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Deux pièces peu connues de la correspondance d'Euler (lettre d'Erik Pontoppidan à L. Euler, et réponse d'Euler)

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B ULLETIN DES SCIENCES

MATHÉMATIQUES ET ASTRONOMIQUES

B IRGER H ANSTED

Deux pièces peu connues de la correspondance d’Euler (lettre d’Erik Pontoppidan à L.

Euler, et réponse d’Euler)

Bulletin des sciences mathématiques et astronomiques 2e série, tome 3, no1 (1879), p. 26-32

<http://www.numdam.org/item?id=BSMA_1879_2_3_1_26_1>

© Gauthier-Villars, 1879, tous droits réservés.

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(LETTRE D'ERIK PONTOPPIDÂN À L. EULER, ET RÉPONSE D'EULER);

COMMUNIQUÉES *

PAR M. BIRGER HANSTED, Candidat en Philosophie, à Copenhague.

Les deux Lettres que j'ai l'honneur de communiquer aux lec- teurs du Bulletin des Sciences mathématiques et astronomiques se trouvent dans un Essay sur la nouveauté du monde publié à Copenhague, 1755, parle DrErikPontoppidan. J'ai cru que la Lettre d'Euler méritait d'être sauvée de l'oubli, qui serait son sort cer- tain si elle restait cachée dans un livre danois peu connu ou pour mieux dire inconnu hors des frontières du Danemark. Cette Lettre, si franche, si sincère, caractérise à merveille l'illustre Euler-, de plus, je crois que sa teneur peut la recommander aux lecteurs de nos jours. Le savant danois Dr Erik Pontoppidan, théologien, naturaliste, historien et scrutateur infatigable de la nature, fut doué d'une rare faculté d'observation, de connaissances très-éten- dues et d'une activité qui ne se lassa jamais. Le but de sa vie fut alors de faire concorder le livre de la nature avec l'Ecriture sainte.

En s'occupant de ramasser des arguments en faveur de son idée que le monde, œuvre du souverain Seigneur, n'existe pas de toute éternité, mais, d'accord avec les renseignements de Moïse, ne date que de 6000 ans, pensée qu'il a développée dans son Essay sur la nouveauté du inonde, il songea à s'adresser au profes- seur Euler, à Berlin, croyant avoir trouvé une diminution de la

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MÉLANGES. *7 durée de Tannée comme suite nécessaire de la contraction de l'or- bite de la Terre. Saisi de cette pensée, il écrit, après quelques hé- sitations, directement à Euler pour le prier de lui donner des explications (voir Lettre I). La réponse d'Euler (voir Lettre II), lui dounant les explications 'souhaitées, est assez remarquable pour mériter d'être connue de tous ceux qui s'intéressent aux études et aux découvertes des siècles passés. Voici les deux Lettres:

Lettre I, datée de Bergen, en Norvège, le 26 de mars 1764, du Dr Erik Pontoppidan, à M. Euler, et Lettre II, datée de Berlin, ce 11 de mai 1754, réponse de M. Euler au Dr Erik Pontop- pidan :

I.

(( MONSIEUR,

)> Vous vous étonnerez sans doute à la vue de ces lignes, dont l'auteur ne présume pas avoir l'honneur de vous être connu. Aussi ai-je bien balancé dans mon esprit le pour et le contre avant que de vous incommoder par là, eu surtout égard à la distance des lieux, sans laquelle j'aurois, il y a longtemps, recherché l'hon- neur et le plaisir de votre commerce. Vous jugerez aisément, Monsieur, que ce désir m'est venu de la lecture de vos Ouvrages, qui n'ont pas manqué d'inspirer à moy, comme i\ tout le monde, beaucoup de respect pour vos talens admirables et admirez en ef- fect par toute l'Europe. Venons-en au fait, sans eompliniens su- perflus, qui ne me sont pas fort naturels. C'est dans le premier tome d'un livre appelé : Pliysihdische Belustigungen et dans le Magazine de Londres que j'ai lu une Lettre de votre main, adressée à M. Wetstein, sur l'approche continuelle de notre globe vers le Soleil comme vers son centre. Ce problème m'a paru très*

intéressant et très-digne de toute la recherche possible, afin d'être 'mis en tout son jour, par conséquent un peu plus détaillé que je ne le trouve dans ladite Lettre. La raison particulière qui me fait souhaiter cela pour l'instruction du public, curieux sous nos jours plus que jamais, c'est que je travaille à un Essay sur la nouveauté du monde, pour l'opposer à Messieurs les matéria- listes et autres incrédules de ce siècle, auxquels on n'appliqueroit pas mal les paroles de saint Pierre (IIe ftpitre, C. III, v. 5). Or je vois

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avec plaisir, Monsieur, qu'à la fin de votre Lettre vous tîrez du principe en question la juste conséquence que notre globe va finir un jour sa carrière et achever sa destination présente. Tout cela cadre admirablement bien avec mes pensées et je souhaiterois qu'il n'y eût rien à dire contre cette position. Cependant, puisque je me sens la vue trop courte dans ces sortes de sujets, il faut de nécessité que je vous incommode par quelques questions, super- flues sans doute, si j'étois plus versé dans l'Astronomie.

» En premier lieu, je me donne la liberté de vous demander par quelle raison vous alléguez la matière subtile qui remplit notre tourbillon (ne fut-ce que la matière de la lumière) comme un moyen qui pousse notre globe de plus en plus vers son centre?

Car si c'est la matière lumineuse qui ne cesse d'émaner du Soleil, ne semble-t-elle pas devoir produire un eiîet contraire en repous- sant notre globe rencontré en son chemin, plutôt que de l'attirer?

» En second lieu, cette matière lumineuse, supposé qu'elle parte incessamment du Soleil, ne devroit-elle pas s'attacher ou se fixer quelque part aux planètes, ou bien rendre notre tourbillon plus lumineux et plus brillant vers la fin des siècles que dans leur com- mencement?

» Troisièmement, ne devroit-elle pas, par la même raison, causer au corps du Soleil un préjudice considérable, en lui ôtant continuellement quelque cliose de son volume?

)> Quatrièmement, s'il y a eu un temps dans lequel notre globe se trouva plus éloigné du Soleil, ne s'ensuit-il pas que les hivers de ce temps-là ont plus de froid comme les étés moins de chaleur, et les habitans faits pour notre globe ont-ils pu s'accommoder de cela?

» En cinquième lieu, ne pourroit-on pas écarter ces inconvé- niens par la supposition que le corps du Soleil, amoindri par l'éma- nation de la matière lumineuse, avoit été, du commencement, plus vaste et ne s'étoit diminué qu'à proportion de l'approche du globe et des autres planètes? Position qui, si elle seroit fondée, servi- roit à glorifier infiniment la sagesse économique du grand Exé- cuteur.

» Enfin, le raccourcissement de l'année qui entre dans votre système est-il bien assuré, et quelle est la différence d'un siècle à un autre ? Asis, roy de Thèbes, n'a-t-il pas mesuré l'année solaire

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MÉLANGES. *9 tout comme neus la mesurons aujourd'huy, en y ajoutant les cinq jours qui lui manquoient auparavant faute de calculs ?

>, Voilà, Monsieur, mes six questions qui, pour être un peu épineuses à moy, n'en seront pas de même à un esprit fait comme le vôtre pour l'illustration de ce siècle. Si je considère ce dernier sous l'image de notre tourbillon, je vous place dans son centre comme le soleil de notre âge. Sur ce fondement, je vous demande pour réponse quelques rayons jettes dans un grand éloignement et d'autant plus bienvenus. Il ne me reste que de vous donner à bon Dieu et de vous souhaiter le comble de ses grâces et bénédictions, étant d'un cœur respectueux autant qu'un inconnu peut l'être,

>» Monsieur, etc.

« De Bergen, en Norw., ce 26 mars 1754. »»

H.

« MONSIEUR,

» Tout sensible que je sois à l'honneur de votre Lettre, je m'es- timerois bien heureux si mes recherches peuvent jamais contri- buer quelque chose à confondre la malice des esprits forts. Je eroyois que l'approche successive des planètes vers le Soleil four- nissoit une preuve convainquante, tant que le système du monde, tel qu'il est aujourd'huy, n'ayt existé depuis toute Péternité, ni qu'il sauroit subsister éternellement. Or, pour prouver ce senti- ment a priori et pour développer en même temps les questions dont vous avez bien voulu m'honorer, je prendrai la liberté de vous proposer, Monsieur, les remarques suivantes.

. )> 1. Je dis donc que l'espace du monde ne sauroit être vuide de toute matière, comme il seroit nécessaire si les planètes dévoient décrire leurs orbites conformément aux règles établies par Kepler et soutenues par le grand Newton, qui a été obligé de supposer l'espace du monde entièrement vuide pour que les planètes, dans Jeur mouvement, n'y rencontrent aucune résistance, ayant bien reconnu qu'une résistance devoit nécessairement troubler leur

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mouvement. Or, quoique Newton ait soutenu vuide l'espace du ciel, je dis que ce sentiment ne sauroit être admis et qu'il est tou- jours détruit par la théorie de la lumière, de quelque manière qu'on l'envisage. Car, si, comme le veut Newton luy même, la lu- mière est dardée du Soleil, avec cette terrible vitesse qui luy fait parcourir l'intervalle entre le Soleil et la Terre en moins de huit mi- nutes, tout l'espace doit être absolument rempli de la matière de la lumière. Mais,"croyant avoir suffisamment réfuté cette hypothèse de l'émanation actuelle de la lumière des corps lumineux, on est réduit par des raisons les plus fortes à soutenir que la lumière se répand par l'espace du ciel, de la manière que le son est répandu par l'ouïe. Il faut donc que l'espace du ciel soit rempli d'un fluide extrêmement élastique et rare pour transmettre les rayons de la lumière. Voilà donc, dans l'un et l'autre cas, l'univers rempli d'une matière subtile qui ne sauroit manquer d'influer sur le mouvement des planètes. Cet effet peut être double, car d'abord, en tant que ce fluide est matière, il faut que les corps qui s'y meuvent rencontrent quelque résistance qui tende à diminuer leur vitesse, et, en tant que cette matière est en mouvement, elle choquera les planètes selon la direction. Et c'est sur quoi roule votre première question, que p a r l e mouvement de la lumière, les planètes devraient être de plus en plus éloignées du Soleil. Cela ar- riveroit, sans doute, si les planètes n'étoient pas continuellement attirées par la gravité, vers le Soleil. Mais, quelle que soit la cause de la gravité, il suffit de savoir que la force est la raison renver- sée des quarrés de la distance au Soleil. Or, la dernière force de la lumière, en cas qu'elle choquât sur les planètes en les repous- sant du Soleil, devroit suivre la même raison, \ u que la force de la lumière diminue aussi en raison du quarré des distances au Soleil ; elle ne feroit donc que diminuer tant soit peu la force de la gravité, et il en seroit de même que si les planètes seroient attirées vers le Soleil par une force un peu moindre, mais qui suivroit également la même raison à l'égard de la distance. Or, si les pla- nètes n'éprouvoyent qu'une telle force qui les poussât au Soleil, elles devroient toujours décrire des ellipses autour du Soleil, et leur grandeur devroit toujours demeurer la même éternellement.

Ainsi, quoique la lumière agisse par impulsion sur les planètes en les repoussant au Soleil, cela ne sauroil altérer la grandeur de

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MÉLANGES. 3i l'orbite de chacune. Mais l'autre effet de cette matière subtile, qui résulte de la résistance, doit nécessairement tant soit peu retar- der le mouvement, ou bien, après que la planète auraj parcouru un certain arc, sa vitesse sera un peu moindre que si elle n'avoit pas éprouvé cette résistance. Or, dès que le mouvement d'une pla- nète est devenu plus lent que la conservation de son orbite l'exige, la force de la gravité l'emporte, et la planète doit s'approcher da- vantage du Soleil. Cela est évident de là que, si le mouvement d'une planète étoit entièrement détruit, elle tomberoit directement dans le Soleil. Il est donc certain qu'à cause d'un fluide dont le ciel est rempli, de quelque nature qu'il soit, les orbites des planètes doivent insensiblement être rétrécies, quelque violente que puisse d'ailleurs être la force repoussante de la lumière.

» 2. Pour la seconde question, comme l'hypothèse de l'émana- tion actuelle de la lumière du Soleil est insoutenable, et que la lu- mière est plus tôt de la même manière répandue par l'éther, que le son par l'air, aussi peu qu'un bruit passé augmente un son pré- sent, la lumière du temps passé pourra augmenter celle d'aujour- d'hui. Aussi voit-on que, dès qu'on rend une chambre obscure, la lumière qui étoit entrée auparavant s'éteint subitement.

» 3. A la troisième question, il n'y a point de doute que, si la lumière étoit une émanation réelle du Soleil, son corps en devroit souffrir une perte très-considérable. Si nous considérons la rapi- dité que ce courant continuel, qui remplit tout l'univers, devroit avoir, quelque subtile que nous concevions la matière de la lu- mière, je doute fort que le Soleil pourroit subsister seulement une heure. Mais dans l'autre système, où la propagation de la lumière est semblable à celle du son, le Soleil ne perdra pas plus en nous éclairant qu'une cloche en sonnant.

» 4. La quatrième question n'a aucun doute, car, comme il est certain que nul homme ni nulle créature semblable aux nôtres ne sauroit subsister dans Saturne ; ainsi, si la Terre avoit été jamais aussi éloignée du Soleil que Saturne l'est aujourd'hui, elle auroit été absolument inhabitable aux créatures qui l'occupent à présent.

Donc, quoique le monde ait existé depuis toute éternité (ce qui

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contredit déjà au rétrécissement successif des orbites) et que l'or- bite de la Terre soit enfin parvenue à l'étendue qu'elle occupe ac- tuellement, il faudroit absolument que dans un certain temps toutes les créatures y fussent produites par un vray miracle.

» 5. Comme je crois l'hypothèse de l'émanation actuelle de la lumière insoutenable, cette question n'a point de difficulté.

» 6. La dernière question est la plus importante. Il s'agit de savoir si l'on peut s'assurer par les observations d'un racour- cissement des années, ce qui seroit une suite nécessaire de la con- traction de l'orbite de la Terre. J'ay cru que cela pou voit être prouvé par les observations rapportées par Ptolomée, et la longueur de l'année qu'il met de 365 jours 5 heures 55 minutes, tandis qu'elle n'est aujourd'hui que de 365 jours 5 heures et 48 minutes, sembloit favoriser mon sentiment. Mais, après un examen plus mûr, on trouve que Ptolomée s'est trompé dans son année et qu'elle n'a pas été plus longue alors qu'aujourd'hui. Mais il est certain que le mouvement de la Lune est aujourd'hui un peu plus vif qu'il n'étoit autrefois, ce qui me parait suffisant pour mon sentiment. Car puisque nous mesurons les années par le nombre des jours, qui nous assure que les jours sont aujourd'huy aussi longs qu'autrefois?

En cas que les jours soyent devenus un peu plus courts, les ans le seroient aussi, quoiqu'ils continssent le même nombre de jours.

)> J'ay l'honneur d'être avec un très-profond respect,

» Monsieur, etc.

» Berlin, ce n de m a y 1754* »

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