Introduction ` a la th´ eorie des graphes
Master MatMod
Semestre 2 2017-2018 Mustapha KCHIKECH Facult´e polydisciplinaire de Safi
Universit´e Cadi Ayyad
Chapitre I
Concepts fondamentaux
espace
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Motivation
Probl`eme des ponts de K¨onigsberg (1736)
Laville de K¨onigsberg(Kaliningrad) comprenait4quartiers, s´epar´es par un fleuve.7ponts permettent de relier ces quartiers. Les habitants de K¨onigsberg se demandaients’il ´etait possible de faire une promenade qui emprunte chacun des sept ponts une fois et une seule (et revient `a son point de d´epart) ?
Probl`eme du parcours du cavalier (1759)
Uncavalierpeut-il parcourir les64 cases de l’´echiquierune fois et une seule, en partant de n’importe laquelle et peut-ilrevenir au point de d´epart?
Probl`eme des quatre couleurs (1852)
R´ ef´ erences
J.A. Bondy, U.S.R. Murty.Graph theory. Spinger, 2008.
R. Diestel,Graph Theory, Electronic Edition, Springer-Verlag, 2000.
G. Chartrand, P. Zhang,Chromatic Graph Theory. Discrete Mathematics and Its Applications. 2008.
J-C Fournier,Graphs Theory and Applications. Wiley-ISTE. 2010.
R-J. Wilson,Introduction to Graph Theory (5th Edition). Pearson. 2010.
C. Vasudev,Combinatorics and Graph Theory. New Age International Publishers. 2007.
C. Berge,Graphes et hypergraphes. Bordas. 1973.
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Histoire
L’histoire de lath´eorie des graphesa commenc´e par l’´etude decertains probl`emes, tels que :
Le probl`eme desponts de K¨onigsberg, r´esolu parEuler au1736, lamarche du cavaliersur l’´echiquier
le c´el`ebre probl`eme dela coloration des cartes g´eographiques(connu aussi par leth´eor`eme des 4 couleurs).
1847 Kirchhoff(1824-1887)d´eveloppa la th´eorie des arbres (analyse de circuits
´
electriques).
1860 Cayley(1821-1895)d´ecouvrit la notion d’arbre (´enum´eration des isom`eres satur´es des hydrocarbures de typesCnH2n+2).
1859 Hamilton(1805-1865)Existence de chemins hamiltoniens.
1879´enonc´e du probl`eme des 4 couleurs (M¨obius (1790-1868), Morgan (1806-1871), Cayley, solution prouv´ee en 1976.
1936 K¨oning, le premier ouvrage sur les graphes.
A partir de 1946le d´eveloppement intense de la th´eorie des graphes grˆace `a des chercheurs commeKuhn,Ford,Fulkerson,Roy,Bergeet...
1958 Berge, l’ouvrage”Th´eorie des graphes et ses applications”donna naissance `a l’`ere moderne de la th´eorie des graphes.
Pr´ esentation
Lath´eorie des graphesconstitue l’une des principales branches des math´ematiques discr`eteset de l’informatique fondamentale.
Depuis le d´ebut du 20`eme si`ecle, elle s’est d´evelopp´ee dans diverses disciplines : math´ematiques, informatique, cryptographie,
les sciences sociales, la biologie, la chimie,...
De mani`ere g´en´erale, lath´eorie des graphespeut ˆetre consid´er´ee comme un outil de mod´elisation permettant derepr´esenterune structure d’un objet complexe en exprimant lesrelationsentres ses ´el´ements.
Autrement, lath´eorie des graphesmis au point un ensemble des techniques et outils math´ematiques permettent de d´emontrer des propri´et´es, d’en d´eduire des m´ethodes de r´esolution et des algorithmes.
En particulier, il permet derepr´esenterde nombreuses situations rencontr´ees dans desapplicationsfaisant intervenir desmath´ematiques discr`eteset n´ecessitant unesolution informatique:
R´eseaux de t´el´ecoms, Circuits ´electriques, r´eseaux de transport, ordonnancement d’un ensemble de tˆaches,...
En r´esum´e,la th´eorie des graphespeut ˆetre consid´er´ee comme une m´ethode de pens´ee,
un moyen de mod´elisation,
permet l’´etude d’une grande vari´et´e de probl`emes.
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D´ efinitions Et notation
Un grapheGest le couple constitu´e par unensemble finid’objetsV et un ensembleEsous-ensemble deV ×V.
Les ´el´ement deV sont appel´essommets(nœudsoupoints).
Les ´el´ement deEsont appel´esarˆetes.
Une arˆeteed’un graphe est une pairee= (u,v)de sommets. Les sommetsuet v sont appel´es lesextr´emit´esde l’arˆetee.
Un graphe est souvent not´eG= (V,E),G= (V(G),E(G))ouG= (VG,EG).
Lenombre de sommetsd’un grapheG est appel´eordredeG, on le note soit ordre(G)ou soit|V|.
G´en´eralement, un graphe estd’ordrenrespectivement detaillemsi il contientn sommetsrespectivementmarˆetes.
Ungraphe trivialest un graphe dont l’ordre est1.
Ungraphe videest un graphe dont la taille est0.
D´ efinitions Et notation
Adjacence, voisinage, degr´e
Deux sommetsuetv sontadjacentsouvoisinssi et seulement si(u,v)est une arˆete dansE.
Deux arˆetes sontadjacentessi et seulement si elles ont uneextr´emit´e commune.
Soitvun sommet deG, on appellevoisinagedevl’ensemble des sommets adjacents `av. Il est not´eN(v).
Le degr´ed’un sommetvest lenombre de voisinsdev. Il est not´edeg(v)ou d(v). Autrement,deg(v) =|N(v)|.
De mˆeme,le degr´ed’un sommetvest lenombre d’arˆetes incidentes`av. Un sommet dedegr´e nulest ditisol´e.
Ledegr´e minimumd’un grapheGest not´eδ(G).
Ledegr´e maximumd’un grapheG est not´e∆(G).
Sivest un sommet d’un grapheGd’ordren, alors
0≤δ(G)≤deg(v)≤∆(G)≤n−1
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D´ efinitions Et notation
Graphes orient´es, Multigraphes
UngrapheG= (V,E)est ditorient´esi chaque ´el´ement deE, appel´earc, est orient´e, munies d’un senset d´efini par sonorigineet sonextr´emit´e.
Pour un arc(vi,vj)deE, le sommetvi est sonextr´emit´e initiale, et le sommet vjsonextr´emit´e finale.
Une boucleest une arˆete ou arc de la forme(x,x).
Une arˆete ou un arc(vi,vj)estmultiple, si elle correspond `aplusieurs arˆetes ou arcsayantvi comme extr´emit´e initiale etvjcomme extr´emit´e finale, dans ce cas l`a, on parle d’unmultigraphe.
Graphe simpleest un graphenon orient´e, sans boucle et non multiple. En g´en´erale, le mot graphe d´esigne un graphe simple.
Repr´ esentations
Repr´esentation graphique
Un graphe estrepr´esent´epar undessinsur un plan o`u
les sommets sont repr´esent´es par despointsou despetits cercles, les arˆetes sont repr´esent´ees par deslignes.
Remarque :la repr´esentation d’un graphe par un dessinn’est pas unique.
Exemple :
G1= (V1,E1)avecV1={1,2,3,4,5}etE1={(1,2),(2,3),(3,4),(4,5),(5,1)}
G2= (V2,E2)avecV2={a,b,c,d,e}etE2={(a,c),(a,d),(b,d),(b,e),(c,e)}
1
2
4 3 5
a
e b
d c
Dans un graphe orient´e, lesarcs sont repr´esent´es `a l’aide d’une fl`eche.
Un multigraphe orient´e avec des boucles
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Repr´ esentations
Repr´esentation algorithmique
Les graphes sont unestructure de donn´eesimportante enalgorithmique.
Il est doncfondamentalde s’int´eresser `a la mani`ere derepr´esenterdes graphes en vue de leursmanipulations algorithmiques.
Plusieursmodes derepr´esentationpeuvent ˆetre envisag´es selon lanature des traitementsque l’on souhaite appliquer au graphe consid´er´e.
1 Repr´esentation parmatrice d’adjacences.
2 Repr´esentation parmatrice d’incidences.
3 Repr´esentation par tableau delistes d’adjacences.
Repr´ esentations
Repr´esentation par matrice d’adjacences
La matrice d’adjacenced’un graphe simpleG= (V,E)d’ordrenest la matrice M= (mij)1≤i,j≤nde dimensionn×ntelle que
mij=
n
1, si(i,j)∈E(c-`a-d(i,j)est un arc);0, sinon.
graphe
a
e b
d c
matrice d’adjacences
0 0 1 1 0
0 0 0 1 1
1 0 0 0 1
1 1 0 0 0
0 1 1 0 0
graphe
1
2
3 4
5
matrice d’adjacence
0 1 0 1 0
0 0 0 0 0
1 1 0 0 0
0 1 1 0 0
1 0 1 1 0
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Repr´ esentations
Repr´esentation par matrice d’incidences
Soit un grapheG= (V,E)sans boucledensommets etmarcs.la matrice d’incidencedeGest lamatriceM= (mij)1≤i≤n;1≤j≤mtelle que
mij=
(
1, si l’arcj arrive au sommeti;−1, si l’arcj sort du sommeti;
0, sinon.
graphe
1
5 2
matrice d’incidences
−1 −1 1 1 0 0 0 0 0
1 0 0 0 1 1 0 0 0
0 0 −1 0 −1 0 1 1 0
0 1 0 0 0 −1 −1 0 1
0 0 0 −1 0 0 0 −1 −1
Repr´ esentations
Repr´esentation par tableau de listes d’adjacences
Tableau de listes d’adjacences
Soit un grapheG= (V,E)densommets. le tableau de listes d’adjacencesdeG est un tableauTdenlistes, une pour chaque sommet deV. Un tel tableau doit v´erifier pour tout couple de sommets(i,j):
j∈T[i]⇔(i,j)∈E
graphe
1
2
3 4
5
tableau de listes d’adjacences T[1] = (2,4)
T[2] = () T[3] = (2,1) T[4] = (2,3) T[5] = (1,3,4)
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Exemple
SoitG= (V,E)le graphe suivant,
a
e b
d c
f
on a,
n=|V|=6,m=|E|=9.
deg(d) =deg(f) =2,deg(c) =deg(e) =3 etdeg(a) =deg(b) =4.
1er Th´ eor` eme en th´ eorie des graphes
1er Th´eor`eme en th´eorie des graphes
Le th´eor`eme suivant est consid´er´e comme ´etant lepremier r´esultat publi´een th´eorie des graphes. Il a ´et´e observ´e par le math´ematicien suisseLeonhard Euler en 1736.
Aujourd’hui, il est connu sous le nom dulemme des poign´eesde main (Handshaking Lemma).
Th´eor`eme SiG= (V,E)est un graphe de taillem, alors
X
v∈V
deg(v) =2m
Preuve :Il suffit de remarquer que dans la sommation
X
v∈V
deg(v)une arˆete
e= (v,u)∈Eest compt´ee exactement deux fois, une fois dansdeg(v)et une fois dansdeg(u).
Corollaire Le nombre de sommets de degr´e impair dans un graphe est pair.
Preuve :Exercice.
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Exemples et exercices
1 Existe-t-il un graphe dont les sommets ont pour degr´e 1,2,2,3,3 ? Mˆeme question avec la suite 1,1,2,3,3.
2 Un grapheGd’ordre 15 et de taille 20 poss`ede 14 sommets de degr´exet un sommet de degr´ey. donner les valeurs dexet dey.
3 Montrer que siGest un graphe d’ordrenet de taillemalors δ(G)6 2m
n 6∆(G).
4 Sinest l’ordre d’un grapheG etmest son nombre d’arˆetes alorsm≤n(n−1)
2 .
5 Montrer que tout graphe non trivial a au moins deux sommets de mˆeme degr´e.
6 Soitkun entier,k>2. Un odd-graphOkest un graphe dont les sommets sont les parties `ak−1 ´el´ements de l’ensemble{1,2,· · ·,2k−1}, deux sommets
´
etant adjacents lorsque les sous ensembles correspondants sont disjoints.
1 D´eterminer l’ordre de ce graphe, le degr´e de chaque sommet et le nombre d’arˆetes de ce graphe.
Isomorphisme de graphes
SoientG1= (V1,E1)etG2= (V1,E2)deux graphes.
D´efinitionOn dit queG1etG2sontisomorphes, et on ´ecritG1'G2, s’il existe une bijectionϕ:V1→V2telle que pour tout couple de sommetsu,v∈V1,
(u,v)∈E1⇔(ϕ(u), ϕ(v))∈E2
Autrement dit :Deux graphes sontisomorphessi ce sont lesmˆemes graphes,dessin´es diff´eremment, ou on peut les´etiqueteravec les mˆemes ´etiquettes de sorte que chaque sommet ait exactement lesmˆemes voisinsdans les deux graphes.
1 2
4 3
1
2 4 3
1
2
3 4
Th´eor`emeSi deux graphesG1etG2sontisomorphes, alors ils ont lemˆeme ordre, mˆeme tailleet lesdegr´esdes sommets deG1sont lesmˆemesque lesdegr´esdes sommets deG2.
PreuveVoir TD.
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Isomorphisme de graphes
Remarque La r´eciproque n’est pas toujours vraie. Les deux graphes suivants ne sont pas isomorphes.
1 2 3
4
5
6
7 8
a b c
d
e
f
g h
Exemple Dessiner des graphes non isomorphes d’ordre 4.
Sous-graphe et Graphe partiel
SoientG= (V,E)un graphe etX un sous ensemble de sommets deV.
Le grapheGX = (X,EX)est ditsous-graphe deG si et seulement siEX⊂E.
SiEX est form´e de toutes les arˆetes deGayant leurs deux extr´emit´es dansX alorsGX = (X,EX)est unsous-graphe induitdeG.
Le grapheGX = (X,EX)est ditgraphe partieldeG, siX =V etEX⊂E.
Autrement dit, on obtientGX en enlevant une ou plusieurs arˆetes au grapheG.
e e 2 e 3 e 4
e 5 e 6 e 7
v 4
v 3
v
1 2
(a) v 1 v5
e e2 e3 e4
e5 v4
v3
v2 v 1
(b) 1 v5
e e2 e5
e6 e7
v5 v3
1 v
(c) v1 2
Figure:
(a):Un grapheG; (b):Graphe partiel deG;(c):Sous-graphe deG.Master MatMod Introduction `a la th´eorie des graphes
Op´ erations sur les graphes
D´efinition :
Le compl´ementaire d’un graphesG= (V,E)est le graphe
G= (V,V×V\E)
L’union de deux graphesG1= (V1,E1)etG2= (V1,E2)est le graphe
G1∪G2= (V1∪V2,E1∪E2)
L’intersection de deux graphesG1= (V1,E1)etG2= (V1,E2)est le graphe
G1∩G2= (V1∩V2,E1∩E2)
Le produit cart´esien de deux graphesG1= (V1,E1)etG2= (V1,E2)est le
Op´ erations sur les graphes
Exemple :Un graphe et son compl´ementaire
1
2
3 4
5
6
3 4
5
1
2
3 4
5
6
Deux graphes et leur union
1
2
3 4
5
6
3 4
5 5
3 4
Deux graphes et leur intersection
c a
b
c1 a1
b1
a2 a3 a4 a5 a6
b2 b3 b4 b5 b6
c2 c3 c4 c5 c6
Deux graphes et leur produit cart´esien
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Types de Graphes
Ungraphe completest un graphe o`u chaque sommet estreli´e `a tous les autres.
Un graphe complet d’ordrenest not´eKn.
On appelle unecliqueunsous-graphe completd’un grapheG.
Dans un grapheG= (V,E), un ensembleS⊂V est ditstablesi deux sommets distincts deSne sontjamais adjacents. On noteα(G)le cardinal maximum d’un stable deG (nombre de stabilit´e).
1
v2
v v v
v1
v2
v
v1
v7 v3
v5 v
(III) v
v v v
4
5 6 7 3 8
10
v9
v8
10
(I) (II)
Figure:
Types de Graphes
Un graphe estr´eguliersi tout ses sommets ont lemˆeme degr´e.
Autrement, un grapheG= (V,E)estr´eguliersi et seulement si
∀x,y∈V, deg(x) =deg(y)etδ(G) = ∆(G).
Un graphe estk-r´eguliersi tout ses sommets sont dedegr´ek.
Autrement, un grapheG= (V,E)estk-r´eguliersi et seulement si
∀x,y∈V, deg(x) =deg(y) =k etδ(G) = ∆(G) =k.
Un graphe completKnest un graphe(n−1)-r´egulier.
Un graphek-r´egulierdek+1 sommets est ungraphe completKk+1. Un graphe3-r´egulierest appel´egraphe cubique. Exemple : le graphe complet K4, le graphe de Petersen.
1
2 4 3
Le grapheK4et le graphe de Petersen
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