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Reference
Quel espace public pour la presse ?
AMEZ-DROZ, Philippe René
Abstract
Chronique consacrée à la révision de la Loi sur les médias électroniques en Suisse. Effets sur la presse écrite. Positionnement dans l'espace public dans le contexte de fragmentation des médias historiques.
AMEZ-DROZ, Philippe René. Quel espace public pour la presse ? La Tribune de Genève , 2018
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:109696
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Date: 17.10.2018
Tribune de Genève / ImmoPlus 1211 Genève 11
022/ 322 40 00 www.tdg.ch
Genre de média: Médias imprimés Type de média: Presse journ./hebd.
Tirage: 36'100
Parution: 6x/semaine N° de thème: 377.116
Ordre: 1094772 Page: 2
Surface: 22'788 mm²
Référence: 71266556
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Quel espace public pour la presse?
L'invité
Dr Philippe Amez-Droz
Chargé de cours Med i@LAB-Genève
La procédure de consultation autour de la future loi sur les médias électroniques (LME) s'achève sur un constat d'insatisfaction générale, ou presque.
Les éditeurs nationaux ne veulent pas entendre parler
d'aide directe mais sont prompts à soutenir les aides indirectes (poste, TVA). Les éditeurs régionaux, appuyés depuis peu par des cantons et des villes titillés par la disparition de titres,
sont divisés entre ceux qui appellent de leurs voeux une aide directe à la production de contenus journalistiques et ceux qui sont favorables à
l'amélioration de l'aide à la distribution, voire à la transition digitale sous la forme de programmes de formation.
Les médias électroniques régionaux, qui devraient se réjouir de la nouvelle loi, craignent une fragmentation accrue puisque, à l'ère de la radio et de la télévision numériques, les chaînes pourront se démultiplier et revendiquer
quelques miettes de la part de la redevance qui leur est réservée
(6% en 2019).
Quant à la SSR, les
commentaires attendront. Elle doit réduire son assiette de 100 millions dans un contexte délicat de redevance plafonnée et de recettes publicitaires en baisse puisqu'elles profitent surtout aux chaînes étrangères.
Et, comme pour la presse écrite, elle est confrontée aux acteurs dominants de l'internet, qui n'ont pas les mêmes exigences de service public.
Fort heureusement, dans ce climat économiquement morose, ici et là, des manifestations d'apaisement de l'écosystème médiatique suisse témoignent d'un après- «No Billag». C'est le temps de repenser l'offre. Car, dans les faits, celle-ci est surabondante et confrontée à la double demande qui détient le pouvoir: celle des utilisateurs et des annonceurs, qui observent, tous deux, ces vieux médias de masse ringardisés par les youtubeurs, instagrameurs et autres influenceurs du Web si prompts à communiquer là où les médias historiques
s'évertuent, d'abord, à informer.
Dans un article paru dans un ouvrage collectif, «Devenir public, modalités et enjeux»
(Mediacritic, 2017), Loïc Ballarini, chercheur au Centre de
recherche sur les médiations à l'Université de Lorraine, souligne que, trop souvent, «l'espace public est réduit à sa dimension médiatique. Comme si l'opinion publique était un sous-produit naturel des grands médias d'information, eux-mêmes abandonnés à un statut de «boîte
noire» bien commode (...)»
Repenser l'espace public, aujourd'hui, ce n'est pas être de droite ou de gauche, libéral ou conservateur, c'est être un acteur participatif de la citoyenneté.
C'est penser non en termes d'offre mais en termes d'espaces publics, au pluriel, sachant qu'ils sont fragmentés, éparpillés en une multitude de communautés reflets de multiples tensions mais toutes nécessaires à la
conversation de la vie locale, régionale, nationale. Intégrer le rôle éminemment laïque de la presse d'information, en tant que gardienne d'une certaine vision du bien commun, c'est affronter le «bluff technologique» (Jacques Ellul) des réseaux sociaux, ces nouveaux lieux de culte où se déchaînent les opinions et le communautarisme. L'aide à la presse écrite, imprimée ou en ligne, se justifie dès lors dans la future LME en raison d'un savoir- faire indispensable en
démocratie, celui de souder ces espaces publics en un seul et même socle citoyen.
L'invité
Dr Philippe Amez-Droz
Chargé de cours Med i@LAB-Genève