi, l’intégration des étrangers en Côte d’Ivoire, s’est traduite par la loi n°61- 415 de 1961 portant code de la nationalité, qui affi rmait le principe du droit du sol plutôt que celui du sang pour l’acquisition de la nationalité ivoirienne. Cette loi permettait donc à tous les étrangers qui le désiraient, d’opter pour la nationalité ivoirienne. Dans le domaine des activités politiques, l’intégration s’est matérialisée, par l’octroi du droit de vote aux immigrants originaires de l’Afrique de l’Ouest jusqu’en 1990 et la nomination de non nationaux3 à de hauts postes de responsabilité politique.

Les effets induits d’une telle politique d’intégration, c’est l’ampleur que prend la conception historique et symbolique de la nationalité chez certains étrangers dans un pays soumis au processus moderne de construction de la citoyenneté. A l’opposé, les discours primordialistes (Geertz, 1963 et Shils, 1957) qui inspirent les tenants de la théorie des tribus fondatrices sont apparus plus opérationnels dans la recherche d’une identité enracinée dans la parenté de «sang», le langage, la région, la coutume. Or, d’après Anderson (1983), l’idée de souveraineté natio- nale n’a rien de naturelle, notamment dans les sociétés traditionnelles, quelque soit la force de leur attachement à une ethnie ou à un territoire. Ainsi, pour les constructivistes (Anderson, 1983 et Deutsch, 1969), la nation est un phénomène social historique construit par les groupes sociaux. Sur cette base, l’approche historique d’inspiration moderne de la nation défi nit les citoyens ivoiriens comme les autochtones appartenant aux différentes tribus installées avant la pénétration coloniale. Mais aussi tous ceux qui, à travers champs et chantiers, à travers luttes héroïques de résistance et construction d’un corps politique ont répandu sueur et sang pour la Côte d’Ivoire (Zoro, 2003). A ce titre, la nation étant désormais «lieu

2 - Kwamé N’Krumah (Ghana), Sékou Touré (Guinée) et Sédar Senghor (Sénégal) . Lire également Idriss Diabaté, Ousmane Dembélé et Francis Akindès, Intellectuels ivoiriens face à la crise, Paris, Karthala, 2005, 195 p.

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de mémoire », être national d’un pays c’est partager les mêmes souvenirs glorieux et douloureux ; c’est avoir connu les mêmes sacrifi ces de sang versé pour les mêmes causes ; c’est partager le même passé collectif (Schnapper, 1991). De ce point de vue, d’après Zoro «déterminer la nationalité d’origine uniquement sur une base tribale et ethnique, c’est nier la dynamique des peuples, c’est faire le lit de l’ethnocentrisme, c’est travailler contre l’émergence d’un sentiment d’unité nationale» (Zoro, 2003). C’est pourquoi, tout en portant la critique à l’approche anthropologique de la nation telle qu’élaborée par Niangoran Boua4, le juriste qu’il est ne puise pas moins dans l’histoire et dans le symbolisme. Cela dit, c’est dans cette logique que s’inscrit les revendications de certains migrants relatives à l’acquisition de fait de la nationalité ivoirienne.

LES REVENDICATIONS CITOYENNES DES IMMIGRÉS

Depuis le début des années 1990, les migrants Burkinabé installés dans des villages (Garango, Koudougou, Koupela, etc.) de la région de Bouafl é au Centre-Ouest de la Côte d’Ivoire depuis la période coloniale, ont entamé des démarches en vue de leur naturalisation collective. Il faut signaler que la politique de naturalisation en Côte d’Ivoire paraît restrictive, car seulement 88 000 individus ont été naturalisés depuis 1960. Toutefois, la faible adhésion des étrangers durant douze années probatoires à la loi 61-415 les naturalisant d’offi ce, semble attester l’hypothèse que cette restriction est moins le résultat d’une politique d’obturation des autorités ivoiriennes, surtout sous le régime jugé libéral d’Houphouët, que celui d’une faible motivation à l’acquisition de la nationalité ivoirienne par les étrangers eux-mêmes. Deux raisons peuvent expliquer cette faible adhésion à la naturalisation. La première serait simplement liée à la volonté pour un étranger de conserver fi èrement sa nationalité d’origine au début des indépendances. En effet, l’adhésion à la nationalité est pour beaucoup une lente maturation, une lente acculturation et non pas un acte impulsif de déclaration de bonnes intentions aux autorités (Milza, 1998). En cela, les débats sur la nationalité en Côte d’Ivoire accordent peu de place à l’expression de la volonté réelle de ces immigrés, qui pour certains ne sont pas demandeurs de la nationalité ivoirienne. La seconde raison est due au fait que nombre d’étrangers ont opté pour une capitalisation des liens sociaux tissés avec la société ivoirienne. Ils ont ainsi pu croire que, du fait de la « fraternité » établie, aucun problème de citoyenneté ne se poserait.

Mais, l’avènement de la carte de séjour pour les étrangers à partir de 1990 et les graves dérives et tracasseries qui l’ont accompagnée ont conduit certains

4 - Voir les Actes du colloque de la CURDIPHE, sur l’«ivoirité», 1996.

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immigrés à entreprendre des procédures de naturalisation. Celles-ci ont connu un dénouement positif en 1995 au terme du décret n° 95-0809 du 26 septembre 1995 portant naturalisation des populations (des milliers d’individus) des villages de Garango, Koudougou, Koupela et Tenkodogo en référence à la loi 61-415 portant code la nationalité telle que modifi ée par la loi 72-852 du 21 décembre 1972. Ce résultat traduit l’aboutissement d’un processus long et complexe de passage de la conception historique et symbolique à celle juridique de la notion de nationalité. A l’origine, de nombreux migrants estiment que pour avoir contribué au développement de la Côte d’Ivoire, puis, du fait de leur long établissement dans ce pays, il apparaît injuste de les déclarer non ivoiriens au regard de la loi en 2000. En fait, cette attitude peut s’expliquer à la lumière de la défi nition que donne Miller (1997) de la nationalité. Pour lui, l’idée que les nations sont des communautés historiques est défendue contre la représentation qui en fait des «communautés» divisées en de longues lignes de classe, en appartenance ethnique, etc. L’adhésion à la nation repose donc sur un principe réitératif et démocratique, reconnaissant et donnant la priorité à la façon dont les habitants d’un territoire comprennent leur identité.

De ce point de vue, la démarche de ces immigrés installés en Côte d’Ivoire depuis la période coloniale s’inscrit dans une volonté consciente de la reconnaissance de leur sentiment d’appartenance à l’identité nationale ivoirienne. De plus, si l’on se fonde sur l’approche défi nitionnelle de la nationalité chez Gellner le partage de la même culture comprise comme système de pensée, de comportement, de communication acquis dans un processus de maturation est un élément fondateur de l’incrustation du sentiment d’appartenance à une nation (Gellner, 1983).

Ainsi, la longue présence de certains immigrés a fi ni par conforter leur sentiment d’appartenance à la nation ivoirienne. En effet, le taux de non-nationaux vivant en Côte d’Ivoire depuis 10 ans ou plus, ou dont les parents y résident depuis plus de 10 ans représentent 28% des immigrés en 1988. De plus, 41% de cette population est née en Côte d’Ivoire (Tapinos, 2002). Ces immigrés ont, pour certain, établi des villages parfois plus équipés que ceux d’autochtones et possèdent des biens, nulle part ailleurs qu’en Côte d’ivoire. Leurs descendants sont, en toutes choses (modes vestimentaires, démarche, langage ou accent, style alimentaire, animation syndicale, etc.) ivoiriens. Très peu d’entre eux connaissent réellement les pays d’origine de leurs parents. Dans ces pays, comme au Burkina-Faso, ces derniers sont considérés comme des «étrangers», plus précisément comme des

«ivoiriens» appelés communément «diaspo»(Zongo, 2003). Il en résulte qu’une importante frange des Burkinabè nés en Côte d’Ivoire ne dispose d’aucun repère au Burkina-Faso. A partir de ces constats, nombres d’immigrés établissent un rapport organique étroit entre l’acquisition de la citoyenneté et celle de la nationalité. Or, si la citoyenneté est l’accomplissement du devoir de chaque individu envers sa communauté (d’origine ou d’accueil) dans le sens d’une participation au processus

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de développement de la nation, la nationalité, elle, apparaît comme l’intériorisation par les individus des valeurs nationales. Mais, dans les Etats modernes, cette intériorisation se double de liens juridiques. Ainsi la nationalité, même si elle est un lien social, elle est aussi et surtout un lien juridique qui rattache un individu à une nation. Pour les immigrés, elle est attribuée par la loi au terme d’un processus de naturalisation ou d’assimilation qui en précise leurs droits et obligations (Bernard, 1998). Sur cette base, les expressions populaires d’immigrés telle que «je suis plus ivoirien que toi» relèvent d’une citoyenneté ivoirienne acquise par le droit de la pratique sociale, économique et culturelle. Mais, elles restent fragilisées par l’absence de référent juridique (décret de naturalisation, carte nationale d’identité ivoirienne, certifi cat de nationalité etc.). En réalité, quelle que soit la longévité de son installation et le niveau de sa contribution à la croissance économique de la Côte d’Ivoire, si l’immigré n’exprime aucune demande de naturalisation, le lien juridique de la nationalité ne peut être revendiqué de fait. Il en résulte qu’une catégorie d’étrangers a un véritable problème de citoyenneté. Il s’agit de ceux qui ont des relations permanentes étroites et de longue date avec la Côte d’Ivoire ; ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont usé de la nationalité ivoirienne dans des conditions fl oues à une période précise dans les administrations et institutions publiques ivoiriennes5 et qui leur est aujourd’hui déniée. C’est cette négation de citoyenneté sur la base d’artifi ces juridiques qui a provoqué un choc d’autant que les représentations symboliques et culturelles de l’appartenance à une nation n’ont pu prospérer au terme de la loi. Mais, de plus, ces représentations sont exacerbées par les enjeux politiques qui font naître des sentiments d’exclusion, voire de xénophobie à partir de 1990. Les politiques, à la recherche des fondements historiques, anthropologiques et juridiques de la nation ivoirienne prennent alors en otage la citoyenneté ivoirienne.

LES POLITIQUES PUBLIQUES DE L’IMMIGRATION PRISES EN OTAGE PAR LES ENJEUX POLITIQUES

Dans de nombreux pays, des situations de troubles économique, social et politique ont parfois entraîné l’expulsion massive d’étrangers : au Ghana en 1969 ; en Zambie en 1971 ; au Nigeria en 1983 et au Gabon en 1995 et en Côte d’Ivoire en 1958, 1993 et de façon épisodique depuis 20006. En France, pays de forte immigration depuis le XIXème siècle, chacune des vagues d’immigration, d’abord européenne, ensuite maghrébine et enfi n subsaharienne a suscité violences et

5- Voir à ce propos la contribution de Ousmane. Dembélé, « Côte d’Ivoire : La fracture communau- taire », Politique africaine n°89, Karthala, 2003, p. 42.

6- Lire également Pérouse de Montclos M-A, L’Afrique rejette ses propres immigrés, Le Monde diplomatique, 2000, p.15.

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xénophobie entre 1880 et 1890, en 1930 et en 1980, en rapport avec la crise économique que subissait la société française (Mucchielli, 1998). Portant un regard sur la situation en Côte d’Ivoire, Akindès sans réfuter la thèse des troubles comme principal facteur de telles crises du lien social, les lie à l’effi cacité limitée des dispositions juridiques nationales qui s’explique par «le manque de réfl exion sur ce qui doit tenir lieu de politique publique de “l’étranger”». A ce stade de la réfl exion, on peut penser qu’en Côte d’Ivoire, ce vide intellectuel a cédé la place à un populisme qui s’est traduit par la volonté, longtemps retenue par Houphouët- Boigny, de reconstruction de la catégorie «étranger» .

D’où le nationalisme exacerbé constaté tant au niveau de la population7 qu’à celui de la classe politique8 et intellectuelle9. En effet, si la catégorie «étranger»

se diluait dans «la fraternité ouest africaine», le contexte de crise économique et politique des années 1990, en Côte d’Ivoire comme partout en Afrique a incité à une modernisation de la citoyenneté qui se traduit par la distinction légale du statut du national de celui de «l’étranger». Les discours d’autochtonie ne sont pas particuliers à la Côte d’Ivoire. Selon Lentz (2003 : 115), ils jouent actuellement en Afrique – Burkina Faso, Ghana, Cameroun - un rôle important dans trois champs d’action : la défi nition de l’appartenance sociale des migrants ; la discussion sur le lien entre territorialité et droits politiques ; et enfi n l’accès aux ressources économiques telles que la terre. L’enjeu dans la situation ivoirienne est la clarifi cation des droits économiques et surtout politiques qui avaient été «amalgamés» sous Houphouët.

C’est en particulier récemment avec les élections multipartisanes que la rhétorique de l’autochtonie est mobilisée dans le jeu politique local ou national contre le vote et le pouvoir des étrangers. Toute la question est de savoir alors comment les pouvoirs publics prennent en main et appliquent le projet de clarifi cation.

7 - Des discours dans les syndicats, les associations des jeunes, les « agoras » et « sorbonnes » (espèces de lieux publics d’expression de l’opinion populaire) etc.font la part belle au nationalisme. En outre ces discours se sont traduits par plusieurs actes : les pêcheurs bozo maliens ont été expulsés des lacs et fl euves (Tiébissou, Béoumi, Kossou et Aboisso). A la suite des confl its violents entre Kroumen et Burkinabé à Tabou en 1999, les seconds ont été expulsés de leurs plantations de café et cacao. Ces attitudes se sont vite répandues dans d’autres régions (Oumé, Gagnoa, Daloa, etc.) comme principal mode de règlement immédiat d’un confl it foncier entre communautés autochtones et allogènes.

8 - En plus des partis PDCI-RDA, FPI et PIT qui avaient crée une «alliance patriotique» en 2000, les conseillers économiques et sociaux, à la fi n de leurs travaux en 1998, avaient conclu que «l’immigration en Côte d’Ivoire avait largement dépassé le seuil du tolérable»

9 - Bédié a incité les intellectuels de son parti à conceptualiser le thème de «l’ivoirité». Cette con- ceptualisation de l’ivoirité n’était qu’une défi nition de surface propre à masquer de très pernicieux ferments de division .

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En 1990, l’ancien premier ministre Alassane Ouattara, nonobstant les intérêts culturels entre étrangers et Ivoiriens a décidé de procéder à une gestion moderne de la migration et de l’état civil en Côte d’Ivoire. Il a instauré une «carte de séjour»

pour les étrangers et une carte dite «sécurisée» pour les nationaux. Si dans le fond, cette politique intégrait plus une stratégie de recherche de ressources fi nancières capables de relancer l’économie ivoirienne en déliquescence à la fi n des années 1980, elle ne relève pas moins d’une exigence de modernisation des Etats dans le processus de planifi cation du développement. Mais, les effets pervers d’une telle politique étatique, se sont traduits par la déconstruction de la notion de

«l’étranger – frère » dans la conscience populaire, pour affi cher la préférence à la

«citoyenneté autochtone». Celle-ci, d’après Dembélé, s’exprime chez les ivoiriens, d’abord par une conception absolue de l’étranger (extra ethnique et national) et par l’affi rmation de leurs droits exclusifs à accéder aux ressources économiques et surtout politiques. Il en découle une «ethnicité politique» dont la grande victime sera Alassane Ouattara lui-même, dont le doute sur sa nationalité polarise le débat politique ivoirien depuis une décennie.

A l’occasion des révisions du code électoral en 1994, et de l’adoption de la constitution de 2000 les différents régimes en place ont attribué la nationalité burkinabé à A. Ouattara, le disqualifi ant ainsi des compétitions électorales en Côte d’Ivoire (Konan, 1999). Les politiques d’identifi cation successives entamées par le Conseil National de Sécurité sous H. K. Bédié en 1998, puis avec R. Guéi et L.

Gbagbo en 2000, ont accentué les antagonismes autour de la nationalité. En fait, l’opération d’identifi cation des populations initiée en 1994 sous le régime Bédié a vu l’introduction de l’attestation administrative d’identité. Cette pièce donnait la possibilité aux Ivoiriens ne possédant aucune pièce d’identité, de prendre part aux élections de 1995. Mais, le gouvernement du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) est soupçonné par les partis d’opposition de l’époque, notamment le Front Républicain (Front Populaire Ivoirien-Rassemblement des Républicains) de vouloir manipuler le corps électoral. Après la transition militaire de 2000, les initiateurs d’une nouvelle loi sur l’immigration changent, mais, la logique, de même que la critique restent les mêmes. La loi 2002-03 du 03 janvier 2002 relative à l’identifi cation des personnes et au séjour des étrangers votée par l’Assemblée Nationale est, elle aussi, l’objet de critiques de la part des partis d’opposition, surtout du RDR, et de certaines Organisations Non Gouvernementales qui gravitent autour de ce parti politique. Or, d’après les autorités, les opérations d’identifi cation visent «simplement» à «nettoyer et à crédibiliser le système de l’état civil par l’informatisation10». Mais, pour les opposants, «une telle opération

10 - Fraternité-Matin du 11 septembre 2002.

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n’est pas exempte d’arrière-pensées politiques et elle viserait à priver de leurs droits d’électeur nombre d’ivoiriens». Ainsi, les partis d’opposition soupçonnent le FPI, parti au pouvoir, de vouloir exclure des pans entiers de la communauté nationale. En défi nitive, depuis 1994, les militants du RDR accusent les régimes successifs de Bédié, à Gbagbo, en passant par le régime d’exception du général Guéi de vouloir faire d’eux des citoyens de seconde zone, et de les exclure du jeu politique par le biais des différentes opérations d’identifi cation des personnes.

En somme, on constate que la politique publique de l’étranger, voire la question identitaire sous-jacente en Côte d’Ivoire depuis 1990, se nourrit de préjugés, d’arrière-pensées, et de polémiques généralisées liées à l’instauration de la carte de séjour, aux conditions d’acquisition de la carte nationale d’identité, et de naturalisation. Toutes ces intrigues autour de la nationalité constituent l’une des raisons supposées ou réelles de la guerre déclenchée en 2002 par une rébellion adossée à la partie septentrionale de la Côte d’Ivoire. C’est pourquoi un projet de modifi cation du code de la nationalité a été suggéré par l’accord de Linas- Marcoussis en janvier 2003.

LE «CITOYEN MARCOUSSIS», UN MORT-NÉ ?

L’accord de Linas-Marcoussis en 2003, en son point premier préconise : «à titre exceptionnel, dans le délai de six mois un projet de loi de naturalisation visant à régler de façon simple et accessible des situations aujourd’hui bloquées et renvoyées au droit commun (notamment cas des anciens bénéfi ciaires des articles 17 à 23 de la loi 61-415 abrogés par la loi 72-852, et des personnes résidant en Côte d’Ivoire avant le 7 août 1960 et n’ayant pas exercé leur droit d’option dans les délais prescrits), et à compléter le texte existant par l’intégration à l’article 12 nouveau des hommes étrangers mariés à des Ivoiriennes». Cependant, ce projet montre bien par sa logique d’inclusion que toutes les parties évoluant dans le champ politique ivoirien construisent leurs stratégies de pouvoir autour de la question identitaire. La stratégie, dans la perspective de Bourdieu (1987), s’inscrit dans le jeu politique en permettant à chaque joueur d’agir dans le sens du jeu. D’après lui, cela suppose donc «une invention permanente indispensable pour s’adapter à des situations indéfi niment variées». Dans le cas ivoirien, les stratégies politiques ont laissé voir le paysage politique muer parfois au gré des alliances et ruptures entre principaux partis ou à l’occasion de processus illégaux de régulation politique tels que les coups d’Etat de 1999 et 200211. De ce fait, les discours et actions dans la l’instrumentalisation de la ressource identitaire ont

11 - Après le coup d’Etat de 1999, on avait vu naître brièvement un «front patriotique» regroupant FPI, PDCI et PIT ; le dernier coup de 2002 a quant à lui donné naissance au G7 et au RHDP, une alliance de partis dits houphouétiste.

12 - Groupement de 4 partis politiques légaux (RDR, UDPCI (Union Démocratique pour la Paix en Côte d’Ivoire), MFA (Mouvement des Forces de l’Avenir) et PDCI-RDA) et de 3 mouvements rebelles (MPCI : Mouvement Patriotique de Côte d’Ivoire, MPIGO : Mouvement Patriotique Ivoirien pour le Grand Ouest et MJP : Mouvement pour le Justice et la Paix).

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varié. Dans cette optique, des forces politiques (partis légaux et groupements rebelles, appelés G7) 12 construisent leur stratégie de conquête du pouvoir sur la naturalisation d’un certain nombre d’étrangers à l’instar de ceux des villages cités plus haut. En fait, selon les initiateurs de la loi issue de Marcoussis conduits par le RDR, une catégorie d’immigrés a un véritable problème de citoyenneté. Mais, à l’analyse des conditions «d’ivoirisation» massive de non nationaux, l’on perçoit en perspective les enjeux électoraux de 2005. En réalité, derrière leurs intentions humanistes et / ou panafricanistes se trouvent des visées électoralistes que le parti au pouvoir se presse de dénoncer. C’est dans ce registre que s’inscrivent les empoignades autour de la nouvelle loi sur la nationalité version Marcoussis. Selon le FPI, parti au pouvoir, «il apparaît clairement que l’objectif caché de la loi est la modifi cation à plus ou moins long terme du corps électoral ivoirien. C’est ce qui justifi e la levée immédiate des incapacités13 des étrangers à naturaliser» (Notre Voie n°1836). Cette modifi cation est d’autant plus importante qu’elle concerne selon l’Institut National de la Statistique, 2 866 414 personnes, une catégorie précise et limitée d’étrangers qui n’ont pas profi té pendant douze années probatoires de la loi 61-415 qui a été abrogée par la loi n° 72-852 de 1972. Prenant en compte ces statistiques, pour le FPI, en voulant régler les problèmes de certains étrangers, le RDR et les mouvements de la rébellion veulent s’offrir un «bétail électoral» dans la perspective des présidentielles de 2005. A ce propos, opposition et parti au pouvoir se rejoignent sur les logiques de manipulation du corps électoral comme stratégie de pouvoir. En effet, tout en réfutant les critiques du FPI, le RDR s’attelle à relativiser, non le principe d’une capitalisation des voix des «nouveaux ivoiriens», mais les chiffres. Relativisant les critiques, pour la ministre de la justice – par ailleurs secrétaire générale de ce parti - cette modifi cation ne concerne «que seulement 882 790 personnes…et celles qui pourront voter en 2005 seraient à peine au dessus de 300 000» (Fraternité-Matin). Or, il s’agit là de 300 000 voix potentielles ou acquises, car pour le RDR, «le FPI, à travers ses députés, veut écarter 0,8%

des électeurs» (Le Patriote du 14 juillet 2004). Cette interprétation des réticences des députés du FPI à voter la nouvelle loi montre bien que les entrepreneurs politiques du RDR entendent tirer un profi t de leur politique d’inclusion. Ainsi, le constat est que depuis 1990, en Côte d’Ivoire, les révisions constitutionnelles, tout comme les politiques d’identifi cation visent à éliminer ou à favoriser un candidat ou une partie de la population électorale.

13 - Les «nouveaux ivoiriens» ne sont pas soumis à des délais probatoires pour exercer les droits civiques et politiques.

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CONCLUSION

Les partis politiques ivoiriens sont fortement à base ethno-régionaliste, ce qui fait que toute politique d’immigration passe pour être un moyen d’inclusion ou d’exclusion d’une population d’électeurs, certes, mais surtout d’une communauté, d’une ethnie. Comme solution, dans leur revendication contre l’exclusion et la xénophobie, les rebelles ivoiriens avaient cru devoir extraire la Côte d’Ivoire d’un processus irréversible de modernisation et de développement qui passe nécessairement par le recensement et l’identifi cation de ses populations. Ils avaient opté pour l’assimilation totale des étrangers. Ainsi les principaux discours en septembre 2002 étaient : «tout le monde doit être ivoirien», «il faut qu’on retourne à la Côte d’Ivoire d’Houphouët, où il n’ y avait pas de différence entre étrangers et ivoiriens» «il faut supprimer les cartes de séjours», «il faut supprimer l’ivoirité»…etc. Mais, un tel conservatisme houphouétiste se dissipe à la lecture de la nouvelle loi sur l’identifi cation des personnes et de la logique constitutive de la rébellion qui repose essentiellement sur la «charte du nord14», très souvent ignorée par les analystes de la crise ivoirienne. La charte du Nord, tout comme l’«ivoirité » véhicule le tribalisme qui comme le souligne Skinner (1968) n’est rien d’autre que l’identité utilisée par des groupes en compétition pour le pouvoir dans l’Afrique contemporaine. Selon Cohen (1974), cette ethnicité constitue une forme de réaction à la modernité qui conduit les individus à s’organiser selon des lignes ethniques pour soutenir la compétition politique. Ainsi, la rébellion ivoirienne, qui avait affi ché sa volonté de rétablir les équilibres dans la gestion du corps social ne s’éloigne pas de la conception ethno-communautaire du pouvoir de régulation qu’ont affi ché les autres régimes. Elle ruine ainsi, comme le souligne Zoro l’espoir de « bâtir une Côte d’Ivoire une et indivisible qui tienne compte des mouvements historiques, des fl ux migratoires et où chacun se sent chez soi dans n’importe quelle partie du territoire ». Or, si l’objectif est de faire en sorte que la loi refl ète le sentiment d’appartenance à la nationalité ivoirienne de personnes étrangères, alors cette loi doit induire un respect de la procédure de légitimation ou de légalisation de ce sentiment.

14 - Une charte du Nord a été lancée dès la décennie 1990. Par son discours rassembleur des fi ls du nord, elle a formalisé l’endoctrinement systématique par la victimisation et l’érection d’un complexe de persécuté et d’une conscience exclusive de « gens du nord ». Une nouvelle Charte actualisée a circulée en 2002. Elle vient, tout comme celle de 1991, lancer un appel aux responsables, cadres, militaires, ouvriers, commerçants, paysans pour un grand Nord uni, fort, crédible disant en choeur : ça suffi t ! (frat-mat du 21 octobre 2003). A la lecture des principes fondamentaux et des objectifs de cette Charte, la rébellion ivoirienne peut être considérée comme le produit de la formalisation militaire de l’idéologie contenue dans la charte. Elle est la traduction de la conception ethno-régionaliste du pouvoir de régulation, en réponse semble t-il à l’ivoirité.

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