plàIes pénétrantes
INTRAPÉRITONÉALES
/de lavessie
DU MEME AUTEUR
:Des
moyens
d’extraction descorps étrangers solidesdu
conduit auditif externeetparticulièrementdu
procédédel’épinglerecourbée. (Extraitdu
Bulletin de thérapeutique médicale et chirurgicale,numéro du
30 sept. Paris, 1873.)Compendium
de Physiologie humaine, par JULIUS BUDGrE, professeur à l’Université de Greifswald.—
Traduit de l’allemand et annoté avec l’autorisation de l’auteur, 1 vol. de 575p. avec 53 fig. dans le texte.G. Masson, Paris, 1874.
Pustule maligne dela face.
{Lyon
Médical, t. p. 23, 1874.)Notes sur les fistules musculaires idiopathiques. (Extrait
du Lyon
Médical, t. XVII, p. 270, 1874.)
De
l’ablation du calcanéum en général et spécialement de l’ablation sous-périostée de cet os, in-8“, 188 p. avec 3 planches. G.Masson,
Paris, 1876.
—
Thèse inaugurale.COULOMMIERS. TYPOGRAPHIEPAUL BRODARD.
PLAIES PENETRANTES
INTRAPÉRITONÉALES
DE LA VESSIE
[Expériencesrelativesà leurtraitementpar lalaparotomie etlacystoraphie)
PAU
Le
D*"E. VINCENT
Professeuragrégéàla Faculté, Chirurgienenchefdésigné delaCharité deLyon.
Extrait de la
Revue
de Chirurgie.PARIS
LIBRAIRIE GERMER BAILLIERE ET
G*' 108, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 108iu coio delarue Dautefeuille
1881
PLAIES PÉNÉTRANTES INTRAPÉRITONÉALES
DE LA VESSIE
(Expériences relatives à leur traitement par la laparotomie et lacystoraphie)
Cuî
persecta vesica lethale, aditHippocrate. Cet arrêt fatal, pro-noncé
par le Père de lamédecine,
doit-il encore êtremaintenu
sans appel nicommentaire? La
chirurgiemoderne
a le droit, cenous
semble,de
protestercontre cettesentencequienglobe sousune
loi
commune
des faits qu’il importe de distinguer. Il faut,en
effet, distinguer les perforationsde
la vessiecommuniquant
avec le péri- toinede
cellesqui siègenten
dehors de cetteséreuse.La
gravitéde
cesdeux
genresde
blessure n’est point semblable.Pour
les pre- mières, l’aphorisme d’Hippocrate n’estque
tropjustifié,mais
il n’en estpas ainsiheureusement pour
les autres.Le mémoire
deM. Max
Bartels,
de
Berlin\
siricheen
observations,montre
que,sila plupart desplaies pénétrantesintrapéritonéalesde
la vessie ont été suiviesde
mort, lesplaiespénétrantesextrapéritonéales guérissenten
assezgrand nombre.
Il paraîtra bientôtune
thèse inaugurale (cellede M.
Maltrait)^dans
laquelle tous lestraumatismesde
lavessieseront colligés avec soin.Le mémoire que nous
publions aujourd’hui apour
objetde
faire connaître : 1“l’historiquedu
traitement opératoire des perforations vésicales; 2“ les résultats des expériencesque nous avons
entre- prises dansle butd’étudierla réparation des plaiesde
lavessie par instrument tranchant, piquant, contondant, pararmes
à feu, par déchirure, etc., siégeantdans
les portionsde
la vessie, revêtuesde
péritoine,etdonnant
lieu àune communication de
sa cavitéavec
celle
de
lagrande
séreuse abdominale.1.Die Traumen der Harnblase,von D''
Max
Bartels, in Berlin, Arch. fur klin.Chirurgie von Langenbeck, Bd. XII,p. 518, 715, 1878.
2. Contribution à l’étude destraumatismes de la vessie. Thèse de Lyon.
VINCENT. l
—
2—
Réfléchissant
aux
causesde
l’effroyable léthalité des blessures intrapéritonéales de lavessie,quand
elles sont perforantes etcom-
pliquées d’unépanchement
d’urine, ilnous
asemblé que
le seulmoyen
rationnel à tenterpour
sauver les blessés de cette catégorie était de pratiquer la laparotomie aussitôtque
possible, d’aller àlarecherche delavessiepar cette voie, d’enfermerla solution
de
con- tinuitéau moyen
d’une suture appropriée, d’enleverde
la cavité péritonéale toutle liquideépanché
; sang, urine, extravasatinflam- matoire, s’ilen
existe déjà, puis, la toilettedu
péritoineachevée, et bien faite antiseptiquement, de réunir, lege artis, la section des paroisabdominales,le tout avecles précautions listériennes les plus minutieuses, qu’on a l’habitudede prendre
aujourd’huidans
les opérationsetnotamment
dansl’ovariotomie.En
présence, d’une iJart,de
l’extrême gravité,on
peut direde
la mortalité àpeu
près fatale des perforations intrapéritonéalesde
la vessie, qui, jusqu’à présent, onttoutes, saufune
seule, entraînélamort
(93 foissur94
cas, Bartels, loco citato);
en
présence, d’autre part, des merveilleux résultatsque
la chirurgieabdominale
obtient grâce aupansement
de Lister% nous pensons
qu’on est autorisé à recourir à l’opération dontnous venons
de parler etque
l’avenir est làpour
la thérapeutique de cegenre de
traumatisme,comme
nous
croyons que,pour
la taille,l’avenir estdans
la cystotomie sus-pubienne
suivie de la cystorraphie.Pourquoi
lecondamné
àmort
d’Hippocratene
serait-il point gracié par Lister? L’illustre chi- rurgien anglaisen
a sauvé bien d’autres.Du
reste, Walther,de
Pittsbourg, a obtenu,en
1862,un
résultat trèsbeau
parune
opéra- tion semblable. C’est lui qui, lepremier
et le seul, a sauvéun malade
atteintd’une perforation intrapéritonéale de la vessie.Son exemple
doitdonc
être suivi, et avec d’autantplus de confianceque nous
possédons aujourd’huilaméthode
antiseptique et par elle d’in-nombrables
succès àl’actifde lachirurgie péritonéale.Sous
l’impul- sion de Lister, cetteméthode
aouvertune
ère nouvelleàlachirurgieen
général; lachirurgie vésicalene
pouvaitêtre excluede
ses bien-faits.
En
1873,Lister,procédantaune
taillesus-pubienne chezun
enfant âgéde
quatorzeans, ouvritle péritoine.Le
calcul extrait. Lister su- tura au catgut la vessie, qui avait étépréalablement distenduepar une
injectionphéniquée
au 1/40; ensuite,ilsutura demôme
le péri- toine et laparoi abdominale.Un
drain fut placédans
l’angle infé-]. Zagas-Bazan, Sur le système de traitement antiseptiquetelquHl estpratiqué chez lesAnglais et principalement par le D''Lister, d’Edimbourg.Thèse de Paris, 1873, n“39, p.43.
3
—
rieur
de
la plaie;pansement
antiseptique surle ventreet,comme
d’habitude, guérison.
La méthode
antiseptique a procuré,en
1879,un beau
succès àUltzmann’ dans une
taillesus-pubiennesuiviede
la sutureau
catgutdelaplaievésicale, et à E.Albert^,lamême
année, dansune
taille vésico-vaginale suivieégalement de
la suture de la plaie. Cesrésultats encourageantsnous
permettent d’espérer,dans une
certainemesure,
qu’aveclepansement
antiseptique ilsera pos- siblepeut-êtrede diminuer
la mortalité des blessures vésicales quinous préoccupent
et qui sontautrement
gravesque
la taille péri- néaleou
sus-pubienne.I
Historique
critique.Quels
moyens,
avant l’ère antiseptique, a-t-onopposés aux
solu- tionsde
continuitéperforantes delavessie, surtout à cellesqui sont intrapéritonéales?J’éliminelesmoyens
médicaux.Les moyens
chi- rurgicaux, opératoires,peuvent
se catégoriser de lamanière
sui- vante :lo
Cathétérisme
uréthral simple,ou
cathétérismeuréthralpoussé au
travers de lavessie etde la déchirure jusquedans
lapoche
uri-neuse
{procédéde Thorp). Nous nous bornons
à signaler le cathé- térisme uréthral simple, temporaireou permanent.
C’estun
adju- vant toujours utile,mais
trèsrarement un moyen
curatif par lui seul.Dans
leprocédé de Thorp on
pousse la sonde, de l’urèthrejus-que
dans lapoche
urineuse,en
traversant la vessie eten
passant parla déchirurede
ceréservoir.Thorp
futassezheureux pour
faire ainsicheminer
sasonde, laver la cavité contenant l’urineépanchée
et
en
obtenir l’oblitération.Son malade
guériten
quatorze jours.Mais,
de
l’avisde
Bartels, il s’agissait,dans
ce cas,simplement
d’une collection extrapéritonéale d’urine.Thorp,
lui, croit s’être trouvé réellementen
présence d’une rupturede
la vessieavec épan-1. Ultzmann, Hoher Blasenschnitt unter aseplischen Kautelen (Wiener medicin.
Presse, 1879, n“ 1, p. 9).
2. E. Albert, Zwei Cyslotomien mit
Nah
[Wiener medic. Presse, 1879, n“ 8, p. 83).—
Voyez aussi Jeannel, De la fièvre consécutiveaux plaies cavitaires et de éapplication de laméthodeantiseptiqueau traitement descavités muqueuses,in Revue mensuelle de médecine et de chirurgie, déc. 1880, p.973.3. Thorp H., Observations on rupture ofthe urinary bladderVûith a history of a case ended in recovery[Dublin quaterl. Journ,, nov., p. 366, 1868)..
_ 4 —
chement
d’urinedans le sac péritonéal.Quoi
qu’ilen
soit, lefait est assezinstructifpour
être reproduit.Un
fermier, âgé de trente ans, en état d’ivresse,tombe
de cheval.Thorp
le trouva quatre heures plustard, assis et souffrant d’unviolent besoin d’uriner qu’il ne pouvait satisfaire. Douleurs brûlantes à l’hypo- gastre, musclesabdominaux
tendus; pas de signes d’une contusion externe, pas devomissement, pas defrissons.Une
sonde élastique par- vint sansdifficulté dans lavessie; il ne s’écoula d’abord point deliquide;mais l’instrument poussé
un
peu plus avant, en lui faisant opérerun mouvement
de rotation sur son axe, il s’écoulaune
cuillerée à soupe d’une urine sanglante, puis environ une once encore lorsqu’on réitéra cettemanœuvre. On
introduisit ensuite une sonded’argent, et l’on fitplacer le malade sur les
genoux
; il s’écoula aussitôt environune
demi- pinte d’urine teintée de sang.Thorp
replaça la sonde élastique en ne faisantpas pénétrer son extrémitéau delàdu
col de lavessie; puis,il fitcoucher le malade dans
une
position demiassise, les épaules relevées;quelques gouttes d’urine claire s’écoulèrent. Quelques heures plus tard, il introduisit
un
cathéter élastiquemuni
d’un mandrin; sa progression fut d’abordempêchée.Mais,en letournant avecdouceur surson axe lon- gitudinal, onparvint àle passer librement:une cuilleréeà souped’urine rouges’écoula.Thorp
lança ensuitedes injections d’eau tiède pour laver le sac péritonéal de l’urine épanchée qui pouvait y rester, en faisant changerplusieursfoisdepositionaumalade. Dès quel’eaumêlée d’urine se fut écoulée, le malade reprit sa position premièredemi
assise, et l’on fixaàdemeure
une sondeélastique n’allantquejusqu’au colde la vessie;l’urine s’écoulagoutte à goutte.
Ce
traitement, associéà desapplications fréquentesdesangsues,decompresses chaudessurTabdomen, etàl’usagedu
calomel et del’opium, procura une guérisoncomplètedu
malade en l’espacede quatorzejours.Thorp pense que
: 1° l’enlèvement de l’urinede
la cavité péri- tonéaleau moyen
de lavages avecde
l’eau tiède, et 2° l’état constant de vacuité et de contractionde
lavessie,grâceau
cathéter àdemeure
introduit jusqu’au col, ont contribué particulièrementà cette
heu-
reuse terminaison. Bienque
l’on soiten
droit, par les révélations cadavériques,de compter
surla cicatrisationcomplète
d’une déchi- rure de la vessieen
l’espacede
huit jours,Thorp
affirmecependant que
la vessie n’est pas capablede
se vider, parune
contraction propre, avant quatorzejours. Cette assertion estabsolument
contre- dite par nos expériences. L’absencede
toutphénomène de
réac- tion péritonitique dans son observationpermet de supposer que
la déchirure de la vessie a étéseulement
extrapéritonéale.Ilne
fautdonc
pas étendreles déductionsde
cefaitaux
perforations intrapé- ritonéales.Du
reste,même pour
les déchiruresextrapéritonéales,ce—
5—
procédé
n’est pas acceptablecomme
règlecommune.
C’estun pur
hasardque de
rencontrerainsi la déchirure de lavessie. S’obstiner à lachercherquand on
nela trouve pasdu premier
coup,c’ests’ex- poser à labourer lamuqueuse
d’une façon trèspréjudiciable.D’un
autre côté, lorsqu’ony
parvient d’embl'ée, est-on sûr de pouvoir entraînerpar des injections toute l’urine, toutle sang coagulé de lapoche
pathologique?En
thèse générale,la cystotomie périnéalenous
sembleraitun procédé
plus sûr,dans
certains cas de perforation extrapéritonéale.2“
On a
ouvertl'urèthrepar
lepérinée.— Boutonnière
périnéale, uréthrotomie externe. Bartels relève quatrefois cemode
d’interven- tion quine
peut,évidemment,
avoir d’autre justificationque
l’im- possibilité de passerune sonde
dansl’urèthre,comme,
parexemple, lorsqu’uneesquille détachéedu
pubisou
de l’ischioncomprime
ce canal.Des
quatre blessés traités ainsi,un
seul asurvécu.3“
On
aponctionné
le cul-de-sac antérectaldu
péritoinepar
lerectum. —
Cette opérations’est inspiréede
l’idée erronée que,dans
les ruptures intrapéritonéales
de
la vessie, l’urine, qui s’épanche, se collecte,en
vertu desloisde
lapesanteur, dans la portionla plus déclivedu
sac péritonéal.Les
recherches deGeorges Wegner*
ontmontré
que,dans
lespremiers
instants d’unépanchement,
lepéri- toineabsorbeleliquideavecune
rapidité extraordinaire, etd’autant plus,que
la présence d’unfluide étranger (bile, urine, etc.), irritant les anses intestinales,provoque
desmouvements
péristaltiques et antipéristaltiques qui ontpour
effetde
diffuser le liquidedans
touslessens, sur toutela surface
du revêtement
péritonéal,comme
l’en- seigneHyrtF
danssonAnatomie
chirurgicale.Ce
n’estque
lorsquele pouvoir absorbant
du
péritoine est épuisé, lorsque les anses in- testinales sont paralysées,du
fait de l’inflammation, qu’une collec- tionliquidepeutse constituer.Mais alorsl’intoxication estsiavancée
déjà,
que
toute intervention abienpeu
dechances
de réussir. Cette opération, laponctionrectale, a étérecommandée
par Harrisson etThorp, mais
elle n’a encore étémise en
usageque
par Cusack,au
direde
Bartels.4“
On a ponctionné
le ventre: A.au-dessus du
joubis.—
Il faut,cela
va
de soi,que
la collection liquide siège dans larégionhypo-
gastrique,en
avant de la vessie, faitrare; et, par suite, cemoyen
1. Georg Wegner, Chirurgische Bemerkungen über die Peritonealhôhle mit beson- derer Berücksichtigung der Ovariotomie
(Verhandl. der deutschen Gesellschaft fur Chirurgie, Bd, V, p.. l, Berlin, 1877, et Archiv. für klinische Chirurgie, Bd. 20, Heft1, p. 51, 1876.
2. J. Hyrtl, Handbuch dertopographischenAnatomie, II,463.Wien, 1847.
—
6—
ne
saurait être qu’exceptionnel. Voiciune
observation, la seule d’après Bartels; elle est de Cusack.Homme,
vingt-six ans;chute surun
banc,lavessieétant pleine, sensa- tion d’éclatementdans le coi’ps. Douleur au niveau de l’ombilic, surtout lorsque le blessé se lève debout. Faciès anxieux; ténesme constant et infructueux.Ventreballonné. Pouls 126.La
sonderetiretrès peud’urine;maisle lendemain, enluiimprimant
un mouvement
derotation,elleretire troispintes d’urine.Le
troisièmejour,paracentèse dol’abdomenau-dessusdu
pubis; il s’écoule une quantité considérable d’urine claire. Soulage-ment
passager. Pollutions.Le
huitième jour, délire etmort.—
Autopsie.Déchirure intrapéritonéaledela vessie, oblique, d’unpouce delong, sur saparoipostérieure et à droite..Vessie vide, rétractée. Signes peuaccusés d’inflammationdans larégion épigastrique, trèsprononcésdansla région hypogastrique, surtoutauniveau de laponction. Les intestinssont adhé- rentsentre eux etau péritoineet recouverts de lymphe. Au-dessous des adhérences vésico-intestinales, il y a
une
pinte d’urine dans le bassin, (In Bartels, p. 731, L c.)On ne
voitpasdans
cette observation lesymptôme
qui a déter-miné Cusack
à faireune
ponction sus-pubienne.La
seule indication rationnelle serait l’existence d’unetumeur
prévésicaleayantles ca- ractèresde
matitéetautres qui appartiennentaux tumeurs
liquides.Et encore, ce
moyen
est-ilinsuffisant, parcequ’ilne permet
pasde
purifier lapoche
ni de prévenirun
nouvelépanchement
parune
suture de lasolutionde
continuitéde
lavessie.B.
Dans un
autre point.— La
paracentèseabdominale
a été faiteune
foisdans
le flancà la hauteur de l’ombilic,également pour une
déchirure intrapéritonéalede
la vessie.Le
blessé estmort
lesecond
jour. (Voyezdans
Bartels, l. c., p. 726 : obs. 67.Bonetus, ponctioniliaque, à 4traversde
doigt à droite de fombilic,mort;
et plus loin, obs. 97,Syme,
obs. 170, Willett etAndre\v, ponction ilia-que, mort).
G.
En combinant
Vaspiration à la ponction.— La
ponction as- piratrice n’a étéfaite qu’unefois, et iln’estpasdouteux
qu’il s’agis- saitsimplement
d’une déchirure extrapéritonéale avec dépôt pré- vésical d’urine. Ilfallut,au
bout de quelques heures, recourir àune
ponction avecun
trocart, qui fut suivie d’une nouvelle aspiration.Après deux
aspirations, il survint desphénomènes
très graves qui durèrentplusieurs jours.Le malade
guérit finalement.Une bonne
incision, à cielouvert, aurait
mieux
valu, ditM.
Bartels ; c’estpro- bable. (Bartels, obs. 134, Macdogall, p. 737.)5°
On a
ouvert lavessiepar
lepérinée.—
Incision périnéale. Six fois employé, ceprocédé
adonné deux
guérisons. Il n’avraiment
chance
deréussirque dans
les perforationsen
dehors de l’enceinte péritonéale. Cependant, dit Bartels,on
serait autorisé à l’essayerpour
les ruptures intrapéritonéales,en
ayant soin d’introduire par la boutonnière périnéaleune sonde
jusquedans
lacollectionliquide intrapéritonéale,en
traversantlabrèche
de lavessiepour
allerétan- cher l’épanchement, laver et désinfecter lapoche
qui le contenait.Bryant conseille pareillement cette
manière
de faire. Il est certain qu’elle semble, àpremière
vue, mériter la préférence sur cellede
Thorp. Si l’onpouvait, àcoup
sûr, parvenir ainsidans
le foyerde
^épanchement,
le laver et le purifier, cette conduite devrait êtreadoptée
en principe etpour
lamajeure
partie des cas;
mais
ilne
peut
en
être de la sorte.En
admettantque
lasonde
arrivedans l’épanchement
péritonéal,ilparaitdifficile,presque
impossible qu’on enlève bien tout lesang
et l’urine épanchés,presque
impossible qu’on répète cettemanœuvre
plusieurs foissans s’exposer à blesser les anses intestinales, car il faut s’attendre à être obligéde
larépé-ter.Si laperforation vésicale estassez large
pour
laisserpasser faci-lement une sonde
destinée à opérer des lavages antiseptiques, elle n’est pasde
celles qui se réunissentper primam,
grâceau
simple retraitde l’organe vide.D’un
autre côté,même en
laissantune sonde
àdemeure pour que
l’urinene
séjournepasdans
lavessieet,partant,ne
ladistende pas, ce qui troublerait le travail de proliférationqui doit conduire à la réparation de la plaie vésicale, il faut s’attendre à ceque
lasonde
sebouche
parmoment,
à ceque
le malade,pendant
sonsommeil, ou
par indocilité, fatigue,manque
d’intelli- gence,ne
garde pas la position qui lui aura étédonnée
et qui devra, naturellement, êtretelleque
laperforationoccupe
lepointle plus élevé, toutescirconstances capablesde donner
lieu àune
ré- tention d’urineou
àun changement
de directiondans son
écoule-ment,
c’est-à-dire,en
définitive,àun
nouvelépanchement
soitintra soitextrapéritonéal.La
boutonnièrevésico-périnéale estdonc un bon moyen, mais un moyen
qui peut être insuffisant, surtoutdans
les lésions intrapéritonéales, parce que, lavessie n’étantpassuturée,on
est toujours exposé plus
ou moins
àun
nouvelépanchement, en
admettantmême
qu’on puisse parvenir à vider et purifier lapoche
pathologique intrapéritonéale, sipoche
ily
a, car le plussouvent l’épanchement
est diffus.Deux
chirurgiens qui se sontoccupés du
traitement des déchiru- res vésicalesdoivent être cités, àpropos
de la cystotomie.Gouley
‘1. Gouley, Ruptureofthe bladderfrom rétention of urine due to stricture ofthe urethra withcasesand remarks {New-Yorkmed. Record,n» 1,1872).
recommande non seulement de
placerun
cathéterpour
retirer Turineépanchée
dans lacavitépéritonéale et le tissu cellulairepel- vien, mais,en même
temps,de
faireune
incision àlavessiedans
legenre
de celle delataille latérale,de
tellesorteque
l’urinene
puisse trouver d’écoulement qu’au dehors.Mason
‘ préconise la conduite quia réussidans lecas suivant:Homme,
vingt-six ans, 1871, Chute d’escalier.Le
lendemain, ténesme vésicalsans pouvoiruriner.La
sonderetire quelques gouttes d’urine.Le
second jour, ventre ballonné : la sonde retire 4 onces d’urinesanguino-lente.
Le
soir, miction volontaire.Le
troisièmejour, péritonitedéclarée, ventre très tendu, renvois, vomissements, enflure des cuisses.On
sent par lerectum unetumeur
fluctuantederrière la prostate.La
taille laté- rale donne passage à une grandequantité d’urine sanglante et permet d’atteindre ladéchirure de la vessie sur sa face postérieure; on ne sent plusdèslorsdetumeur
par lerectum.Deux
joursaprèscette opération, on voit apparaîtredu
gonflement dur et brunâtre au pli de l’aine, au ventre, aux cuisses. Sueurs abondantes exhalant une odeur fortement urineuse.Le
quatrième jour, l’infiltration rétrograde; le quatorzième, convalescence. Guérison lecinquantièmejour.Bartels n’accepte pas ce fait
comme
étantun
casde
déchirure intrapéritonéalede la vessie, ainsique
le prétend son auteur. L’in- filtration urineusedu
pli de l’aine,du
ventre, des cuisses; la len- teurde l’évolutionde
la péritonite s’accordentmieux,en
effet, avec lesallures d’une perforation extrapéritonéale.6“
On
a ouvert la cavitéabdominale par une
incisionsur
la ligne blanche, enlevéau moyen
d’éponges propres les liquidesépanchés dans
le ventre.Tout
lemonde
est d’avisde
suturer la boutonnièreabdominale
; celatombait sous le sens. Maison
separ- tageen deux camps, au
sujetde
l’opportunitéde
suturer la vessierompue.
Les
uns, prétextant la facilitédu rapprochement
des bords d’une solution de continuitéde
la vessie,en
vertude
sa rétractilité,ou
redoutantles dangers d’une suture dont lesagents (filsmétalliquesou
organiques), restent incarcérésdans
le péritoine,ne
veulentpas que, aprèsavoir nettoyé cette séreuse et réuni la boutonnière ven- trale,on
fasseautre choseque
placerune sonde en permanence dans
l’urèthre. C’estainsi
que
se conduisitWalter dans
sa célèbreobser- vationpubliéeen 1862
etque nous
retrouvonsdans
le recueilde
Bartels.1. Mason, Operative treatment of rupture of the bladder. {New-York medical journal;Phïlad. medandsurg. Reporter, sept. 14,p. 246, 1872.)
—
9—
Un homme
de vingt-deux ans reçoit, dans une rixe,un
coup sur le bas-ventre. Il ressentit immédiatement, à ce niveau, une vive douleur qui persista, et, enmême
temps, il éprouvaun
violent besoin d’uriner sans pouvoir le satisfaire.Au
bout de quelques heures, le ventre se tuméfia, le pouls devint petit et fréquent, la respiration s’accéléra; les nauséeset lesvomissementséclatèrent.La
sonde évacuaunefaiblequan-tité d’urine sanglante.
On
porte le diagnostic de déchirure intrapérito- néale de lavessie,et,comme
lessymptômes
allaient s’aggravant d’heure en heure,Walter
procédaà lalaparotomie, dix heures après l’accident.Une
incision longue de six pouces, sur la ligne blanche, ouvrit la cavité abdominale, d’où les intestins gonflés et légèrement injectés s’échappèrentaussitôt.Aprèsavoirenlevédelacavitépéritonéaleenviron unepinted’urineet desang,aumoyen
d’épongesmolles,on aperçutune déchirure dedeux
pouces de long sur le fond de la vessie.La
paroi abdominale futexactement fermée par une suture entortillée.On
plaça une sonde à demeure, et lepatient fut tenu à la diète la plus sévèreet sousl’influence de l’opium.Au
bout d’une semaine, la plaie était cica- trisée.Le
dixièmejour, ondonna un
lavement nutritif.Au
cours dela troisièmesemaine, la sondeàdemeure
fut supprimée; on nel’introduisit ensuite quetoutes les quatre heures.Au
bout de la troisième semaine, l’opéré urinaitvolontairement, et enfinilse rétablit tout àfait.Remarquons-le,
ce point est capital,Walter
a opéréun homme
jeune, dix
heures seulement
après l’accident. C’est certainement à cettepromptitude
d’exécution qu’iladû son
succès. WillettetHeath, dontnous
rapporterons les opérationsmalheureuses
plusloin, ontéchoué
parcequ’ils sont intervenus troptard,l’un trente-sixheures, l’autre quaranteheures après la déchirure. Ces faits cliniques sonten
parfait accord avecles faitsexpérimentaux de Wegner, de
Hyrtl et lesnôtres.D’autres chirurgiens,et
parmi
eux,autantqu’onsache,ditBartels,Benjamin
Bell paraît être le premier, ontproposé
d’aller à la re-cherche de
lavessiepour en coudre
la déchirure avantde
refermer l’incisiondu
ventre. Cette proposition a été faite, dit-on, dèslespre- miers âgesde
lachirurgiepour
les plaiespararmes
àfeu.Cette idée devait,en
effet, venir tout naturellement à l’esprit;
mais
personne, croyons-nous,ne
l’aréalisée surl’homme
ni surlesanimaux. Nous
l’avonstentéeavec succès
dans
quelques-unesde
nos expériencesque
l’ontrouveraplusloin.
Revenons
àBenjamin
Bell.Cetauteur raconte^ que,pour
prévenirl’épanchement
del’urine,on
a conseillédecoudre
laplaiedelavessieàlaparoi
du
ventre.Celaest facile, dit-il,lorsquela1. Benjamin Bell, Lehrbegriff der Wundarzneikunst, Leipzig, 1789, Bd. IV, p. 169.
— 10 —
plaie vésicale siège
en
avant,mais
impossible«sans causerde grandes
douleurs et sans courirdegrands
périls », lorsque laplaiesiègeen
.arrière. Il s’exprimeplus loin
en
ces termes : « Je conseillerais plu- tôtde coudreproprement
la plaieen
pareil cas,de
réduireensuite les parties et detraiter lesmalades comme
je l’ai prescritaux
plaies del’intestin. »Parmi
les chirurgiens militaires,nous voyons Larrey
et Legouest préconiser aussilasuturevésicale. Legouest, parlantde cemoyen,
dit ; « Serait-il
également
applicableaux
plaies pararmes
à feu?Rien
n’empêcheraitde
le tenter, si les difficultés d’exécution n’en- traînaient pas desmanoeuvres
dangereusespour
le malade.La
su- ture à points séparésou
la suturedu
pelletier serait celleque
l’on choisiraiten
prenant laprécaution indispensable decouper
les fils et deles retirer par la plaie vers lequatrième
jour, afin qu’ilsne tombent
pas dansla vessie etne
deviennent pasl’occasionde
dépôts lithiques.La
suture est le seulmoyen
directde
s’opposerà l’épan-chement
d’urineL
»Nous
verrons dans nos expériences le meilleurprocédé
àem-
ployer.Ilfautchoisir celui qui adosse le
mieux
lerevêtement
séreux etqui éviteleplus de toucherà latuniquemuqueuse. Quant
au dan»gerde voir
tomber
les filsdans
l’intérieur de lavessie, il est abso-lument prévenu
par notremode
de suture et parl’emploi des filsabsorbables.
Poursuivons
nos excursions bibliographiques.L’idée de l’ouverture
du
ventre avec suture consécutive de la vessie setrouve consignéedans un
livre plus ancienque
celuide Benjamin
Bell. JacobWoyt
(1716), dans sesLeçons sur
les i^laies mortelles de tout le corpshumam
2, s’exprimecomme
suit : «C’estbien plusgrave lorsqueles côtés
de
la vessiesontatteints; car alors ni la suture ni l’artne peuvent
rien, parce que, lablessure siégeant profondément,l’urines’épancheplus volontiersdansleventre,etque
laplaie extérieure
ne
peut l’éconduire. Ilest vrai qu’en faisantune grande
incision au bas-ventre,en
attirant la vessie au dehorspour
réunir les lèvres de la plaie,on
pourrait guérir la blessure,pourvu que
l’inflammation n’y mît obstacle; mais encore, si l’on réussissait par ce
moyen,
ilfaudrait l’attribuerabsolument au
hasard, etl’onne
serait pas
en
droit d'en rien conclurede
spécial nide
certain. »Celte réflexion terminale
ne témoigne
rienmoins
qu’unegrande
con- fiance del’auteurdans l’excellence de son idée.1. Legouest, Traité de chirurgie d'armée. Paris, 1863.
2.Joh. JacobWoyt, Unterrlcht von den tôdtlichen Wanden desgantzen mensch- jichen Leibes, Dretzen, 1716, p. 417.
11
—
Bartels
ne
s’estpointencorefait d’opinion arrêtée sur la nécessité d’adjoindre à lalaparotomie lasuturevésicale.Ilsedéclaretrèspar- tisande lalaparotomie suivie de la toilettepéritonéale. «Nous pou- vons nous
convaincre par la statistique, dit-il,que
tous les blessés chezlesquelson
apu
diagnostiquer-avecun
certaindegréde
vraisem- blanceunô
blessureintrapéritonéalede
la vessie, et, dansun grand nombre
de cas, ce diagnostic a été vérifiépar l’autopsie; que,dis-je,tous ont
succombé
fatalementet laplupartaprès avoir horriblement souffert. Cette opération estune
tentative, il est vrai,mais une
ten- tative qui s’estune
foisdéjàmontrée couronnée de
succès. » Cas deWalter de
Pittsbourg (Bartels, l. c., p. 778).Ilajouteavec raison,
en
s’appuyant sur lesexpériencesde Wegner
et de Hyrtl,qu’il
importe
de pratiquer la laparotomie le plus vite possible, c’est-à-dire avant qu’ilse soit produitune
résorptiontrop considérable d’urine et autres liquides, avantque
lapéritonite ait atteint degrandes
proportions. Mais,pour
agir vite, ilfautdiagnos- tiquervite.Ce
n’estpoint chose toujoursfacile.La
réactiondu
péri- toine sera le guide essentieldans
la reconnaissance d’unépanche- ment
intrapéritonéal. Bartelsindiqueun
autre signe. Quelquefoisilsurvient,
peu
d’instants aprèsla blessurevésicale,une tumeur mate dans
la région hypogastrique; elle est bilatérale etsymétrique dans
les
épanchements
d’urine intrapéritonéaux. Cela secomprend,
l’urine est libre
dans
le sac péritonéal et secomporte comme un épanchement
ascitique.En
ce cas, faire vite la laparotomie.La
tu-meur
urinaire est,au
contraire, asymétrique, unilatérale,lorsque la perforationde
la vessie est extrapéritonéale. Bartelsdemande
desfaits
nombreux pour
trancher la question de la suture vésicale.Walter
a réussi sans suture; Willett, quil’apratiquée, a
perdu
son opéré. Voici l’observation d’Alfred Willett qui, lepremier, a suturé lavessie chezl’homme, au
direde
Bartels.Un homme
de quarante-huit ans fut jeté à terre, dansune
rixe, et reçutun
coup de piedou un
coup de poing sur le ventre, au-dessusdu
pubis. Outre unevive douleur, il éprouvaaussitôt unesensation
comme
siquelquechose s’était déchiré dans le bas-ventre. Collapsus profond et violentbesoin d’uriner, sans parvenirà le satisfaire.
Au
bout de quatre heures et demie, on letransporte àl’hôpital.Le
ventreesttendu, dou- loureux, la peau froide, le faciès anxieux, le pouls faible, la respiration accélérée, la langue sèche.Le
cathéter évacua d’abord 8onces à la fois,puis encore
un
peu, à différentes reprises, d’urine sanglante.On
diagnos- tique une déchirure intrapéritonéaledela vessie.La
nuit fut trèsmau-
1.Alfred Willett,Abdominal section in a case ofruptured bladder (St. BarthoV Hosp.Rep., vol. XII, p. 209, 222, 1876).
12 —
vaise.
Le
lendemain,ils’écoula,parune sondemétallique,environ 10 onces d’urinecouleur chocolat, en jet interrompuet manifestement synchrone auxmouvements
de larespiration.Uaprès-midi, on
fit la laparotomie.Une
incision de6 pouces de long sur la ligneblanche ouvrit le ventre, de l’ombilicaupubis. L’hémostaseachevée,on incisele péritoine,efaus-sitôtil s’échappe par la plaie plusieurs onces d’un liquide trouble, bru- nâtre, qui répandaitune odeur fortement urineuse.
En même
temps, les intestinstrès-dilatés firent hernie. Aprèsavoirrompu
quelques adhé- rences, on refoula en haut l’épiploon et les anses intestinales, en les recouvrant d’uneflanelleimbibéed’eautiède.Ensuite,onretireencoresoi-gneusement dela cavitéabdominale unedemi-pinte dourinesanglante.
On
aperçoit alors une déchirure de 3pouces et
demi
de long, sur lefond dela vessie, se dirigeantde droite à gauche et d’avant en arrière. Les bordsen furentadaptéset réunis, aumoyen
de huit points de suture enfilde soie.
La
réduction desintestins fut laborieuse.On
ferma laplaiedu
ventre par des points de suture, on plaçaun
drain, et l’on établit àdemeure
une sonde dans l’urèthre.La
douleur disparut à partir de cemoment,
et lemalade pritune
physionomieplus calme. Mais,au bout de quelques heures, ilsurvintune sueurabondante,etils’écoulaparlasondeun
peud’urinesanglante.La
nuit suivante, l’opérédormit avec desinter- mittences;il vomit par deux fois.De
l’urine claire sortitpar la sonde.Le
lendemain matin, l’urines’écoula trouble.,Le patient entra ensuite gra- duellement en collapsus etmourut
subitement dans l’après-midi, après avoir vomi,un
peuauparavant, une grande quantité de liquide trouble.La
morteut lieu vingt-deux heures et demieaprès l’opérationet environ cinquante-deux heures après l’accident. L’opération avait été pratiquée trente-six heures après l’accident.A
Vautopsie, on trouva la plaie abdominale accolée et les intestins agglutinésavec elle et entre eux.La
plaievésicale était aussi accolée, excepté
au
niveau desdeux
derniers points, par où le liquide trouvait passage. Ily avait 2 onces de fluide sanguinolent dans la cavité abdominale, qui présentait en divers points desexsudais récents.Willett
exprime
le regretde n’avoir pasprocédé
plus tôt àcette opération, avant l’apparitiondesphénom.ènes
de péritonite.Il croit aussi qu’ungrand
avenirestréservé à la laparotomie suivie de la suture vésicale.Gomme
cette opération enlève l’urine extravasée et s’attaqueau siègemême
dela lésion intrapéritonéale,illapréfèreau
traitement proposé parGouley
etMason pour
les ruptures de vessie, c’est-à-dire à la taille latéralisée.On
peut expliquer aisément l’insuccèsde
Willett. Ilaopérétrop tard; la blessure avait trente à trente-six heuresde
date, il exis- tait déjà desphénomènes
de péritonite très accusés.D’un
autre côté, la suture amanqué
et c’est à celaque
l’on doit attribuer aussiune bonne
partde
l’insuccès.On
fait, àtort, portertoute larespon-
— 13 —
sabilité
de
cetéchec au
défautde
la suture. S’ilen
est ainsi,on
jugedonc
la suture utile, sinon nécessaire.Le
casde
Willettne
plaide pas contre la suture vésicaleen
général,mais
bien contre la suture vésicalemal
faite; il plaidepour
la suture vésicale bien faite et, par suite, il constitueun argument
défavorable àceux
qui, invoquant le succèsde
Walter, préconisent la laporotomie sans suture de la vessie.Bartels
nous apprend que
l’incisiondes paroisabdominales
a été faitedans cinqcas(dontdeux
sontprobablement
identiques]de collec- tions urinaires extrapitonéalesdiagnostiquéescomme
telles etque
le but désiré, laguérisonne
futmalheureusement obtenu
qu’une seule fois.Il
y
apeu de
temps, laquestiondu
traitementdes déchiruresde
lavessieaété remise
en
discussion,en
Angleterre,à l’occasion d’unnouveau
faitde
laparotomie,celuide
Heath,quiest latroisième opé- rationde
cegenre
pratiquéepour un épanchement
avéréd’urinedans
le sac péritonéal.
Ils’agissait d’un ouvrier âgé dequarante-sept ans, qui avait été jeté
violemment àterre dans unerixe. Christopher Heath posa le diagnostic d’une rupturede lavessie.
Quarante
heures après l’accident, il exécuta la laparotomie,comme
l’avait déjà fait Willett, en 1876. Il eut soin de clore la déchirure, qui était située à la partie supérieure de la paroi postérieure dela vessie et avaitla directiondu
grandaxe del’organe. Il fitune suture continueau
catgut.Après
avoirnettoyé la cavité périto- néaledel’urineetdes caillotsde sang,ilréunitla plaiede l’incisionabdo- minale, à l’exception del’angle inférieur,où
il plaçaun
tube à drainage.L’opérationse terminaparla miseà
demeure
d’une sondedansl’urèthre.Le
blessérendit par la sonde de l’urineexempte de sang; mais, lequa- trième jour, ce liquide redevint sanglant; puis la péritonite éclata, et enfin la mort survint le sixième jour après l’accident.On
trouva, à l’autopsie,quel’angleinférieurdeladéchirurevésicales’étaitréouvert,
Il yavait 6 oncesde sang noir, fétide, dans une poche recto-vésicale
du
péritoine i.
L’insuccès
de
cette opération s’explique, cenous
semble,comme
celui
de
Willett,surtoutparleretard volontaireou
forcéqu’on amis
à lapratiquer et,en
partie,aussi jene
nie point, par la défectionde
lasuturevésicale. Cela
ne
constitue pasun argument
contre l’opé- ration,mais
contre latemporisation
et lesmauvaises
conditionsde
la suture.
Donc,
il faut opérervite et suturer mieux.En
général, la1. Heath Christopher, On the diagnOsis and treatment ofrupture lladder (Média chir. Trans., vol. 62, p. 335, et Royal med. and chir. Soc,, febr. Ho;Lancet march 1j Med. TimesandGaz., march 15, 1879).
_ 14 —
suture continue (surtout avec le catgutqui se résorbe souventtrop vite) est
un mauvais procédé de
déligation. N’étantcomposée que
d’une anse defd,quand
cette anse vient à se relâcher, la suturese disloque surtoutela ligne.La
suture doit êtrefaite à points séparés, avecdu
catgutou du
filde lin, de soie,de
telle sorteque
l’aiguillene
franchisse pas l’épaisseurde
lacouche musculeuse
etque
lamembrane
péritonéale soit largement et solidement adossée.Nos
expériences tendent à l’établirpéremptoirement; on
le verra plus loin.Le
cas deHeath donna
lieu àune
longue discussion àlaRoyal med. and
chir. Societyde
Londres.Heath
fit son rneâculpâ de
lafaçon la plus honorable. Il
blâma
son opération et cellede
Willett sondevancier. Il parla de quatre casde
rupture intrapéritonéaledelavessie arrivés àguérison.
Nous avons
déjàditque
Bartelsn’admet
point ces diagnostics. Il estpersuadé que
les auteurs se sont fait illusion, qu’ils ont pris des blessures extrapéritonéalespour
des intrapéritonéales.Sur
les94
observations positives, indubitables, qu’il a recueillies, de perforations de la vessie avecépanchement
d’urine dansle péritoine, ilne
trouve qu’une seule gnérison, celleque
Walter, de Pittsbourg, eutlebonheur
d’obteniren
1862. (Bar-tels, 1. c., p. 756.)
— Heath
termina sa confessionen
prenantla résolutionde suivre à l’avenir l’exempledonné
parThorp
: faire lecathétérisme parladéchirure
de
la vessie, vider et laver par cette voie la cavité péritonéale.—
Ilne
serait pas sans utilité, cenous
semble, avant de seprononcer
ainsien
faveurde
ce procédéde Thorp,
de posséderun
certain degré de certitude à l’endroitde
la pénétration péritonéalede
l’épanchement,pour
ce qui regarde le cas particulierde
Thorp.Nous
avonsvu que
rien n’estmoins
démontré.Lorsque
ladéchirurene
peut êtreatteinte avec la sonde,Heath
déclarequ’il essayeraitla taillelatéralisée.Bryant regarde
comme
difficile etdangereuse
lamanœuvre de
Thorp.A
sonavis, il seraitpréférable derecourir à la cystotomie périnéale et de purifier, par cettevoie, le péritoine de l’urine et
du sang
quipeuvent
s’yêtre épanchés. Willett, qui avait étéblâmé
par Heath,ne
partage paslerepentir de son imitateurmalheureux
ettropprompt au découragement.
Ilneluisemble
pasque
lecasdeHeath
soit décourageant au pointdeforcer à l’abandon delaméthode. Son ma-
laden’a-t-ilpasétébien
pendant
quarante-huit heures, dit-il,jusqu’aumoment où
laplaievésicales’estréouverte?Le
cathétérisme,donton
parle,
ne
sauraitpermettre l’enlèvement des caillotsde
sang. Willett referait, lecas échéant, la laparotomieen donnant
tous ses soins à la suturede
lavessie.Holmes
estdu même
avis; ilpréfèrede
beau-— 15 —
coup
lamanière de
Willett àcellerecommandée
parThorp
et Bryant.Morris
exprima une
opinion semblable. Si la rupture de lavessie s’est produiteàl’intérieurdu
péritoine,dit-il, il convientderecourir à lalaparotomie deWillett; si elle n’empiète pas sur le péritoine, la cystotomie suffit.—
Cettemanière de
voir paraît sage.Quelque temps
apres la discussionque nous venons
d’analyser, Morris ' reprit cette question de l’intervention opératoiredans
les déchirures de la vessie, à l’occasion d’un fait qu’il eut à observer et qui serésume comme
suit :Un homme,
âgé de trente-neuf ans, avait, vingt-quatre heures avant son admission à l’hôpital, étérenversé à terre, dans une rixe, et l’eçu de son adversaireun
coupdegenou
sur leventre, sa vessie étant pleine.Le
maladeressentit aussitôtlesdouleurslesplus vives àl’hypogastre. Malgrélespressions variéesque le chirurgien exerça sur cetterégion, il ne put retirer,au
moyen
de lasonde uréthrale introduite trente-sixheures après letraumatisme, plusde trois quarts depinted’urine contenant des cail- lots de sang. Desphénomènes
de nausées et de collapsus ne tardèrent pas à se montrer; laviedu
blessé fut très sérieusementcompromise.Ce
nefut quele douzième jourqu’il apparutun mieux
réel.Le
traitement consista uniquement enl’emploi dela sondeà demeure.Morris
émet lui-même
des doutes surlescommunications de
cette plaie de vessie avecle péritoine.Dans
sonincertitude, il la faitintra et extrapéritonéale. C’est de la prudence,mais
ce n’est pasune
dé- monstration. Ilraconte, à ce propos, qu’ila pratiqué l’autopsied’unmalade
quimourut
trois jours aprèsune
chute d’escalier. Il trouva surlaparoi postérieurede lavessieetà droiteun
troude
ladimen-
siond’unœuf de
poule.A
ce niveau,le péritoineétaitdécolléetpré- sentaitune
plaie sanslamoindre apparence
d’inflammation. Morrisen
conclut qu’unelésiondu
péritoineavecépanchement
d’urinedans
le sac péritonéalpeutexistersans entraîner depéritonite. Il partde ce fait
pour
déconseiller les opérations quine
sont pas urgentes,malgré
lepronostic défavorable des déchiruresde
lavessieabandon-
néesàelles-mêmes
(sur 169cas,Morrisne compte que
18guérisons.— Emprunté
àBartelssans doute).Ilveutrestreindreleplus possible lalaparotomie avec suturede
lavessie aussi bienque
la cystotomie périnéale.Lorsque
laplaie siègeen
avanteten
haut surle corpsde
lavessie,
comme dans
soncas, lasuture, dit-il,ne
pourrait.être exé- cutée qu’aprèsavoir agrandi la solutionde
continuitédu
péritoine.De même,
lalaparotomien’auraitpas dechance
d’aboutir,lorsquela1. Morris Henry, Clinical lecture on rupture of the bladder and its treatment {_Med. Times andGaz,,nov. 29, p. 603, 1879).
— 16 —
’plaie vésicale se trouve
en
arrière au-dessusdu
point de réflexiondu
péritoine. Morrisne
considèrela cystotomie périnéalecomme
in- diquéeque
lorsque la vessie a été touchée à sa base, c’est-à-dire, lorsque lepéritoinen’estpas intéresséparletraumatisme
etqu’iln’y a pasd’épanchement
urineux, ailleursque dans
le tissu conjonctif pelvien.En
thèse générale, dit-il,il faut seborner
à l’emploi delasonde
àdemeure dans
lesplaiesde
lavessie.Nous
n’avons pas besoin de discuter ces idéesde
Morris, après les critiquesauxquellesnous nous sommes
livrédans
lespages qui précèdent.Tel estl’historique
de
laquestion.II
Expériences.
Avant
d’exposer quelques-unesde nos
expériences,nous croyons
utile d’enregistrer certains détails
anatomiques
etde
décrire lemanuel
opératoirepour ceux
quivoudraient les répéter.A.
Détailsanatomiques. — Pour nous
rendrecompte de
l’étatde
lavessieàson
maximum
deréplétion, chezlechien,nous avons
incisé laparoi abdominale, après avoir pousséune
injectionforcéedans
le réservoir urinaire.Dans
cet état, la vessie est pyriforme, sa face antérieure vienttoucher la paroiabdominale
dont elle estpresque
toujoursséparée parde l’épiploon; ellemesure
environ 8 centimè- tresde
long sur4
à 5 de large; ses parois sontminces
et assez transparentespour
qu’on aperçoive le niveau etles fluctuationsdu
liquide qu’ellecontient.
La
vessie est recouvertedans
tous lessens par le péritoine; cette séreuse luiforme
des espècesde
ligaments larges qui se portenten
arrièrede chaque
côtédu
rectum,en
déli- mitantun grand
cul-de-sac recto-vésicaLDes
rapportsdu
péritoine avecla vessie, chez le chien, il résulteque, chez cet animal, toutes lesplaies de la vessie sontforcément
intrapéritonéales.De chaque
côté delavessie, quelquefois aussi sur ses faces antérieure et posté- rieure,on
voit des vaisseaux sanguins,en
saillie sous le péritoine, aller de l’extrémité inférieure ausommet, en
décrivant desméan-
dres, d’oùpartentles arborisations qui constituent le réseau vascu- laire de cetorgane.
Sur un
chien detaillemoyenne,
laparoi vésicale àl’étatde
vacuité et de rétractionmesure
7 millimètres d’épaisseur, 1 millimètrepour
le revêtement péritonéal, 5
pour
la tuniquemusculeuse,
1pour
lacouche muqueuse. Cesmesrues
sontprisessurl’extrémité supérieure.- n —
Avec une
telle épaisseur, il estdonc
facilede
faireune
suturesang
atteindrelacouche muqueuse. On compte beaucoup
surla rétractionde
la vessiepour boucher une
perforation; les plaiesde
la vessiediminuent
réellement d'étendue par le seul faitde
la rétractionde
l’organe. Mais ce retraitne
peutdonner
pareil résultatque pour
les piqûres
proprement
dites, les ponctionsde
petit diamètre.Les grandes
incisions de 3, 4,5
centimètresne
sont pas effacéespar ce retourde
lavessiesur elle-même, lorsqu’ellesevidede
son contenu.Cesincisions
ne
perdent pas plus de10
à 15millimètres.Dans
des cas exceptionnels, et lorsque la solutionde
continuité siège surla paroi antérieure, desperforationsmoyennes de
la vessiepeuvent
se réunirspontanément, per primam,
grâceau
voisinagede
l’épiploon qui recouvreen
généraltoute sa face antérieure, sonsommet
etsesbords
latéraux. L’épiploon sejettecomme un vélum
sur la perfora- tion, s’y applique,y adhère promptement
et remplit ainsi l’officed’un opercule, àla faveur duquelles lèvres
de
la plaie s’agglutinent par des produits plastiques.B.
Manuel
opératoire.— Nous nous bornerons
à formuler ici les procédés auxquelsnous nous sommes
arrêtés après bien des es- sais etque nous nous permettons de recommander
àceux
quivou-
draient répéternos
expériences. Ils peuvent, d’ailleurs, trouver leur application chezl’homme, dans une
certainemesure
.
1“
Ouverture du
ventre, laparotomie.Se
placeràdroite, chercherle
bord
supérieurde
lasymphyse
pubienne.A
quelques millimètres au-dessus, enfoncerd’uncoup
secetretenulabranche
pointue d’une pairede
ciseaux,jusqu’à ce qu’on senteque
la paroiabdominale
est traversée,comme dans une
ponction d’ascite.Les
ciseauxqui étaient tenuspresque
verticalement, sont abaissés ensuite, autantque
pos- sible, etl’oncoupe
la paroi dans touteson
épaisseur, surl’étendueque
l’onveut,de
basen
haut naturellement. C’est ceque
j’appelle lalaparotomie sus-pubienneen un
temps.Ilsuffît d’une boutonnièrede
3à5
centimètrespour
extraire la vessie.Grâce
à cette exiguité d’ouverture, les intestinsne
sortent pas, chose très importante. Carj’aifortbien noté
que
lesanimaux
dontlesintestinsétaient restésau
dehors prenaient plus facilementde
la péritonite,malgré
l’acide phénique.Quand on
s’est bien tenu sur la lignemédiane, on
n’a jamaisde
vaisseau àlier.Chez
le chienil fautavoir soin d’écarter, d’un centimètre à gauche, la verge,pour tomber
juste sur la ligne blanche.2“
Recherche
etextractionde
lavessie.Plonger
l’indexde
lamain gauche dans
la boutonnière;ilrencontre àcoup
sûrlavessie,pour peu
qu’ellecontiennede
l’urine. Sielleest toutàfaità sec,il fautVINCENT. 2