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Chapitre 2 : Les provinces kimberlitiques et leurs mégacristaux en République Démocratique du Congo. Cadre géologique et objets de l'étude

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Chapitre 2 :

Les provinces kimberlitiques et leurs mégacristaux en République Démocratique du Congo.

Cadre géologique et objets de l'étude

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Chapitre 2 :  

Les provinces kimberlitiques et leurs mégacristaux  en République Démocratique du Congo.  

Cadre géologique et objets de l’étude 

Introduction  2.1.

Le continent africain, largement cratonisé, est très riche en intrusions kimberlitiques et autres intrusions alcalines (carbonatites, syénites à néphéline), concentrées principalement dans la partie sud du continent et en Afrique centrale (Fig. 2.1). En Afrique centrale, des intrusions kimberlitiques (diamantifères et non diamantifères) sont notamment trouvées au Gabon, en Tanzanie et au Kenya, et principalement en Angola et en République Démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre). La plupart des provinces kimberlitiques d’Afrique centrale se mettent en place dans le craton archéen du Congo-Kasaï.

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Deux provinces kimberlitiques sont connues depuis longtemps en RDC. Ce sont les kimberlites diamantifères de Mbuji-Mayi (anciennement Bakwanga), dans la province du Kasaï-Oriental, et les kimberlites non diamantifères du plateau du Kundelungu, dans la province du Katanga (anciennement Shaba), au sud-est de la RDC (Fig. 2.2). Les kimberlites de Mbuji-Mayi et du Kundelungu se sont respectivement mises en place dans le craton archéen du Congo-Kasaï et la ceinture orogénique néoprotérozoïque katanguienne qui le borde à l’est. Une troisième province kimberlitique aurait été récemment identifiée à 200 km au nord-ouest de Mbuji-Mayi, dans la région de Luebo (Kasaï-Occidental), sur le craton du Congo-Kasaï (Fig. 2.2). Sa présence était suspectée depuis longtemps car des diamants et des minéraux indicateurs de la présence de kimberlites (i.e. ilménites-grenats-zircons) ont été largement observés (Batumike et al., 2009a ; b).

Cette étude est principalement axée sur les mégacristaux des kimberlites de Mbuji-Mayi mais des mégacristaux de grenat du Kundelungu sont également disponibles, ce qui nous permettra de comparer, sur certains aspects, les provinces kimberlitiques de deux régions qui diffèrent notamment par :

- la nature du socle traversé et des enclaves transportées ;

- l’âge de mise en place, la composition des kimberlites et leur potentiel diamantifère ; - la composition de la suite de mégacristaux.

2.2. Contexte géologique 

2.2.1. Structure et évolution du craton du Congo­Kasaï  

Le craton du Congo-Kasaï (également appelé craton du Congo) s’étend certainement de l’Angola (bloc d’Angola), au sud, en RDC (bloc du Kasaï), jusqu’en République centrafricaine (RCA), au Gabon (bloc du Gabon) et au Cameroun, au nord (Fig. 2.2 ; De Waele et al., 2008 ; Begg et al., 2009). Une épaisse couverture phanérozoïque rend cependant impossible la corrélation directe entre ces différents blocs et, bien qu’il n’y ait pas de consensus et que les études soient rares dans ces régions, certains pensent que la partie sud (bloc d’Angola + bloc du Kasaï) n’est pas liée par un socle archéen aux ensembles nord et ouest (Gabon, RCA et Cameroun) sous l’épaisse couverture sédimentaire de la cuvette centrale du Congo (e.g. Pasyanos and Nybdale, 2007). Ce craton n’aurait alors pas l’étendue qu’on lui reconnaît le plus souvent. Les résultats des études divergent (e.g. Crosby et al., 2010), c’est pourquoi nous avons décidé de continuer nos descriptions en nous basant sur la Fig. 2.2 (modifiée d’après De Waele et al., 2008) sur laquelle le craton du Congo-Kasaï est composé de différents blocs archéens : le bloc du Gabon, le bloc de l’Uganda, le bloc NE- Congo, le bloc Kasaï et enfin le bloc Angola. Ce craton s’étend donc de l’Angola, au sud, au

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Cameroun, au nord. Par ailleurs, quelle que soit son étendue véritable, la partie du craton qui nous intéresse concerne les régions du Kasaï et du Katanga, toutes deux liées à l’histoire du sud du craton.

Afin de comprendre la structure du craton du Congo-Kasaï et des ceintures orogéniques qui le bordent, il est important de brièvement retracer son évolution dans le contexte tectonique global du continent africain (centre et sud principalement) (Rogers, 1996 ; De Waele et al., 2008 ; Begg et al., 2009 et références dedans). Ce continent est composé de cratons archéens et paléoprotérozoïques amalgamés par des réseaux de ceintures orogéniques d’âges divers qui contiennent des arcs d’îles océaniques, des lithologies de marge continentale et, localement, des fragments de cratons plus anciens.

En Afrique sub-saharienne, trois grands cratons archéens sont distingués : le craton du Congo-Kasaï, le craton de Tanzanie et le craton du Kalahari (Fig. 2.2). Les ceintures orogéniques ruzizienne, ubendienne et usagarienne qui bordent le craton de Tanzanie à l’ouest, au sud-ouest et sud-est respectivement, se sont formées au Paléoprotérozoïque. Elles témoignent vraisemblablement de l’amalgamation du craton archéen de Tanzanie avec le bloc de Bangweulu, situé plus au sud. La ceinture ubendienne (2,0 Ga) enregistre des âges supérieurs au bloc de Bangweulu, qui ne contient pas de lithologie plus vieille que 1,9 Ga. Ce bloc pourrait cependant résulter du fort remaniement, lors de l’Eburnéen (entre 2,2 et 1,9 Ga), d’une terrane mésoarchéenne de 3,2 Ga : la terrane de Likasi. Ce socle archéen se trouverait à la fois sous le bloc de Bangweulu et sous la ceinture mésoprotérozoïque irumide, au sud. Au Mésoprotérozoïque, la ceinture kibarienne (1,38 Ga) marque la convergence entre le bloc Tanzanie-Bangweulu et le craton du Congo-Kasaï. Les ceintures kibarienne et nord-est kibarienne bordent en effet l’est des blocs Kasaï, NE Congo et Uganda, et l’ouest du bloc Tanzanie-Bangweulu. Bien que les preuves manquent encore, il est possible que les blocs Angola-Kasaï et Tanzanie se soient amalgamés au Paléoprotérozoïque étant donné qu’il a été montré que ces trois ensembles ont été affectés par l’orogenèse éburnéenne (2,2-1,9 Ga).

C’est un peu plus tard (1,05-1,02 Ga) que se forment les ceintures irumide et sud irumide, le long de la marge S-SE du craton. Ces dernières témoignent peut-être de la participation du craton du Kasaï (+ Tanzanie) au supercontinent Rodinia (1020 Ma) mais les preuves sont manquantes. Le rifting initié au début du Néoprotérozoïque (820-800 Ma) marque le début de l’orogenèse lufilienne. Il est caractérisé par des dépôts clastiques (groupes de Roan et Mwashya) ou volcaniques dans la ceinture lufilienne-katanguienne et la ceinture zambezi.

C’est également à celui-ci que nous devons les successions de dépôts cuprifères formant la

« Copperbelt » de l’Afrique centrale.

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Kasai Block NE Congo Block

Uganda Block Gabon

Block

Damara, Gariep,

Kaoko and Namaqua

Belts Angola

Block

Kheis Belt

Kaapvaal Craton

Natal Belt Zimbabwe

Craton Magondi

Belt

Lurio Foreland Ruwenzori Belt

Tanzania Craton

Zambezi Belt

Lurio Foreland

Congo-Kasai Craton

Kalahari Craton

Mozambique Belt

Lufilian Belt

Kundelungu Mbuji-Mayi

Luebo

Southern Irumide Belt Irumide Belt West

Congo Belt

+ Kimezian

Belt

Gab. Belt

KibaranBelt

Ruzisian

NE Kibaran Belt

Ubendian Belt

Usagaran Belt

Limpopo Belt Katangan Belt

tab. Kat.

L.V

L.T.

L.Ma.

L.B.

L.Mw.

L.R.

Bangweulu Block

Fig. 2.2. Carte géologique simplifiée de l'Afrique sub-saharienne (modifié d’après De Waele et al., 2008 et Batumike et al., 2009a).

L e s s o c l e s c r a t o n i q u e s a r c h é e n s à paléoprotérozoïques sont mis en évidence ainsi que les possibles étendues de 2 grands cratons: le craton du Congo-Kasaï et le craton du Kalahari. Les socles cratoniques sont séparés par des ceintures orogéniques précambriennes.

Les provinces kimberlitiques connues en RDC sont mises en évidence (ronds blancs).

Les frontières géographiques et les grands lacs du Rift Est Africain (EARS) sont également illustrés.

tab. Kat.: Katanguien tabulaire

Lacs:V: Victoria; T: Tanganyika; R:Rukwa; B: Bangweulu;

Ma: Malawi; Mw: Mweru

Cratons archéens avec recouvrement paléoprotérozoïque ou cratons paléoprotérozoïques contenant des parties archéennes Ceintures orogéniques paléoprotérozoïques avec possible socle archéen sous-jacent

Ceintures orogéniques paléoprotérozoïques Ceintures orogéniques mésoprotérozoïques

Ceintures mésoprotérozoïques recouvertes par du Néoprotérozoïque

orogéniques

Ceintures orogéniques néoprotérozoïques à cambriennes Ceintures orogéniques précambriennes non différenciées Couverture phanérozoique à récente

Possible étendue du craton à 1 Ga d’après De Waele et al. (2008) Limites des cratons (comme le plus souvent représentées)

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Une sédimentation de marge passive extensive a suivi (~ 765 Ma ; groupes Nguba et Kundelungu). Le métamorphisme éclogitique (659-595 Ma), enregistré dans la ceinture de Zambezi, marque la subduction de croûte océanique et la fermeture du bassin océanique au sud du craton du Kasaï (+ Tanzanie). Vers 570-530 Ma, lors de la formation du supercontinent Gondwana, le craton du Kasaï (+ Tanzanie) a convergé avec celui du Kalahari.

Ce dernier comprend les cratons du Kaapvaal au sud, et du Zimbabwe, au nord, ainsi que la ceinture orogénique paléoprotérozoïque de Limpopo qui les lie. L’orogenèse panafricaine mène donc à la formation des ceintures lufilienne-katanguienne et zambezi qui regroupent les deux grands cratons de l’Afrique sub-saharienne.

2.2.2.  La province kimberlitique de Mbuji­Mayi 

La découverte des premiers diamants le long de la rivière Mbuji-Mayi remonte à 1916.

Ce n’est que trois années plus tard qu’a débuté l’exploitation par la Minière de Bakwanga (MIBA). Il a cependant fallu attendre 1946 pour que l’identification du premier pipe kimberlitique par levé électrique soit réalisée par De Magnée (dans Demaiffe, 1995). Les kimberlites de Mbuji-Mayi et les dépôts diamantifères associés ont suscité de l’intérêt depuis les années 1950 étant donné leur grand potentiel économique (e.g. Meyer de Stadelhofen, 1963 ; Fieremans, 1966 ; Mvuemba Ntanda, 1980 ; cités dans Demaiffe, 1995). Les dépôts de cratère et les graviers qui en dérivent contiennent en effet jusque 20 carats/tonne (5 en moyenne) bien que les diamants soient le plus souvent de relativement pauvre qualité (Janse and Sheahan, 1995).

2.2.2.1. Emplacement tectonique des kimberlites 

La province kimberlitique de Mbuji-Mayi se situe dans l’est de la province du Kasaï (province du Kasaï-Oriental) et consiste en deux groupes de pipes ou diatrèmes qui traversent le craton archéen du Congo-Kasaï, âgé de plus de 2,9 Ga (Fig. 2.5a):

- un groupe nord, à Mbuji-Mayi même, comprenant dix corps allongés dans la direction E-O qui seraient liés à une fissure crustale d’au moins 10 km de long. Six d’entre eux seulement sont de véritables diatrèmes, tandis que les autres sont composés de matériel tufacé expulsé par les pipes.

- un groupe sud (Tshibua-Kalonji), à 30 km au sud-est de Mbuji-Mayi. Cinq pipes y sont actuellement connus.

Bien que les relations tectoniques entre ces deux groupes ne soient pas claires, la forme elliptique des intrusions et leurs positions relatives semblent suggérer un alignement E-O.

Cette direction, bien que ne correspondant à aucune faille majeure, coïncide avec la troisième direction structurale principale de la région qui est caractérisée par la mise en place de dykes

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basiques et ultrabasiques, sur une distance de quelques dizaines de km. Les deux groupes de pipes sont séparés par une distance N-S d’environ 13 km et il est intéressant de remarquer que les récentes prospections suggèrent l’éventuelle présence d’autres dykes basiques, peut-être kimberlitiques, à la même distance, encore plus au sud (Demaiffe et al., 1991).

Les kimberlites de Mbuji-Mayi se sont mises en place au Crétacé. Cet âge a d’abord été proposé sur base de relations stratigraphiques (Fieremans, 1966 ; cité dans Demaiffe, 1995) et a ensuite été confirmé par les datations U-Pb (ID-TIMS ; 45 analyses) sur les mégacristaux de zircon et baddeleyite (Schärer et al., 1997). Les points d’analyse s’alignent en effet le long d’une corde discordia ; ils sont situés près de l’intersection inférieure qui donne un âge précis de 69,8 ± 0,5 Ma. L’intersection supérieure est évidemment beaucoup moins précise ; elle correspond à un âge de 2528 ± 452 Ma. Quelle que soit la signification de l’âge paléoprotérozoïque archéen de l’intersection supérieure (Schärer et al., 1997 ; Batumike et al., 2009b), les kimberlites de cette région, comme beaucoup d’autres en Afrique, se sont mises en place au Crétacé supérieur.

La province kimberlitique de Mbuji-Mayi se trouve à l’extrême NE du grand couloir d’orientation SO-NE dessiné par les kimberlites et les carbonatites d’Angola, que l’on appelle le corridor de Lucapa (Egorov et al., 2007 ; Pettit, 2009 ; Fig. 2.3). Cette relation avait été suggérée il y a longtemps déjà par Reis (1972 ; cité dans Demaiffe et al., 1991) qui proposait que les structures linéaires profondes mises en évidence par la géophysique soient liées à différentes périodes d’activité magmatique. Ce graben de Lucapa est un système de failles d’extension d’âge crétacé (Robles et al., 2009) qui se trouve dans le prolongement d’une ancienne structure au SO de l’Angola, le corridor NE-SO de Quilenges-Andulo. Ce dernier est un assemblage composite de failles profondes qui s’étend sur 400 km de long et 90 km de large et qui concentre également de nombreuses carbonatites et kimberlites (Jelsma et al., 2009). Le corridor de Lucapa, comme d’autres couloirs parallèles qui contiennent des intrusions kimberlitiques du même âge, en Afrique du Sud par exemple, a été réactivé lors de la séparation de l’Afrique et de l’Amérique du Sud, avec l’ouverture de l’Atlantique Sud. Les datations radiochronologiques sont peu nombreuses pour les kimberlites en Angola en général. Cependant, une dizaine de pipes du groupe d’Alto Cuilo, au nord-est du corridor, sur le craton du Kasaï, ont été récemment datés entre 145 ± 4 Ma (Crétacé inférieur) et 113 ± 0,8 Ma (Crétacé moyen) (Rb-Sr sur phlogopite ou U-Pb sur zircon ou pérovskite ; Eley et al., 2008).

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0100200 kilometers

ATLANTIC OCEAN

NAMIBIA

ZAMBIA

DRC

Angolan Block

Kasai Block

10°S 15°S 15°E20°E

kimberlites carbonatites Lucapa Corridor Quilenges

Andulo

Luanda

Cabinda Uige Saurimo Luena

Alto Cuilo

Mbuji-Mayi Namibe Fig. 2.3. Localisation des kimberlites de Mbuji-Mayi dans l’extension NE du corridor de Lucapa dans lequel les occurrences kimberlitiques et carbonatitiques sont nombreuses en Angola. Modifié d’après Egorov et al. (2007) et Pettit (2009).Fig. 2.4. Carte géologique simplifiée mettant en évidence les différentes unités archéennes du craton du Congo-Kasaï au S-SO de la province kimberlitique de Mbuji-Mayi. Modifiée d’après Walraven and Rumvegeri (1993) et la légende de la carte géologique Fig. 2.5.

Dibaya

kimberlite D K-LΔ

K-LΔ’

T = Tshambogo Young cover Post tectonic granite Luiza metasedimentary complex Dibaya granite/ migmatite complex Kasai-Lomami gabbro-norite & charnockite complex Sandoa-Kapanga complex

Luiza Musefu Kapanga Sandoa

Lz

7°S 8°S 9°S 10°S 11°S 23°E24°E

RDC

Abγ

Kalonji Tshibua

Mbuji-Mayi 22°E

ANGOLA

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Alors que les kimberlites diamantifères de Mbuji-Mayi sont exploitées depuis longtemps, l’unique centre actif de production de diamants en Angola est la kimberlite de Catoca appartenant au groupe de kimberlites d’Alto Cuilo (province de Lunda Sul, NE Angola) (Robles et al., 2009). Il est également intéressant de noter que, dans le sud de l’Angola, seuls les pipes qui se trouvent dans le couloir parallèle à celui du Lucapa, dont l’un a été daté à 372

± 8 Ma (K-Ar sur phlogopite), sont diamantifères, alors que ceux qui se trouvent sur la faille N-S sont pauvres en diamants (Egorov et al., 2007).

2.2.2.2. Structure et composition du socle  

Le craton archéen du Congo-Kasaï affleure à 100 km au S-SE de la région d’exploitation de Mbuji-Mayi (Figs. 2.4-2.5a) et s’étend sur 1 200 km entre la rivière Lomami et la côte atlantique en Angola (bloc du Kasaï + bloc d’Angola) (Bingen et al., 1984). Ce craton se compose de plusieurs complexes granulitiques archéens.

Dans la région de Mbuji-Mayi, le socle le plus ancien est le complexe gabbro-noritique et charnockitique du Kasaï-Lomami (Δ(’)KL ; > 2,9 Ga). Au nord de celui-ci se trouve le complexe granitique et migmatitique de Dibaya (D ; 2,7 Ga) et, au sud, le complexe granito- gneissique du Shaba occidental (Delhal and Liégeois, 1982), également appelé complexe de Sandoa-Kapanga (Ab ; 3,02 Ga, Walraven and Rumvegeri, 1993) (Fig. 2.4). Ces complexes archéens sont recouverts par le complexe métasédimentaire de la Luiza (Lz) du Protérozoïque inférieur. Le gneiss de « Haute-Luanyi » est décrit comme la plus vieille unité du craton du Kasaï (voir légende Fig. 2.5) mais couvre seulement une petite région dans la partie nord du complexe du Kasai-Lomami-Dibaya (KL-D) et la datation (âge modèle Rb-Sr sur feldspath d’une pegmatite dans le gneiss : 3487 ± 67 Ma ; recalculé par Walraven and Rumvegeri, 1993) est peut-être peu fiable (elle dépend en effet nettement de la valeur choisie pour le rapport isotopique initial : 87Sr/86Sr0) et n’a jamais été répliquée (Walraven and Rumvegeri, 1993). L’âge le plus ancien enregistré dans le craton du Kasaï est de 3021 ± 47-49 Ma ; il provient de la datation Pb-Pb sur roches totales (RT) dans des granitoïdes granodioritiques se trouvant dans les gneiss à biotite de la région de Sandoa-Kapanga, au sud du complexe du Kasaï-Lomami (Walraven and Rumvegeri, 1993 ; Fig. 2.4). Cet âge reflèterait un épisode métamorphique lors duquel la fusion anatectique engendre la formation de magma granodioritique.

(11)

11° S 10° S

28° E 27° E

b.

6°S

7°S 5°S 24°E

23°E 22°E

21°E

D D

c3

c3

c3

c1

c1

ΔK-L

Δ’K-L K-L

Δ’

KL- D

b0-1

b2

tt Ab

Lz Lu

δ σ’

pp pp

pp

k3

k3

kg g m-r

k1

kg/pp

pp ho

k3

ho

a.

a.

b.

Tshibua Kalonji

Kundelungu

(12)

Δ’K-L K-L

Δ

ROCHES MAGMATIQUES ET METAMORPHIQUES RESSOURCES METALLIQUES

RESSOURCES NON-METALLIQUES

TONNAGE

Fig. 2.5. Extraits de la Carte Géologique et Minière de la République Démocratique du Congo (1/2 500 000); Musée Royal de l'Afrique Centrale (MRAC), Tervuren 2005.

a. Région de Mbuji-Mayi (I. Congo méridional - A Kwango-Kasaï-Lomami) b. Région du Kundelungu (II. Congo sud-oriental - A Méridional)

(13)

Le complexe gabbro-noritique et charnockitique du Kasaï-Lomami est constitué de deux ensembles (Figs. 2.4-2.5a):

- au sud, un ensemble à caractère acide (ΔKL), composé de gneiss enderbitiques prépondérants et de gneiss charnockitiques, de granulites métapélitiques à sillimanite et grenat et subsidiairement de veines de roches hololeucocrates roses à mésoperthite et quartz, d’apparence migmatitique. Ce second ensemble est recoupé par de nombreux dykes de métadolérite (δ), orientés au hasard, qui ont conservé une partie de leur texture magmatique primaire (Delhal et al., 1976 ; 1986 ; Delhal and Liégeois, 1982 ; Bingen et al., 1984 ; 1988) et,

- au nord, un ensemble basique plutonique (Δ’KL), constitué de gabbro-norites et de gabbros avec des quantités subordonnées d’anorthosite à forstérite et quelques pyroxénites.

La partie acide de ce complexe a subi un premier métamorphisme (« charnockitisation » ; événement Musefu), dans les conditions du faciès granulitique vers 2,8-2,9 Ga, qui a donné naissance aux roches hololeucocrates à mésoperthite et quartz (e.g. datation Rb/Sr sur 13 roches hololeucocrates du complexe charnockitique de la région de Musefu : 2830 ± 77 Ma, Delhal et al., 1976). La majorité des roches de la partie acide est cependant antérieure à la charnockitisation mais leur âge exact n’est pas bien contraint :

- ~ 3,6 Ga : âge modèle Hf sur zircons de 3,2 Ga caractérisés par des εHf0 < 0 (Batumike et al., 2009b) ;

- > 3,4 Ga : âge modèle Rb-Sr sur feldspath d’une pegmatite dans le gneiss (Cahen et al., 1984) ;

- > 3,1 Ga : âge modèle Sm-Nd le plus vieux sur un protolite tonalitique des charno- enderbites (Delhal et al., 1986).

Ce premier événement métamorphique a été suivi par l’intrusion du complexe granitique et migmatitique de Dibaya (2,7 Ga ; événement Moyo) qui aurait localement rétromorphosé les granulites dans le faciès amphibolite (Delhal et al., 1976 ; Delhal and Liégeois, 1982).

La partie basique du complexe, au nord, ainsi que les dykes de métadolérite qui recoupent la partie acide, se sont mis en place vers 2,4 ± 0,1 Ga. La mise en place du complexe basique précède de peu (temps d’enfouissement des dykes de métadolérite hypabyssaux dans conditions du faciès granulitique) un second épisode métamorphique granulitique (730 ± 50

°C, 7,0 ± 0,5 kbar ; Bingen et al., 1984). En effet, les isochrones Sm-Nd sur RT (gabbro- norites, métadolérites) et minéraux séparés donnent toutes deux des âges concordants dans les

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limites d’erreur (Delhal et al., 1986). Les granulites sont également localement rétromorphosées en amphibolites. L’effet de ce second événement métamorphique sur les granulites acides de 2,8 Ga n’a été enregistré que dans les biotites qui donnent des âges Rb-Sr de 2,4 Ga (Delhal et al., 1976).

L’orogenèse luizienne à ~ 2,1 Ga (Delhal et al., 1986) (métasédiments de Luiza en discordance sur le socle ; Fig. 2.5a) remanie les roches du complexe du Kasaï-Lomami- Dibaya (KL-D) (incorporation des gabbro-norites dans la ceinture luizienne intracratonique) mais ne les métamorphise que peu. L’âge du magmatisme archéen le plus jeune de ce socle, en RDC, est enregistré dans les granites de la Malafundi du complexe de Dibaya (2648 ± 34 Ma ; Rb/Sr, Delhal et al., 1976). Les roches plus jeunes (paléo-, méso-, néoprotérozoïques) de ce craton sont peu étudiées mais se composent de fragments des ceintures orogéniques environnantes (ubendienne, kibarienne et katanguienne, respectivement) (Batumike et al., 2009a).

Les kimberlites du groupe nord de Mbuji-Mayi recoupent successivement (1) le socle archéen, (2) le Supergroupe de Mbuji-Mayi qui consiste en une épaisse séquence sédimentaire (non métamorphique) du Protérozoïque moyen à supérieur et est composé de grès et calcaires stromatolitiques dolomitisés mis en place entre 1300 Ma (phase tectonique principale de l’orogenèse kibarienne) et 950 Ma (extrusion des laves doléritiques au sommet de la séquence calcaire), et (3) les grès arénacés des séries de la Lualaba datant du Crétacé (120 Ma) (Demaiffe and Fieremans, 1981).

Les kimberlites du groupe sud ne recoupent que le premier et le dernier terme de cette séquence, se trouvant hors de la zone de dépôt des calcaires de Mbuji-Mayi (Fig. 2.5a).

2.2.3. La province kimberlitique du Kundelungu 

Le premier diamant a été trouvé il y a plus d’un siècle dans la région du Katanga et les kimberlites ont été identifiées seulement 5 ans plus tard, en 1908, sur le plateau du Kundelungu (Demaiffe, 1995). Ces dernières n’ont cependant jamais été exploitées étant donné leur faible potentiel économique (~ 0.3 carat/tonne pour le plus grand pipe) et la pauvre qualité des pierres (Janse and Sheahan, 1995).

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2.2.3.1. Emplacement tectonique des kimberlites 

Le Haut Plateau du Kundelungu, région du Katanga (ex-Shaba, SE de la RDC), est situé entre deux régions déprimées : à l’ouest, la plaine de la Lufira et, à l’est, la dépression de Luapula-Mweru (Kampata, 1993). La province kimberlitique du Kundelungu se compose de deux groupes de pipes distincts qui affleurent sur une superficie d’environ 250 km2, sur les bordures est et ouest du plateau (Fig. 2.6 ; Demaiffe et al, 1991 ; Batumike et al., 2008) :

- le groupe ouest comprend quatorze pipes, tous alignés suivant une direction N-S, à l’exception d’un pipe ;

- le groupe est se compose de seize pipes plus irrégulièrement distribués. Le pipe de Talala, qui affleure sur environ 50 ha, est l’un des plus grands pipe au monde.

La partie centrale du plateau est recouverte d’une épaisse couche de sable, appartenant à la série du Kalahari (Cénozoïque), qui pourrait masquer d’autres pipes kimberlitiques (Kampata, 1993).

Par analogie avec de très nombreuses kimberlites en Afrique du Sud et avec celles de Mbuji-Mayi en RDC, il a longtemps été suggéré que les kimberlites du Kundelungu étaient d’âge crétacé (e.g. Fieremans et al., 1984 ; Demaiffe et al., 1991). Elles sont en effet postérieures au dépôt des roches du sous-groupe Biano (Néoprotérozoïque supérieur) qui forment le plateau du Kundelungu et antérieures aux grès d’âge Miocéne qui recouvrent le plateau. Ce n’est que récemment que l’âge de 32,3 ± 2,2 Ma a été déterminé de manière précise (56 analyses ; LAM-ICP-MS) par datation U-Pb des pérovskites de la matrice des kimberlites des pipes de Kambeli et Msipashi (Batumike et al., 2008). La mise en place des kimberlites à l’Oligocène inférieur serait associée à l’ouverture du Rift Est-Africain (EARS) (Batumike et al., 2008 ; Jelsma et al., 2009). L’ouverture de la partie nord du rift a en effet débuté à l’Eocène-Oligocène et le plateau du Kundelungu se trouve non loin des grands lacs formés par ce rift quaternaire (Tanganyika, Mweru… ; Fig. 2.2) auquel est associé un volcanisme intense. Plus précisément, le plateau du Kundelungu se trouve dans l’axe qui prolonge, vers le sud, le graben du lac Luapula-Mweru (NNE-SSO) (Fig. 2.2). La mise en place des kimberlites est donc vraisemblablement liée à l’ouverture de la branche éthiopienne de l’EARS qui affecte le continent africain bien plus au sud.

(16)

Dyamba (= Kashioba) Mafumba

Liasa Konzi Golo

Chingululu Mbo

Gwena

Lualala

Kapwasa

Katawala Mafwa

Talala

Lwanza Gungwania

Mshipashi Kambeli

Lutshipuka Tengo

Chimbe Mombwe

Kango

Zefu Gondolo

Katipa

Kundelungu Plateau Sand cover

Kimberlite pipe

15km

Kasai Block

KibaranBelt

tabular Katangan Bangweulu

Block

Ubendian Belt

Southern Irumide Belt Irumide Belt

Zambezi Belt

Katangan Belt

Lufilian Belt

Zimbabwe Craton Choma-Kalomo

Block

K.P. Kundelungu Plateau Neoproterozoic Paleozoic to Recent Mesoproterozoic

Granitoids Paleoproterozoic

Archean

Strike-slip fault Thrust K.P.

16°S 12°S

25°E 30°E

Luina

Paleoproterozoic with

Fig. 2.6. Distribution des intrusions kimberlitiques de la province du Kundelungu sur les bordures est et ouest du Haut Plateau du Kundelungu (sud-est RDC). D’après Batumike et al. (2008).

N

Fig. 2.7. Carte géologique simplifiée détaillant la structure du socle en-dessous et aux abords du plateau du Kundelungu (KP). D’après Batumike et al. (2007).

08°S

(17)

2.2.3.2. Structure et composition du socle  

Le plateau du Kundelungu se trouve sur la ceinture orogénique katanguienne (Néoprotérozoïque supérieur-Paléozoïque inférieur ; ~ 800-540 Ma) qui constitue la partie non plissée de la ceinture orogénique lufilienne, formée lors de la convergence des cratons du Congo-Kasaï-Tanzanie et du Kalahari (Fig. 2.7 ; Batumike et al., 2007 ; 2008). La ceinture du Katanga est stable depuis environ 540 Ma (fin de l’orogenèse lufilienne) et aucun événement magmatique ou tectonique majeur n’a été reconnu au sein de cette ceinture après cette période (Batumike et al., 2008). Les roches qui composent le plateau du Kundelungu appartiennent donc au supergroupe Katanguien (Fig. 2.5b). Plus précisément, les pipes kimberlitiques traversent les sédiments horizontaux du système du Kundelungu (sous-groupe de Biano, partie supérieure du supergroupe Katanguien), composés de grès, en association avec des calcaires, dolomites et mudstones. En profondeur, ils sont également intrusifs dans la ceinture orogénique mésoprotérozoïque kibarienne (1,3 ± 0,2 Ga) qui affleure au NO (Fig. 2.7) et est composée de roches métamorphiques : granitoïdes, quartzites et sédiments pélitiques, plissés lors de l’orogenèse kibarienne (Batumike et al., 2007). Le dôme granitique de la Luina, au sud du Katanga (Fig. 2.7), a été daté à 1882 ± 20 Ma (Ngoyi et al, 1991), suggérant que tous les dômes granitiques de l’arc cuprifère zaïro-zambien pourraient constituer la prolongation vers le sud-ouest du bloc de Bangweulu, dont les granitoïdes sont du même âge (Demaiffe, 1995).

Dans ce cas, il est possible que les pipes de cette province recoupent, en profondeur, un socle Paléoprotérozoïque de 1,9 Ga, composé de micaschistes, de métavolcanites et de granitoïdes.

Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que, sous le bloc de Bangweulu lui-même, pourrait se trouver une terrane méso-archéenne (terrane de Likasi). Les datations U-Pb (TIMS) sur des xénocristaux de zircon d’un tuff de la ceinture néoprotérozoïque lufilienne ont en effet révélé un âge de 3,2 Ga (Rainaud et al., 2003 ; cités dans De Waele et al., 2008). Le seul argument suggérant la présence de croûte archéenne (2726 ± 36 Ma) dans la région provient de la datation de zircons d’un gneiss granitique qui constitue une partie du socle dans la ceinture irumide, le long de la marge sud du bloc de Bangweulu (De Waele et al., 2008).

2.2.4. Estimations de la profondeur de la lithosphère en RDC 

Etant donné l’instabilité de la situation géopolitique dans ces régions, nous n’avons que relativement peu de connaissances sur la composition et la structure profonde du craton du Congo-Kasaï et des régions avoisinantes. Cependant, grâce aux récents développements des méthodes d’inversion des ondes sismiques de surface pour contraindre l’épaisseur de la lithosphère, des études ont pu être réalisées récemment sur le continent africain (e.g. Priestley and McKenzie, 2006 ; Pasyanos and Nyblade, 2007). Ces études ont une meilleure résolution spatiale que les méthodes géophysiques classiques qui utilisent les ondes sismiques de volume

(18)

(P et S) (e.g. Begg et al., 2009). L’intérêt porté à l’estimation de la profondeur de la lithosphère sous le bassin intracratonique du Congo, aussi appelé « cuvette centrale du Congo », formé à la fin du Précambrien (e.g. Crosby et al., 2010), nous permet depuis peu de disposer d’une estimation relativement précise sous les régions d’intérêt (Fig. 2.8).

Les kimberlites de Mbuji-Mayi et les kimberlites du nord de l’Angola se trouvent en effet sur la bordure S-SE de ce bassin. Sous le craton du Congo, l’épaisseur de la lithosphère varie depuis 240 km à sa marge ouest, jusque environ 180 km vers l’est (Crosby et al., 2010) : une épaisseur moyenne de 220 ± 30 km sous le bassin du Congo semble en bon accord avec l’estimation (205 ± 5 km) dérivée des analyses géochimiques sur des xénocristaux de grenat des kimberlites de Mbuji-Mayi et Luebo (Batumike et al., 2009a). L’épaisseur de la lithosphère échantillonnée par les kimberlites du Kundelungu a été estimée à un minimum de 175 km via l’étude des xénocristaux de grenat (Batumike et al., 2009a) et semble comprise entre 180 et 200 km sur base du profil dérivé des ondes sismiques (Crosby et al., 2010).

(19)

2.3. Nature des kimberlites de RDC et de leurs enclaves  2.3.1. Introduction 

Les kimberlites de Mbuji-Mayi et du Kundelungu peuvent être associées aux kimberlites du Groupe I d’Afrique du Sud (Smith, 1983). Les rapports isotopiques (87Sr/86Sr)0

sont en effet assez faibles (0,7040-0,7045 et 0,7038-0,7049, respectivement) et les εNd0

légèrement positifs (+ 1,9 à + 5,9 et + 2,1 à + 4,9, respectivement) (Demaiffe and Fieremans, 1981 ; Weis and Demaiffe, 1985 ; Kampata, 1993), ce qui suggère que leur région-source était faiblement appauvrie en éléments incompatibles. Les kimberlites de RDC sont globalement similaires aux autres kimberlites du Groupe I à travers le monde ; elles sont peut-être légèrement plus appauvries en HREE que la moyenne (Fieremans et al., 1984).

Les provinces kimberlitiques de Mbuji-Mayi et du Kundelungu présentent cependant des différences, notamment dans les compositions des roches kimberlitiques, la nature des enclaves mantéliques et les compositions des mégacristaux. Par ailleurs, les diamants n’ont été trouvés en quantité exploitable que dans la région de Mbuji-Mayi, ce qui pourrait être lié à la nature et l’âge du socle traversé. La règle de Clifford (1966) statue en effet que les occurrences économiques de diamants sont restreintes aux socles archéens (e.g. Janse and Sheahan, 1995). Elle semble être globalement vérifiée bien que la relation entre l’âge et l’épaisseur de la lithosphère n’est pas toujours clairement établie car elle dépend de l’histoire de la lithosphère (voir Chapitre 1). Il semble que c’est plutôt l’épaisseur de la lithosphère qui contrôle la présence de diamants (e.g. White et al., 1995 ; O’Neill et al., 2005).

2.3.2. La province kimberlitique de Mbuji­Mayi  2.3.2.1. Les kimberlites  

Le remplissage des pipes kimberlitiques en général, et de ceux de Mbuji-Mayi en particulier, est brèchique. Dès lors, les échantillons de kimberlites, à couleur dominante bleue (« blueground ») ou jaune (« yellowground »), sont très hétérogènes et sont de plus souvent très altérés en climat tropical. L’étude pétrographique porte donc sur les enclaves de kimberlite, appelées autolites de kimberlite (« primary kimberlite ») qui se trouvent dans la brèche (Demaiffe and Fieremans, 1981 ; Fieremans et al., 1984 ; Demaiffe et al., 1991). Ces nodules sont sans doute les meilleurs représentants des roches kimberlitiques « originales », mises en place sous forme de sills ou de dykes à des niveaux plus profonds de la croûte : ils correspondent au faciès hypabyssal des kimberlites.

Les kimberlites de Mbuji-Mayi sont enrichies en éléments volatils (H2O-CO2) par rapport à celles du Kundelungu et aux kimberlites en général d’ailleurs, ce qui est probablement dû à la nature hypabyssale, donc non dégazée, des nodules étudiés et à l’abondance des carbonates.

(20)

Certains autolites contiennent en effet des inclusions angulaires de carbonates (jusque 4 cm), dont l’origine semble être directement liée au magma kimberlitique (sur base des signatures isotopiques du Sr ; Demaiffe and Fieremans, 1981), éventuellement par immiscibilité de liquide ou lors d’une cristallisation tardive de carbonates. Les carbonates, calcite principalement, sont par ailleurs communs, que ce soit sous forme de grains isolés ou agrégats dans la matrice, ou en phases de remplacement. Bien que ces autolites soient localement altérés, on y distingue deux générations de phénocristaux d’olivine partiellement transformés en phlogopite + calcite + saponite, ainsi que des macrocristaux (jusque 0,5 cm) de chlorite chromifère tabulaire. La chlorite confère à la roche une apparence micacée et est souvent entourée ou remplacée par de la phlogopite. La matrice est fine et constituée de calcite primaire (~ 25 %), de Cr-chlorite automorphe, de saponite et de phases accessoires (magnétite, rutile et apatite). On n’y retrouve ni spinelle chromifère, ni pérovskite et les vrais phénocristaux de phlogopite sont absents dans ces kimberlites.

2.3.2.2. Les mégacristaux 

La suite de mégacristaux échantillonnée par les kimberlites de Mbuji-Mayi est exceptionnelle de par sa diversité : on y trouve en effet les minéraux classiques d’une suite de mégacristaux, comme le pyrope, le diopside et l’ilménite Mg, mais aussi le zircon. Les intercroissances oxyde-silicates sont nombreuses mais ne sont pas faites d’ilménite comme dans la plupart des autres occurrences, mais bien de rutile. Le rutile est également abondant sous forme de grains monominéraux. D’autre part, ces phases sont accompagnées par des minéraux qui ne sont que très rarement, voire jamais, retrouvés dans les kimberlites : des mégacristaux de chlorite, de disthène, de baddeleyite et de corindon. Ni l’olivine, ni l’orthopyroxène n’ont été retrouvés à Mbuji-Mayi, ce qui pourrait être dû à la nature très altérable de ces minéraux.

Les échantillons disponibles pour cette thèse proviennent directement du site d’exploitation à la MIBA où Carlos Fieremans, Directeur général dans les années 1960-1980, a pu constituer une collection remarquable de mégacristaux sortant directement du crible des mines.

Certains mégacristaux ont fait l’objet d’études antérieures. Mvuemba Ntanda (1980) a étudié la composition chimique des principales phases minérales ; les données ont été synthétisées dans M. Fieremans et al., (1984) et Demaiffe et al. (1991). Les mégacristaux de clinopyroxène, de grenat et d’ilménite ont été analysés pour les éléments majeurs. Deux populations de clinopyroxène ont été identifiées : l’une riche en Na et Al, de type omphacite et comparable aux minéraux des éclogites, et l’autre pauvre en Cr (0,5-0,8 % Cr2O3), de type diopside, appartenant au groupe de mégacristaux pauvres en Cr. Il distingue également deux

(21)

populations de grenat : la première est composée de grenats riches en FeO (Mg# = 60) et CaO (5,5-7 %), et pauvres en Cr2O3 (< 1 %), comparables à ceux des éclogites et la seconde constituée de pyropes Cr (Mg# = 83-90 ; 1-7 % Cr2O3), caractéristiques de la paragenèse lherzolitique de Sobolev (1977). Les ilménites sont magnésiennes et chromifères (10-15 % MgO et 1,5-4 % Cr2O3).

Les minéraux plus exotiques de cette suite n’ont été que peu étudiés mais sont cependant succinctement décrits dans des revues nationales par M. Fieremans et Ottenburgs. Les nodules d’intercroissances rutile-silicates peuvent atteindre 4,5 cm et, d’un point de vue textural, ressemblent aux intercroissances pyroxène-ilménite décrites dans de nombreuses autres provinces kimberlitiques (Ottenburgs and Fieremans, 1979). Les cristaux de zircon ne sont pas rares dans les kimberlites en général ; ceux de Mbuji-Mayi sont assez grands (0,5-1 cm).

Les mégacristaux de baddeleyite se présentent sous forme de cristaux isolés d’assez grande taille et sont également décrits en « revêtement » des grains de zircon (Fieremans and Ottenburgs, 1979b). Les nodules de chlorite (5 cm) sont en fait composés d’un étroit réseau de quartz et de chlorite (Fieremans and Ottenburgs, 1979a). Les cristaux de corindon et de kyanite (jusqu’à 1 cm) n’ont pas encore fait l’objet d’études mais pourraient éventuellement trouver leur origine dans les abondantes éclogites à kyanite de Mbuji-Mayi (Demaiffe et al., 1991).

2.3.2.3. Les xénolites et les diamants 

Les brèches kimberlitiques de Mbuji-Mayi contiennent de nombreux fragments de roches crustales environnantes comme des gneiss granulitiques, des grès et des calcaires dolomitiques (Fieremans et al., 1984).

La plupart des nodules mantéliques ramenés par les kimberlites sont de nature éclogitique. Les éclogites représentent en effet plus de 90 % de la population des enclaves mantéliques échantillonnées dans cette région (Fieremans et al., 1984). Mbuji-Mayi, comme Roberts Victor, Bellsbank ou Newlands en Afrique du Sud, Orapa au Botswana, Koidu en Sierra Leone, ou encore Zagadochnaya en Sibérie, fait en effet partie des quelques rares localités kimberlitiques dans lesquelles domine ce type de nodule. Les lherzolites et les clinopyroxénites à grenat sont très rares (El Fadili and Demaiffe, 1999).

Les nodules d’éclogite et de granulite associés ont fait l’objet de la thèse d’El Fadili (1998). Trois groupes d’éclogite ont été distingués : des éclogites biminérales classiques (grenat et omphacite), des éclogites à kyanite (contenant des intercroissances kyanite- omphacite) et une éclogite à diamant (El Fadili and Demaiffe, 1999). Les granulites de Mbuji- Mayi contiennent des intercroissances kyanite-omphacite, semblables à celles des éclogites de ce type.

(22)

Les diamants sont abondants à Mbuji-Mayi ; mais les diamants de qualité gemme sont peu abondants (3-4 %) (Demaiffe et al., 1981). L’inclusion minérale la plus commune dans les diamants est la pyrrhotite, accompagnée du grenat et du clinopyroxène. Les pyropes et diopsides Cr appartiennent à la paragenèse lherzolitique, alors que les grenats plus riches en Fe et Ca et les omphacites appartiennent à la paragenèse éclogitique. La paragenèse lherzolitique domine. L’olivine n’a que rarement été observée et l’enstatite semble absente.

Quelques inclusions monominérales de clinopyroxène jadéitique, de disthène, de rutile, de zircon, d’ilménite Mg et Cr, de chromite et de diamant sont également reportées (Mvuemba Ntanda et al., 1982). Les auteurs définissent alors une paragenèse de type « éclogite à disthène » ou « grospydite » (grossulaire-pyroxène-disthène) ou encore « éclogite à diamant » pour les inclusions de disthène, jadéite et diamant.

Comme le faisaient déjà remarquer les auteurs pré-cités, il semble contradictoire que la paragenèse lherzolitique domine pour les inclusions dans les diamants du Kasaï alors que les xénolites de péridotite sont rares. Cependant, Mbuji-Mayi n’est pas une exception à ce titre étant donné que les mêmes constatations sont reportées pour Roberts Victor et Bellsbank.

2.3.3. La province kimberlitique du Kundelungu  2.3.3.1. Les kimberlites 

La première étude systématique des pipes du Kundelungu a été réalisée en 1938 par Verhoogen (cité dans Demaiffe and Fieremans, 1981). Il faut ensuite attendre 1993 pour que des informations complémentaires soient apportées par Kampata qui réalise une thèse sur les kimberlites, les mégacristaux et les enclaves associées. Ces kimberlites suscitent en effet moins d’intérêt étant donné qu’elles ne possèdent pas de diamants en quantités exploitables.

Dans la majorité des pipes de cette région, les kimberlites sont exceptionnellement fraîches, non brèchifiées et de type non micacé. Seul le pipe de Kashioba (~Dyamba) est décrit comme une kimberlite micacée (« phénocristaux » de phlogopite) par Verhoogen (1938) (cité dans Kampata, 1993). La roche est généralement caractérisée par une structure porphyrique avec de grands phénocristaux d’olivine frais et arrondis dans une matrice chloritique foncée, finement grenue, également constituée de spinelles, d’olivine (serpentinisée et carbonatisée à divers degrés), de pérovskite, de calcite, de serpentine et de rare ilménite. La monticellite constitue également une phase matricielle dans les kimberlites des pipes du secteur oriental (Kampata et al., 1994). Les phénocristaux de phlogopite sont rares. Les kimberlites de cette région sont nettement moins riches en carbonates que les autolites de Mbuji-Mayi (Fieremans et al., 1984).

(23)

2.3.3.2. Les mégacristaux 

La suite de mégacristaux de cette province kimberlitique a été étudiée en détails par Kampata (1993). Elle diffère de celle de Mbuji-Mayi par la présence d’olivine (abondante), d’orthopyroxène et de phlogopite (peu abondante) et l’absence de zircon, de baddeleyite, de chlorite et de nodule d’intercroissances rutile-silicate. Les mégacristaux de grenat et d’ilménite sont les plus abondants car très résistants à l’altération, au contraire des olivines et des orthopyroxènes qui sont nettement moins abondants dans les pipes les plus altérés. Le clinopyroxène est également représenté en grande quantité.

Les olivines présentent une gamme de compositions restreinte (89,4-92,5 mol% Fo).

Elles sont comparables aux olivines des péridotites et à celles de la matrice des kimberlites.

Deux groupes d’orthopyroxène riches en Cr sont distingués sur base des teneurs en Fe et en Ca : des enstatites très pauvres en Ca et des « bronzites » titanifères (enstatite selon l’actuelle classification de l’IMA). Les clinopyroxènes sont également scindés en deux groupes sur base de leur pourcentage moléculaire en wollastonite : les diopsides calciques (42,4-47,2 mol%

Wo) et les diopsides subcalciques (32,9 et 39,6 % Wo). Il n’y a pas de clinopyroxène omphacitique, ce qui reflète la rareté des nodules d’éclogite au Kundelungu. Les grenats, tous riches en Ca, sont également séparés en deux catégories, selon leurs teneurs en Cr : certains sont riches en Cr2O3 (2,55-7,44 %) et d’autres sont pauvres (0,36-2,43 %). Les ilménites sont très abondantes dans cette région et leurs gammes de composition sont fort variables. Elles sont scindées en ilménites diamagnétiques (non magnétiques, < 20 mol% Fe2O3) et paramagnétiques (magnétiques ; riches en hématite). Les mégacristaux de phlogopite sont magnésiens et riches en Ti (0,58-3,77 % TiO2) ; ils ne sont pas présents dans l’ensemble de pipes de cette région (Kampata et al., 1995 ; 1996).

2.3.3.3. Les xénolites 

Les xénolites d’origine crustale sont soit des roches sédimentaires (shales, grès, calcaires…), caractéristiques de la croûte supérieure, soit des roches magmatiques basiques de type dolérite et des roches altérées (difficilement identifiables), soit encore des roches métamorphiques (micaschistes, gneiss granulitiques, quartzites…), originaires de la croûte profonde (Kampata, 1993).

Dans cette province kimberlitique, contrairement à Mbuji-Mayi, les enclaves mantéliques ont des compositions très variées (Kampata et al., 1995). Les enclaves péridotitiques observées sont des lherzolites, harzburgites, wehrlites et dunites. Des nodules d’éclogite biminérale sont également trouvés mais uniquement dans le pipe de Gwena. Une clinopyroxénite (sans grenat) a également été observée. Les lherzolites présentent les deux types de texture caractéristique des xénolites péridotitiques : la texture granulaire (« granular

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lherzolite ») de BT et la texture déformée (« sheared lherzolite ») de HT, cette dernière n’étant observée que dans un échantillon.

Les diamants sont rares au Kundelungu et n’ont pas été étudiés pour leurs inclusions.

2.4. Objets et objectifs de l’étude 

Nous disposons d’une collection vaste et variée de l’ensemble des mégacristaux des kimberlites de Mbuji-Mayi. Ils proviennent du crible des mines ; il est donc rare qu’ils puissent être associés à leur pipe d’origine. Seuls des grenats sont disponibles pour l’étude des mégacristaux du Kundelungu.

Notre choix s’est principalement porté sur les mégacristaux de grenat et de clinopyroxène car :

1) il sera dès lors possible d’étudier comparativement les mégacristaux des deux provinces de situation géotectonique et d’âge différents, et

2) ce sont les deux minéraux principaux des roches du manteau (mis à part l’orthopyroxène et l’olivine, qui sont absents à Mbuji-Mayi) ; ils pourraient de ce fait nous donner des indications sur la composition du manteau lithosphérique cratonique sous le craton du Congo.

Les mégacristaux de zircon et de baddeleyite ont également suscité un intérêt particulier étant donné qu’il est à priori relativement difficile de concevoir que deux phases dont l’activité en silice diffère puissent coexister. Par ailleurs, alors que les mégacristaux de zircon sont relativement courants dans les kimberlites, les mégacristaux de baddeleyite sont plus communs dans les carbonatites que dans les kimberlites.

L’ilménite, le rutile et les intercroissances symplectitiques rutile-silicates seront considérés dans une perspective globale de caractérisation de l’ensemble de la population des oxydes titanifères. Alors que les intercroissances ilménite-diopside sont communes dans les kimberlites, celles composées de l’association rutile-silicates en structure graphique symplectitique n’ont été observées qu’à Mbuji-Mayi et deux autres localités en Afrique du Sud (Jagersfontein et Kampfersdam).

Etant donné que les mégacristaux sont pour la plupart des monocristaux, une étude pétrographique détaillée au microscope électronique à balayage (MEB) nous a semblé primordiale afin d’identifier l’éventuelle présence d’inclusions minérales (communes dans les mégacristaux) dans le but d’établir les possibles associations paragénétiques de minéraux.

Les compositions des différents minéraux sont alors analysées pour les éléments majeurs (microsonde électronique) et en traces (LA-ICP-MS).

(25)

Nous avons ensuite entrepris une série d’analyses à caractère innovateur pour les mégacristaux dans les kimberlites :

- l’analyse des rapports Fe3+/∑Fe dans les mégacristaux de grenat et de clinopyroxène par spectroscopie Mössbauer. Ce type d’analyse se développe depuis une petite vingtaine d’années dans les xénolites de péridotite afin de caractériser l’état d’oxydation (fugacité de l’oxygène ; fO2) du manteau lithosphérique.

- la géochimie isotopique de l’oxygène : les rapports 18O/16O ont été mesurés par spectrométrie de masse après fluorination laser dans les mégacristaux de grenat, clinopyroxène et zircon.

- la géochimie isotopique du Nd (143Nd/144Nd) et de l’Hf (176Hf/177Hf) a également été entreprise (par MC-ICP-MS) dans les mégacristaux de grenat et clinopyroxène, ainsi que les isotopes de l’Hf dans les mégacristaux de zircon et baddeleyite.

L’ensemble de ces résultats sera traité dans le but de définir un modèle de formation de la suite de mégacristaux des kimberlites de Mbuji-Mayi.

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