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Submitted on 1 Jan 1956
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Les pressions de radiation et leur aspect tensoriel
L. Brillouin
To cite this version:
L. Brillouin. Les pressions de radiation et leur aspect tensoriel. J. Phys. Radium, 1956, 17 (5),
pp.379-383. �10.1051/jphysrad:01956001705037900�. �jpa-00235388�
LES PRESSIONS DE RADIATION ET LEUR ASPECT TENSORIEL
Par L. BRILLOUIN,
National Academy of Sciences (Washington), Columbia University (New-York).
Sommaire.
2014Lorsque des ondes élastiques sont émises, absorbées ou réfléchies par des corps, ceux-ci sont soumis à des efforts dus aux tensions de radiation. Dans le cas d’une onde plane non perturbée, l’évaluation du tenseur des efforts moyens permet de connaître les efforts agissant sur
un obstacle.
Le tenseur des efforts moyens est d’abord évalué dans le cas d’un milieu non dispersif (vitesse
de phase indépendante de la fréquence), puis dans le cas d’un milieu dispersif.
Des exemples d’application sont étudiés et en particulier la notion de section efficace d’un obstacle sphérique se trouve précisée.
Abstract.
2014Emission, absorption and reflection of elastic waves result in forces known as radiation pressure. For an unperturbed plane wave it is possible to compute the average tensor of stresses, from which the force on any obstacle can be obtained.
This fundamental tensor is discussed first for a non-dispersive medium and second for a disper-
sive medium. Some examples and applications are given. The problem of scattering by a sphere is of special interest, and its discussion leads to a correct definition of the scattering cross-
section.
PHYSIQUE 17, 1956,
1. Introduction.
-Lord Rayleigh découvrit le fait que les ondes élastiques exercent des efforts
sur les surfaces qui émettent, absorbent ou réflé-
chissent ces radiations. Il appela ces efforts les
« pressions de radiation » et ce terme prête à la critique. On doit réserver le mot « pression o pour
le cas où les efforts exercés sur une surface sont normaux et indépendants de la direction de la sur-
face. Dans un liquide au repos s’exerce une pres- sion. Dans un solide déformé nous avons des ten-
sions, obliques sur les surfaces et dépendant de leur
orientation.
Les efforts exercés par une radiation dépendent
de l’orientation de la surface par rapport à l’onde
et ne sont pas nécessairement normaux. Ce sont donc des tensions de radiation et non des pressions.
Ces problèmes furent discutés très en détail par L. Brillouin dans une série d’articles [1] (1925) et
résumés dans un livre sur « Les Tenseurs » (Masson, Paris, 1938 et Dover, New-York, 1946) pp. 284-304.
2. Les différentes étapes du problème.
-Un problème typique est représenté sur la figure 1 :
FIG. 1.
une onde incidente plane 1 tombe sur un obstacle 0.
Des ondes D sont diffractées en tous sens par
l’objet 0, et une force F s’exerce sur cet objet. On peut aussi observer un couple résultant, mais cet
effet nécessiterait une théorie plus détaillée que celle donnant la « pression de radiation » F.
Dans ce problème, il est commode de distinguer
trois étapes :
I.
-Problèmes de diffraction, conduisant au
calcul de l’intensité des ondes diffractées D dans toutes les directions.
II.
-Le calcul des « tensions de radiation » dans une onde plane non perturbée. Ce calcul
fournit tout le tenseur des efforts moyens s’exer- çant au travers du milieu qui progage l’onde plane.
III.
-Calcul de la force résultante F sur l’obs- tacle. Connaissant les tensions de radiation dans l’onde incidente et dans les ondes diffractées, il
faut faire la somme de tous les efforts transmis par
toutes ces ondes, et l’on obtient la force résul- tante F sur l’objet placé dans l’onde.
Cette manière d’organiser les calculs présente l’avantage de distinguer nettement la partie II, propriété générale des ondes planes, et les pro-
blèmes 1 et III où interviennent les propriétés et la
forme de l’obstacle interposé dans l’onde.
-
Nous porterons spécialement notre ’ attention
sur le problème II et nous indiquerons à la fin de
cet exposé quelques applications pratiques à des
cas concrets.
La subdivision I, II, III n’a pas été toujours observée, et certains auteurs traitent le problème global en une ‘seule opération, ce qui les oblige à
tout reprendre du commencement lorsque le type d’obstacle est changé.
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphysrad:01956001705037900
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3. Définition du « tenseur des efiorts o et des tensions.
-Dans un milieu élastique déformé, traçons une surface plane dont l’aire est S et dont
F1G. 2.
~
la normale est représentée par le vecteur n. Nous
utilisons des coordonnées rectangulaires x1x2x3 et
~
le vecteur unité n a pour composantes nln2n3.
La partie du milieu située à droite (du côté de la
normale positive) exerce, au travers de S, une
~
force Je sur la portion gauche
Cette force est proportionnelle à l’aire S, mais en général elle n’est pas normale à la surface S. Dans
ces conditions T est un tenseur à neuf composantes
et la formule condensée (1) s’explicite ainsi :
Dans un très grand nombre de problèmes [2],
le tenseur T est symétrique
de sorte qu’il ne reste, en réalité, que 6 composantes indépendantes.
Lorsque le système des efforts se réduit à une pression comme c’est le cas pour un fluide isotrope homogène, le tenseur des efforts se simplifie et prend l’aspect :
La force F est alors toujours dans la direction de la normale à la surface S, car les formules (3)
se réduisent à
c’ f’Rt-n -di 1’0
C’est seulement dans un tel cas qu’on a le droit
de parler de pression. Il faut que le tenseur T soit
diagonal et que ses trois composantes Soient égales.
Si ces conditions ne sont pas remplies, on a un exemple de tensions tensorielles et non pas de
pression.
14. Le tenseur moyen des efforts dans une onde
plane.
-Milieu non dispersif.
--Considérons maintenant le problème II du paragraphe 2. Une
onde plane se propage dans la direction x 1 avec
une vitesse de phase W et une densité moyenne
d’énergie E. Le milieu dans lequel se propage l’onde est supposé isotrope, homogène et non
absorbant. Nous supposons tout d’abord un milieu
non dispersif, de sorte que la vitesse W ne dépende
pas de la fréquence v. Le cas d’un milieu dispersif
sera discuté plus loin.
L’onde en propagation libre crée un système de
tensions moyennes représentées par le tenseur
où v représente le volume spécifique du corps maté- riel au travers duquel se propage l’onde, et
v dW d log W dé end de la variation de
‘
v dW - -d log W W dv d log v dépend de la variation de
vitesse W provoquée par un changement dans le
volume spécifique v. La valeur de cette formule,
c’est qu’elle s’applique à une grande variété de
cas : ondes élastiques dans les solides ou liquides,
ondes électromagnétiques dans les solides ou
liquides, etc... Le sens physique de ces expressions
est le suivant : l’onde provoque un changement
local de pression moyenne
puisque ce terme se retrouve en effet aux trois places du tenseur ci-dessus. La première posi-
tion (11) du tenseur contient un terme supplémen-
taire
-E que l’on peut expliquer en disant que l’onde transporte une densité de quantité de mou-
E
vement, E/W. Lorsque l’onde est émise, la surface
émettrice subit un recul E et, lorsque l’onde est absorbée, elle exerce une poussée E sur la surface absorbante ; ces efforts liés à l’onde s’ajoutent à l’augmentation Ap de pression moyenne dans toute la région traversée par l’onde.
Des résultats tout à fait semblables ont été
retrouvés récemment par Borgnis [3] dans une
série de mémoires. Une discussion très méticuleuse de E. J. Post [4] confirme aussi ces formules.
Les méthodes de calcul employées pour trouver
ces résultats sont très variées. Les unes consistent à partir des équations de propagation des ondes, en gardant les termes non linéaires. On fait ensuite les moyennes des composantes du tenseur des efforts.
Pour les ondes électromagnétiques, on peut faire directement les moyennes des tensions de Maxwell.
Un raisonnement général, applicable à tous les types d’onde, peut être basé sur l’emploi de la for-
mule de Boltzmann-Ehrenfest (Les tenseurs, p. 300). La concordance de ces calculs très diffé- rents confirme la généralité des résultats.
5. Milieu dispersif.
-Discutons maintenant le
problème pour un milieu dispersif. Il faut distin- guer alors entre vitesse de phase W et vitesse du
groupe U
où v est la fréquence et a l’inverse de la longueur
d’onde. Ces deux vitesses W et U sont égales s’il n’y a pas dispersion, mais autrement W dépend de
la fréquence v et U aussi
( 111 1
Comment tenir compte de ces conditions dans le calcul de la tension de radiation ? Le calcul direct serait très compliqué, mais la formule de Boltz- mann-Ehrenfest donne une réponse rapide et très générale, valable pour tous les types d’onde. Le raisonnement donné dans mon livre Les Tenseurs
(p. 300) était valable pour un milieu non dispersif.
Voyons comment le généraliser pour le milieu
dispersif. Le point de départ est la formule de
Boltzmann-Ehrenfest donnant le travail dC obtenu quand on modifie un paramètre 1,, du réser-
voir contenant les ondes :
’où V est le volume du réservoir et E la densité moyenne d’énergie pour l’onde considérée. Consi- dérons un réservoir parallélépipédique de côtés ll, l2 et l3
Une onde stationnaire dans ce volume est carac-
térisée par trois entiers mi, m2 et’ m3. La longueur
d’onde À et le nombre d’ondes a sont définis par
qui dépend seulement de 111 l2, l3. ( 1J)
et la fréquence v est donnée par
Nous considérons maintenant une variation du
de la longueur 11 tandis que les côtés l2 et l3 restent
constants.
La quantité a dépend directement de l1 et
où 0 est l’angle d’incidence sur le piston déplacé de d11.
La vitesse de phase W dépend de deux variables,
a et v où v est le volume spécifique (1)
’
car du v est égal àdl, il Dans la formule (12) nous
*
devons calculer
en utilisant la formule (11). Enfin, avec l’aide de (14)
D’autre part le travail dV est représenté par p d v et la pression p sur le piston vaut
Changeons le signe pour écrire une tension au
lieu d’une pression. Notre tenseur de radiation (8)
est ainsi modifié
La seule modification porte sur le premier terme
où apparaît un facteur U/W qui se réduit à l’unité
pour un milieu non dispersif. Ce premier terme peut, nous l’avons vu, s’interpréter comme résul-
tant d’un transport de quantité de mouvement : la densité d’énergie E se propage avec la vitesse U,
de sorte que l’énergie reçue par seconde sur un
(1) Il résulte de cette formule que la dérivée 2013- est
prise à a constant (x constant v varié).
382
écran unité est EU. Cette énergie EU transporte
une quantité de mouvement E§ ce qui donne une densité E de quantité de mouvement dans l’onde.
W
Cette dernière expression coïncide avec la valeur
calculée pour un milieu non dispersif. Les milieux
absorbants soulèvent de sérieuses difficultés.
6. Exemples.
-Des exemples variés se trouvent
dans mon livre des Tenseurs, p. 292 etc. et p. 302
FIG. 3.
et suivantes. Sur la figure 3 est représenté le cas
d’un faisceau 1 émis par une surface B et absorbé par une surface A. Soit S l’aire du faisceau d’ondes, comptée perpendiculairement à la direction de
propagation. L’excès de pression Ap de l’équa-
tion (9) joue le rôle d’un excès de pression interne
dans la région vibratoire et se transmet dans tout le liquide.’ Il en résulte une petite diminution de densité dans la zone parcourue par le faisceau. Les surfaces immergées B, A sont soumises des deux côtés à la pression Ap dont la résultante est nulle.
Les forces Fb, Fa agissant sur l’émetteur et
l’absorbeur sont uniquement dues au terme en
E U S dirigé soit en sens inverse soit dans le sens
W g
de propagation. Ces forces Fb, à peuvent être obliques sur les surfaces B, A comme indiqué sur
la figure 4.
-
FIG. 4.
Si un faisceau 1 est réfléchi sur une surface iinmergée M et réfléchi en R, les forces *Fi et Fr se composent en une résultante F. Soit S la surface du
miroir M, on a
FTG,
Reprenons un exemple similaire à celui de la
figure 3. Dans une cuve, un faisceau I est maintenu entre A et B (voir fig. 5). La pression interne à
provoque une diminution de densité du liquide
dans la région I, mais la pression extérieure est maintenue constante dans la région II où il n’y a
pas de vibration ; une petite quantité de liquide Av
sera rejetée hors de la région 1 et pénétrera dans II.
La même quantité Av s’observera par un dépla-
cement du ménisque de a en b dans un tube hori-
zontal. Il est évident que Av ne dépend que de Ap
et du volume VI de la région I, mais est indépen-
dant du volume VII de la région II. Cet exemple
résulte d’une discussion détaillée avec R. Lucas durant le congrès de Marseille.
Ajoutons encore un exemple qui permettra de
contrôler les formules pour un milieu dispersif
non absorbant. Considérons un guide d’ondes
constitué par deux plans réfléchissants paral-
lèles P 1P 2 entre lesquels se trouve un milieu non dispersif. Les ondes guidées peuvent être consi- dérées comme produites par les interférences entre deux faisceaux plans faisant des angles + 0 avec
l’axe du système [5] guidant.
FIU. 6.
L’onde guidée se propage suivant l’axe du guide
avec une vitesse de phase W et une vitesse de groupe U
où Wo est la vitesse d’une onde plane libre.
Si chacune des ondes planes constituantes a une
densité d’énergie e, l’onde guidée a une densité
d’énergie
-- , - -.Cherchons l’effort produit par ces radiations sur un miroir terminal M perpendiculaire à l’axe du guide.
I.
-Considérons les deux ondes planes consti- tuantes, à l’inclinaison 6, nous obtenons une pries- sion normale au miroir
II.
-Considérons l’onde guidée globale, nous
avons une onde dont la vitesse W dépend de la fréquence. Le système est dispersif. Nous devons utiliser le tenseur (16) qui donne
Les deux expressions sont identiques, si l’on
tient compte des relations (18), (19).
7. Discussion sommaire d’un problème complet.
: Le programme d’une discussion complète a
été esquissé au paragraphe 2 et comporte trois étapes I, II, III. Les paragraphes 3 à 6 se rap-
portent à l’étape II. Voyons sur un cas concret
comment conduire une discussion complète.
Le problème de diffraction par une sphère
réfléchissante a été complètement traité d’une
manière rigoureuse [6].
Les formules se simplifient lorsque le rayon a de
la sphère est très grand devant la longueur d’onde
et l’on obtient alors la situation représentée sur la figure 7. Une onde plane incidente tombe sur la
Fic.7.
sphère. Les approximations successives sont : A onde plane non perturbée,
B perturbation.
La perturbation, dans le cas (22) se divise en
deux termes, assez nettement séparés :
B.R les ondes réfléchies par la sphère dans
toutes les directions,
B.O un champ négatif compensant le champ
’
positif de l’onde non perturbée dans la région de l’ombre.
Ce dernier champ ne forme pas une onde exac- tement plane, mais se diffuse progressivement. Il apparaît sur les bords de l’ombre, des franges qui
finissent par se rejoindre à une distance
L’énergie comprise dans le terme B.R est égale
à l’énergie tombant sur . la section droite de la sphère, na 2. Les ondes B.R sont également distri-
buées dans toutes les directions. Le système B.O transporte aussi une énergie correspondant à une
section droite na2, mais ces ondes ne sont que très peu déviées et ne peuvent être distinguées de
l’onde plane incidente qu’à des distances supé-
rieures à D.
Au total, la section de diffusion de la sphère est
2na2 mais ne peut s’observer qu’à très grande dis-
tance. Ce résultat curieux était longtemps resté inexplicable. Les expériences le justifient entiè-
rement. Cette description épuise le problème I.
Passons au problème III et évaluons la force exercée, par les radiations sur la sphère. Les
ondes B.R diffusées en tous sens exercent une
force totale nulle. L’onde incidente ainsi dispersée
donne une force correspondant à la section na2.
Les ondes B.O très peu déviées donnent une force
qui compense la force exercée par l’onde incidente
,correspondante. Leur effet global est nul.
Au total, la force correspond à une section
7ta2 seulement. Ce résultat autrefois calculé direc- tement par P. Debye n’est donc pas en contra- diction avec les 2na 2 de section diffusante.
"