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V O C A B U L A I R E

Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XXI - n° 7 - septembre 2017

Par Jean-Joseph Julaud (Paris), professeur de français, auteur de romans, nouvelles, livres pratiques et essais.

D U G E N R E

Il faudrait pour cette page une en-tête…

Voyons, “en-tête”, est-ce féminin ? Non, c’est masculin : un en-tête… Pourtant, on dit bien : “une tête” ? Oui, mais ne vous entêtez pas, l’en-tête est masculin ! C’est comme une exergue alors ? Non, exergue aussi est masculin ! Un exergue, le cousin d’un épigraphe ?

Voyons, on dit une épigraphe, où avez-vous la tête !

Le genre des noms est un chausse-trape, vite un échappatoire, et qu’on me tire de ce martyre ou je fais une esclandre !

Votre ton soudain monte d’un octave, qu’on vous apporte un écritoire afin que vous y graviez, en même temps qu’en votre mémoire : on dit une chausse-trape, on envoie quérir une écritoire, et l’on se garde bien de faire un esclandre ! Dans ce grand flou du genre, tout égaré, vous atteignez une apogée !

Ah, mais ! Vous qui morigénez à tout-va et qui êtes prêt à me lancer un anathème, vous, bon chic bon genre, auriez-vous perdu les clés de la musique et tous ses dièses et ses bémols pour ôter à l’octave son genre féminin – on dit une octave – et la trans- former en un masculin qui continue de fauter dans l’écritoire, féminin elle aussi – au lieu que votre apogée, malgré son “e” final, se tient du côté mâle : un apogée !

Quel tintamarre, quel embrouillamini ! Que ne sommes-nous finnois, hongrois ou turcs, ou basques ou estoniens ! Point de masculin ou de féminin là-bas !

Oui, mais en France, il faut faire avec, être toujours en garde, prêt à parer un coup, n’im- porte où, même au théâtre où vous lâchez innocemment : “Ah, tant mieux, il y aura une entracte”, et l’écho courroucé qui peut même surgir de votre moitié vous répon- dant : “Un entracte !” Rideau !

Penaud, vous avancez des raisons qui tempèrent cet intégrisme, affirmant qu’au XVIe siècle, on entendait encore “la doute, la silence, la poison, une arbre” ou bien “un apostrophe, un vipère, le colère, un affaire, un asperge, le dette, le fourmi, un énigme, etc.”. On vous rétorquera que François de Malherbe, au XVIIe siècle, a fait le ménage et que depuis, on sait tous qu’un élastique n’est pas une encaustique, qu’un colchique dans les prés peut cacher les belles amours d’une odalisque − en tout point différente d’un obélisque (de Louksor)…

Vous tentez de faire assaut d’érudition en donnant l’origine du mot “genre”, issu de la racine indo-européenne “gen” ou “gna”

associée à l’idée de création, de procréation, et qui a donné génie, ingénieur, aîné, néant

− ne-gna, “qui ne fut jamais procréé”, autre- ment dit : personne −, naïf, nature, général et même nation !

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Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XXI - n° 7 - septembre 2017

Inutile diversion si d’aventure l’échange se poursuit et qu’est rappelée cette phrase écrite au temps d’un Louis XIV triomphant par le grammairien Dominique Bouhours :

“Lorsque les deux genres se rencontrent, il faut que le plus noble l’emporte.”

Et quel est le genre le plus noble, selon Nicolas Beauzée, grammairien du XVIIIe siècle ? “Le genre masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supé- riorité du mâle sur la femelle.”

Quelque féministe se trouve-t-elle dans les parages ? La guerre est déclarée ! Quoi ? Le masculin fort l’emporte sur le féminin faible ? Le mâle sur la femelle ? Non : le

genre de chaque individu résulte d’une construction sociale indépendante de son sexe physique ! Et vous voilà embarqué dans une théorie qui pourrait vous faire troquer votre jupe contre un pantalon. Ou l’inverse.

À moins de faire la paix, de se dire que tout cela est ludique, que l’attribution des genres au fil de l’histoire n’est rien d’autre qu’une figure du chaos et que la concurrence des sexes n’a rien à faire dans cette distinction entre masculin et féminin.

Allons, c’est fini ? On joue ? Oui ! “Oriflamme”, masculin ou féminin ? “Insigne”, masculin ou féminin ? Et “tyran” ? Masculin, bien sûr ! Féminin aussi ? Qui sait…

© Images en Dermatologie 2015;6(VIII):198.

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