Bibliographie
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0 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 25 janvier 2012 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 25 janvier 2012 151 présentation clinique
Un homme de 85 ans connu pour une fibrillation auriculaire paroxystique (FA) et une hypertension ar tériel le (HTA) est hospitalisé pour investigations d’une dysp
née d’effort progressive apparue il y a deux mois. Une échocardiographie ef
fectuée en ambulatoire a révélé comme seule anomalie une discrète insuffisance mitrale sur un prolapsus mitral connu de longue date. Les fonc tions pulmonaires sont normales. Parallèlement, la dyspnée s’aggrave progressivement et devient de grade 3, avec apparition d’œdèmes des membres inférieurs, et le patient arrête son traitement antihypertenseur en rai
son d’une mauvaise tolérance (hypoten
sion orthostatique), sans réapparition de l’HTA. L’examen clinique révèle un souffle holosystolique 2/6 maximum au foyer mitral. Il a une matité et un probable épanchement pleu ral droit confirmé par la radiographie du thorax. Le diagnostic de présomption est une décompensa
tion cardiaque gau che due à un arrêt du traitement antihypertenseur. Malgré un traitement classique de diurétiques et la reprise d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion, l’état du patient s’aggrave, avec une dyspnée de stade 4 et une insuf fisance rénale prérénale.
Fautil revoir notre hypothèse de départ et quel examen pratiquer pour poser le diagnostic correct ?
commentaire
Les erreurs diagnostiques constituent environ la moitié de toutes les erreurs médi
cales et de nombreuses études démontrent que 15% environ des diagnostics posés en médecine interne sont erronés.1 Ces erreurs peuvent entraîner une invalidité ou un décès dans près d’un tiers des cas. Les causes les plus fréquentes en sont des erreurs co
gnitives, autrement dit un raisonnement clini
que fautif. Il peut s’agir d’une mauvaise col
lecte de données à l’anamnèse et à l’examen clinique, ou d’une mauvaise interprétation de ces données liées à différents biais de raisonnement.2 Par exemple, si l’on recher
che une maladie de Cushing chez tous les patients hypertendus parce que le dernier patient hypertendu que l’on a vu avait cette pathologie, on est victime du biais de dis
ponibilité.3 Si l’on ne revoit pas la probabi
lité d’une maladie en fonction du résultat d’un test diagnostique, on est victime du biais d’ancrage. Enfin, si l’on conclut sans tenir compte de toutes les données au diag
nostic le plus fréquent, on risque de con
clure prématurément.
Le raisonnement clinique a été bien étu
dié et recourt à deux stratégies importantes et complémentaires : le raisonnement hypo
théticodéductif (figure 1), et la reconnais
sance immédiate.4 D’autre part, nous avons pu démontrer que des cliniciens experts, tout en ayant des styles de collecte d’infor
mations différents, ont des caractéristiques communes qui semblent prédire l’expertise.
Ils consacrent du temps à caractériser et préciser la plainte initiale, posent les ques
tionsclés précocement, récapitulent fré
quem ment l’information disponible, et formu
lent des hypothèses pour guider la collecte de données.5 Des données préliminaires sug gèrent que ces techniques peuvent être enseignées aux étudiants et améliorer leur performance diagnostique.6
Peut-on prévenir les erreurs diagnostiques ?
Quadrimed 2012
Rev Med Suisse 2012 ; 8 : 151
A. Perrier M. Nendaz
Pr Arnaud Perrier Dr Mathieu Nendaz
Département de médecine interne, réhabilitation et gériatrie
HUG, 1211 Genève 14
Figure 1. Processus hypothético-déductif. Exemple de la dyspnée (Adaptée de réf.4 ).
J’ai de la peine à respirer depuis trois semaines, surtout quand je suis couché
Insuffisance cardiaque ? Problème pulmonaire ? Orthopnée non discriminative L’insuffisance cardiaque demeure plausible, problème respiratoire non exclu
Insuffisance cardiaque Information du patient
Génération d’hypothèse(s)
Interprétation des données
Vérification d’hypothèse(s)
Hypothèse finale
Implications pratiques
Les erreurs diagnostiques sont fréquen tes et ont des conséquences parfois gra ves pour les patients
Le raisonnement du médecin est plus souvent en cause que l’imperfection des tests diag- nostiques
Le raisonnement clinique emploie des stratégies complémentaires telles que la recon- naissance immédiate et le raisonnement hypothético-déductif
Des données préliminaires suggèrent que l’enseignement explicite du raisonne ment mé- dical aux étudiants en médecine pourrait améliorer leurs performances diagnostiques E
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