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Hyperdensité osseuse : étiologies et conduite à tenir

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Academic year: 2022

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MISE AU POINT

18 | La Lettre du Rhumatologue • N° 431 - avril 2017

Hyperdensité osseuse :

étiologies et conduite à tenir

High bone mineral density: a review of causes and management

J. Paccou*, B. Cortet*

* Université Lille 2, PMOI EA 4490, Lille ; service de rhumatologie, CHRU de Lille.

Une hyperdensité osseuse, ou ostéoconden- sation, peut être retrouvée sur des radio- graphies standard, mais la mesure de la densité minérale osseuse (DMO) par absorptio- métrie biphotonique à rayons X (DXA) est beau- coup plus précise, à la fois pour le diagnostic et pour la quantification de cette augmentation de la DMO. En pratique, il n’est pas rare de retrouver une hyperdensité osseuse lors de la réalisation d’une DMO. L’origine est le plus souvent artéfactuelle chez le sujet âgé (arthrose rachidienne en premier lieu), mais il ne faut pas méconnaître les causes locales ou généralisées (acquises ou génétiques) d’hyperdensité osseuse. Enfin, bien que la génétique ait permis d’identifier certaines maladies monogé- niques (mutations des gènes LRP4, LRP5 et SOST) responsables de ces hyperdensités osseuses (High Bone Mass pour les Anglo-Saxons) [1], un certain nombre d’entre elles restent inexpliquées.

Définition et prévalence de l’hyperdensité osseuse

Il n’existe pas de définition consensuelle de l’hyper- densité osseuse. En 2005, Michael Whyte (2) a proposé la définition suivante : Z-score supérieur à +2,5. Jusqu’alors, les cas cliniques et les séries de cas, qui correspondent à la majorité des publications sur ce sujet, ont utilisé des seuils différents pour définir l’hyperdensité osseuse. Récemment, une étude bri- tannique (3), regroupant 15 centres et 335 115 DMO, a évalué la prévalence de l’hyperdensité osseuse dans la population générale en proposant comme seuil diagnostique un T-score ou un Z-score supé- rieur ou égal à +4, que ce soit au rachis et/ou à la hanche. Les auteurs de cette étude ont retrouvé une prévalence de l’hyperdensité osseuse de 5/1 000 (3).

La moitié des cas d’hyperdensité osseuse était liée à une augmentation artéfactuelle de la DMO en raison d’une arthrose rachidienne.

Conduite à tenir devant la découverte d’une

hyperdensité osseuse par DXA

En dehors de situations évidentes, il convient dans un premier temps de rechercher par l’inter- rogatoire, l’examen clinique, les radiographies et des explorations biologiques simples les causes d’hyper densité osseuse acquise. Les étiologies sont multiples (encadré), mais l’arthrose rachidienne, les métastases osseuses d’un cancer du sein ou de la prostate sont des causes classiques, tout comme l’atteinte osseuse pagétique. Plus rarement, voire exceptionnellement, βl’origine en est une fluorose, une ostéodystrophie rénale (diffuse ou “en maillot de rugby”), une mastocytose ou une myélofibrose primitive. L’ostéocondensation diffuse liée à l’hépa- tite C est également exceptionnelle (encadré).

Principales causes d’hyperdensité osseuse d’origine génétique

Il existe différentes maladies génétiques entraînant une hyperdensité osseuse. Les principales sont les ostéopétroses et les maladies liées à une mutation de SOST ou des corécepteurs LRP4 et LRP5. Cependant, l’atteinte osseuse (quantitative et qualitative) de ces différentes maladies a un retentissement variable sur la résistance osseuse et le risque fracturaire. La distinction entre ces maladies peut se faire selon le risque fracturaire (augmenté ou diminué), mais aussi en fonction des perturbations du remodelage osseux : augmentation de la formation osseuse ou diminu- tion de la résorption osseuse (ostéopétrose) [4]. Il y a également certaines pathologies condensantes associées à une perturbation à la fois de la formation et de la résorption osseuses, comme la maladie de Camurati -Engelmann (mutations du gène TGFβ1) et la dysplasie hémato-diaphysaire de Ghosal.

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MISE AU POINT

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Points forts

» Il n’est pas rare de retrouver une densité minérale osseuse (DMO) augmentée (ou hyperdensité osseuse) lors de sa mesure par absorptiométrie biphotonique à rayons X.

» Il s’agit le plus souvent d’une arthrose rachidienne. Au-delà des causes artéfactuelles, une grande variété de pathologies sont associées à une hyperdensité osseuse, avec une classification habituellement selon le caractère local ou généralisé ou encore selon le caractère acquis ou constitutionnel.

» Des investigations cliniques et paracliniques peuvent être proposées après une interprétation attentive de la DMO par DXA.

» Certaines hyperdensités osseuses restent inexpliquées.

Mots-clés

Densité minérale osseuse

Hyperdensité osseuse Ostéopétrose

Sclérostine

Highlights

»A finding of high bone mineral density on routine DXA scanning is not infrequent.

»Most commonly, it reflects osteoarthritis of the spine.

»A range of underlying disor- ders affecting the skeleton may cause high BMD. Those disor- ders are classified as focally or generally increased BMD but also as acquired or inherited.

»An approach to guide appropriate investigations after careful interpretation of DXA scan findings within the context of the clinical history can be proposed.

»In some cases, high BMD remains unexplained.

Keywords

Bone mineral density High bone mass Osteopetrosis Sclerostin On citera également l’ostéomésopycnose, dont le

mécanisme génétique demeure inconnu, et l’ostéo- pathie striée-sclérose crânienne (OSSC) liée à l’X.

Diminution de la résorption osseuse

L’ostéopétrose correspond à un phénotype partagé par de nombreuses anomalies génétiques, ce qui permet d’expliquer les présentations cliniques très variables (troubles de la croissance, de l’audition, de la vision, de la dentition, compressions neuro- logiques, diminution de l’espérance de vie, etc.) [5].

Les ostéopétroses sont en général classées en fonc- tion de leur sévérité clinique. Lorsque le diagnostic est porté à l’âge adulte, il s’agit d’ostéopétroses de transmission autosomique dominante, historique- ment divisées en type 1 et type 2. Il s’est avéré que

l’ostéopétrose de type 1 était due à une mutation du gène LRP5, et n’était donc pas liée à une diminution de la résorption osseuse. Cette maladie n’est pas associée à une augmentation du risque fracturaire, et il est légitime de ne plus la considérer comme une ostéopétrose [5]. L’ostéopétrose de type 2 (ou maladie d’Albers-Schönberg) est certainement l’ostéo pétrose la plus fréquente chez l’adulte. Elle est causée par une mutation de CLCN7 (codant pour une protéine de transport du chlore dans la lacune ostéoclastique), avec une pénétrance variable et un spectre de présentation clinique étendu, allant de la découverte fortuite d’anomalies radiographiques chez un patient asymptomatique à des formes létales, en passant par des patients présentant des fractures mul- tiples. Cette ostéopétrose de type 2 est caractérisée radiologiquement par l’épaissi ssement des plateaux vertébraux, avec l’aspect classique d’une colonne vertébrale en “maillot de rugby” et d’un bassin en “os dans l’os” (figure 1, p. 20). Parmi les autres anomalies génétiques entraînant une hyperdensité osseuse par diminution de la résorption osseuse, on peut citer la pycnodysostose (maladie génétique lysosomale caractérisée par une ostéo sclérose du squelette, une petite taille et une fragi lité osseuse due à une mutation autosomique récessive du gène codant pour la cathepsine K), la mélorhéo stose (atteinte mono- mélique avec ostéo condensation linéaire en “coulée de bougie”) et l’ostéo poïkilocytose (caractère bénin de cette affection de découverte fortuite devant des plages focales d’ostéocondensation).

Augmentation

de la formation osseuse

Sclérostéose et maladie de Van Buchem Ces 2 maladies sont l’illustration parfaite de ce que la découverte de maladies monogéniques permet une meilleure compréhension des mécanismes de régula- tion du métabolisme osseux, avec la possibilité à terme de développer de nouvelles voies thérapeutiques.

La sclérostéose et la maladie de Van Buchem sont caractérisées par une augmentation de la formation et de la résistance osseuses et par une diminution du risque fracturaire en lien avec une mutation du gène Causes artéfactuelles

– Arthrose rachidienne (zygapophysaire) ± scoliose associée

– Spondylarthrite ankylosante (syndesmophytes) – Calcification vasculaire (aorte abdominale) – Cimentoplastie

Causes acquises (locales)

– Vertèbre(s) ivoire(s) : maladie de Paget, SAPHO, sarcoïdose, lymphome, etc.

– Métastases osseuses condensantes (prostate, sein…)

– Syndrome POEMS

Causes acquises (généralisées) – Fluorose

– Ostéodystrophie rénale – Acromégalie

– Mastocytose – Myélofibrose – Hépatite C

– Myélome condensant

– Ostéomalacie axiale condensante

Encadré. Principales causes acquises et artéfactuelles d’hyperdensité osseuse.

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Hyperdensité osseuse : étiologies et conduite à tenir

codant pour la protéine SOST (inhibitrice de la for- mation osseuse), entraînant une perte de fonction (6).

L’élargissement mandibulaire patent qui apparaît au cours de la puberté en est le signe caractéristique, tout comme l’hypertrophie du crâne pouvant entraîner des compressions neurologiques (figure 2). La conden- sation osseuse est généralisée à l’ensemble du sque- lette. Les manifestations de la maladie de Van Buchem sont moins graves que la sclérostéose. La sclérostéose atteint surtout la population afrikaner d’Afrique du Sud, alors que la maladie de Van Buchem est essen- tiellement localisée aux Pays-Bas. Il s’agit de maladies à transmission autosomique récessive. La découverte des mutations du gène SOST a permis des avancées thérapeutiques. En effet, des anticorps antisclérostine sont en cours de développement dans l’ostéoporose postménopausique (7).

Mutations de LRP5 et LRP4

Il s’agit de mutations activatrices des gènes codant pour les protéines LRP5 et LRP4, corécepteurs de la voie de signalisation Wnt impliqués dans la formation osseuse (8). L’élargissement mandibulaire, l’hyper- trophie du crâne et des compressions neurologiques ont également été décrits au cours des mutations de LRP5 (8). Dans ces maladies monogéniques, les mesures répétées de la DMO permettent d’évaluer l’évolution de la maladie ostéo condensante vers une éventuelle aggravation dans le temps. A contrario, les mutations inactivatrices de LRP5 sont en cause dans le syndrome ostéoporose-pseudogliome.

Hyperdensités osseuses inexpliquées

Après avoir éliminé l’ensemble des étiologies évo- quées précédemment, il reste un certain nombre de patients atteints d’une hyperdensité osseuse inexpliquée (figure 3), mais avec parfois des carac- téristiques cliniques suggérant une dysplasie osseuse (élargissement de la mandibule, ossifications à l’in- sertion des tendons et des ligaments, augmentation de l’indice de masse corporelle et de la pointure, etc.). Il s’agit vraisemblablement d’hyperdensités osseuses liées à des atteintes monogéniques ou poly- géniques pour le moment inconnues. Des études sur la microarchitecture osseuse de cette population bien particulière ont été réalisées, ainsi que des études sur les modifications de la composition corporelle et du lien entre hyperdensité osseuse et arthrose (9, 10).

Région Surface CMO DMO T- PR Z- MA (cm2) (g) (g/cm2) score (%) score (%) L2 15,79 28,46 1,802 7,1 178 7,1 178 L3 17,82 30,91 1,734 6,4 166 6,4 166 L4 19,91 35,11 1,763 6,6 169 6,6 169 Total 53,53 94,48 1,765 7,0 171 7,0 171 A

C

B

Figure 1. Aspect caractéristique en “maillot de rugby” d’une ostéopétrose de type 2, ou maladie d’Albers-Schönberg, que ce soit sur la morphométrie vertébrale (A) ou sur l’imagerie DMO de la colonne lombaire (B), avec une traduction densitométrique (C) : Z-score +7 de L2-L4.

Figure 2. Photographies de patients atteints de la maladie de Van Buchem présentant des caractéristiques cliniques typiques avec élargissement de la mandibule et une hyper- trophie des os du crâne. Le patient C présente une compression neurologique (paralysie faciale). Adapté de (6).

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Région Surface CMO DMO T- PR Z- MA (cm2) (g) (g/cm2) score (%) score (%) L1 12,39 15,76 1,272 3,2 137 3,2 137 L2 14,42 19,66 1,363 3,2 135 3,2 135 L3 16,12 20,94 1,299 2,4 125 2,4 125 Total 42,93 56,36 1,313 2,9 131 2,9 131

Région Surface CMO DMO T- PR Z- MA (cm2) (g) (g/cm2) score (%) score (%) Col 4,58 5,01 1,094 2,0 128 2,0 128 Troch 11,48 10,82 0,942 2,2 133 2,2 133 Inter 21,85 32,38 1,482 2,5 135 2,6 136 Total 37,91 48,20 1,271 2,5 135 2,5 135 Ward 1,13 1,08 0,955 1,9 130 1,9 130

A B

Figure 3. Hyperdensité osseuse inexpliquée chez une jeune femme de 24 ans avec : (A) T/Z-scores à +2,9 au rachis lombaire (L1 à L3) ; (B) T/Z-scores à +2,5 à la hanche totale.

Conclusion

La découverte d’une densité osseuse élevée (T et/ou Z-score supérieur ou égal à +2,5) lors de la réali- sation d’une mesure de la DMO n’est pas excep- tionnelle. La visualisation des images de la DMO (associées ou non à des radiographies) permet dans un grand nombre de cas de retrouver une origine artéfactuelle à cette hyperdensité osseuse. Les autres situations nécessitent, après un interroga- toire et un examen clinique soigneux, de réaliser des explorations complémentaires (imagerie et biologie). Ceux-ci permettent le diagnostic des

causes acquises d’hyper densité osseuse, qu’elles soit locales ou généralisées. Bien entendu, la pré- sentation clinique, le phénotype des patients et/

ou les explorations complémentaires doivent per- mettre d’évoquer certaines maladies génétiques responsables d’une diminution de la résorption osseuse (ostéopétrose autosomique dominante de type 2) ou d’une augmentation de la forma- tion osseuse (mutations inactivatrices de SOST et mutations activatrices des corécepteurs LRP5 et LRP4). Enfin, un certain nombre d’hyperden- sités osseuses restent inexpliquées : il s’agit des syndromes de masse osseuse élevée.

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts en rapport avec cet article.

1. Whyte MP, Reinus WH, Mumm S. High-bone-mass disease and LRP5. N Engl J Med 2004;350(20):2096-9.

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scanning, a review of causes and management. Rheuma- tology (Oxford) 2013;52(6):968-85.

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10. Hardcastle SA, Dieppe P, Gregson CL et al. Osteoarthritis and bone mineral density: are strong bones bad for joints?

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Références bibliographiques

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