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L'occupation sur la longue durée de villages de Syrie du sud.

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Jean-M arie Dentzer e t Pascale Clauss

L'occupation sur la longue durée

de

villages

de

Problème de l’utilisation archéologique des données

et

l’arrière

pl

Jean-Marie Dentzer (UMR ArScAn - Proche-Orient hellénistique et romain),

Pascale Clauss (IFPO-Damas)

En 1975 é taient encore conservés dans la Syrie du Sud basaltique un grand nom bre de villages antiques en raison de conditions géographiques et historiques qui o n t lim ité les destructions (faible densité, ju sq u 'à une p é rio d e très récente, des o ccupatio ns — souvent précaires — dans une partie d e la région située en confins des zones sédentaires cultivées). Le m atériau quasi unique utilisé e t présent en a b o n d a n c e est ie basalte qui se conserve sans d é g ra d a tio n notoire, non com bustible e t la te c h n iq u e choisie élim ine d 'u n e fa ç o n presque co m p lè te le bois dans la construction, ta n t pour la c h a rp e n te q u e pour une p a rtie des huisseries, é quipe m e nts co n vo ité s au Proche-O rient e t récupérés après a b a n d o n , interventions qui entraînent la destruction rapide des bâtiments). De plus, sur des sols rocheux e t en l'a b s e n c e de m atériaux fragiles e t plastiques com m e la terre, les structures ne sont g é n é ra le m e n t pas ensevelies p ro fo n d é m e n t e t sont souvent lisibles a v e c leur contexte, dans toute leur étendue. Ces circonstances donna ient la possibilité d 'é tu d ie r non seulement des habitats bien conservés mais des villages entiers, dans leur paysage, a ve c les voies d e communications, les systèmes d 'a p p ro v is io n n e m e n t en eau e t les é quipe m e nts agricoles, terrasses d e cultures e t procédés d 'é p ie rra g e fixant en m êm e temps les limites des propriétés et, à certaines périodes, l'organisation d'ensem ble d e l'esp ace agricole.

La p lupart des villages antiques conservés, visibles en surface, é taient c e p e n d a n t écroulés en grande partie e t m êm e si la presque to ta lité des m atériaux é ta it conservée sur place, les plans des constructions e t les circulations é ta ie n t devenues illisibles sous les éboulis, le visiteur a ctuel circulant au niveau d 'u n premier étage. D'autres villages étaient intégrés dans le tissu d'a gglom érations modernes, seules des parties d e quelques constructions restant identifiables. Il restait le cas de petites agglom érations a p p a re m m e n t com plètes et lisibles p arce qu'elles ava ie n t continué à être occupées e t entretenues jusqu'à l'é p o q u e actuelle.

À c ô té d'a gglom érations com m e Diyatheh, abandonnées à la limite d e la steppe, à l'est,1 Shâ'ra est un d e ces villages (Fig. 1), im planté sur le rebord d 'u n p lateau c h a o tiq u e form é d e coulées d e laves récentes, le Léja, d o m in a n t des zones agricoles fertiles. Il est situé à l'in te rfa ce entre ces cultures e t les espaces rocheux du Léja, quasi désertiques, exploitables d 'u n e fa ço n aléatoire par de maigres troupeaux e t devenus refuges de brigands dans les périodes d e faiblesse du pouvoir politique. Ce village éta it o c c u p é et vivant il y a soixante-dix ans. Ses habitants o n t été réinstallés dans un nouveau village, à proximité im m édiate d e l'ancien.

1 Villeneuve F. - Ad-Diyatheh : Village e t castellum romains e t byzantins à l'est du Jebel Druze (Syrie), in Proceedings o f a colloquium

he ld a t the University o f Sheffield, April 1986, Freeman Ph., Kennedy D „ eds, BAR Int. Ser, 297, Oxford, 1986, p. 697-715 ; Villeneuve F. e t Sadler

S. - O ccu p a tio n du sol e t vestiges architecturaux sur les marges arides d e la Syrie du Sud. L'exem ple d e Diyatheh, in C o n q u ête d e la Steppe

e t appropriation des terres sur les m arges arides du Croissant Fertile, G eyer B. éd., Lyon, 2001, p. 159-187.

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Bâti e t h a b ita t

cour dallée \ lemenos

CA'ÆRA

Localisation de l'in stallatio n rupestre

Mission archéologique de Sha'æra M.Kalos 1999

(calage topo.JP.Fourdrin 1979 e t in te rp ré ta tio n d'après

0 100 m p h o to . Y.Guichard 1999. V e cto risa tio n T.Fournet 2000)

Fig. 1. Plan du site (J.-P. Fourdrin, M. Kalos, Th. Four n e t e t P. François architectes, P. Clauss archéologue e t Y. Guichard photos aériennes)

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Jean-M arie Dentzer e t Pascale Clauss

Dans l'a n cie n village libéré ont été inventoriées plus d 'u n e centaine d e maisons d o n t la plupart com plètes jusqu'à la couverture, intégrées dans un p a ysa g e d e coulées d e lave a c c id e n té e s e t d'effondrem ents. Le village semble s'être d évelop pé à partir de noyaux d 'h a b ita t séparés installés au d é p a rt sur les collines (Fig. 2) dom inant le site et laissant subsister des vides qui n 'o n t jam ais été e n tiè re m e n t com blés dans le cours du d é ve lo p p e m e n t du village. C et inachèvem ent m et sous nos yeux un m odèle d e dévelo p p e m e n t qui correspond à celui de la ville orientale traditionnelle, e t que l'on pouvait conjecturer de l'analyse d 'u n certain nom bre d'agglom érations à partir d e l'â g e du bronze.

Il restait à établir si le village e t les maisons que nous avons sous les yeux p euven t nous donner réellem ent une im age d e l'é ta t « antique » qu'il faudrait encore d a te r d'ailleurs. Les fouilles effectuées dans la maison B06 ont montré que, sur un terrain d é jà o c c u p é par des sépultures à l'é p o q u e hellénistique, elle a été construite à la fin du IIe ou au d é b u t du IIIe siècle après J.-C. L'analyse du bâtim ent principal n 'a pas montré de modifications m e tta n t en cause l'organisation g lo b a le d e c e tte partie du b â tim e n t alors q u e des a djonctio ns o n t été effectuées à l'intérieur d e la cour d o n t les dernières (corps d e b âtim ent abritant une cuisine e t dernier

dalla g e d e la cour) d a te n t de deux générations seulement. Ce d é ve lo p p e m e n t consistant à ajouter des pièces à un premier noyau, à l'intérieur de l'esp ace délim ité par la cour, correspond à une pratique encore en œ uvre récem m ent2 dans un d é ve lo p p e m e n t parallèle à celui d e l'agglom ération elle-même, a v e c un c h a n g e m e n t d'é chelle. Ici une nouvelle maison s'ajoute dans un espace d o n t la limite n'est pas forcém ent matérialisée, mais réservé à un groupe familial défini.

Les fouilles d e la maison C l 3 d o n t l'é ta t actuellem en t visible, su ccé d a n t é galem en t à une o c c u p a tio n hellénistique e t à une prem ière im plantation du IIe siècle d e notre ère, semble avoir

été construit au Ve siècle, indique à travers to u t une série d 'é ta ts qui s'é ta g e n t de l'é p o q u e m édiévale à l'é p o q u e otto m a n e une fidélité à la structure de base, a vec des réparations, qui cherchent à restituer, a u ta n t q u e possible, l'é ta t antérieur, après des tremblements d e terre. Dans la région, les séismes sem blent avoir représenté la principale cause de destruction. Les changem ents observés ne portent que sur des am énagem ents internes (installation de banquettes à l'intérieur des pièces, em placem ents d e tannours dans la cour e t d 'e nclos pour d e petits animaux, d é p la c e m e n t des accès aux toitures en terrasses qui en découlent).

Fig. 2. Vue aérienne p a r cerf-vo la n t de la partie centrale du village (Y. G uichard)

2 Selon les ressources disponibles, les familles ajoutaient une p iè ce ou une maison co m p lè te pour y loger un fils marié a ve c sa nouvelle famille, dans ou à proximité du noydu d 'h a b ita t d'origine. La pression d é m o g raphique e t le m anque d 'e s p a c e disponible ont co nduit récem m ent à un d é ve lo pp e m e nt vertical d e ces espaces en laissant en a tte n te des poteaux pour ajouter des étages dans une maison qui d evient alors un im meuble.

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Bâti e t h a b ita t

L'absence d e ruptures qui se dessine ainsi dans la tradition d e l'h a b ita t résulte aussi d e la continuité rem arquable dans les techniques de constructions simples fondées sur la disponibilité des mêmes types d e m atériaux trouvés à proxim ité e t souvent remployés. L'affleurem ent des coulées d e basalte qui se fissurent en prismes fournit des blocs grossièrement parallé lé p ip é d iq u e s, a v e c deux lits parallèles, utilisables a ve c un minimum d e retaille. La couverture par des dalles reposant sur les murs par l'interm édiaire d e corbeaux e t sur des supports internes, piliers ou colonnes, est attestée dans la région dès l'â g e du bronze aussi bien pour des tom beaux-tumulus que pour des maisons. L'apparition des arcs, sans d oute à partir d e l'é p o q u e romaine, perm et l'é d ification de volumes plus vastes.

Les constructions a ctuellem en t visibles nous fournissent d o n c une première a p p ro c h e valable pour constituer un corpus de types d 'h a b ita t, intégrés dans une structure villageoise, pour servir de base à l'é tu d e d e la maison rurale antique.

Les réoccupations, sur la longue durée, des maisons anciennes posent la question d e leur a d a p ta tio n aux m odes d e vie e t aux structures sociales d e leurs o ccu p a n ts successifs. On p e u t supposer que ces maisons ont été occupées, dans certaines phases au moins, d 'u n e manière précaire par des populations nomades (Fig. 3). Très attachés à leur vie sous la tente, les bédouins utilisaient q u a n d les circonstances s'y prêtaient des grottes non pour y habiter mais pour abriter leurs réserves d e nourriture ou leurs objets les plus précieux. On a pu observer encore récem m ent ces conduites chez les Bdul nom adisant dans la périphérie d e Pétra. Des maisons antiques com plètes e t couvertes pouvaient remplir le m êm e o ffice à Shâ'ra. On peut supposer que c e type d 'o c c u p a tio n ne c o n d u it pas à m odifier l'organisation interne de la maison e t des pièces mais se limite à des réparations d e fortune. Il faudrait peut- être com parer c e tte dém arche à celle des Druzes venus s'installer dans le Jebel à partir du XVIIIe siècle. A p p o rta n t d e leurs origines au Liban une culture d 'h a b ita t sédentaire, on peut supposer qu'ils ont m odifié plus profondém ent les maisons antiques plus ou moins bien conservées e t vides qu'ils ont trouvées eux aussi sur leurs sites d'im plantation. Il semble que d a v a n ta g e d e constructions antiques d e c e tte région o n t é té dém ontée s pour fournir to u t sim plem ent des m atériaux pour construire leurs

propres maisons. Il serait intéressant de réunir les inform ations e n co re disponibles pour préciser co m m e n t ils ont a d a p té à leur m ode de vie les maisons antiques qui sont devenues les leurs. On peut noter que c e tte a d a p ta tio n s'est faite sans trop de difficultés e t qu'il existait des éléments parallèles entre les deux m odes d e vie. Dès à présent le rôle social joué par la m a d a fé dans la maison druze trouvait un équivalent dans une p iè ce d e b a n q u e t et d 'a ccu e il des hôtes l'a n d rô n des maisons antiques.

Fig. 3. Vue vers la m osquée (J.-M. Dentzer)

Pour conclure, on est co n d u it à s'interroger sur les continuités ou les ruptures non seulement dans l'h a b ita t mais encore dans l'organisation familiale et sociale elle-m êm e d e l'a n tiq u ité à la période préindustrielle.

Figure

Fig.  1.  Plan du site (J.-P.  Fourdrin,  M.  Kalos,  Th.  Four n e t e t P.  François architectes,  P
Fig.  2.  Vue  aérienne p a r cerf-vo la n t de  la partie centrale du  village  (Y.  G uichard)
Fig.  3.  Vue vers la m osquée (J.-M.  Dentzer)

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