Cahier des thèmes transversaux ArScAn
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Thème
Environnement
s
Responsables
Stéphanie Thiébault
(UMR ArScAn - Protohistoire e u r o p é e n n e )
Sander Van der Leeuw
Environnement, Sociétés, Espaces
Les
économies
de la fin du paléolithique à la fin du mésolithique
en
Europe
nord-Anne Bridault (UMR ArScAn - Archéoiogies environnementales)
Bn Europe nord o ccidentale, les com m unautés hum aines qui ont vécu entre 13 000 BP et 6500 BP environ ont dû s 'a d a p te r à d e nouveaux milieux engendrés par ie réchauffem ent climatique am o rc é vers 15 000 BP. Au d é b u t d e la période en v isagée, les p a y sa g e s encore très ouverts (d e type toundra sur une grande partie d e l'Europe du nord e t atlantique, ou e n c o re d e forêt claire d e bouleaux et d e pins), font rapidem ent p la c e à d e s p a y s a g e s forestiers qui deviennent d e plus en plus fermés. Les interprétations des caractéristiques d e s transformations du milieu e t d e leur influence sur les conditions d e vie humaines sont, elles, très contradictoires. Elles ont d o n n é lieu à deux m odèles antagonistes. L'un, dit minimaliste, considère q u e les mésolithiques ont dû g é re r une situation d e pénurie en raison notam m ent d e la diminution d e s ressources consom m ables. L'autre insiste sur l'augm entation des ressources potentielles (notam m ent d e la biomasse) et sur la situation d 'a b o n d a n c e do n t pou v aien t tirer parti les sociétés du mésolithique, g râ c e à une organisation d e la prédation et une tec h n o lo g ie com plexes. Ces deux m odèles posent d e s explications radicalem ent différentes d e la disparition d e s é c o n o m ies d e chasse collecte.
M êm e si aujourd'hui le m odèle d e pénurie sem ble le moins robuste, la question est loin d 'ê tre tra n c h é e ; tous deu x doivent do n c être mis à l'épreuve d e s faits actuels. C 'est dans c e tte optique q u e nous présentons ici des é lé m en ts d e discussion fondés sur l'exam en d e l'exploitation des ressources animales, t est évident qu'ils n e constituent q u e certaines pièces d 'u n vaste puzzle...
La p ersp ectiv e a d o p té e considère q u e dans les sociétés d e ch asse collecte, la c a p a c ité des groupes humains à g érer les fluctuations des ressources dans l'e s p a c e e t d a n s le tem ps (l'instabilité des milieux naturels) constitue une c lé d e leur ad ap tatio n . Pour cela, l'organisation d e la prédation repose forcém ent sur une g a m m e d e décisions qui vont conduire, p a r exem ple :
• soit à exploiter le tout venant, supposant en contrepartie une forte mobilité d e l'ensem ble du groupe au sein du territoire ;
• soit à hiérarchiser les ressources potentiellem ent exploitables e t à les exploiter en fonction d e certains critères (a b o n d a n c e , proximité, facilité d 'a c c è s , valeur nutritive... etc.), perm ettant ainsi au groupe d 'a m é n a g e r ses d ép lacem en ts, mais supposant, en contrepartie, une division sociale des tâ c h e s p ro b ab lem en t différente ou un rapport différent entre groupes voisins.
C 'est d o n c en cherchant à docum enter, au-delà des seules caractéristiques des écosystèm es naturels, la relation dialectique entre les contraintes du milieu naturel e t l'organisation d e la prédation (dom aine des choix e t des contraintes sociales), q u e se situe notre ap proche. Les c o n séq u e n c e s des choix sont un dom aine q u e nous avons e n c o re peu exploré.
I faut enfin souligner certaines limites inhérentes à c e tte a p p ro c h e :
• difficulté pour a p p ré h e n d e r les e sp ac e s territoriaux (d'exploitation ou d e socialisation) en d e h o rs d e l'entité site qui est souvent le principal point d 'a n c ra g e d e nos é tu d e s ;
• difficulté d 'a p p ré h e n d e r des interactions hommes/milieux dans des environnements qui ne sont pas parmi « les plus fragiles », c a r les degrés d e réponses sont plus diffus e t plus difficiles à saisir à l'analyse ;
• difficulté d 'a p p ré h e n d e r conjointement l'instabilité des écosystèm es e t celle des g ro u p e s humains étudiés ;
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• enfin, difficulté d 'a p p ré h e n d e r les différentes échelles tem porelles nécessaires à l'analyse d e la description des systèm es : saisonnalité des exploitations et rythme d e mobilité d e s groupes ou encore rythme d e s transformations environnementales.
Transformations d es écosystèm es, nouvelles conditions de vie
Le prem ier point est d e confronter les connaissances récentes aux enjeux dessinés p a r c e s m o d èles en tentant d 'é v a lu e r quelles sont les contraintes e t les potentialités nouvelles qui ont pu ê tre déterm inantes pour les éco nom ies d e c e s périodes
Plusieurs a s p e c ts s o rt discutés :
• la structure des variations climatiques et leur incidence sur la saisonnalité d e s ressources ; • l'élévation des niveaux marins, les transformations des systèmes côtiers e t fluviatiles e t leurs
incidences sur la géographie d e s e sp ac e s « habitables » e t sur les m odalités d'im plantation ; • la recom position des c o rtè g e s floristiques et faunistiques e t leurs c o n s é q u e n c e s sur la
g a m m e d e s espèces exploitées à travers le tem ps : enrichissement, diversification ?
D'autres p aram ètres, plus difficilement appréhensibles, mais déterminants dans les stratégies d'exploitation des ressources, ont dû é g a le m e n t être redéfinis à la faveur des chan g em en ts d e milieux :
• la configuration de la distribution spatiale des ressources (agrégation / dispersion) ;
• la prévisibilité des ressources (liée à la structure d es fluctuations d e s ressources : plutôt saisonnière ou plutôt stochastique) ;
• la saisonnalité des ressources (c a ra c tè re migrateur ou non du gibier) qui conditionne leur accessibilité, ou encore les probabilités d e rencontre des animaux lors d e s sorties d e chasse. À in niveau très général, on peut souligner q u e les com m unautés ont disposé dès la fin du tardiglaciaire, d'une nouvelle g a m m e d e ressources, p e u t-ê tre plus importante q u 'à la période p ré c é d e n te . Cela, en théorie, leur perm ettait d e parer aux fluctuations imprévues (co m pensant la diminution d e certaines ressources par d'autres) e t leur conférait d o n c une certaine stabilité alimentaire. Du point d e vue d e la structure d e la prédation, il y a effectivement u ne rupture qui se m arque très tôt ; mais 3 n'y a ni élargissem ent ni enrichissement d e la g a m m e des ressources exploitées à travers le temps, qui puissent ê tre concom itants d e la fermeture du milieu. Dans les régions d'Europe tem pérée, les économ ies dites à larges sp e ctres se sont mises en p la c e très tôt, d ès i'épipaléolithique.
Néanmoins l'exploitation d 'u n e large g a m m e d e ressources, a tte sté e durant ces périodes, n e v a pas d e soi. C 'est d 'a b o rd une stratégie, enracinée socialem ent, qui doit gérer les contraintes d e distance d'approvisionnem ent (entre des ressources p a s forcém ent regroupées), d o n c d e tem p s d'exploitation, en fonction d e la valeur relative des ressources e t des risques inhérents à la prédation. Nous avons choisi d'exam iner les options d é v e lo p p é e s au niveau d e l'acquisition des ressources et d e s b io to p e s exploités durant le mésolithique, par entités biogéographiques : milieux côtiers, forêts d e l'intérieur d e s terres, milieux d e m ontagne.
Caractéristiques d es économ ies d e c h a sse
L'idée est ici d'exam iner les modalités d'exploitation des ressources dans différents types d e milieux et d e tenter d e saisir s'il y aurait une signature spécifique de l'organisation d e la subsistance mésolithique ? Les économ ies mésolithiques sont réputées pour être des économ ies généralisées exploitant une très large g am m e d 'e s p è c e s . Si c e tte notion est souvent a v a n c é e à juste titre, elle doit absolum ent ê tre relativisée, n u a n c ée e t explicitée. 6 faudrait pour cela, pouvoir prendre en c o m p te toutes la g a m m e d e s ressources animales, c e qui est loin d 'ê tre souvent le c a s d a n s l'état actuel des données.
On peut néanm oins, tirer parti, lorsque les d o n n é e s s'y prêtent, d'u n e analyse qui p ren d en c o m p te les proportions relatives d e s différents types d e ressources animales (terrestres, aq u atiques e t aviaires) qui co m posent les sp e ctres d e s sites localisés d a n s différents types d e milieux, co m m e les zones côtières marines en opposition à celles d e l'intérieur d e s terres : plaines fluviatiles ou m ontagnes.
Plusieurs exem ples sont discutés : Scandinavie méridionale, Suisse o c c id e n ta le e t fonds d e vallée (Bassin parisien, Serbie).
Ces exem ples m ontrent que, proportionnellement à la richesse naturelle du milieu, les mésolithiques pratiquent toujours l'exploitation d 'u n e large g am m e d e ressources (contrairement aux groupes néolithiques).
Environnement, Sociétés, Espaces
En fait, pour saisir c e tte notion complexe d 'é c o n o m ie dite « à large sp ectre », il faut différencier les ressources qui forment la b a s e d e la subsistance d e ce s groupes des autres ressources qui représentent soit un simple appoint, soit un a p p o in t crucial parce q u e leur exploitation perm et d'équilibrer le b u d g e t alimentaire à
certaines périodes d e l'an n é e (période d e soudure) ou p e n d a n t certaines périodes d e pénurie d e certaines ressources. Des exem ples permettent d e discuter c e tte notion e t d e montrer que certaines d e c e s économ ies (celle où les ressources aquatiques ont une faible contribution) sont é g a le m e n t spécialisées, dans la m esure où la b a s e d e la subsistance repose sur quelques e sp è c e s d e très fort rapport dont les individus sont ab attu s selon des critères d 'â g e e t d e poids très stricts.
Éléments bibliographiques
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Bridault A ., Chaix L 1999. Contribution de l'a rc h é o z o o lo g ie à ta ca ractérisation des m odalités d 'o c c u p a tio n des sites alpins e t jurassiens, d e l'épipaléolithique au néolithique ancien, tn : A. Thévenin A., Bintz P. L'Europe des derniers chasseurs — Épipaléolrthique et mésolithique. 5e co n g rè s international sur l'épipaléolithique et le mésolithique en
Europe. Paris : CTHS. p. 547-558.