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A propos de. La part Maudite..." Mal de femme. La perversion au féminin". d'Alain Abelhauser

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A propos de. La part Maudite...” Mal de femme. La

perversion au féminin”. d’Alain Abelhauser

Thierry Lamote, Marie Jean

To cite this version:

Thierry Lamote, Marie Jean.

A propos de.

La part Maudite...”

Mal de femme.

La

perver-sion au féminin”. d’Alain Abelhauser. L’Évolution Psychiatrique, Elsevier, 2014, 79, pp.598-604.

�10.1016/j.evopsy.2014.05.004�. �hal-01497519�

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L’évolutionpsychiatrique79(2014)598–604

ScienceDirect

À

propos

de

.

.

.

La

Part

maudite.

À

propos

de

.

.

.

«

Mal

de

femme.

La

perversion

au

féminin

»

d’Alain

Abelhauser

Thierry

Lamote

(Psychologue

Clinicien,

Docteur

en

psychanalyse

et

psychopathologie,

Chercheur

associé

à

l’Équipe

de

Recherche

Clinique

en

Psychanalyse

(ERC))

,

Marie

Jean

(Psychologue

Clinicienne,

Docteur

en

psychopathologie

clinique,

Chercheur

associé

à

l’Équipe

de

Recherche

Clinique

en

Psychanalyse

(ERC))

Laboratoiredecliniquespsychopathologiqueetinterculturelle(LCPI–EA4591),universitéToulouse2–LeMirail,5, alléesAntonio-Machado,31058Toulousecedex09,France

Rec¸ule31mai2013

DansLesexeetlesignifiant[1],sonprécédentouvrage,AlainAbelhausers’étaitproposéde mettrelesconceptspsychanalytiquesàl’épreuvedelacliniqueenrepérantl’insistancedusexuel danslesfaillesdelaparole.Ily faisaitrésonnerleséquivoquesdulangagepourencernerles bords,laissantsimplemententrevoir,dans lesfulgurancesdelacliniqueordinaire,l’excès(de jouissance)quiromptàtoutmomentl’illusiond’unitéetdemaîtrisedontsebercentlessujets. C’estmaintenantcetexcèslui-même,au-delàdesmots,l’espaceouvertdecequeLacannomma la«jouissanceAutre»,quifaitl’objetdesonnouvelouvrage,Maldefemme.Laperversionau féminin[2].Danscelivrequiestàlafoisunbeautémoignagedesapratiquepsychanalytiqueet unsubtiltravaildesémiologieetd’archéologiedusavoirmédical,AlainAbelhauserentreprend demettreensérietouteunepalettedepathologiesquitouchentpréférentiellementlesfemmes (anorexie,SyndromedeMünchhausen,etc.).Iltente,par-delàleurphénoménologiebaroque,d’en démasquerlastructurecommune,àsavoirlaperversion:uneperversion«auféminin».Car«la perversion,rappelle-t-il, estbienunestructure,ayanttitrecommetelleàaccueillirtout“type” deparlêtre.Mais[...]ilya,defait,deuxfac¸onsdevenirl’habiter,dèslorsquelaconstruction

AbelhauserA.Maldefemme.Laperversionauféminin.Paris:Seuil;2013405p.Auteurcorrespondant.

Adressee-mail: thierrylamote@yahoo.fr(T.Lamote).

http://dx.doi.org/10.1016/j.evopsy.2014.05.004

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subjectiverequiertdessujetsquiysontengagésqu’ilssepositionnentaugrédelalogiquedela sexuation»([2],p.304).Chaqueparcelledulivreportelamarquedecetteidéeannoncéedèsson sous-titre.Aupointquel’ensembledeladémonstrationparaisseirriguéparla«forcestructurante» decettehypothèsequel’onpeutalorsdire«élémentaire»,ausensdeLacan,c’est-à-direnonpas ausensd’unnoyaupremier,enfoui,quiseraitrecouvertetenveloppéparl’ensembledutextequ’il auraitsourdementimpulsé,maisélémentaire«commel’est,parrapportàuneplante,lafeuilleoù severrauncertaindétaildelafac¸ondonts’imbriquentets’insèrentlesnervures–ilyaquelque chosedecommunàtoutelaplantequisereproduitdanscertainesdesformesquicomposentsa totalité»([3],p.28).Or,ilfautbienadmettrequecettehypothèsed’uneperversionauféminin vientpourlemoinsbousculerlathéorie.

1. Unethèseintroduiteencinq«actes»...

L’auteurentame sonproposenmettantànulaconstruction,parlesavoirmédical,de cinq «maladies» quinous sontdevenuesdésormaisplusou moinsfamilières, en commenc¸antpar celle quel’on appelledans latraditionfranc¸aise, depuislestravaux deLasègue (1873)etde Huchard(1883),«anorexiementale».

Dansce «1er acte» ([2],p.35–52),il meten avant,àpartir dutravailprincepsde Charles Lasègue,un«processusentroistemps»:«unejeunefilleentre15et20ans»,pourquelqueraison émotive,expliqueLasègue,cessedes’alimenterdéclenchantainsilamaladie;vientensuiteune périoded’étatdurantlaquelle,avecun«contentementvraimentpathologique»,cettejeunefemme vaconsulterlemédecin;suivid’untroisièmemomentoùlecorps,spectaculairementamaigri,se détraque.Deuxtraits,tirésd’uneinterventionfaiteen1859parledocteurMacé,serontlapierre angulairedelathèsed’AlainAbelhauser:d’unepart,cesjeunespatientesmaltraitentleurcorps aupointques’yimprimentlesmarquesdelamort;d’autrepart,ellessuscitentchezlemédecin auquelellesexhibentavecunetroublanteindifférencececorpsdevenucorpse,unetelleréaction qu’il«batenretraitedevantleurrésistancedésespérée».Quelleestdonccetteétrangejouissance quinetrouveàsemanifesterqu’encecorpsdélabrésoumisavecdéfiauregardmédical?Quatre autrespathologiesvontnousengagerparpetitestouchesàsuivrel’interprétationdel’auteur.

En1908,«2eacte»([2],p.53–65),leprofesseurDieulafoyprésenteunemaladienouvellequ’il

baptise–aidéduromancierPaulBourget–«pathomimie»:lessujets«porte[ntici]délibérément atteinteà[leur]proprecorps,puisdemande[nt]auxmédecinsdediagnostiquer[leurs]mauxet delessoigner,alorsmêmequ’il[s]continue[nt]àlesinduireouàlesentretenir».Maisleplus troublantestqu’ils«nesimulentlamaladiequepourleurseulesatisfaction,ondiraitpresque pour leurplaisir».Lemêmeplaisir serarepéré parleDrAsherdansladescriptioninaugurale qu’ilfaiten1951duSyndromedeMünchhausendansThe Lancet–«3e acte» ([2],p.67–78). RichardAshers’intéresseàdessujetsquiviennentconsulterenmettantenavantdestroubles, plusoumoinsgraves,présentésavecunehistoiremédicalegénéralementcompliquée,etdontles plaintesàlafoisvivesetpeuconvaincantess’accompagnentdedocuments(médicaux)laplupart dutemps«douteux».IlprésentealorsdesmaladesprochesdespathomimesdeDieulafoy,àceci prèsquecesderniers«exhibentdesmauxpatents(maisqu’ilsonteux-mêmescréés),làoùles autresexhibentplutôtdesfablesdestinéesàfairecroirequ’ilssontmalades».Maisiciaussibien quelà,lespatients «netirentaucunbénéficede leurconduite, sice n’estceluide nombreux examens etopérations injustifiésetinvalidantsqu’ils récoltentet auxquelsils se prêtentavec unebonnevolontéégalementremarquableetsuspecte»–d’autantplussuspectequecesactions ne visent aucun bénéficeimmédiat, sinon «unintense désird’abuser tout unchacun leplus possible». LeSyndrome de Lasthénie deFerjol –«4e acte» ([2],p.79–90)– misaujour en

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1967par le professeurJeanBernard, touche,lui,des femmes quis’infligent dessaignements assezdiscretspourpasserinaperc¸us,pourensuitevenirmontrerleurcorpsanémiéenconsultation médicale.Ellesjouissentalorsnonseulementdelastupéfactionqu’ellessuscitentmaiségalement dudoubledésarroiducorpsmédical,car,«impuissanttantqu’iln’apasisolél’étiologiedumal [les“spoliations”],ill’esttoujoursautantunefoisqu’ill’adécouverte,puisquecelan’aboutitle plussouventqu’àlafuitedespatientes».Nerestentalorsquelesilenceetl’impuissancefaceà cesconduitesdontlessujetseux-mêmesnedisentrien.Retenonscesdeuxtraits,quitraversent l’ensemblede ces présentations: lerien etl’impuissance. Ilsressurgissent sousunetournure monstrueusedans leSyndrome deMeadow,au«5e acte»([2],p.91–99),lequelnepeutque suscitercequestionnement:pourquoidesparentsenviennent-ilsàprovoqueretàentretenirdes pathologiesgraveschezleursenfantsqu’ilssoumettentensuite–encoreunefois–auregarddes experts?Danslamassedesconnaissancesaccumuléesdepuissadécouverteen1977, retenons-endeuxquiconfirment(enlesdéplac¸ant)lesconclusionsprécédentes:toutd’abord,làoùnous avionsavanttoutaffaireàdesfemmes(souventjeunes),nousapprenonsquecesontici«presque toujours[nonplusdesfemmesentant quetelles,maisdesfemmesentantque]desmèresqui sontresponsables destroubles»;ensuite, «queleur ingéniositéetleurmanque descrupuleà tromperlesmédecinsetàmettreàmalleursenfantsn’ontguèredelimite».Commentinscrirele foisonnementnosologiquedece«maldefemme»danslaclinique(psychanalytique)dusujet? L’auteuryvientparuncheminemententroisétapes.

2. ...troisétapes...

L’anorexieluifournittoutd’abordunetrame:certainssujets(féminins)s’enprennentàleur corpsavantdeleprésenteràunAutre(unefiguredemaître–médecin,généralement)pourleréduire àl’impuissance.Jusque-là,lesélémentsfournisparAlainAbelhausersemblentdonctracerles contoursdelapositiontraditionnelledel’hystérique,quiinterpellelemaîtrepourlepousserà accoucherd’unnouveausavoirconcernantsondésir(àelle)–savoirqu’ellepourraalorsmettre enéchec,enuncyclepropiceàfaireavancerlaconnaissance,deratageenratage.Maisilintroduit rapidement(deuxièmetempsdesadémonstration)desélémentsquiouvrentd’autrespistestout enprécisantsonprojet.Ilenappelletout d’abord,dèsle«2e acte»,auprofesseur Dieulafoy. Celui-ciinvoque,pour expliquerl’étonnanteconduite despathomimes,«lajoie intime[qu’ils doiventéprouver]àsefaireplaindre,lasatisfaction[qu’ilsgoûtent]àmystifierleurprochain». L’idéedemystification,unefoisintroduite,modifiesubtilementl’apparenteinnocencedonton pouvaitencorecréditerl’anorexique.Cettepenteàlatromperieseraconfirmée,au«3eacte»,avec l’intense«désird’abuser»prêtéausujet«Münchhausen».Unefois introduitceténigmatique plaisirdemystifier,resteàendécouvrirlaclé:elleseradonnéevialeSyndromedeLasthénie deFerjol,lorsquel’auteur relèvel’undesdiagnosticsposésantérieurement–celuid’«hystérie perverse».Lemot«perverse»,ainsiavancé,ouvreautroisièmetempsdeladémonstration,celui oùseradécritleSyndromedeMeadow.AlainAbelhauserrappelleque,derrièrel’inadmissible (attenterà lasantéetà lavie desonenfant), se logele«bénéfice épouvantable,inavouable, attaché[pourlesparents]àlamaladiedeleurenfant».Rendreunenfantmalade,voireletuer, «relève,certes,d’uneréalitéterrible,d’unacteodieux,maisaussid’unfantasmepuissant,voiredu fantasmeparexcellence»:ininterrogeable,ilvoileautantqu’ilrévèlel’horreurd’unejouissance innommable.C’estcettejouissancequel’auteurvadésormaistenterdecernerenresserrantson proposautourdestracesquienapparaissentdanslacliniqueetdanslaculture,avantd’enveniràsa thèse:l’articulationdelastructureperverseàcettejouissanceindicible,spécifiquementféminine,

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queLacannomma«jouissanceAutre».Maiscenouageinéditnevapasdesoi,aussil’auteur va-t-ill’amenerpardiversescirconlocutions.

3. ...etdeuxaxes

Ilramassetoutd’abord([2],p.103–111)cemalféminin«protéiforme»endeuxpôles:d’un côté,ilsitue«l’atteinteaucorps»,etdel’autrel’atteinteà«l’autresocial».Unaxe,enformede continuum,s’élaboreainsiavec,positionnésàl’undesextrêmes,«côtécorps[...](làoùcequi semblecompterleplusestlefaitquecesoitlecorpsquisoitatteint)»:lespathomimes;tandisque «côté“mensonge”(làoùcequisemblecompterleplusestlefaitqu’ilyaitduperiedel’autre)», se trouveraientlesMünchhausens.Entrelesdeux,lasthéniquesetanorexiquesmaintiendraient en étatdequasiéquilibrel’atteinteaucorps etla«duperie»del’autre.Uneambiguïtéestici maintenueparl’auteurentre«autre»et«Autre»:tantôtl’«autre»(enminuscules)renvoieau corpsdusujet,tandisquel’«Autre»(majuscule)épinglelemédecin(oulecorpsmédical);tantôt leschosesserenversent:l’«Autre»désignealorslecorpsdusujet,etl’«autre»celuiauquelil lemontre.Lesdeuxécrituresrenvoientpourtantàdeuxinstancestrèsdifférentes:lepetitautre («a» minuscule)estl’autre-même,celuiavecquil’onentretient unerelationdestricteégalité spéculaire,alorsquelegrandAutrerenvoieàlaradicalealtéritédel’instancetierce.D’uncôté, donc,côté«petitautre»,lerapportsesituesurl’axeimaginaire(celuidelaconfusiondesplaceset del’illusiondecomplétude),del’autre(«grandAutre»),cerapportsesituesurl’axesymbolique (fondésurl’irréductibledistancedumotàlachose).Loind’êtreanodine,cetteambiguïtéseral’un despiliersdeladémonstration.Intéressons-nouspourl’instantausecondmouvementdemiseen ordre([2],p.115–170),quisuccèdeimmédiatementàcettepremièrepolaritécorps/autre.

Àpartirdufouillis(àpremièrevue)emmêlédemultiplesréférencesculturelles–laLasthénie de FerjoldeBarbeyd’Aurevilly(etses antécédentslittéraires),lafigurebiface duvampireet dunécrophile–,AlainAbelhausercommenceparexciperlemotiflittéraireduvioldelafemme morte (ou inconsciente). Corpssilencieux où s’est éteintel’«horror di femina» ([2],p.155) la«belleendormie» infiltredesaprésence spectralel’imaginairedespeuples–révélantainsi lefantasmesous-jacentd’unpossibleévitementdelarencontreavecl’innommablejouissance féminine.L’auteurarticuleensuiteàcepremiermotif(lafemmemorte),viauneétudedequelques grandspersonnagesmythologiques(She,«àlafoisfemmeetmère»,vampirisantpeupleetamant desonamourdévorant;Médée,tueusedesespropresenfants),lafiguredela«vraiefemme».À l’inversedelafemmemorte,la«vraiefemme»,néedel’intricationd’unejouissancedédoublée (celle dela mèreetdelafemme), incarneavec éclatla«menaceféminine enmajesté» ([2], p.156):ellerappellel’impossibilitéd’échapperàl’horreurouderéduirelachoseausilence.Une nouvelle polaritéestainsi promue,complexifiantetdéplac¸ant lebinôme«corps/autre». D’un côté,noustrouvonslasérie«femmemorte,évidéedesajouissance,inoffensive»;del’autre,la séquence«femmevraie,menac¸ante,complétéed’unejouissanceinnommable».Soitlenouveau binôme:«jouissanced’hommestiquée»/«jouissanceindomptable».C’estalorsàlalocalisation –aucroisemententrel’opérationlangagièreetsonsolde;lecorps(dusujet)etlecorps(médical); l’autreetl’Autre–dece«maldefemme»parlequels’exprimecetteinquiétantejouissanceque l’auteur va s’atteler pour tenter de le situer dans la structure perverse. Mais qu’appelle-t-on «jouissance»?

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4. LaChose,lajouissanceetl’objeta

Lanotion dejouissance estcentrale chez Lacan.À telpointqu’elle estvenue déplacerla questionirrésolue de Freud:là oùce dernier se demandait«Que veutunefemme?»,Lacan s’interrogeasurcequispécifieraitlajouissanceféminine.Maisqu’est-cequelajouissance,si, commel’affirmeAlainAbelhauser,ellerenvoiemoinsauplaisirqu’àunetensionquiviseson «forc¸age»pourtouchersonau-delà?Pourlacernerauplusprès,ilfautseplacer,avecFreud, «danslasituationd’unêtrevivantquisetrouvedansunedétressepresquetotale,quin’estpas encoreorienté dans lemondeet quirec¸oit desexcitations dans sa substancenerveuse» ([4], p.14).L’êtreainsiassailliparceterrifiantdébordementdesensationsestle«Moi-réel»mythique posé par Freud au commencementde la vie: le nouveau-né inentamé par lesignifiant –être vivantjetédansle«réelpur,antérieuràtoutesymbolisation»([5],p.72),lieud’unejouissance illimitéequeLacan,aprèsFreud,nommadasDing,laChose.Dufonddesadétresseetdeson impuissanceprimordiales,l’infansréagiraàcetenvahissementparuncrinu,surgidirectementde lamatièrevivante,quivatrouverunéchodansl’Autre(maternel),dontlaréponsetransformera rétroactivement ce crien un premier signifiant. Cetterencontre avec l’Autre aurapour effet d’extrairelesujetduRéelpleindanslequelilsetrouvaitpris,pour l’introduiredanslachaîne signifiante.Lenouveau-né,ainsi«apparolé»,c’est-à-direappeléàdevenirsujetdulangageparla paroleinvoquantedel’Autre,estalorsarrachéàl’universcontinudelasensationpourêtreinséré danslechampdiscontinudusymbolique:aumomentoùilgagnelemondedesmots,ilquitte doncdéfinitivementceluidelaChose.Orcelle-ci,affirmeBraunstein[5],estenréalitéuneffetde l’intrusionduSymbolique:c’estlaLoidulangage«quicréelaChoseetladéfinitcommeperdue» ([5],p.73–74).LaChose(etlajouissanceperduequis’yrattache)n’estdoncquelatracelaissée parsaperte.Etc’estdanslevideainsicréé,surcefondd’absenceprincipielle,queleschoses –cequeLacannomma«objetsa»–,quinesontquedessuccédanésdelaChose manquante, vontpouvoirapparaîtreetpeuplerlemondedesinnombrablesobjetsdufantasmeautourdesquels tourneralapulsion,portéeparlademandeadresséeàl’Autreetorientéeparledésir.Lesujet, mordu parle langage,devra renonceràla «Grandejouissance initiale» autoérotiquepour la mettre enjeu dans ses transactions avecl’Autre,tandis quelajouissance restante,désormais prisedansl’ordresymbolique,glisserahorsdesoncorps:ellevad’abords’attacherauxorifices corporelsquifont l’objetd’unedemande del’Autre(leszones «prégénitales» des«phases» psychosexuelles),avantdes’ordonnerautourdu«Phallus» dontl’effetmajeur estdeviderle corpsdelajouissancepourlocalisercelle-ciendesobjetshors-corps.Détaillonsceprocessusdit de«métaphorepaternelle»quivanousintroduireàlathèsed’AlainAbelhauseretauxquestions qu’ellesoulève.

5. Perversion«auféminin»...ouhystérie?

La métaphore paternelle ([6], p.557) est une écriturelogique du processus œdipien: elle décritl’opérationparlaquellelesignifiantpaternel(leNom-du-Père),ennommantledésirdela mère,frappel’Autred’interditetinscritàsontermelesignifiantdumanque,lePhallus().Ce signifiantphalliquedésignedonclafailledel’Autre(lamèreaussibienquelepère),lemanque qui lefaitdésirant:il indexe levideoù viendraprendreplaceleNom-du-Père. Illeste aussi tout objetse proposantàlapulsiond’un moins-de-jouirquilerendra foncièrementdécevant, marquant ainsicombien lavoied’unejouissance complèteestinterditeàquiparle–leretour àlaChoseprimordialeétantimpossible.Leprincipaleffetdelamétaphorepaternelleestdonc depurgerlecorpsdesajouissance,laquelle,aprèsavoirétéexternalisée,laisserapoursoldede

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sonopérationunreliquatdejouissanceautoriséeauparlêtre:cellequipasseparlelangaged’où ellenecroiseraquelessemblantsdelaChose(lesobjetsa,inéluctablementinsatisfaisants), à savoirla«jouissancephallique»,«limitée,circonscriteet,d’unecertainefac¸on,régulée»([2], p.293).Voilàpourcequisepasseducôtédeshommes,dontlasexualitétournetoutentièreautour del’organe –lepénis–quioffreunepriseimaginaireausignifiantphallique.Côtéfemme,en revanche,danslamesureoù«l’organefémininsemble[danslafantasmatiquedel’enfant]n’être jamaisdécouvert»([7],p.116),l’inconscientmanqued’unsignifiantapteàlacirconscriredans unedéfinition,cequifaitquesajouissancen’estqu’enpartieordonnéesurlesignifiantphallique. Sielleseprendincontestablementàlajouissancemasculine,ellen’yestenrevanche«pas-toute» soumise:elleaccèdeégalementàuneautreformedejouissance–la«jouissanceAutre»–,une jouissanceducorps,folleeténigmatiquepuisquehors-langageetsansobjet.Decettejouissance Autretémoignenotammentlamystique:«pas-toute»contraintedanslasignificationphallique, elleconnaît,danssa relationprivilégiéeavecunAutreconsistant,desextasesquidonnentun aperc¸udecettejouissancecorporellesansobjetparoùs’indiquelafailledel’Autre–l’absence dumotquil’épinglerait.Peut-on,commeleproposeAlainAbelhauser,articulercettejouissance corporelle,spécifiquementféminine,aveclastructureperverse?

Le pervers se présente comme celui qui opère la synthèse du savoir et de la jouissance –l’incarnation du «savoirjouir» ([2],p.216–226), commel’écrit Braunsteinenun seulmot: ildénielemanquechezl’Autre(lacastrationmaternelle),qu’ilvoilesoitparlefétiche,soitpar desscénariosoùs’affichesamaîtriseducorpsdupartenaireetdusavoirjouirquilecomplète. C’estpourquoiilvaviserlafaillesubjectivedesonpartenaire,pours’offrircommel’objetcapable delecomblergrâceàcesavoirjouirquilecomplète.D’oùlapropositiondeLacanselonlaquelle lefantasmepervers(a♦$)inverselestermesdel’écrituredufantasmenévrotique($♦a):làoùle névrosé($),diviséparlemanque-à-jouir,courtaprèslesobjetsfantasmatiques(a)etinaccessibles (♦)quipolarisentsondésir,lepervers(chezquila«volontédejouissance»faitofficededésir), par ses manœuvres,dévoileladivisiondeson partenaire(enplacede sujet,$) defac¸on àse proposercommel’objet(a)apteàlacombler.Ils’agitdonc,pourlepervers,querienn’échappe àsoncontrôle,àl’emprise desonsavoir:tout,delajouissanceetducorps,doitêtre traméet ordonnéparlesignifiant–colonisé,end’autrestermes,parcettesignificationphallique radicale-mentincompatibleaveclajouissanceAutre.Maisl’opérationneseréduitpasauxdeuxpartenaires enprésence:cequiestvisédanslajouissancedupartenaire,cequ’ils’agitdedémentirparla monstrationdesajouissance,c’estlacastrationdelaMère,dugrandAutre–«lepervers[...] estamenéparlalogiquemêmedesastructureetdesondésiràseconvertirenunobjet,enun instrument,enuncomplémentauservicedel’Autre»([5],p.222).Orsileperversvise,viala jouissanced’unpartenaire,àdénierladivisiondel’Autreensoumettanttoutelajouissanceau savoir,etenl’ordonnanttouteducôtédelasignificationphallique,commentenvisagerla perver-sionaufémininproposéeparAlainAbelhauser,àsavoiruneperversionorganiséenonpasducôté delajouissancephallique,maisprécisémentducôtédelajouissanceAutre(cellequerécusele pervers)?

Ilyparvientmoyennanttroisglissementsconceptuels([2],p.302–305).Toutd’abord,làoù Lacanposelepartenaireduperversenplacedesujet($)dontilfautsusciterladivision(pour pouvoirlacomblerens’enfaisantl’objeta),l’auteurlefaitbasculerenplacedepetitautredela situation;ilexpliqueensuite,quelaperversionconsiste(nonpasàdiviserlesujet-partenairepour lecomplémenterdesajouissancedefac¸onàdénierlemanquedel’Autre,mais)àdiviserl’Autre lui-même;puisilradicalisel’équivalence,tiréedeLacan,entrelecorps(lieudelajouissancede l’Autresexe)etl’Autre.Cetteconfigurationsubvertitlestermeshabituelsdelastructureperverse. Làoùlepervers, afindesoutenirledémentiportantsurlacastrationdel’Autre(maternel),se

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voueàsusciterladivisiondusujet-partenairedefac¸onàlasuturerens’enfaisantl’objeta,la perverse,elle,necherchepasàcompléterl’Autre:elles’attachesimplement,enprovoquantles vacillementsdupetitautre(l’impuissanceducorpsmédical)faceàlacastrationdugrandAutre (soncorpsdélabréousonenfantmalade),àjouirdesapropredivision.Maisn’est-cepasalors laviséeessentielledelamiseenscènedupervers,tellequ’ellefutpromueparFreudetLacan –dénierlacastrationdel’Autre(delaMère)–,quisetrouveainsiretournéeensoncontrairepar l’auteur,puisquelaperverse, tellequ’il laprésente,chercherait parses manœuvresnonpasà masquerlemanquedel’Autre(commelepervers),maisàledévoiler?Restent,autermedece parcours,cesquelquesquestionsquenouslaissonsensuspens:lecorpsdecesfemmes,maltraité etsoumisàl’entièremaîtrisedusujet,relève-t-ilencoredel’altéritéradicaledel’Autre(àsavoir duregistreduSymbolique)?Netombe-t-ilpas,sinonenplacededéchet,c’est-à-dired’objeta

(versantRéel),dumoinsàcelledupetitautredel’axeimaginaire?Etenadmettantquececorps «corpséifié»relèvebienduregistredel’Autre,cetteréécrituredelaperversionquienrenverse lalogiquea-t-elleencoreàvoiraveclastructureperversetellequeLacan(surl’enseignement duquell’auteursefonde)enalaissélaformule?

Onauracomprisqu’ilesticidifficiledesoutenirquel’auteuraréussi,commeilenaeule projet,àmontrerquecesfemmes–quijouissent,dansleur«belleindifférence»,dudévoilement del’imposturedumaître–sontdestructureperverse.Etquandbienmêmeleseraient-elles,iln’est pascertainqu’ellesneleseraientpascommeleshommes,àsavoirparcequi,deleurjouissance, s’inscritducôtéduPhallus.Endépitdesafinesse,celivrelaissedoncengrandepartieinentamé lemystèreduféminin:ilenconfirmeainsilarétivitéàselaisserréduireàdusavoir–cequenous ajouterionsàlalistedesesnombreusesqualités.

Déclarationd’intérêts

Lesauteursn’ontpastransmisdedéclarationdeconflitsd’intérêts.

Références

[1]AbelhauserA.Lesexeetlesignifiant:suitescliniques.Paris:Seuil;2002.

[2]AbelhauserA.Maldefemme.Laperversionauféminin.Paris:Seuil;2013.

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[4]FreudS.Métapsychologie.Paris:Seuil;2009.

[5]BraunsteinE.Lajouissance,unconceptlacanien.Toulouse:Érès;2005.

[6]LacanJ.Écrits.Paris:Seuil;1966.

Références

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