Modifications des caractéristiques
d’un sol brun acide des Ardennes primaires
par la monoculture d’Epicéa commun
avec la collaboration de
Dominique
VAIRELLES, Jitka LHOMME et D. GELHAYE Station de Recherches sur les Sols forestiers et la FertilisationCentre de Recherches
forestières
de Nancy, I.N.R.A., .,Champenoux, 54280 Seichamps
Résumé
Cet article résume les modifications des
caractéristiques
physico-chimiques d’un sol brun acide, sous unpeuplement
forestier feuillu, développé sur des limons reposant sur les schistes du Revinien dans les Ardennesprimaires.
L’introduction de
l’Epicéa
(Piceaabies)
aprovoqué
un début depodzolisation.
L’humusde type mull acide sous les feuillus est moder-mull sous les
Epicéas.
L’acidité libre et l’indice de redistribution de l’alumine et du fer libres sont plus élevés sous lesEpicéas.
Les réserves des éléments
échangeables,
mobilisables et les immobilisations dans la biomasse aérienne sont semblables dans les deuxécosystèmes.
A court terme iln’y
a pas diminution de la fertilité de la station par enrésinement.Le bilan
isoquartz
a étéappliqué
aux éléments totaux. Iln’y
a pas de modificationimportante
des réserves minérales.Lessivage
et altération seraientplus
intenses sous lesrésineux mais l’accumulation
d’argiles
et l’altérationpossible
de l’horizon C (horizon de référence pour le calculisoquartz)
sous lesEpicéas
pose leproblème
de limite et d’exactitude d’un tel calcul.Depuis plus
de 30 ans lapolitique
forestière nationale encourage lesplantations
d’essences résineuses dont l’économie a un réel besoin
(pâte
àpapier
et bois de tritu-ration).
Mais la monoculture de conifères provoque sur le sol des modificationsphysico-chimiques
etbiologiques.
De nombreuses études ont été effectuées sous des
peuplemens
résineux artificiels(G E N SSLER
, 1959 ;
HOLMSGAARD etQ L., 1961 ;
DUCHAUFOUR &B O N NE A U , 1961 ;
S CHL E
NKER et
C iL., 1969 ; M IEHLICH , 1970 ; N IHLGARD , 197Z ;
BRETHES &NY S , 1975 ;
JN y
s, 1976 ;
BoNNEAU et al.,1976 ; Compte
renduD.G.R.S.T., 1977 ; R ICHERT , 1978 ; P
ATERNOSTER
, 1979 ; G WLLAUD , 1979)
afin de savoir s’il y a baisse de fertilité des solsqui
lesportent,
et s’il existe ou non desrisques
d’altérations irréversibles et de «dégra-
dation, p au sens
pédogénétique.
Des mises aupoint
surles conséquences pédologiques
des monocultures de résineux ont été
publiées (M ANIL , 1966 ; B ONNEAU , 1973 ;
NOIR-FALISE &
VANESSE, 1975 ; BONNEAU, 1978).
Ces travaux ne
permettaient
pas derépondre complètement
à laquestion posée.
C’est
pourquoi
nous menons une étudecomparée
dans différentsécosystèmes forestiers,
en
particulier
dans les ArdennesFrançaises
où nous essayons de réaliser une étudeglobale
du fonctionnement d’une futaied’Epicéa
et d’unpeuplement
feuillureprésentant
la forêt
originelle
de cetterégion.
Cet article rend
compte
des résultats de l’étudecomparative
de l’évolution des sols.I. - Caractérisation des deux stations étudiées
La station est située en forêt domaniale de
Château-Regnault
dans les Ardennesprimaires.
L’altitude est de 390 m et lapente
faible(4
à 6 p.100).
Le climat detype montagnard
est froid et humide. Lesprécipitations
moyennes annuelles sont de 1 100 mm. Latempérature
d’environ 8 &dquo;C.1.1. -
Ecologie
despeuplements
1.11. - Les
peuplements
Le
peuplement
feuillu est un taillis-sous-futaie. Les réserves(76 tiges/ha)
sontconstituées par 90 p. 100 de Chêne
(Quercus sessiliflora Salisb.)
et 10 p. 100 de Hêtre(Fagus sylvatica L.).
Le taillis(6
150tiges/ha)
estâgé
de 28 ans et pauvre. Deuxessences dominantes le composent : le Sorbier des oiseleurs
(Sorbus aucuparia L.)
etle Bouleau
(Betula
verrucosaE.).
Les essencesd’accompagnement
sont leChêne,
leCoudrier
(Corylus
avellanaL.)
et la Bourdaine(Rhamnus frangula L.),
laFougère aigle (Pteris aquilinum)
et la Ronce(Rubus sp.)
sont lesespèces
de la strate herbacée.Le
peuplement d’Epicéa [Picea
excelsa(Lam.) Link]
étaitâgé
de 45 ans en 1976.Sa densité est de 1 700
tiges
par hectare. Lepeuplement
n’ajamais
été éclairci.1.12. - Les
profils
du solNous avons effectué dans
chaque station, après
lacartographie
dessols,
les des-criptions
de 5profils
du sol. Ceci nouspermet
dedégager
laparenté
de ces deuxstations feuillues et résineuses et de
préciser
les modificationsmorphologiques
duesà la monoculture
d’Epicéa.
Nous considéronsqu’avant
l’introduction desépicéas
il y a 45 ans, les deux stations étaient
analogues.
1.121. - Le
profil
sous lesfeuillus
ou sol deréférence
La litière des feuilles de l’année est peu
épaisse (moins
de 1cm)
et discontinue.Elle recouvre un horizon Ao des feuilles en voie de
décomposition
très peuépais
et local.
0-5 cm : dans l’horizon
All,
la structure estgrumeleuse friable,
la texturelimoneuse. Un
feutrage
de fines racines degraminées
envahit cet horizon.5-8 cm : A12
incorporation
de matièreorganique plus
ou moinsrégulière.
L’humus est de
type
mull acide.8-25 cm : horizon de transition avec l’horizon
(B)
de structurepolyédrique
depetites
dimensions et peu stable. Texture limoneuse avecquelques gravillons plats
deschiste et
quelques
caillouxgréseux.
25-50 cm : horizon
(B)
de couleur brun.La
structure est à tendancepolyédrique
peu stable. La texture limoneuse.
La teneur en
gravillons
schisteuxaugmente
avec laprofondeur.
5-7 cm : un horizon
Bh,
infiltration de matièreorganique,
de couleur marronchocolat,
s’estdéveloppé,
il est ondulé etd’épaisseur
variable.7-25 cm : horizon de transition
plus
riche en matièreorganique
que son homo-logue
sous feuillus.L’humus est de type moder-mull et le sol de
type
brun ocreux.La monoculture
d’Epicéa
aprovoqué
des modificationsmorphologiques
deshumus.
Quelles
sont donc les modifications desprincipales caractéristiques physiques
et
chimiques ?
1.2. - Les
caractéristigues phy.sico-chimiques
desprofils
types 1.21. - Méthodesanalytiques
Dans chacune de nos deux stations nous avons
prélevé
5profils
du sol divisésen 10 horizons. Pour
chaque
échantillon ont été déterminés : les taux d’humidité(105 &dquo;C),
les densités apparentes(mesurées : d’m).
Pour
chaque
station 3profils
ont été totalementanalysés.
Les résultats donnésdans cette
publication correspondent
aux moyennes des 3profils
pour les feuillus et de 2 pour lesépicéas (un profil
ne s’avérant pasparfaitement homogène
verti-calement).
Les
principales
méthodesd’analyse
sont décrites dans DucHAUFOUR(1970).
Ce sontprincipalement
lesdosages
de : Carbone(C)
par la méthodeAnne,
l’azote total(Kjeldahl), pH
eau, acidités libres(eau),
aciditésd’échange (KCI normal)
et acidités totales(résine H + )
par titration à lasoude ;
les élémentséchangeables (extraction
acétate
d’ammonium),
lacapacité
totaled’échange (méthode Metson),
les élémentsmobilisables
(E.D.T.A.
+tétraphénylborate (V EDY , 1973)),
les éléments libres feret aluminium
(Tamm
+hydrosulfite
desodium),
la siliceamorphe (NaOH)
et les éléments totaux(déterminés
par fusion alcaline au métaborate destrontium)
sur lesfractions
grossières (supérieure
à 2micromètres)
et lesargiles granulométriques.
Nous avons d’autre part déterminé la
composition
minérale des échantillons :micas, feldspaths
et quartz. Leprincipe
de cette méthode est la dissolutionchimique
différentielle(J ACKSON , 1974) : après séparation
desargiles (fraction granulométrique
inférieure à 2
micromètres)
les micas sont dissous par lepyrosulfate
de sodium àchaud,
lesfeldspaths
du culot restant sont dissous à froid(15 °C)
par l’acidefluorosilicique.
Lerésidu, après
vérification auxR.X.,
est le quartz déterminé parpesée.
1.22. -
Comparaison
descaractéristiques pédologiques
Les
principales caractéristiques
des sols sont décrites dans le tableau 1 et lesfigures
2 et 3.D’une manière
générale
l’ensemble de cesanalyses
de caractérisation confirmel’homogénéité
des deux stations et leur bonneparenté
et montrequ’il n’y
a pas de modification dans les horizons minéraux(plus
de 25 cm deprofondeur) excepté
pour les éléments libres et
amorphes.
Par contre nous constatons dans les horizons
organiques
des modificationssystématiques
desprincipales caractéristiques
desprofils
du sol.1.221. -
Carbone,
Azote et C/NLes deux éléments carbone et azote,
apportés
aux sols par lejeu
ducycle biologique (litière, racines)
s’accumulentplus
sous lesépicéas.
Les retombées annuelles de litière sontéquivalentes (environ
4 000kg/ha/an), cependant
la moins bonneminéralisation sous les résineux
(G UILLAUD , 1979)
a pourconséquence
son accumu-lation dans la litière et l’horizon A1. Le C/N est
plus
élevé en surface(litière, Al)
sous les
Epicéas
etprésente
unléger
ventre au niveau de l’horizon Bh sous lesépicéas.
1.222. -
Capacité
totaled’échange (C.E.C.)
Elle est
plus
élevée dans les horizons de surface sous lesépicéas,
ceci en liaisonavec une teneur
plus
élevée en matièreorganique.
1.223. - Eléynents
échangeables
Ces éléments du
complexe
absorbant sont directementdisponibles
pour l’alimen- tation minérale desvégétaux.
Ils sont le reflet ducycle biologique
etprécisent
le niveau de fertilité de la station.
Nous constatons que les teneurs en cations
échangeables (calcium, potassium, magnésium
etmanganèse)
sontplus
élevées sous lesépicéas
dans les 25premiers
centimètres deprofils (horizons organiques).
1.224. -
pH
et aciditéDans les horizons
organiques
du sol(L, A)
lepH
est inférieur d’environ0,5
unité sous lesépicéas.
Les différentes formes d’acidité et enparticulier
celled’échange
décroissent vers la base duprofil
où elles deviennentégales
dans lesprofils
des deux stations. En
surface,
l’aciditéd’échange
estplus
élevée sous les résineux(R
ICHERT
, 1978).
Ceci traduit chezl’Epicéa
unepotentialité plus grande
à l’altération des minérauxprimaires.
1.225. - Eléments mobilisables et totaux
Les minéraux
primaires
s’altèrent sous l’action des eaux degravité
ou liéeset de leurs
composants organiques,
formant lecomplexe
d’altération. Celui-ci estcapable
de libérerplus
ou moinsrapidement
certains élémentssusceptibles
alorsde
recharger
lecomplexe
absorbant en élémentséchangeables.
Sauf pour le
magnésium mobilisable,
nous constatons sous les résineux unediminution des concentrations en éléments mobilisables et totaux par
rapport
aux feuillus.L226. - Eléments libres et
amorphes
Nous constatons des teneurs et une redistribution sur l’ensemble du
profil
différentes entre les feuillus et les
épicéas.
La silice
amorphe (extraction NaOH) présente
des teneursplus
élevées sous les résineux.Le fer libre et l’aluminium libre
(extraction
Tamm +hydrosulfitc
desodium)
sont redistribués avec des intensités différentes. Les coefficients de redistribution
K A ,
et
K I; ,, (S OUCHIER , 1971)
montrent que ceux-ci sontplus
élevés pour les sols sousEpicéa
que sous feuillus.v ¡t::’....:!..<.!B ^, n TT U:- !11-- 1 1 A
Remarque :
nous constatons que dans l’horizon C laquantité
d’éléments libres etamorphes
estimportante
par rapport aux horizons de surface du sol. Ceci confirme que nos stations sont sur une roche mère ancienne, bien différente de celleprécédem-
ment étudiée
(granite
de Millevaches peualtéré)
et que l’altération de notre horizon C de référence estdéjà
ancienne.La
proportion
de fer extractible au réactif de Tamm +hydrosulfite
de sodiumreprésente plus
de 60 p. 100 du fer total.1.227. - Les minéraux du sol
La
technique
de dissolution sélective des minérauxprimaires
pour déterminer la teneur en quartz permet encomplément
d’évaluer les différents constituants minéraux du sol.La
figure
3 montre la similitudeminéralogique
des deuxprofils
moyens quant à larépartition
des teneurs enquartz
variant peu autour de 40-50 p.100,
des micas 30 à40 p. 100,
desfeldspaths
7 à l0 p.100,
desargiles granulométriques
10 à 13 p. 100.Les
profils
se différencientcependant
en surface par une diminution sous lesépicéas
desargiles
et micas et uneaugmentation
du quartz etégalement
dans l’hori-zon C par une accumulation faible
d’argile
sous lesépicéas qui
serait due à unlessivage plus
intense.Conclusion
Nous constatons que 45 ans de monoculture
d’Epicéa
aprovoqué
des modi-fications
qualitatives
desprincipales caractéristiques
des sols dans les horizons de surface.L’acidification,
lamigration
et(ou)
l’altération desargiles (inférieures
à 2 micro-mètres), l’augmentation
du taux decarbone,
du C/N etl’apparition
d’un horizon Bhcaractéristique
de lamigration
de la matièreorganique,
et des coefficients de redistribution du fer et de l’aluminiumplus
élevés sous lesépicéas
que sous les feuillus confirment les modificationsmorphologiques
des horizonsorganiques.
Il est indéniable que
l’Epicéa
aprovoqué
un début depodzolisation.
Dans cette
première partie
nous avonsqualifié
lesphénomènes
et constaté quel’Epicéa
entraînait lapodzolisation.
Derrière ce terme de
podzolisation,
il est souventsous-entendu,
pour lepublic,
des effets de
dégradation irréversible,
de stérilisation du sol etd’appauvrissement.
Qu’en
est-il exactement ?Nous essayerons donc dans la deuxième
partie
dequantifier
cette action del’Epicéa
par des bilanspondéraux permettant
d’une part d’évaluer les réserves d’éléments minérauxéchangeables
et mobilisables caractérisant le niveau de fertilité de la station et sa diminution éventuelle. D’autrepart
dequantifier
l’accélération de l’altération par l’étude des éléments totaux et des minéraux.Il. - Bilans
géochimiques comparés
des éléments minéraux des différentscompartiments (échangeables,
mobilisables ettotaux)
IL1. - Généralités
Dans le cadre de cette étude deux
types
de bilan ont été réalisés en fonction de deuxobjectifs.
- Evaluer les réserves actuelles
disponibles
en élémentséchangeables
et mobi-lisables
correspondant
à l’évaluation de la fertilité de la station à court terme. C’est le bilan des éléments contenus dans la couche du solprospectable
par les racines.-
Comparer
l’évolution de l’altération des minéraux du sol(par
les élémentstotaux)
et cela par latechnique
du bilanisoquartz.
IL 11. -
Principe
du bilanisoquartz
Le
principe
du bilanisoquartz
a été défini par lesgéologues
etadapté
aux solspar
L ELONG ,
SOUCHIER(1972),
MEILHAC(1970).
L’altération des
composants
minéraux du solcorrespond
à des modifications structurales des minéraux et à despertes
de matières inéluctables. Cespertes
corres-pondent
à la variation entre la masse de la colonne du sol actuel et celle de la roche mère initialequi
lui a donné naissance.Pour les
évaluer,
il suffit dedisposer
dans la masse du sol d’un minéralinvariant,
résistant à l’altération. Celui-ci sert d’étalon interne.
Dans les sols de climats
tempérés
lequartz
est considéré comme un minéralstable,
c’estpourquoi
nous l’avons choisi comme étalon interne.Nous pouvons ainsi
rapporter
toutes les variations des élémentschimiques
étudiés au
poids
dequartz
contenu dans la colonne de roche mère initiale et accéder à l’évolutionquantitative,
en vraiegrandeur,
de ces éléments.11.12. - Le
principe
du calculisoquartz
Le
principe
est de calculer horizon parhorizon,
la variation en un élément parrapport
à C horizonqui
contient la même masse dequartz
que lui et de sommer sur l’ensemble duprofil.
La variation
(A)
pour un élément « x » dans un horizon « i » est :Remarque :
dans cet article nous comparons les résultats moyens des résultats de 3profils
sous les feuillus et de 2profils
sous lesépicéas.
IL 13. - Etablissement des bilans et leurs limites
La
première hypothèse d’homogénéité
verticale duprofil
du solacceptée,
le bilan
isoquartz
a pourprincipe
une référence à l’horizon C du sol considéré pour le sol comme le matériau initial. C’est la deuxièmehypothèse
fondamentale du calcul.Nous avons
cependant
constaté dans cetteétude,
et nous l’aborderons dans la suite de cetarticle,
que cet horizon Cpouvait
avoir lui-même subit unepédogenèse
différente sous les deux
peuplements
donc créé une erreursupplémentaire
sur l’éva-luation des variations des éléments.
D’autre
part
l’altération réduit les réserves minérales donc la masse de matière du sol. Celle-ci estplus
ou moinscompensée
par lesapports biologiques (litières).
La
perte
depoids
crée des modifications de la densitéapparente
des horizons du sol.Nous avons constaté de
plus
que sous lesépicéas
les densitésapparentes
des horizons de surface étaientplus
faibles que sous les feuillus. L’altération seule ne peutexpliquer
ces écarts. L’enracinementsuperficiel
del’Epicéa
a pu créer ces modificationsphysiques
de la densité : c’est ici un foisonnement.Il est nécessaire d’évaluer ce foisonnement et de
corriger l’épaisseur
desprofils
de telle sorte que l’on compare des
épaisseurs
initiales du solégales.
IL14. - Evaluation dcc
foisonnement
ou du tassementLe bilan
isoquartz
permet de calculer lespertes
relativesP i
de matière minérale pour un horizon « 1 »1
q!!
qiLe taux de foisonnement F est défini par :
ri !r
où d’m est la densité
apparente
mesurée et d’c est la densitéapparente
calculée :si d’c > d’m : il y a foisonnement c’est-à-dire
augmentation
du volume du solsans variation de masse
d’c < d’m : il y a tassement.
Les bilans sont réalisés pour une
épaisseur
desprofils équivalente
sous les deuxpeuplements
etcorrespondant
à 80 cm de l’horizon C de référence soit 100 cm sous lesépicéas
et 94 cm sous les feuillus.Il.2. - Résultat des bilans
11.21. - Stock des éléinents
échnngeables,
du carbone et de l’azote Immobilisation dans lesécosystèmes
L’accumulation de matière
organique plus importante
sous lesépicéas
a eu pourconséquence l’augmentation
de lacapacité
totaled’échange
et avec elle lapotentialité
de retenir
plus
de cationséchangeables.
Nous constatons en effet que les réserves en élémentséchangeables
sontplus
abondantes sous les résineux d’environ 10 p. 100 pour le calcium et lemanganèse,
de 30 p. 100 pour lepotassium
et lemagnésium.
A court terme, ces réserves d’éléments
échangeables
sont le refl!et de la fertilité du sol car ilsreprésentent
les éléments directement assimilables. Lesépicéas
ne pro-voquent
donc pas au cours de lapremière génération
de baisse de la fertilité de la station(sol
sur limonacide).
Ces résultats concordent avec les travaux de HoLtvts!nnRD(1968),
et GENSSLER(1959) qui
constatent une aussi bonneproductivité
en deuxièmeou troisième
génération
de résineuxqu’en première génération.
Remarque : L’augmentation apparente
de la fertilité à court terme est liée à celle de la matièreorganique
du sol. Lepeuplement d’’Epicéa
étudié est dense et la minéra-lisation de la matière
organique
faible. Or la secondegénération
seraprécédée
d’unecoupe à blanc étoc. Celle-ci aura pour effet de provoquer une accélération de la minéralisation du stock de matière
organique
et comme le montre uneexpérience lysi- métrique
dans une coupe àblanc,
lelessivage
des éléments minéraux sera intensifié provoquant ainsi la baisse de ces réserves en éléments assimilables.L’établissement des biomasses
puis
des minéralomasses dans les deuxécoystèmes
permet d’évaluer les
quantités
d’éléments immobilisées dans lesparties
aériennesdes
végétaux
et dans les litières. Enquantité
elles sontéquivalentes
aux réserves deséléments
échangeables
du sol. Lesépicéas
se différencient des feuillus par une immo- bilisationplus importante
ducarbone,
de l’azote et dumagnésium (tableau 2).
Le total des immobilisations
minérales, organiques
et des élémentséchangeables
dans
l’écosystème Epicéa
estsupérieur
à celui del’écosystème
feuillu sauf pour le calcium où il lui estégal.
Il.22. - Stocks des éléments mobilisables et totaux
Les réserves en éléments totaux dans le sol caractérisent la
potentialité
de cesol à
long
terme. Les éléments mobilisables sontsusceptibles
depouvoir recharger rapidement
lecomplexe
absorbant en éléments nécessaires à une bonne nutrition des arbres. De ces réserves en éléments mobilisablesdépend
la fertilité à court et moyen terme de la station.Les réserves actuelles dans les sols des deux
peuplements
sont du mêmeordre de
grandeur.
11.3. - Variations isoquartz
Les variations
isoquartz correspondent
auxquantités
de matièresqui
ont étéentraînées hors du
profil (en
référence à l’horizon C contenant la mêmequantité
de quartz que
lui)
s’il y aperte.
S’il y a
gain
ellescorrespondent
à un apport extérieur(eaux
despluies).
IL31. - Variations des éléments mobilisables et du
phosphore
assirnilable(tableau 3)
Sous les feuillus l’altération des minéraux du sol se traduit par uneaugmentation
du stock
(complexe d’altération)
des éléments mobilisables(magnésium, manganèse)
et du
phosphore
assimilable(extraction DocHnuFOUx-BotvrrEnu, 1969).
Lepotassium
mobilisable est peu retenu, sa variation est
négative.
Sous lesépicéas
les processus sont les mêmes mais leurs intensités sontplus
élevées sauf pour lemagnésium
dontla variation est
négative
alorsqu’elle
étaitpositive
sous les feuillus.IL32. - Variations des éléments libres et
amorphes
L’horizon C de référence contient
déjà
desquantités importantes
d’élémentslibres ou
amorphes
du fait de sonorigine
sédimentaire ou d’une altération très ancienne liée à la mise en surface. L’action descomposés organiques
libérés par lavégétation
s’estsurimposée
et a modifiépositivement
ounégativement
leurquantité.
Sous feuillus l’alumine a
augmenté
tandis que le fer et la silice ont diminué.Sous les
épicéas
le fer a diminuéégalement
mais moins que sous feuillus. L’aluminea
augmenté davantage
que sous le taillis-sous-futaie et la variation de la silice est nettementpositive
alorsqu’elle
étaitnégative
sous feuillus.On
peut
donc estimer que l’altération estplus rapide
sous lesépicéas.
Parrapport
au sol sous
feuillus,
les taux de variations(rapport
des pertes du sol parrapport
au stock initial de la roche mère dont il estissu)
ontaugmenté
sous les résineux de3,7
p. 100 pour lefer,
de27,4
p. 100 pour l’aluminium et de 44 p. 100 pour le silicium(tableau 3).
Ces résultats confirment les
précédents
et caractérisent unedynamique podzo-
lisante nette sous les
épicéas.
Si cette
dynamique podzolisante
est réelle sous lesépicéas
cela doit se concrétiser par des pertes d’éléments totauxplus importantes
sous lesépicéas.
11.33. - Variations des éléments totaux
Les
principaux
résultats sont rassemblés dans le tableau 4.Dans les sols des deux
écosystèmes
feuillus et résineux l’altération provoque unediminution des réserves des éléments totaux sauf pour deux éléments : le calcium et le
manganèse.
Au cours ducycle biogéochimiquc
ces deux éléments sontprélevés
par les racines dans les couches
profondes
de la roche mèrepuis
retournent au sol par les litières et sont ensuite stockés dans les horizons de surface.Les pertes calculées sont
plus importantes
sous les résineux(K, Mg)
ou lesgains
moindres
(Ca, Mn)
pour tous les éléments minéraux nécessaires à l’alimentation miné- rale des arbres(variations isoquartz
du tableau4).
Lespertes
en aluminium total semblent moinsimportantes
sous lesépicéas
cequi
est en contradictionapparente
avec les résultats
précédents.
Ces résultats d’aluminium totalcorrespondent
à lasomme de l’aluminium total de constitution des minéraux et des différentes autres formes en
particulier
de la forme aluminium libre(extraction
Tamm +hydrosulfite
de
sodium).
De ce fait les pertes d’aluminium total de constitution des minéraux sontplus
élevées de14,1
T/ha.En ce
qui
concerne le fer total les différencesimportantes
constatées nepeuvent
s’expliquer
que par unehétérogénéité.
C’est ce que nous constatons d’ailleurs dans un desprofils
sous feuillus et enparticulier
pour l’horizon C de référence(voir
Tableau1). ).
Remarque:
Une différence de 1%, de
la concentration dans l’horizon de réfé-rence C provoque sous les feuillus une modification des variations de 13,7 T/ha.
Conclusion
45 ans de monoculture
d’Epicéa
commun sur un sol brun acide sur limon des Ardennesprimaires
ontprovoqué
des modifications descaractéristiques physico- chimiques
de cet ancien sol de forêt feuillue.L’humus de type mull acide sous les feuillus s’est transformé en moder mull et un horizon Bh
apparaît
à la base du Al. Le sol brun acide est maintenant de typeocreux avec un
épaississement important
de la litière. Le coefficient dedécomposition
de la matière
organique
de JENNY est2,6
foisplus
élevé sous les feuillus(24,2)
quesous les
Epicéas (9,3)
pour des retombées de litièresquantitativement égales.
L’épicéa
commun est uneespèce
acidifiante. Les aciditéslibres, d’échange
ettotales des horizons
organiques
et des eaux degravités
sontplus
élevées(RrcftFxT, 1978).
La
quantité
des éléments mis en circulation chezl’Epicéa
estplus importante
que celle du taillis-sous-futaie feuillu. Les stocks des éléments
échangeables,
ducarbone et de l’azote sont
plus
élevés.Cependant
la minéralisation de l’azote est moins intense que sous les feuillus(G WLLAUD , 1979).
Les réserves d’éléments mobilisables et d’éléments totaux sont semblables dans les deux
écosystèmes.
Les variationsisoquartz
des éléments mobilisables sont assezvoisines et ne permettent pas de différencier nettement les deux stations. Par contre les pertes en éléments totaux notamment K et
Mg
sont, en valeurabsolue, plus
fortes sous
l’Epicéa.
Le taux de variation dupotassium
total sousEpicéa
est peu diffsrcrt de celui
qui
a été calculé sousfeuillus,
alors que pourMg
et Mn il estbeaucoup plus
élevé sous résineux. Ceci traduit vraisemblablement sousEpicéa
unealtération renforcée
portant
essentiellement sur les micas. Une faible perte de fertilité àlong
terme semble doncpossible.
Les coefficients de redistribution du fer et de l’alumine libres confirment l’action
podzolisante
del’Epicéa
sur cetype
de substrat.Cependant
il n’est paspossible
d’être trèsaffirmatif,
du fait notamment de la faible différence des taux de variation dupotassium
maisaussi, malgré
lesprécau-
tions
prises
dans le choix desstations,
d’une certainehétérogénéité
desprofils.
En effet les
analyses
de caractérisation de l’horizonC,
deréférence,
montrentsous les
épicéas
une faible accumulationd’argile
duepeut-être
à unlessivage (Tableau
1,Figure 3).
Nous vérifions actuellement cettehypothèse
par des observa- tionsmicromorphologiques
et desanalyses
des eaux degravité.
L’augmentation
du tauxd’argile
évaluée à 1 p. 100 et celle des éléments mobilisables fait que notre horizon C de référence adéjà
subi sous lesépicéas
un début d’évolu- tion. Cet enrichissement en matière surestime lespertes
calculées par la méthode du bilanisoquartz.
Nous avons
jugé indispensable
dans ces conditions deprocéder
à une nouvelleestimation des pertes d’éléments dues à une altération des minéraux en tenant
compte
de ce
phénomène
éventuel. Pour cela nous« corrigeons
» l’horizon de référencesous
Epicéa
afin de reconstituer lacomposition qu’il
aurait en absence delessivage.
Les résultats
corrigés,
les pertes sousEpicéa
restentplus importantes
que sous feuillus. Ellescorrespondent cependant
à la fois à une altération et ausimple départ
desargiles
parlessivage.
Pour obtenir les vraies pertes par altération seule il faudrait donc diminuer les chiffres du tableau 5 desquantités correspondant
à l’accumulation
d’argile
en C. Il estimpossible
de le calculer exactement car nous ne connaissons pasl’épaisseur
surlaquelle
a pu se faire cette accumulation.Il est vraisemblable
qu’on
arriverait dans ces conditions à une très faible perte depotassium
et celacorrespondrait
bien au fait que dans ledispositif lysimétrique qui
a été installé dans ces stations la concentration en
potassium
des eaux n’est pasplus
élevée sous
Epicéa
que sous feuillus.Cependant
deux autres observations amènent à se demander si cette « correction delessivage
» estlégitime.
D’unepart
les eaux deslysimètres
n’ontjamais
montréd’argile
ensuspension,
maispeut-être
sont-elles arrêtées par les filtres deslysimètres
eux-mêmes : la
réponse
ne pourra être donnée que lors de la destruction deslysimètres.
Il se peut aussi que le
lessivage
ait eu lieu surtout au début de la révolutiond’Epicéa
alors que les études
lysimétriques
ne sont menées que 45 ansaprès
laplantation.
D’autre part la correction effectuée amène un
gain
relativementimportant
d’alu-minium total
(49
tonnes soit2 p.
100 parrapport
au stockactuel)
alors que les calculsinitiaux,
sanscorrections,
aboutissaient sensiblement à une constance de l’aluminium cequi
étaitplus
satisfaisant.Malgré
lesprécautions prises
et des réflexionsapprofondies
nous devons donc conclure que notre étude du bilan ne permet pas de conclusion formelle. Si l’onne tient pas compte du
lessivage
la perte depotassium
total àlong
terme n’est pasnégligeable.
Dans le cas contraire elle estpratiquement nulle,
mais il reste despertes
notables en
magnésium
et calcium. Le bilan d’alumine libre et de siliceamorphe oblige
à conclure à un renforcement de l’altération sousEpicéa,
mais elle est loin d’êtredramatique.
Cette altération conduit à des pertes
qui
pour lepotassium
semblent assezfaibles et d’un ordre de
grandeur identique
à celui des erreursauxquelles
conduitfatalement l’inévitable manque
d’homogénéité
verticale desprofils.
Dans l’ensemble l’influence de
l’Epicéa
estbien,
sur les schistes desArdennes,
de même nature que cellequi
adéjà
été mise en évidence sur lesgranites
du MassifCentral
(B RETHES , N y s, 1975),
oùdéjà
l’attention avait été attirée sur l’altération des micas. Mais elle estici,
sur un matériauplus « tamponné » plus
discrète et pour certainséléments,
à la limite despossibilités
de détection.Comme dans le Massif Central ces
phénomènes
ne concernent, dupoint
de vuede la fertilité du
sol,
que le trèslong
terme. La conservation de l’essentielle despropriétés
du sol étant certaine à court et moyen terme.Reçu
pourpublication
enjanvier
1980.Summary
Changes
in/ 7/:y.Hcc’-c/te;n/ca/ properties of
a brown .soilin a hardwood
forest
in Ardennes moutainby
introductionof Norway Spruce
The objective of our work was to determine the influence of Norway Spruce (picea a abies) plantation on soil
fertility
and alteration of minerals, compared with a deciduous stand(coppice
with standards) in theprimary
part of Ardennes moutains in France. The parent rock is acid silt over schists of Revinien.Under hardwoods the Humus is a « acid mull ». It is a « moder mull » under the conifers. Acidity and amorphous elements are more important under spruce. It induces with the beginnings podzolisation.
The reserves of exchangeable and available elements in the soil and of elements in the biomass are the same in the two stands.
We had to evaluate the quartz content of the horizons, then to calculate
ponderal
gains or losses of some elements and minerals in the sameprofile,
ascompared
to theC horizon,
using
quartz as invariable standard.The results show under spruce :
- slight losses of the reserves of total elements except
significant
losses of total K and Mg;-
gains
ofamorphous
Al, Fe, Si ;- greater
weathering
of minerals(micas)
andclay ;
-
slight leaching
ofclay ;
We debate of the
validity
ofisoquartz
balance.The
stability
of the reserves of exchangeable and available element, mayby explained
by thesupply
to the soilexchange-complex
of elements removed from silicatesby
fasterweathering.
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