Ecclésiologie : éléments pour l’histoire d’une discipline (XVIII
e-XX
es.) Érudition, sciences sociales, théories institutionnelles
Séminaire organisé par Frédéric Gabriel (chargé de recherches, CNRS), Dominique Iogna-Prat (directeur d'études, EHESS), Alain Rauwel (professeur agrégé,
université de Bourgogne), dans le cadre de l’EHESS, du CEIFR (Centre d’études inter- disciplinaires des faits religieux), du CNRS (Institut d’histoire de la pensée classique),
de l’ENS de Lyon, et du Labex COMOD (Université de Lyon) Année 2014-2015
Deuxième séance :
L’ecclésiologie au miroir du complexe « théologico-politique » : le cas d’Erik Peterson
27 novembre 2014, Paris, Faculté de théologie protestante, 83 boulevard Arago, Paris 14
e, salle 22
Les définitions de l’Église comme société ont souvent privilégié une approche hiérarchique, au sens humain du terme, qui insistait sur l’inégalité foncière des membres, la masse des fidèles n’ayant vocation qu’à se soumettre à l’élite cléricale. La profonde originalité d’Erik Peterson (1890-1960) est d’avoir concilié une approche liturgique de l’Église et un sens aigu de sa nature juridique : tout baptisé est pour lui « citoyen de la Cité céleste », uni aux anges dans l’acclamation du Kurios, et précisément en tant que citoyen sujet d’un ensemble de droits et de devoirs par lesquels la Cité trouve son équilibre et surtout sa fin, son eschaton. Comme l’a noté Richard Figuier, « la théo-liturgie eschatologique de Peterson actualise l’irruption incessante du Royaume de Dieu dans le monde en même temps qu’elle en annonce la transfiguration finale ». Au-delà de l’utilité instrumentale de telles élaborations dans le combat anti- schmittien, l’ecclésiologie de Peterson, encore mal connue en France par le fait de traductions dispersées, permet de retrouver dans la modernité une centralité du culte qui avait structuré le discours des Pères et des théologiens monastiques. Elle mérite donc d’être étudiée comme un moment constitutif du revival ecclésiologique du XXe s. dont on a tendance à ne retenir que les figures ecclésiastiques tardives.