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Vers un aménagement de notre dette viagère de guerre

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J OURNAL DE LA SOCIÉTÉ STATISTIQUE DE P ARIS

J OSEPH G IRARD

Vers un aménagement de notre dette viagère de guerre

Journal de la société statistique de Paris, tome 64 (1923), p. 5-9

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VERS UN AMÉNAGEMENT

DE NOTRE DETTE VIAGÈRE DE GUERRE

C'est exprimer une vérité banale, presque un lieu commun, que rappeler que les solutions de la plupart des grandes difficultés actuellement posées devant le pays sont conditionnées par celle du problème financier. A la base de toute prévision budgétaire et, en quelque sorte, comme préface à tout débat d'ordre économique, se trouve la question de savoir vers quelle formule les Pouvoirs publics tendront à s'orienter en ce qui concerne le statut de notre circulation fiduciaire ou, plus exactement, quelle formule les dures circonstances que nous traversons leur permettront de choisir : infla- tion large ou limitée, franche ou déguisée, efforts continus pour assurer une déflation lente — ou bien encore statûlisation, réalisée après que toutes les précautions nécessaires auront été prises...

C'est bien là, en effet, le problème de premier plan et quelques années encore s'écouleront sans doute avant qu'il ait pu être résolu, au mieux, espé- rons-le, des intérêts de la nation. Mais il n'y a pas de raison pour qu'on abandonne jusque-là toute recherche de réformes, de second ordre peut- être, mais importantes encore cependant, susceptibles de réalisation, immé- diate; on doit attendre beaucoup de ces retouches, même de portée limitée, dont les heureux effets peuvent, en s'accumulant, soulager nos charges.

Au nombre de ces améliorations, nous voulons signaler aujourd'hui celle à laquelle tend l'intéressante suggestion apportée par M. Joseph VELAY dans un récent article du Journal des Economistes H , suggestion qui vise à un meilleur aménagement de notre dette viagère de guerre.

Parmi les éléments nouveaux qui sont venus si profondément différencier nos budgets des.budgets d'avant-guerre, se trouve évidemment le formidable accroissement de la dette viagère de la France, consécutif aux événements récents : formidable assurément, même si, laissant de côté toutes les réper- cussions indirectes de la guerre, relèvements de traitements, créations d'allo- cations temporaires de cherté de vie et de majorations, de pensions, on ne retient que la charge des pensions accordées aux victimes directes de la guerre et, notamment, des pensions militaires d'invalidité et des pensioris d'avant droit des 'militaires morts pour la Franice,- instituées- par la loi du 3i mars 1919.

Qu'il suffise de rappeler que l'on se trouve ici en présence d'un effectif d'invalides qui est de Tordre de grandeur de 1.800.000 et des ayants droit (1) Journal des Économistes du i5 avriLi92a : ia Considérations nouvelles sur les pensions de guerre.

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d'un nombre de morts qui atteint i.385.ooo : les trois milliards et demi qui représentent la charge annuelle d'arrérages, au moins pour les premières années, constituent bien l'un des « postes » les plus lourds de notre budget actuel. On observera même qu'ils dépassent à eux seuls et de beaucoup la moitié du budget total des dépenses de la France dans les derniers budgets d'avant-guerre. Quelque écrasante que fût la charge qu'ils représentent, ils constituaient une dette sacrée que le Parlement ne pouvait se refuser à avaliser, alors même que c'est l'Allemagne qm', aux termes du traité de Versailles, devait en supporter le poids. On connaît la déclaration de prin- cipe par laquelle débute la loi précitée :

...La République, reconnaissante envers ceux qui ont assuré le salut de la pajrîe, proclame... le droit à la réparation due aux militaires des armées de terre et de mer affectés d'infirmités résultant de la guerre, aux veuves, aux orphelins et aux ascendants, de ceux qui sont morts pour la France.

Le droit est acquis; il est certain; il est incontestable.

Dans la détermination de son assiette, on ne s'est pas préoccupé — e t l'on ne pouvait pas se préoccuper — de savoir si les bénéficiaires dispo- saient ou non de ressources personnelles, s'ils étaient ou non dans une situation de fortune florissante : la dette a été déterminée en fonction seu- lement de la situation que le militaire blessé ou disparu occupait à l'armée...

Est-ce à dire qu'il n'y ait pas d'amélioration à apporter aux liquidations ainsi effectuées d'après des règles générales — donc rigides — qui ne tien- nent aucun compte des besoins personnels de chaque pensionné? Devant ce solennel et grandiose engagement formulé au nom de la collectivité, on se surprend à se demander si une adaptation plus souple aux situations particulières ne présenterait pas de grands avantages et à rechercher s'il a 'existe pas de moyen de la réaliser, accessible, voire même favorable pour les Finances publiques; il va de soi qu'on ne saurait en envisager une que sous le bénéfice de l'adhésion facultative, librement consentie, de chacun des bénéficiaires intéressés.

Voici les réflexions qu'a développées à ce sujet M. VELAY et la solution qu'elles lui ont suggérée :

Une veuve de soldat, dit-il, pensionnée de guerre, est âgée de ih à 26 ans. Sa vie durant, elle recevra la même pension de 800 francs, destinée, en principe, à com- penser la privation de l'appui matériel que le mari était censé apporter. Aucune corrélation n'a été recherchée et n'existe entre cette allocation de 800 francs et les besoins de la pensionnée. Cependant, celle ci) considérant sa situation que seule elle commît, estime que sa modeste pension ne lui est actuellement d'aucune uti- lité, tandis qu'une pension plus élevée, plus conforme aux nécessités de la vie, lui sera indispensable plus tard, à 55 ans par exemple. Comme une pension immédiate de 800 francs à 25 ans et une pension différée de 6.760 francs à 55 ans ont une*

même valeur, l'intéressée pourrait, sans que ses droits soient diminués et sans que In dette de l'Eiat soit augmentée, bénéficier dans l'avenir d'une pension de 6.,760 (rancs à partir de 55 ans au lieu de celle de 800 francs qui lui est servie dès main- tenant.

L'auteur cite d'autres exemples où la transformation totale ou partielle, d'une pension à jouissance immédiate en une pension différée, ou même

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en un capital différé équivalents peut présenter des avantages considérables pour Jes intéressés, et il ajoute :

La transformation de tout ou partie d'une pension immédiate en une pension différée pourra donc apparaître, dans un grand nombre de cas, comme un puissant moyen d'adaptation de l'aide trop rigide et trop absolue de l'Etat aux multiples Situations sociales des bénéficiaires...

Or, quels sont les bénéficiaires? Des êtres jeunes en général et répartis entre toutes les catégories de l'échelle sociale. Quel genre d'aide offre l'Etat? Uniforme ment la pension viagère immédiatet c'est-à dire une modalité qui ne s'applique ou ne s'impose — dans des circonstances normales, hâtons nous d'ajouter — que lorsqu'il s'agit de garantir au déclin de la vie les moyens nécessaires à l'existence...

Le législateur ne pouvait... que se placer en face d'une situation moyenne, la plus générale, s'inspirer de la présomption la plus admissible, celle de survenance d'un dommage immédiat et donner, par conséquent, à l'aide nationale, la forme de la pension forfaitaire et immédiate.

M. VELAY, soucieux d'assurer aux dispositions législatives laufr maxi- m u m d'efficacité, demande alors la coopération du pensionné; il souhaite que celui-ci soit appelé à indiquer lui-même la forme de réparation qu'il estime la plus opportune, non point certes dans le sens d'une anticipation qui serait manifestement contraire aux intentions du législateur, mais au contraire dans le sens d'un différé qui, en s'adaptant aux besoins de l'inté- ressé, lui vaudra par surcroît le large et légitime développement corres- pondant des ressources que la nation met à sa disposition.

Quiconque a quelque peu la pratique des opérations d'assurance en général et, plus particulièrement, de celles qu'effectue notre grande Caisse d'Etat, la Caisse nationale des retraites pour la vieillesse, sait de quel méca- nisme à la fois subtil et simple on dispose pour réaliser ce desideratum, mécanisme qui, d'une part, permet l'ajournement de jouissance des rentes, avec accroissement correspondant du montant de ces dernières et, d'autre part, autorise leur « désajournement », c'est-à-dire l'anticipation du point de départ de leur service, quand la durée du différé, initialement indiquée, se trouve avoir été trop forte.

Que cette «ingénieuse combinaison soit favorable aux pensionnaires, c'est ce que nul ne saurait contester.

Il reste à savoir ce qu'elle vaut pour l'Etat, quels inconvénients ou quels avantages, quelle répercussion en «im «mot, elle offre pour les Finances publiques.

De l'exposé sommaire qui précède, jl résulte assez clairement que M. Velay s'appuie sur ce qu'en langage d'assurance on appelle, d'un terme qui n'a rien d'obscur, même pour lesiplus profanes, l'égalité dès « valeurs actuelles » des deux pensions considérées, pension immédiate et pension différée : cela revient à dire que la pension différée est réglée par rapport à la pension immédiate de telle manière que le « marchand d'assurances », qu'il soit Compagnie d'assuranice ou Caisse d'Etat, demandera 11? même prix pour payer l'une ou payer l'autre, l'accroissement de la pension différée compensant simplement les chances de mort avant l'entrée en jouissance et la diminu tion éventuelle de la durée de son service.

Si l'on prend comme base, comme le fait avec infiniment de raison M. Ve-

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lay, les tarifs actuels de la Caisse nationale des retraites pour la vieillesse, tarifs qui siont établis^au taux de 5 °/n, on voit t[ue tous les calculs reviennent à chercher, pour une pension détermiinée, à jouissamae immédiate, 4e capi- tal-valeur actuelle correspondante, au taux de 5 %, puis à fixer le montant de la rente correspondante, différée dans les conditions choisies p a r le titulaire.

Ainsi apparaît-il immédiatement que si, sur la masse des crédirentiers appelés à toucher actuellement l'annuité de 3 milliards ^ de francs dont il a été question ci-dessus, une fraction appréciable opte pour le différé, les budgets immédiats bénéficieront d'un allégement considérable, et c'est là un premier résultat dont l'importance apparaît tout aussitôt. Il est vrai que les budgets futurs, puisque les pensions différées doivent présenter des quotités plus élevées, se trouwrfHit, malgré la diminution du «nombre des parties pre- nantes, chargés d'annuités plus fortes. Mais, était-il raisonnable de prétendre que des charges immédiates pussent, être remplacées sans majoration p a r des charges différées? Compte tenu de la productivité des capitaux (surtout au taux actuel!), ce serait um moyen trop commode de soulager les finances pu- bliques.

L'opération est-elle alors simplement indifférente pour ces dernières? En d'autres termes, le bénéfice que l'on retire du différé par le soulagement des budgets actuels est-il mathématiquement, actuariellement, l'équivalent de l'aggravation des charges futures? Eh bien, non, et la combinaison reste avantageuse pour l'Etat. Si, en effet, et par hypothèse, il y a équivalence rigoureuse entre les valeurs actuelles des pensions immédiates liquidées et des pensions différées en lesquelles on veut les transformer, cela s'entend de valeurs actuelles calculées au taux de base de 5 %, ce qui veut dire que si l'Etat devait effectuer l'emprunt au taux de 5«% du capital représentant la valeur actuelle des pensions différées, la somme à emprunter serait la même que pour représenter la valeur actuelle des pensions immédiates. Or, on sait que, dans l'état actuel des choses, l'Etat ne. trouve plus d'emprunt à réaliser sur le marché à un taux aussi bas. De fait, c'est un taux plus élevé, assez voisin de 7 %, qui caractérise les opérations actuelles d'emprunt...; dès lors, l'équilibre entre les valeurs actuelles des pensions immédiates et des pensions différées déterminées comme il a été dit pins haut se trouve rompu et le coût de ces dernières se trouve allégé par rapport à celui des premières : d'où, pour la collectivité, um. bénéfice certain. Et ce bénéfice peut être appréciable même ai une faible partie seulement de l'effectif des intéressés opte pour l'ajournement, même si le différé ne joue que pour une petite fraction dtè l'annuité de 3 imilliiards et demi.

Fort avantageuse pour les pensionnaires, facilement réalisable et même- favorable aux intérêts de l'Etat, telle apparaît donc la combinaison qu'a ima- ginée M. Velay. Faut-il ajouter qu'elle offre en outre une. véritable valeur morale, en ce qu'elle tend à initier la masse à l'idée de productivité de l'épar- gne et, p a r suite, à la mieux orienter vers la prévoyance sociale?

Nous permettrons-nous de compléter son intéressante monographie sur un point de détail qu'il a volontairement laissé dans l'ombre?

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Si la solution suggérée avait l'agrément du ministère des Finanees et du Parlement, comment, pratiquement, réaliserait-on les opérations néces- saires? A qui en confierait-on l'exécution?

La première idée qui vient à l'esprit — et elle n'est certes pas mauvaise

— consisterait à confier l'organisation des transformations récessaires au ministère des Pensions.

Mais n'oublions pas que nous disposons en France de la grande Caisse d'Etat, dont il était question tout à l'heure, qu'une longue expérience a rompue à la manœuvre de ces opérations strictement individuelles i»u carac- tère desquelles participeraient les transformations envisagées polir les pen- sionnaires de guerre. Qui donc, mieux que la Caisse nationale des retraites, pour la vieillesse, pourrait offrir à chacune des parties prenantes le choix des combinaisons variées que permettraient des tarifs" spécialement établis sans doute à cet effet, mais en somme assez analogues à ses propres tarifs actuels ?

On a naguère, non sans motif sérieux, fait la critique des méthodes admi- nistratives de la Caisse. Elle a victorieusement montré depuis quelques années qu'elle était capable de s'adapter avec souplesse aux combinaisons d'assurances les plus modernes : nous saluerions avec plaisir la nouvelle étape de sa législation spéciale qui l'armerait pour; répondre aux besoins créés par l'acceptation de la combinaison si intelligente et si neuve que M. Velay a imaginée.

Joseph GIRARD.

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