Enoncé H149 (Diophante) Question de genre
Diophante a soudé une anse (le tube central) sur deux trous pratiqués dans un ruban de Möbius, en sorte qu’on peut passer de l’intérieur à l’extérieur du tube sans traverser la surface, en suivant le ruban. Sur cet objet, combien (au maximum) peut-on tracer de courbes fermées (qui ne se coupent pas) sans le séparer en plusieurs parties ?
Solution de Jean Moreau de Saint-Martin
On peut tracer trois courbes (bleue, rouge, verte sur la figure ci-dessous) bien que, sur un ruban de Möbius comme sur un tore (ou une surface convexe complétée par une anse), on ne puisse tracer qu’une courbe avec les propriétés de l’énoncé.
Commentaires
Le nombre de courbes (g, genre de la surface) est 3 conformément à un théorème général : χ étant la caractéristique de la surface, χ = 2−2g si la surface est orientable, χ = 2−g sinon. Ici on est parti d’un ruban de Möbius de caractéristique 1, on a ajouté une anse qui enlève 2 à la caractéristique (cf. problème H146), doncχ=−1, et la présence du ruban de Möbius exclut de définir une orientation sur la surface.
Les 3 courbes ne se rencontrent pas (bien qu’on ne distingue pas entre les deux côtés de la surface) et ne touchent pas le bord du ruban de Möbius (courbe violette). Ce sont des courbes simples (les parties en tireté bleu
qui semblent se couper sont l’une sur le ruban, l’autre sur le tube).
Il est moins immédiat de vérifier que ces courbes ne divisent pas la surface en plusieurs parties. Une méthode consiste à s’armer de papier, ciseaux et crayons de couleur pour fabriquer l’objet, puis pour le couper le long des 3 courbes.
Observons plutôt qu’un objet topologiquement équivalent peut être fabri- qué à partir d’un tore. Pratiquons dans une partie du tore une coupure en H, puis recollons les languettes obtenues avec vrillage d’un demi-tour.
Le H et ses abords constituent un ruban de Möbius, que le reste du tore complète par une anse. Recollée, la barre transversale du H n’est plus une coupure de la surface ; quant aux deux “boutonnières” créées par la cou- pure des “montants” du H, le collage en fait une courbe unique, bord du ruban.
Pour le tracé des courbes, partons donc d’un tore ; traçons un cercle de Villarceau, puis par un de ses points P le cercle méridien et le cercle parallèle qui traversent tous deux le cercle de Villarceau. Faisons passer par P la barre transversale de la coupure en H : le vrillage des languettes permet de rétablir la continuité des trois cercles sans qu’ils se traversent.
Cela peut être représenté sur un rectangle : on sait qu’un tore coupé selon un méridien et un parallèle peut être appliqué (s’il est en matière souple !) sur un rectangle, de même qu’une feuille rectangulaire peut être transfor- mée en tore en recollant les côtés opposés.
La figure suivante représente un tore coupé selon un méridien et un paral- lèle (en tireté). Le cercle de Villarceau est en rouge, le méridien en bleu, le parallèle en vert, avec une petite distorsion au point P pour que le vrillage des languettes refasse leur continuité sans point commun entre ces trois courbes. La connexité (pouvoir relier deux points quelconques sans traverser de courbe en couleur) devient apparente.