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Evaluation des ressources forestières pour la bioéconomie : quels nouveaux besoins et comment y répondre ?

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Evaluation des ressources forestières pour la bioéconomie : quels nouveaux besoins et comment y répondre ?

Hervé J.-C. 1,† , Morneau F. 2 , Véga C. 1 , Leban J.-M. 1,3 , , Saint-André L. 3 , Bontemps J.-D. 1

1 IGN, Laboratoire d’Inventaire Forestier, 14 rue Girardet, F-54042 Nancy Cedex

2 IGN, Service de l’Inventaire Forestier et Environnemental, Château des Barres, F-45290 Nogent-sur- Vernisson

3 INRA, Unité Biogéochimie des Ecosystèmes Forestiers, F-54280 Champenoux

(†) Jean-Christophe Hervé est décédé le 16 avril 2017. L’article a été écrit par le dernier auteur à partir de la communication orale donnée par l’auteur, et d’un enregistrement audio-visuel réalisé par l’INRA (session 1, piste 3), ainsi que des nombreux échanges antérieurement développés sur le sujet. Deux hommages sont publiés sur les sites du GIP Ecofor, et de Forestopic

Correspondance : jean-daniel.bontemps@ign.fr

Résumé

Une bioéconomie fondée sur la forêt et le bois implique de concevoir de nouvelles stratégies de gestion pour simultanément adapter la forêt au changement climatique et lui permettre de répondre aux demandes accrues, en visant l’optimisation d’un bilan carbone forêt-bois intégré, tout en préservant les services écosystémiques. Les inventaires forestiers nationaux (IFN) tels qu’ils existent aujourd’hui nécessitent plusieurs innovations pour étendre leur portée : a) un inventaire plus complet incluant les branches et même le menu bois, en volume et en biomasse ; b) l’intégration du carbone dans le sol et ses variations ; c) le développement de capacités de monitoring des impacts du changement climatique, de la fertilité des sols et de la biodiversité. A travers l’exemple de l’inventaire forestier français et de quelques autres en Europe, nous montrons comment les inventaires forestiers nationaux sont devenus, grâce à une longue expérience et des innovations constantes comme le dispositif d’inventaire continu, des outils très performants de suivi détaillé des forêts pouvant aller bien au-delà de leur rôle initial. Nous présentons également des recherches en cours, dont plusieurs sont menées dans le cadre du projet H2020 DIABOLO réunissant tous les inventaires forestiers européens (réseau ENFIN) pour définir les méthodes visant à constituer un système européen d’informations forestières harmonisées, multi- objectifs et multi-sources.

Mots-clés : Inventaire forestier, Monitoring, Changement climatique, Biomasse

Abstract: Forest resources assessment for the bioeconomy: what new needs and how to address them ?

A forest-based bioeconomy requires designing new management strategies to simultaneously adapt

forests to climate change and enable them to satisfy an increased demand for forest-based products, by

targeting the optimisation of the forestry wood chain carbon budget, while preserving all other

ecosystem services. National forest inventories (NFI) as they exist today require several innovations to

extend their scope: a) to perform a more complete inventory including branches and even twigs, both in

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volume and biomass; b) to integrate soil carbon content and its variations; c) to develop capacity to monitor climate change impacts, soil fertility and biodiversity. Through the examples of the French NFI and some others in Europe, it is shown how these programs, thanks to their long experience and constant innovations such as the continuous inventory system, have become very efficient tools for detailed forest monitoring that can go far beyond their original role. It also presents ongoing research, several of which are carried out within the framework of the H2020 DIABOLO project (Distributed, Integrated and Harmonised Forest Information for Bioeconomy Outlooks) bringing together all the European National Forest Inventories (ENFIN network) with the aim of defining the methods to set up a harmonized, multipurpose and multisource European forest information system.

Keywords: Forest inventory, Monitoring, Climate change, Biomass

1. Introduction : une forêt européenne en transition(s)

La forêt Européenne présente une double singularité : elle est, au plan temporel, dans une dynamique d’expansion séculaire de sa surface et son stock de bois, qui caractérise la phase tardive de la

‘transition forestière’ (Mather, 1992 ; Meyfroidt et Lambin, 2011), mais aussi le seul espace continental au monde dans cette situation (FAO, 2016).

La dynamique du stock de bois sur pied des nations a pu être documentée à partir de la mise en place des programmes nationaux d’inventaire des ressources forestières (plus communément dénommés

‘NFI’, National Forest Inventory, voir Tomppo et al. (2010) pour une synthèse européenne), dans les années 1920 pour les pays scandinaves (qui sont à ce titre des pionniers), en 1961 pour la France, et plus récemment pour l’Allemagne (début des années 1990), dont le stock de bois est le plus important en Europe (supérieur à 3,600 hm 3,1 ), suivi par la Suède (3,200 hm 3 ), la France (2,600 hm 3 ) et la Finlande (2,300 hm 3 ).

La progression du stock sur pied de ces quatre pays se situe en moyenne entre +20 et +30 hm 3 /an (Figure 1).

Figure 1 : Evolution des 4 plus importants stocks de bois sur pied nationaux en Europe. Bleu turquoise : Allemagne, vert : Suède, rouge : France, bleu : Finlande.

1

Cette unité correspond au million de m

3

. Voir Voreux C. (2011) Millions de mètres cubes, millions d'hectares, ... (Revue

Forestière Française 63:387-388).

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Elle est donc d’une intensité remarquable, et très similaire entre des contextes biogéographiques pourtant très contrastés, ce qui vient souligner la puissance de ce phénomène d’expansion. Il n’est pas inutile de rapprocher ces trajectoires de celle de l’augmentation du taux de CO

2

atmosphérique, dont la forte similitude traduit une origine en partie commune (substitution bois/ énergies fossiles). A ce titre, ces trajectoires en stock de bois ne sont pas de moindre signification pour les politiques forestières que ne l’est cette dernière au plan environnemental.

Un tel système suppose la production de connaissances et d’informations nouvelles sur les forêts, et l’acquisition de nouvelles données. Ainsi, l’atténuation du changement climatique suppose d’optimiser la fixation brute de carbone en forêt (captation de carbone), et non plus la production brute en volume de bois. Il doit de plus se concevoir d’emblée de façon harmonisée à une échelle européenne – ne serait-ce que parce que la production et la consommation de bois sont spatialement découplées – dans la logique des initiatives récentes portées par le réseau des inventaires européens (Tomppo et al., 2010 ; Vidal et al., 2016).

Parce qu’il doit se concevoir de façon harmonisée sur le continent, et qu’il ne pourra se faire qu’à coût marginal réduit, ce besoin d’une information forestière plus complète et élargie à de nouvelles dimensions, et d’une capacité de monitoring des forêts, désigne les inventaires forestiers nationaux européens, qui se sont systématisés ou ont progressé fortement, comme le support à privilégier à ces fins.

2. L’inventaire forestier national français et ses évolutions récentes

Depuis son lancement opérationnel en 1961 et jusqu’en 2004, l’inventaire forestier national était conduit par département administratif à une périodicité décennale, sur la base d’échantillons de placettes temporaires. Tandis que la désynchronisation entre départements interdisait de produire une image millésimée de la forêt française, le rythme d’inventaire générait une latence impropre à mesurer rapidement l’effet d’événements majeurs (par exemple, les dégâts associés aux tempêtes de 1999). En 2005, l’inventaire est donc devenu annuel (notion d’inventaire continu) et s’applique à ce rythme à l’ensemble du territoire national (Figure 2). L’information statistique en résultant est produite sur des fenêtres glissantes de 5 ans qui permettent d’en accroître la précision.

Figure 2 : Structure spatio-temporelle de l’inventaire forestier national depuis sa création. Créé en 1958, le

programme d’inventaire est d’abord conduit au grain départemental et progresse par cycles (1 à 4, dont le 4

e

ne

sera amorcé que dans une quinzaine de départements) jusqu’en 2005, où la surface forestière est intégralement

sondée chaque année (phase 5 du graphique).

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L’estimation des prélèvements de bois était par ailleurs et jusqu’alors fondée sur une évaluation rétrospective conduite sur les placettes temporaires de l’inventaire. Afin d’améliorer ces estimations, un système de placettes « semi-permanentes » a été mis en œuvre en 2010. Ce système consiste à effectuer un retour sur les points d’un échantillon décrit 5 ans auparavant afin d’identifier objectivement les prélèvements et la mortalité. Cette logique a été systématisée en 2015, avec une re-mesure systématique sur ces placettes qui permet d’estimer l’ensemble des flux sur 5 ans (croissance et recrutement inclus), tout en réalisant en parallèle un nouvel échantillon annuel.

Ces changements (fréquence et exhaustivité de l’inventaire, mesure appropriée des flux) confèrent donc à l’inventaire forestier une capacité de monitoring et de suivi des changements de la forêt très renforcée. Le caractère continu de l’inventaire forestier est appelé à devenir un standard international à horizon rapproché.

A titre d’illustration, des travaux récents conduits à partir des données de l’inventaire forestier (ancien système) ont permis de mettre en évidence les évolutions de croissance des forêts dominées par des espèces majeures de la forêt française au cours des 25 dernières années (Charru et al., 2014 , 2017), et d’exploiter la couverture exhaustive du territoire par cet inventaire pour : 1) spatialiser les changements de croissance et démontrer l’implication de facteurs environnementaux locaux dans ces changements, 2) démontrer que la différentiation régionale du climat et le changement climatique jouaient un rôle essentiel dans ces changements. Une des difficultés de l’approche résidait dans le déséquilibre temps-espace généré par l’ancienne méthode de sondage. Avec un inventaire désormais exhaustif et continu, et une information annuelle de croissance sur certains arbres échantillon, cette capacité d’exploration des impacts du changement climatique (évaluation continue, cartographie, identification de facteurs) s’en retrouve très largement améliorée, et fait partie des axes prioritaires de recherche du laboratoire d’inventaire forestier (LIF, IGN), dont un des champs de recherche est de développer les systèmes d’inventaire et de monitoring futurs.

3. L’évaluation des volumes de bois par l’inventaire forestier national 3.1 Le volume commercial et la révision de son estimation

Jusqu’à présent, l’inventaire forestier national a évalué les stocks de bois sur la base du volume de la tige principale sur écorce, et jusqu’à une découpe commerciale (7 cm), selon un standard international.

Ce volume s’estime à partir de modèles de type allométriques désignés par le terme de « tarifs de cubage ». Au long de sa réalisation, l’inventaire forestier a ainsi procédé au cubage de 1.5 million d’arbres suivant un protocole constant pour le développement de tels tarifs. Cet effort a été maintenu sur 25 % des points lors des campagnes d’inventaire allant de 2005 à 2007.

Cette masse de données considérable a permis une révision complète de ces tarifs en 2007 et en 2015, d’abord, en modélisant l’évolution de la forme des arbres au cours de leur développement (Figure 3), puis en introduisant, en plus de la hauteur et du diamètre, un troisième prédicteur associé à la hauteur de première rupture morphologique le long de la tige (hauteur de découpe), qui est intégratrice de l’histoire de gestion des peuplements. Cette génération de modèles ouvre de plus la perspective de dissocier le volume de bois d’œuvre de celui associé à d’autres usages.

3.2 Une première estimation du volume total aérien

Pour aussi fondamentale et nécessaire que puisse paraître l’estimation du volume total aérien des forêts, celle-ci demeure un enjeu de recherche (Bontemps et al., 2012). Historiquement, le volume total aérien de dizaines de milliers d’abres a été mesuré dans les décennies 1920-1950 suivant le protocole

« Oudin » (Oudin, 1930). Ces données de référence ont été mobilisées il y a une dizaine d’années pour

établir les modèles de volume associés pour les principales essences forestières (Vallet et al., 2006), et

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complétées par les données du projet ANR « Emerge » (Deleuze et al., 2013). Elles ont encore été déployées à titre expérimental sur le dispositif d’inventaire pour procéder à une première estimation du carbone forestier.

Ainsi, tandis que le stock commercial de bois sur pied s’établit à plus de 2,600 hm 3 , le volume total aérien avoisine les 4,000 hm 3 , avec un différentiel de 35% qui permet de situer l’enjeu de l’appréciation du volume total aérien. Parce qu’elles ont été collectées en forêt domaniale, dont l’histoire de gestion et les conditions de fertilité diffèrent des autres forêts, et sur des arbres jeunes, ces estimations n’offrent cependant aucune garantie quant à leur validité (représentation du territoire national), et appellent de nouveaux développements.

a) b)

c) d)

Figure 3 : Estimation du volume commercial des arbres de la ressource forestière française par des tarifs de

cubage nouvelle génération à trois prédicteurs (diamètre, hauteur totale, hauteur de première rupture

morphologique) : a) relation diamètre – volume de la tige principale (données de calibration et validation sur

nouvelle méthode d’inventaire), b) relation facteur de forme – diamètre de l’arbre permettant d’apprécier le

changement de forme de l’arbre moyen au cours de son développement (mêmes données, le « facteur de

forme » étant défini comme le ratio entre volume de l’arbre et le volume du cylindre défini par son diamètre à

1,30m et sa hauteur totale), c) même relation, analyse des tarifs ajustés sur les données de l’ancienne méthode

(calibration), d) même relation, analyse des tarifs en prédiction sur les données de la nouvelle méthode.

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4. Vers un inventaire volume/biomasse/carbone complet des forêts 4.1 Mesurer le volume total aérien de la forêt française

C’est dans ce contexte que l’inventaire forestier national a initié le déploiement de mesures par lidar terrestre en 2009 sur un sous-ensemble des points d’inventaire, afin de constituer progressivement une base de données de référence, représentative des essences et morphologies d’arbres rencontrées dans la forêt française. Cette base contient aujourd’hui plus de 1500 placettes numérisées (Figure 4).

Ces dernières ont pu être mises à profit dans un premier projet initié par le laboratoire d’inventaire forestier, le projet européen « Diabolo », permettant d’amorcer le développement d’algorithmes de reconstitution de la géométrie des arbres pour l’estimation de leur volume. Ces derniers doivent pouvoir être suffisamment génériques et robustes pour approcher avec le moins de biais possible une diversité de morphologies individuelles, associées aux contextes d’espèces, de gestion, et de fertilité de la forêt française, tout en s’adaptant à des protocoles de numérisation de placettes qui doivent par essence être efficaces et d’exécution rapide, et génèrent à ce titre plus d’occlusion géométrique que des protocoles dédiés à un petit nombre de placettes expérimentales. Ces algorithmes bénéficient des services offerts par la plateforme d’accueil « Computree » (Piboule et al., 2013).

a) b)

c) d)

Figure 4 : Numérisation de placettes de l’inventaire forestier national par Lidar terrestre et reconstitution

algorithmique de la géométrie des arbres pour l’estimation du volume total aérien des ressources forestières. a)

placette d’inventaire localisée dans un peuplement de chêne liège, b) placette localisée dans une plantation

d’épicéa, c) reconstruction algorithmique de la géométrie des arbres d’une placette, d) analyse topologique d’un

arbre distinguant sa tige principale et ses branches (source : projet européen « Diabolo », Jan Hackenberg).

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4.2 Mesurer la biomasse de la forêt française

A ces volumes plus complets, il est ensuite nécessaire de pouvoir associer des estimations de stocks et flux de biomasse, puis de carbone. C’est à ce titre qu’a été conçu le projet « XyloDensMap » (cartographie de la densité des espèces et la biomasse des forêts françaises, Leban et al., 2016), emblématique de la collaboration initiée entre l’IGN (Laboratoire d’Inventaire Forestier) et l’INRA (xylologie et plateforme de xylosciences du département EFPA).

L’estimation de la biomasse suppose en effet de disposer d’estimations de la densité du bois des essences inventoriées par l’inventaire forestier national (66 essences en France), ainsi que de leur variabilité, et de déterminer de manière quantitative la façon dont cette dernière est reliée aux facteurs de la gestion sylvicole et des contextes biogéographiques (pédologiques et climatiques), dont les variations peuvent couramment faire varier du simple au triple la valeur de densité du bois mesurée dans le cerne de l’arbre.

Parce qu’il n’existe pas de données atteignant cette représentativité, il a été décidé en 2015 de conserver et mesurer les carottes d’arbres collectées par le programme d’inventaire forestier depuis son origine aux fins d’estimations de l’accroissement en volume et de l’âge des peuplements. Cette démarche est illustrative d’une approche dite « à coût marginal minimal », puisqu’au lieu d’abandonner ces carottes de bois sur le terrain, ces dernières sont à présent adressées sous enveloppe pré- affranchie par les opérateurs de terrain de l’inventaire, et traitées à l’INRA. Pour une campagne annuelle d’inventaire, la collecte représente plus de 30 000 carottes.

Face à une collecte de données d’une telle ampleur, il était nécessaire de mettre en place une procédure d’acquisition à haut débit de mesures de densité du bois. Aux mesures traditionnelles de micro-densitométrie aux rayons X a dont été substituée une approche originale fondée sur le scan massif de blocs de boîtes de carottes, par le tomographe médical à rayon X (résolution de 200 µm), et sur le développement d’un logiciel d’extraction de mesures densitométriques sur les carottes (Jacquin et al., 2017 - Figure 5).

La superposition des mesures d’accroissement dimensionnel aux profils densitométriques obtenus par

une telle procédure permet pour la première fois d’envisager l’estimation de l’accroissement en

biomasse des forêts, sur l’ensemble du territoire et de ses contextes.

(8)

a)

b) c)

d)

e)

Figure 5 : Acquisition de mesures densitométriques par tomographie RX à haut débit pour l’estimation des

stocks et flux de biomasse et de carbone de la forêt française. a) carottes de bois des arbres recensables d’une

placette d’inventaire forestier collectées sur le terrain, b) scan optique au tomographe RX d’un ensemble de

boîtes de carottes (environ 1500 carottes), c) image RX en coupe transversale laissant apparaître les carottes

dans leurs alvéoles, d) image RX en coupe longitudinale dans une série de carottes, e) extraction d’un profil

densitométrique (résolution 200 µm) sur une carotte de bois après mise en œuvre d’un algorithme de détection

et d’analyse de carottes (Jacquin et al., 2017).

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5. L’intégration européenne et les travaux du réseau ENFIN des inventaires forestiers nationaux

Bien qu’il ait toujours existé des échanges et des collaborations entre programmes d’inventaires forestiers, les inventaires forestiers nationaux européens se sont formellement constitués en association (association « ENFIN », ou European National Forest Inventory Network) en 2003, avec plusieurs objectifs : 1) promouvoir leur coopération, et se concerter sur les solutions à mettre en œuvre pour répondre aux nouvelles demandes en information (par exemple concernant le bois mort ou la biodiversité), 2) appuyer les pays de l’Est européen à la mise en place d’un inventaire forestier statistique, après l’effondrement du bloc soviétique au sein duquel les questions d’évaluation des ressources étaient essentiellement gérées par la mise en œuvre de plans d’aménagement, 3) développer une démarche d’harmonisation européenne des résultats d’inventaire dans le respect des standards (définitions et protocoles) nationaux.

La question de l’harmonisation des résultats d’inventaire a focalisé les travaux depuis une grosse décennie (Tomppo et al., 2010, voir aussi Leban et Bontemps (2016), et les articles publiés dans ce numéro spécial). Ce terme admet une acception technique plutôt que politique, et ne doit pas davantage être confondu avec une procédure de standardisation des définitions et mesures entre pays européens. Ainsi, l’objectif de cette démarche d’harmonisation a été : 1) d’établir, par consensus, des définitions pour la mesure des caractéristiques inventoriables de la forêt (par exemple stock, production, recrutrement, etc) avec une précision au moins égale à celle des dispositifs nationaux, 2) pour chaque pays, d’établir les procédures et modèles permettant la conversion de résultats nationaux en résultats correspondant aux définitions harmonisées, voire d’adopter ces nouvelles définitions (cas des inventaires en cours de développement).

Ce processus de connaissance mutuelle entre programmes d’inventaires et d’élaboration de référentiels harmonisés s’est traduite dans deux actions « COST » européennes (E43, et FP1001), qui ont donné lieu à la publication de plusieurs ouvrages (dont les classiques « country reports » permettent à partir d’une analyse nationale systématique, d’élaborer une synthèse européenne (Tomppo et al., 2010 ; Vidal et al., 2016), et de publications. Les contributions françaises sont celles de Robert et al. (2010), puis Hervé (2016).

Cette démarche s’est plus récemment concrétisée dans l’élaboration du projet de recherche européen

« Diabolo » (horizon H2020, « Distributed, Integrated and hArmonized forest information for Bioeconomy OutLOoks »), consortium rassemblant, autour du réseau ENFIN, 33 partenaires d’inventaire et de recherche forestiers de 25 pays. La France occupe une position stratégique dans ce projet, puisque le plus important « Workpackage » (WP) du projet est coordonné par l’IGN et l’INRA, avec pour objectifs : 1) d’harmoniser les données d’estimation du volume commercial aérien, 2) de produire des algorithmes d’exploitation de nuages lidar terrestre d’arbres aux fins de reconstitution du volume total aérien, puis de développer des modèles européens d’estimation de ce volume total et de la biomasse, 3) de développer des estimateurs statistiques flexibles et multi-sources (exploitant notamment des cartes et de l’information issue de télédétection en sus de l’information issue des points d’inventaire terrain), et qui soient régulièrement mis à jour.

Ce projet européen, qui se terminera en 2019, est donc amené à représenter une étape historique

significative, fondée sur la double-dimension d’harmonisation européenne et de production de

nouveaux résultats d’inventaire constituant une information essentielle pour les stratégies de gestion

des ressources qui incarneront la « bio-économie » à l’européenne.

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Références bibliographiques

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