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LA REFORME DE BÂLE III

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LA REFORME DE BÂLE III

CHRISTIANE RUBEIZ – Chargée d’enseignement à la FGM

RÉSUMÉ

La crise financière qui a fortement impacté l’économie mondiale ces dernières années a mis en évidence les faiblesses du cadre réglementaire applicable et la nécessité de mettre en place un nouveau système de régulation financière avec une réforme de la réglementation tant microprudentielle que macroprudentielle.

Une réforme du cadre prudentiel est voulue intégrale par le Comité de Bâle afin de l’adapter à un environnement bancaire devenu incertain et volatil. A cet effet, le groupe des gouverneurs de banque centrale et les responsables du contrôle bancaire se sont fermement résolus à augmenter la qualité, la quantité et la convergence des exigences en fonds propres, à renforcer les normes internationales relatives à la liquidité, à décourager le recours trop fréquent à l’effet de levier, la prise de risque excessive et à réduire la procyclicité.

Les critères de Bâle III qui entreront en vigueur entre 2013 et 2018 constituent un des principaux défis auquel le secteur bancaire fera face. L’impact réel de la réforme Bâle III dépendra de l’attitude des banques qui devront modifier en profondeur leur stratégie, leur structure de coût et leur politique de rémunération des actionnaires. Une réforme qui aura par conséquent, un impact sur l’économie mondiale assurant comme estimé, par les gouverneurs et les superviseurs, une stabilité et une performance économique à long terme.

MOTS-CLÉS

Réforme de Bâle III, stabilité financière, fonds propres, liquidité, procyclicité, réglementation microprudentielle, risque systémique.

1- INTRODUCTION

Bâle III édicte un ensemble de normes portant sur la mise en place d’un ratio de liquidité pour les banques internationales, d’un ratio d’effet de levier, de mesures contra-cycliques, d’une redéfinition des fonds propres et d’une révision de la couverture de certains risques. Cet ensemble de normes contribuera à renforcer la résilience du secteur financier et bancaire en prévision de nouvelles tensions financières et économiques et ce, indépendamment de la source.

L’ensemble de ses nouvelles mesures que le Comité de Bâle a développé pour solidifier la réglementation, le contrôle et la gestion des risques dans le secteur bancaire vise à renforcer la transparence et la communication au sein des banques, à améliorer la capacité des banques à absorber les chocs résultant des tensions, à la gestion des risques et à la gouvernance. Ce renforcement des exigences qualitatives et quantitatives et ces mesures élaborées par le Comité de Bâle sont axés sur deux démarches1:

1 BRI (2010), « Cadre réglementaire international du secteur bancaire (Bâle III) », Bâle, Monetary and Financial Stability, 16 décembre.

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(i) La réglementation au niveau des banques Bank-level (microprudentielle) qui renforcera la résilience des institutions bancaires en période de tension.

(ii) Les risques systémiques System-wide (macroprudentiels) qui peuvent s’accumuler dans le secteur bancaire ainsi que leur amplification procyclique dans le temps.

Ces deux approches à l’égard du contrôle bancaire sont complémentaires vu que le renforcement de la résilience des établissements réduit le risque de chocs d’ampleur systémique.

L’instance de gouvernance du Comité de Bâle a convenu du dispositif général de Bâle III en septembre 2009 et a énoncé des propositions concrètes en décembre 2009: les documents consultatifs correspondants ont constitué le fondement de la réponse du Comité à la crise financière faisant partie des initiatives mondiales (visant à renforcer le système réglementaire financier) soutenues par les chefs d’État et de gouvernement du G20.

Le groupe des gouverneurs de banque centrale et des responsables du contrôle bancaire2 s’est parvenu à une large convergence de vues sur la réforme des normes de fonds propres et de liquidité, sur les principales caractéristiques du nouveau dispositif (en juillet 2010) et du calibrage et de la transition pour la mise en œuvre des mesures (en septembre 2010).

Pour Prot (2010), la réforme de Bâle III est une décision historique: « C’est un changement complet de paradigme, un vrai New Deal bancaire comme il n’y en a que tous les cinquante ans, à la mesure de la crise que nous avons connue. Sur le plan de l’organisation de la supervision d’abord, élément aussi essentiel dans la prévention des crises que le niveau d’exigence de capital ».

En se basant sur les principaux enseignements tirés de la crise, les accords de Bâle III marquent une étape importante vers une meilleure résilience du secteur bancaire: « Le Comité de Bâle a veillé à ce que ces réformes soient rigoureuses et favorisent la stabilité à long terme du système bancaire » (Trichet [2010]).

Cependant, des dispositions transitoires sont mises en place pour que le secteur bancaire soit en mesure de soutenir la reprise économique: « De nombreuses banques ont déjà considérablement progressé s’agissant du renforcement de leurs fonds propres et de leur liquidité. Les dispositions transitoires permettront au secteur bancaire de satisfaire aux nouvelles normes grâce à une limitation des distributions de bénéfices et à des augmentations de capital raisonnables » (Wellink [2010]).

Toutefois, il ne saurait y avoir de croissance économique tenable sans un secteur bancaire solide et stable. La réforme du cadre prudentiel, la robustesse des banques et leur aptitude à gérer des périodes de tensions sont devenus un thème d’une grande actualité et un champ de réflexion important pour la recherche économique et bancaire. Néanmoins, les principaux enseignements tirés de la crise financière ont montré avec acuité l’importance de ce sujet; l’instance de gouvernance du Comité de Bâle a voulu réagir en élaborant un programme de réformes si profondes, soit une véritable refonte du secteur tout entier.

2 Le Groupe des gouverneurs de banque centrale et des responsables du contrôle bancaire est l’organe de gouvernance du Comité de Bâle; il est composé des gouverneurs de banque centrale et des représentants des autorités de contrôle des pays membres.

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Nous adopterons la démarche suivante: après avoir rappelé le contexte de la réforme de Bâle III (Partie I), nous examinerons la nouvelle architecture de Bâle III en énumérant les réformes conçues pour renforcer la réglementation tant au niveau microprudentiel que macroprudentiel (Partie II), et enfin, nous évoquerons les défis de la mise en œuvre et les divers impacts de la réforme de Bâle III (Partie III).

2- Le contexte de la réforme de Bâle III

La crise bancaire et financière initiée en 2007 a fortement touché les marchés financiers et l’économie mondiale et a mis en évidence la non-adéquation du cadre réglementaire Bâlois aux situations extrêmes. Cette crise a mis distinctement les faiblesses du cadre réglementaire applicable au secteur financier (Flaunet [2010]):

- Une sous-pondération du risque de crédit et une absence de prise en compte de certains risques (liquidité, concentration…) due à un environnement macroéconomique peu propice à leur prise en considération (inflation modérée, faiblesse des taux d’intérêts, excès de liquidité...).

- Une interconnexion exponentielle du système financier (Originate to Distribute Model) et des modèles de gouvernance défaillants (politique de rémunération agressive).

- Un manque de transparence de l’information financière.

A ce jour, le cadre réglementaire est essentiellement défini par les accords de Bâle II et par leurs amendements (Capital Requirements Directive II & III). Même si la défaillance du cadre réglementaire ne se limite pas uniquement à Bâle II, ce dernier constitue le régime de solvabilité et de supervision prudentielle le plus répandu et a fait l’objet de toutes les critiques et des intentions de réforme (Deloitte [2010]).

La faillite de la réglementation bancaire est un ingrédient essentiel de la récente crise financière qui a dégénéré en crise économique mondiale. A cet effet, l’objectif du Comité de Bâle était de répondre aux faiblesses constatées durant cette crise et cela s’est traduit par trois vagues de réforme: Capital Requirements Directive II, Capital Requirements Directive III et Capital Requirements Directive IV qui portent principalement sur ce qui suit:

- Le renforcement des fonds propres (qualitatif et quantitatif) et des processus de surveillance prudentielle.

- Le renforcement des exigences qualitatives des pratiques de gestion des risques et de gouvernance (politique de rémunérations, processus de planification du capital…) et la limitation des leviers.

Pour de nombreux économistes, les principales faiblesses du dispositif d’avant-crise découlent d’une approche pas trop micro-prudentielle de la surveillance financière qui s’emploie à prévenir avant tout les faillites individuelles des institutions et qui vise également à protéger l’argent du contribuable et à discipliner les banques (Ben Jelloul [2011]). En revanche, une surveillance macro-prudentielle reconnaît l’importance des effets d’équilibre général et s’attache à sauvegarder la stabilité du système financier pris dans sa globalité: cette analyse macroscopique (rapport De Larosière [2009]) a servi de pierre angulaire à la réforme européenne, aux recommandations de Bâle III et à celles du FMI et de la BRI3.

Le calendrier des révisions du Capital Requirements Directive II, III & IV se veut plus ambitieux que celui de la réforme Bâle II, ce qui permettra d’assurer l’instauration d’une réaction relativement rapide à la crise (Tableau n° 1).

3 VIÑALS J., FIECHTER J., PAZARBASIOGLU C., KODRES L., NARAIN A. & MORETTI M. (2010), « Shaping the New Financial System », IMF Staff Position Note, n° 2010/15; BORIO C. & DREHMANN M. (2009), « Towards an operational framework for financial stability: “fuzzy” measurement and its consequences », BIS Working Paper, n° 284, juin.

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4 Tableau n° 1: Le calendrier des révisions du Capital Requirements Directive II, III & IV

2009 Publication des directives européennes Bâle II-CRD III (Avril-Septembre 2009)

Publication des propositions européennes relatives à la définition de Bâle II-CRD IV (Déc. 09)

2010

Etudes d’impact par les établissements financiers des propositions de Décembre 2009-QIS Bâle II CRD IV

Transposition des directives Bâle II-CRD II et CRD III en droit français (Octobre 2010)

Adoption définitive et publication des directives européennes Bâle II-CRD III (Oct. 2010)/CRD IV (Déc. 2010)

Entrée en application des directives Bâle II – CRD II (31.12.2010)

2011

Transposition des directives Bâle II-CRD IV en droit français et convergence des normes comptables au niveau européen (Juin 2011)

Entrée en application des directives Bâle II-CRD III (2011-2012)

2012 Entrée en application des premières directives Bâle II-CRD IV Transactions OTC sur dérivés standardisées compensées via CCP: traitement prudentiel pénalisant (31.12.2012)

2013-2018 Entrée en application progressive des autres directives Bâle II-CRD Source:

Eurogroup Consulting (2011), « Bâle III, quels impacts sur les métiers de la banque », Evolution de la réglementation prudentielle, Avril, p. 2.

FBF (2009), « Révision de la directive sur l’adéquation des fonds propres », la Banque et l’Europe, 25 septembre.

Le calendrier de la réforme couvre une période s’étendant jusqu’à fin 2012 et le projet du Capital Requirements Directive III interviendra au cours de l’année 2011. Les propositions du Comité de Bâle publiées en décembre 2009 ont servi d’ébauche au Capital Requirements Directive IV qui sera fixé fin 2012 (Tableau n° 2).

Tableau n° 2: Le calendrier de la réforme et les projets du Capital Requirements Directive

Réforme Bâle II

Capital Requirements Directive (CRD)

Convergence internationale de la mesure des normes de fonds propres

Système des 3 piliers: exigences minimales de fonds propres, surveillance par les autorités prudentielles, transparence et discipline de marché

Les textes réglementaires: Convergence Internationale de la mesure et des normes de fonds propres (Dispositif révisé en Juin 2006)

Fonds propres réglementaires Capital Requirements Directive II (CRD II)

Ajustement des critères d’éligibilité des éléments de capital hybrides

Révision du traitement des grands risques

Amélioration des techniques de gestion des risques liés à la titrisation

Les textes réglementaires:

- Risque de liquidité: Gestion et défis de surveillance (Février 2008)

- Cross-sectorial review of group-wide identification and management of risk concentrations (Avril 2008)

Fonds propres réglementaires Capital Requirements Directive III (CRD III)

Renforcement des exigences en capital pour le portefeuille de négociation

Augmentation des exigences en capital pour les activités de re-titrisation

Augmentation des exigences sur les informations à publier

Les textes réglementaires:

- Révisions du risque de marché en vue du cadre de Bâle II-version finale (Juillet 2009) - Améliorations apportées au cadre de Bâle II (Juillet 2009)

Fonds propres réglementaires Capital Requirements Directive IV (CRD IV)

Augmentation de la définition des fonds propres

Introduction de nouvelles normes de liquidité

Introduction d’un ratio de levier

Révision des exigences sur risque de contrepartie

Mesures contra-cycliques

Traitement des banques d’importance systémique

Les textes réglementaires: Ratio secondaire peu suivi à ce jour car ne prenant pas en compte les diversités du risque en fonction de la typologie des actifs

Source:

Zeb Consulting (2011), « On the way to Basel III », New regulatory requirements concerning the adequacy of capital and liquidity.

Banque de France (2010), « Participation à l’évolution du cadre réglementaire », Rapport annuel d’activité, ACP, p. 9.

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PWC (2010), « Basel III: A Risk Management Perspective », Evolution of the Basel Framework, Risk Management, 5 mai.

Suite au sommet du G20 de Pittsburgh en septembre 2009 (réformer les régulations bancaires et financières, faire face aux séquelles de la crise des subprimes, se préparer à la reprise modérée…); le Comité de Bâle a décidé de procéder à une réforme intégrale de ce cadre prudentiel afin de l’adapter à un environnement bancaire devenu incertain et volatile.

A cet effet, il s’agit de réguler des hedge funds et des instruments dérivés sur la surveillance des agences de notation, d’élargir les réformes sur les paradis fiscaux du G20, de favoriser la transparence, de légiférer sur des règles de provisionnement en fonds propres pour les banques et d’intégrer les dispositifs de bonus-malus.

Le sommet de Pittsburgh avait acté de nouveaux principes pour réguler les bonus où son versement doit être conditionné à des critères de performance: de nouvelles règles pour les rémunérations des opérateurs de marché ont été fixées où "pas de bonus sans malus" 4. De ce fait, les banques centrales de chaque pays qui contrôlent les banques disposeraient du pouvoir de limiter le montant global des bonus: « C’est la première fois que le pouvoir est ainsi donné au superviseur de plafonner le montant des bonus en fonction des revenus d’une banque » (Sarkozy [2009])5.

Les amendements Capital Requirements Directive III et Capital Requirements Directive IV (Annexe n° 1) qui composent la réforme de Bâle III portent sur les évolutions ci-après (Tableau n° 3):

Tableau n° 3: La réforme de Bâle III: une répartition par Piliers Réglementaires

CRD III

Une augmentation des fonds propres réglementaires relatifs au Trading Book

Une augmentation des fonds propres réglementaires relatifs aux opérations de re-titrisation

Une amélioration de la communication financière

Une modification des politiques de rémunération des opérateurs de marché

CRD IV

Un renforcement de la qualité des fonds propres (impact direct sur le ratio de solvabilité)

Une révision de la couverture du risque de contrepartie (impact direct sur le ratio de solvabilité)

Une introduction d’un ratio de levier

Une introduction d’un dispositif de coussins contra- cyclique

Une introduction de ratios de liquidité minimum

Une gestion des établissements financiers à effets systémiques

Une mise en place d’un corpus réglementaire unique Pilier I: Exigences minimales de

Fonds Propres

Pilier II: Surveillance par les autorités prudentielles

Pilier III: Transparence et discipline du marché

4 Le Président français Nicolas Sarkozy a annoncé en août 2009 de nouvelles règles pour les rémunérations des opérateurs de marché: un arrêté du 05.11.09 traduit les exigences encadrant les rémunérations des opérateurs de marché (traders) des banques (l’interdiction de verser des bonus garantis > à 1 an, un versement différé et étalé sur 3 ans des bonus permettant l’introduction de malus en cas de mauvais résultats et le versement d’une partie de ces bonus en actions de la banque…).

5 LES ÉCHOS (2009), « G20: le sommet de Pittsburgh a posé les bases d’une nouvelle gouvernance économique et financière mondiale », 8 octobre.

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3- La nouvelle architecture de Bâle III

Les réformes élaborées par le Comité de Bâle ont pour objectif d’améliorer la capacité du secteur bancaire à absorber les chocs consécutifs à des tensions économiques ou financières et de réduire par conséquent, le risque de propagation à l’économie réelle. Ces réformes sont conçues pour renforcer la réglementation microprudentielle (accroître la résilience des banques durant la période des tensions) et comportent également, une dimension macroprudentielle (viser les risques systémiques qui peuvent s’accumuler et leur amplification procyclique dans le temps).

3.1- Les mesures de réforme microprudentielles

Les réformes du Comité de Bâle visent principalement à renforcer la réglementation en matière de fonds propres et de liquidité et à améliorer également le contrôle bancaire, la gestion des risques, la gouvernance, la transparence et la communication financière.

3.1.1- L’évolution au niveau du capital

La crise a montré que les ratios de fonds propres pondérés en fonction des risques donnent parfois une fausse idée de la solidité générale des banques et il arrive que les règles de pondération sous- estiment les risques effectifs. Afin d’y remédier à ce problème et afin de soutenir l’exigence de fonds propres en regard du risque, Bâle III a élaboré un ratio de levier qui devrait contribuer à contenir l’accumulation de risque systémique en cas de développement rapide de l’effet de levier.

a- L’évolution des ratios relatifs aux fonds propres

Le ratio de fonds propres mesure la solidité financière des établissements bancaires. A cet effet, le Groupe des gouverneurs et des responsables du contrôle bancaire a renforcé, par sa nouvelle réglementation adoptée, les exigences minimales de fonds propres qui se répartissent en trois composantes (Cecchetti [2010]): le numérateur (correspond à la mesure des fonds propres), le dénominateur (mesure les actifs en regard desquels des fonds propres sont constitués pour absorber les pertes) et le ratio d’adéquation des fonds propres.

Au niveau du numérateur, l’action du Comité de Bâle s’est concentrée sur les actions ordinaires qui permettent le mieux d’absorber les pertes avec une définition beaucoup plus stricte: la structure des fonds propres a été simplifiée par l’application de critères d’éligibilité rigoureux pour les éléments de base Tier 1 et complémentaires Tier 2. Bâle III vise à améliorer la qualité des fonds propres (qui constituent l’exigence minimale et la définition de fonds propres de base Tier 1) par le renforcement de la capacité d’absorption des pertes, la robustesse des banques et leur aptitude à gérer des périodes de tensions.

Au niveau du dénominateur, le Comité de Bâle a pris des mesures garantissant la prise en compte de toute la gamme des risques significatifs (un bon niveau de fonds propres ne peut protéger des pertes imprévues que si tous les risques sont entièrement couverts) et a renforcé la réglementation (pour englober le risque de crédit des activités complexes de négoce et sur dérivés), les exigences de fonds propres et les nouvelles dispositions relatives au risque de contrepartie.

Au niveau du ratio d’adéquation des fonds propres, un élément essentiel de Bâle III réside dans le relèvement de l’exigence minimale qui passe à 4,5% (contre 2% actuellement) et cette nouvelle réglementation de Bâle III a redéfini les ratios relatifs aux fonds propres, à savoir:

- Le ratio sur fonds propres de base durs Core Tier 1 fixé à 2%, passera à 4,5% des risques nets pondérés (ce ratio n’inclut que les actions et bénéfices dans les fonds propres).

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7 - Le ratio sur fonds propres de base Ratio Tier 1 fixé à 4%, passera à 6% (les fonds publiques

injectés pendant la crise pourront être conservés dans ce ratio jusqu’en 2018).

Un matelas de protection fixé à 2,5% a été ajouté pour résister à des périodes futures de tension et cette réserve de fonds propres devra uniquement être composée d’actions ordinaires (Annexe n°

2). En termes d’exigences en capital, les banques devront respecter un ratio de fonds propres durs de 3,5% dès 2013 qui s’élèvera à 7% en janvier 2019: les exigences en fonds propres ont été relevées où le ratio Core Tier 1 atteint au total un seuil minimum de 7% et en cas de non-respect de ce matelas, le régulateur a la possibilité d’imposer la reconstitution des réserves en lieu et place des actions de distribution ordinaires (rémunération des dividendes, bonus) et des primes.

Avec une exigence minimale de 4,5% (complétée par un volant de conservation de 2,5% et un volant contracyclique de 2,5%), il apparaît qu’au cours des crises récentes les pertes enregistrées par les grandes banques internationales représentaient 4 à 5% des actifs pondérés en fonction des risques.

L’examen de ces chiffres montre que Bâle III représente une hausse significative des volants de fonds propres en faveur du système bancaire mondial: « La nouvelle définition des fonds propres interviendra en même temps que le relèvement des ratios… les exigences sont passées en fait de 1%

à 7%, une augmentation qui fait abstraction du volant contracyclique mais qui inclut le volant de conservation qui vaudra pour toutes les banques… sauf à s’exposer à des sanctions, les banques seront soumises à une exigence de 7%, soit 7 fois plus qu’auparavant » (Cecchetti [2010]).

Quant à Delannoy (2010), les ratios de fonds propres durs exigés ne constituent pas une réponse adaptée à la prévention d’un quelconque risque systémique. En vertu de Bâle II, les exigences minimales pour une banque moyenne opérant sur le marché international, qui étaient fixées à 2%

pour les actions ordinaires et 4% pour Tier 1 équivalent aujourd’hui respectivement à 1% et 2% selon la nouvelle définition des fonds propres; d’où la nécessité pour les banques de relever le niveau de leur composante actions ordinaires afin de satisfaire aux exigences minimales.

Selon Tahiry (2010), les directives de Bâle III voulues plus strictes en termes d’exigences en fonds propres avaient été demandées par les Etats du G20 en vue d’éviter à l’avenir la débâcle financière de 2008. Quant à Trichet (2010), il considère que les accords conclus constituent un renforcement fondamental des normes internationales de capital et leur contribution à la stabilité financière à long terme et à la croissance seront considérables.

Pour Weber (2010), la phase de transition graduelle va permettre à toutes les banques de remplir les exigences de niveau minimum requis en termes de capital et de liquidités. A noter que les nouvelles normes seront appliquées de manière progressive à partir de 2013 et mises en place définitivement en 2019.

b- La couverture des risques du portefeuille de négociation

Le Comité de Bâle renforce les exigences en capital au titre des expositions logées dans le portefeuille de négociation, des expositions à des structures de hors-bilan et des expositions au risque de contrepartie sur instruments dérivés. En outre, et afin d’augmenter le capital pour couvrir ses expositions risquées, réduire la procyclicité des mesures de type Var et diminuer le risque systémique, un certain nombre d’initiatives ont été prises par le Comité de Bâle et dont la mise en application est prévue à partir du 31.12.116:

6 KPMG (2011), « Bâle III: Les impacts à anticiper », Financial Services, Mars.

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8 - Une introduction d’une charge en capital au titre de la Var stressée (calibration des facteurs de risque sur une période de stress de 12 mois) et un renforcement des exigences en matière de gestion du risque de contrepartie (collatéraux, stress tests).

- Un alignement des pondérations des expositions de titrisation du portefeuille de négociation sur celles du portefeuille bancaire et un renforcement des pondérations relatives aux expositions retitrisées.

- Une application de charges de capital additionnelles au titre de pertes potentielles de valeur des expositions liées à un risque de défaut et de dégradation éventuelle de la notation de la contrepartie (CVA: Credit Valuation Adjustment et IRC: Incremental Risk Charge).

- Une meilleure prise en compte du risque de corrélation entre les institutions financières et une incitation à l’utilisation de chambres de compensation pour les instruments dérivés.

Face à la dégradation de la qualité de crédit des contreparties (source importante de pertes), le Comité de Bâle a décidé de relever les exigences de fonds propres réglementaires et d’améliorer la gestion du risque de contrepartie: « Il faut recourir à des scénarios de crise pour déterminer les exigences de fonds propres en regard du risque de défaut et fixer de nouvelles exigences afin de prémunir les banques contre le risque d’une dégradation de la qualité de crédit d’une contrepartie » (BRI [2010])7.

Les implications pour les banques en matière de couverture des risques du portefeuille de négociation peuvent se traduire par la revue des activités du portefeuille de négociation au regard des nouvelles contraintes de capital, par la réduction du volume des transactions entre institutions financières et surtout par l’amélioration de la gestion et du contrôle du risque de contrepartie.

b- La maîtrise de l’effet de levier

Le Comité de Bâle a introduit un nouveau ratio de capital qui vise à maîtriser la croissance des bilans, il s’agit d’un ratio d’endettement (Leverage Ratio). Ce ratio de levier est basé non pas sur la mesure ajustée du risque (Non-risk based) mais sur la taille du bilan des banques: la valeur maximale de ce ratio serait fixée à 3% du capital Tier 1 (soit un total des expositions en bilan et hors-bilan ne dépassant pas 33 fois le capital Tier 1 des banques).

Cette mesure qui rapporte le montant des fonds propres de base Tier 1 à celui des expositions brutes de bilan et de hors-bilan vise à limiter l’effet de levier des banques: il s’agit alors d’une mesure simple, transparente, non basée sur le risque et calibrée pour servir de mesure complémentaire crédible aux exigences de fonds propres fondées sur le risque.

Le Comité de Bâle a approuvé la conception et le calibrage pour le ratio de levier (une moyenne sur le trimestre) qui serviraient de base aux vérifications pendant la période d’évaluation (Parallel Run Period); soit une approche qui donnerait lieu à un traitement prudent des éléments de hors-bilan et renforcerait le traitement des dérivés par rapport à la mesure purement comptable8:

- Pour les éléments de hors-bilan: utiliser des facteurs de conversion en équivalent-risque de crédit 10% pour les engagements révocables sans condition.

- Pour tous les dérivés: appliquer le mécanisme de compensation Netting prévu par Bâle II et une simple mesure de l’exposition future éventuelle où tous les dérivés sont convertis de manière cohérente en un équivalent-prêt.

7 BANQUE DES REGLEMENTS INTERNATIONAUX (2010), « Réponse du Comité de Bâle à la crise financière:

Rapport au Groupe des Vingt », Bâle, octobre.

8 Afin de résoudre les différences entre les IFRS (International Financial Reporting Standards) et les GAAP (Generally Accepted Accounting Principles).

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S’agissant du calibrage, le Comité propose de tester un ratio minimum de levier de 3% pour Tier 1 durant la période d’évaluation (Minimum Tier 1 Leverage Ratio): il utilisera cette période pour évaluer si la conception et le calibrage proposés sont appropriés sur un cycle de crédit complet et pour différents types de modèles opérationnels. Le Comité de Bâle a décidé de diviser la période de transition en deux grandes phases9:

- La période de surveillance par les autorités de contrôle (qui a déjà débuté le 01.01.2011) est axée sur l’élaboration de modèles destinés à assurer un suivi homogène des composantes fondamentales de la définition convenue et du ratio correspondant.

- La période d’évaluation débute le 01.01.2013 et se termine le 01.01.2017: le ratio de levier (et ses composantes) fera l’objet d’un suivi qui sera notamment axé sur son comportement (Behaviour) par rapport à l’exigence de fonds propres en regard du risque. La publication du ratio de levier au niveau des banques (Bank Level Disclosure) débutera le 01.01.2015 sous l’étroite surveillance du Comité.

Selon les résultats collectés durant cette période, des ajustements définitifs seraient effectués au premier semestre 2017 en vue d’une intégration de ce ratio au titre du Pilier 1 le 01.01.2018 et ce, après examen et calibrage appropriés.

Les implications pour les banques résultant de la maîtrise de l’effet de levier peuvent se traduire par une réduction de l’activité de leurs prêts, une forte incitation à se séparer des actifs à faible marge et une probabilité de devoir maintenir un niveau de ratio supérieur au seuil défini par les régulateurs sous la pression du marché et des agences de notation.

4- L’évolution au niveau de la liquidité

Pour contrer les pressions observées durant la crise, deux normes réglementaires ont été élaborées par le Comité de Bâle pour réaliser des objectifs distincts mais complémentaires au niveau international:

- Le ratio de liquidité à court terme Liquidity Coverage Ratio (LCR): concerne certains actifs liquides pouvant être utilisés pour compenser des sorties nettes de liquidités dans des scénarios de tensions brèves définis par les responsables prudentiels.

- Le ratio structurel de liquidité à long terme Net Stable Funding Ratio (NSFR): évalue l’ensemble du bilan au moyen d’une estimation des sources de financement fiables en présence de tensions plus prolongées et moins sévères.

Ces ratios visent à protéger les banques contre une crise de liquidité.

4.1- Le ratio de liquidité à court terme (Liquidity Coverage Ratio)

Le ratio de liquidité à court terme Liquidity Coverage Ratio est un ratio qui devra favoriser la résistance immédiate des banques à une éventuelle situation d’illiquidité: les banques seront tenues de disposer d’un volant d’actifs liquides de haute qualité et suffisant pour résister à des crises de liquidité aigues sur une durée d’un mois. Les réserves de liquidité doivent être supérieures aux fuites de liquidité générées par la perte des possibilités de refinancement sur le marché, par la fuite des dépôts, et par une série d’autres facteurs qui peuvent survenir lors d’une telle crise de liquidité. Les principaux paramètres du Liquidity Coverage Ratio sont les suivants10:

9 BRI (2010), « Le Groupe des gouverneurs de banque centrale et des responsables du contrôle bancaire parvient à une large convergence de vues sur la réforme des normes de fonds propres et de liquidité », Banque des Règlements Internationaux, Communiqué de presse, 26 juillet.

10 BIS (2010), « Basel III rules text and results of the quantitative impact study issued by the Basel Committee », 16 December.

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- Le cash et les titres d’Etat sont pondérés à 100%, d’autres titres sont pondérés à 85% (15%

de décote sur leur valeur de marché) et le refinancement de marché est renouvelé à 0%.

- Les prêts aux clients sont supposés renouvelés à 50% et les prêts interbancaires ne sont pas renouvelés. Les dépôts Retail subissent des taux de fuite entre 5% et 10% selon la stabilité estimée du dépôt en question alors que les dépôts des Grandes Entreprises subissent un taux de fuite entre 25% et 75% selon la stabilité estimée du dépôt en question.

- Une conservation d’actifs liquides permettant l’absorption d’une crise sur une durée de 1 mois et un ratio de ces actifs sur les flux de décaissement calculé sur la base de stress-tests doit être > à 100%.

En ce qui concerne le planning de mise en œuvre, une période d’observation est prévue jusqu’au 2014 et une validation en Janvier 2015.

4.2- Le ratio de liquidité à long terme (Net Stable Funding Ratio)

Le ratio de liquidité à long terme Net Stable Funding Ratio est un ratio à un an qui devra favoriser aux banques la résistance à une situation de crise spécifique à l’établissement: le montant des besoins en ressource stable Required Stable Funding doit être supérieur au montant des ressources stables Available Stable Funding (Tableau n° 4). Ce ratio remédiera aux asymétries de financement et incitera les banques à recourir à des sources stables pour financer leurs activités. Les principaux paramètres du Net Stable Funding Ratio sont les suivants:

- Ratio des ressources stables >1 an/montant nécessaire des ressources stables doit être > à 100%

- Prise en compte du renouvellement automatique de certains emplois (même si < à 1 an)

En ce qui concerne le planning de mise en œuvre, une période d’observation est prévue jusqu’à 2017 et une validation en Janvier 2018.

Tableau n° 4: Les indicateurs de la disponibilité de la liquidité

Ressources stables Financement stable

Fonds propres et passif à plus d’un an 100% Actifs liquides et titres à maturité résiduelle < 1 an 0%

Dépôts à vue stables 85% Dette gouvernementale 5%

Dépôts à vue moins stables 70% Dette d’entreprises 20%

Financements par entreprises non financières 50% Prêts durée résiduelle < 1 an 50%

Autre passif 0% Tous autres actifs 100%

Hors-bilan 10%

Source: SIA Conseil (2010), « Décryptage de la réforme et étude d’impact », 18 août.

Le Comité de Bâle III adoptera des procédures rigoureuses de notification afin de suivre les ratios de liquidité durant la période de transition vu la grande diversité dans les modes de gestion de liquidité à travers le monde et dans les régimes nationaux de surveillance prudentielle de la liquidité (Caruana [2010]). Pour Nouy (2010), une réflexion doit s’engager sur la structure des ratios de liquidité pendant la période d’observation (2011-2015) afin de faire les ajustements nécessaires. Egalement pour Noyer (2010) qui considère que la période d’observation doit être mise à profit pour corriger certains aspects du calibrage des ratios de liquidité et de transformation.

Quant aux aménagements possibles des ratios actuels, Noyer (2010) souligne que dans la liste des actifs éligibles à ces ratios, il y a une concentration très forte sur les titres d’Etat; les créances vis-à- vis des entreprises et autres établissements financiers se voient à l’opposé, imposer des décotes très

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importantes: « Nous savons maintenant que les titres d’Etat ne sont pas forcément les actifs les plus sûrs et les plus liquides en toutes circonstances ». Bâle III apporte quelques changements à la définition des ratios de liquidité que les banques devront respecter en 2015 (pour le ratio à 30 jours) et en 2018 (pour celui à un an): la règle veut qu’une banque détienne des actifs liquides lui permettant de couvrir au moins 100% des retraits potentiels de cash sur la période considérée (Garabedian [2010]). Selon Berger (2010), la liquidité sera le principal défi pour de nombreuses banques avec plusieurs conséquences (abandon d’activités, désintermédiation du financement des entreprises): « Les banques les plus actives sur l’obligataire en Europe telles BNP Paribas espèrent profiter de la montée en puissance annoncée des marchés de dette ».

L’objectif de Bâle III est de réduire au minimum l’exposition du système bancaire aux chocs néfastes d’offre et de demande d’actifs liquides: « Il se peut que le volume de titres de dette à court terme émis par l’État et le secteur privé ne parvienne jamais à satisfaire la demande naturelle d’instruments d’épargne à court terme des particuliers et des entreprises… nous ne devrions pas reprocher aux banques leur mission première qui est de proposer ces instruments au public en les rémunérant au moyen des rendements obtenus sur des actifs à plus long terme… nous pouvons faire en sorte que les banques détiennent davantage d’actifs liquides et gèrent correctement leurs risques de liquidité » (Cecchetti [2010]).

En matière d’amélioration de la gestion de la liquidité à court terme, les implications pour les banques peuvent se traduire par le maintien en permanence d’un stock d’actifs de très haute qualité permettant de supporter une crise de liquidité à court terme caractérisée par la dégradation de la notation de l’établissement, l’arrêt du refinancement interbancaire, la perte d’une partie des dépôts clientèle, la fermeture de l’accès aux financements sécurisés, les tirages des lignes de liquidité accordées ainsi qu’un investissement dans des titres d’Etats ou dans la dette privée très bien notée (KPMG [2011]).

Quant aux implications pour les banques en matière d’amélioration de la gestion de la liquidité à long terme, ils peuvent se traduire par l’affectation aux différents éléments du bilan (actifs, passifs, hors bilan) d’un pourcentage correspondant à leur degré de stabilité (estimé à l’horizon d’un an), par la diversification des sources de financement afin de réduire toute dépendance à un type particulier de ressources et la détention d’un montant élevé de ressources à moyen terme.

4.3- La gestion et la surveillance des risques

Le renforcement des exigences en matière de fonds propres et de liquidité doit s’accompagner d’une amélioration de la gestion et de la surveillance des risques, et ce, dans un environnement de rapide et constante innovation financière. A cet effet, le Comité de Bâle a réexaminé le processus de surveillance prudentielle (2ème pilier) en vue de remédier à plusieurs insuffisances qui sont apparues dans les pratiques de gestion des risques des établissements au cours de la crise financière, à savoir:

- La gouvernance et la gestion des risques au sein des établissements avec une prise en compte des risques liés aux expositions de hors-bilan et aux opérations de titrisation.

- La gestion des concentrations de risque et les incitations pour les banques à mieux gérer les risques et les rendements sur le long terme ainsi que des pratiques saines en matière de rémunération Compensation Principles and Standards Assessment Methodology (cette méthodologie aidera les

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autorités de contrôle à apprécier si un établissement respecte bien les principes de bonnes pratiques énoncés par le Conseil de stabilité financière et applique les normes relatives à leur mise en œuvre)11.

4.4- La discipline de marché

Afin de corriger les déficiences de la communication financière dévoilées durant la crise, le Comité de Bâle a revu les exigences définies au titre du 3ème pilier pour les expositions aux opérations de titrisation et le soutien accordé aux structures de hors-bilan (les banques devraient satisfaire aux exigences révisées d’ici fin 2011) sachant que l’information sur les composantes des fonds propres est insuffisante et rend difficile l’évaluation précise de leur qualité ou la comparaison pertinente entre banques.

Pour améliorer la transparence et la discipline de marché, le Comité exige des banques qu’elles communiquent tous les éléments constituant les fonds propres réglementaires, les déductions appliquées et un rapprochement avec les comptes financiers. Les exigences de communication en matière de rémunération dans le cadre du 3ème pilier, visent que les banques publient des informations claires, exhaustives et disponibles en temps utile sur leurs pratiques de rémunération avec pour objectif principal de promouvoir une discipline de marché plus efficace (BRI [2010]).

5- Les mesures de réforme macroprudentielles

En outre l’approche microprudentielle visant à améliorer la solidité des établissements et afin de réduire la procyclicité et d’accroître la résilience de l’ensemble du système bancaire, il s’agit de prendre des mesures plus étendues qui viseraient les risques découlant de l’interdépendance des banques internationales d’importance systémique, les défis posés par la résolution des défaillances bancaires et l’aléa moral (BRI [2010]).

5.1- La procyclicité

En plus de l’instauration d’un ratio de levier et l’utilisation de scénarios de crise dans le calcul de la valeur en risque et du risque de contrepartie, le Comité de Bâle examine les différentes approches destinées à remédier à toute cyclicité excessive des exigences minimales de fonds propres.

5.1.1- Les volants de fonds propres

L’essentiel du nouveau dispositif de fonds propres est la constitution par les banques en période favorable d’un volant de fonds propres qui peut être mobilisé lorsque la situation se détériore; un volant qui contribuera à l’objectif d’atténuation de la procyclicité dans le système bancaire et le système financier dans son ensemble.

Ce nouveau dispositif de fonds propres comporte une exigence minimale d’un volant de conservation et d’un volant contracyclique visant à prémunir le secteur bancaire contre des phases de croissance excessive du crédit: « La définition bien plus stricte des fonds propres, le relèvement des exigences minimales et l’adoption de nouveaux volants de sécurité feront que les banques seront mieux à même de traverser des périodes de tensions économiques et financières, ce qui sera un soutien à la croissance » (Wellink [2010]).

11 En octobre 2010, le Comité de Bâle a publié un rapport (Range of Methodologies for Risk and Performance Alignment of Remuneration) qui répond à une recommandation du CSF invitant le Comité à énoncer les diverses méthodologies applicables pour concilier risque et performance dans les plans de rémunération, et évaluer leur efficacité à la lumière de l’expérience acquise.

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Le volant de conservation pourra être mobilisé pour absorber les pertes en période de tensions: à mesure que le niveau des fonds propres d’une banque se rapprochera du ratio minimal (4,5 %), le volant de conservation lui imposera de limiter ses versements discrétionnaires12. Ce dispositif soutient l’objectif de saine surveillance et de bonne gouvernance bancaire et répond au problème des pressions collectives qui ont empêché certaines banques de réduire les bénéfices distribués alors même que leur situation en termes de fonds propres se dégradait (Cecchetti [2010]). La mise en œuvre du volant de conservation conduit à imposer des restrictions sur les versements discrétionnaires (dividendes et primes) lorsque le niveau de fonds propres franchit les limites de ce volant.

Le volant contracyclique pouvant varier de 0 à 2,5 % sera appliqué en fonction de la conjoncture nationale (Annexe n° 2). Le rôle du volant contracyclique est de soutenir l’objectif macroprudentiel consistant à protéger le secteur bancaire lors des phases de croissance globale excessive du crédit: ce volant sera imposé lorsqu’une bulle de crédit aura provoqué l’accumulation de risque systémique et il sera mobilisé quand il permettra d’absorber des pertes qui menacent la stabilité financière; ce qui permettra de réduire le risque que le crédit disponible soit limité par les exigences de fonds propres réglementaires. Ces éléments réunis donnent un dispositif qui réduit la probabilité d’une création excessive de crédit en période favorable ainsi que la possibilité d’un assèchement lorsque la conjoncture devient difficile.

5.1.2- Le provisionnement

Si la procyclicité amplifie les chocs dans la durée, l’interdépendance excessive entre les banques d’importance systémique transmet des ondes de choc au sein du système financier et de l’économie.

5.2- Les risques systémiques et l’interdépendance

Les exigences de fonds propres pour atténuer les risques découlant des expositions entre établissements d’envergure mondiale contribueront à faire face au risque systémique et au problème de l’interdépendance, à savoir (BRI [2010]):

- Les incitations au recours à des contreparties centrales pour leurs opérations sur instruments dérivés de gré à gré et l’instauration d’exigences de liquidité pénalisant le recours excessif au financement interbancaire à court terme pour couvrir des actifs à long terme.

- Le relèvement des exigences de fonds propres pour les expositions liées aux activités de négociation et le relèvement des exigences de fonds propres pour les expositions au sein du secteur financier.

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5.2.1- Les fonds propres conditionnels

L’utilisation de fonds propres conditionnels en cas de liquidation renforcera la contribution du secteur privé à la résolution des crises bancaires futures réduisant ainsi l’aléa moral. Le Comité de Bâle a demandé qu’il soit contractuellement possible (au gré de l’autorité compétente) de sortir de tels titres du bilan ou de les convertir en actions ordinaires si la banque est jugée non viable ou si elle a bénéficié d’une injection de capitaux de la part du secteur public lui ayant permis d’éviter la défaillance.

5.2.2- La résolution des défaillances bancaires transfrontières

La résolution de défaillances transfrontières est une procédure complexe et la crise financière a mis en évidence d’importantes lacunes dans les techniques d’intervention et les outils à

12 Les banques seront tenues de disposer d’un volant de conservation constitué d’éléments de la composante dure et fixé à 2,5 % des actifs pondérés des risques. Le fait de conserver une part plus importante des bénéfices pendant une phase de repli conjoncturel permettra aux banques de s’assurer une disponibilité de fonds propres pour demeurer opérationnels en période de tensions.

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disposition pour parvenir à une résolution ordonnée. Cette résolution ordonnée est un élément essentiel des mesures visant à gérer le risque systémique et à répondre à la perception que certains établissements sont trop grands pour faire faillite too big to fail 13.

6- Les impacts de la réforme de Bâle III

Selon une évaluation approfondie effectuée par le Comité de Bâle quant à l’effet de Bâle III tant au niveau du secteur bancaire que dans l’économie en général; il a été conclu que le passage à des normes de fonds propres et de liquidité plus contraignantes ne devrait guère nuire à la croissance économique: « Si la nouvelle réglementation est instaurée progressivement sur une période de 4 ans, le PIB reculera d’environ 0,19% pour chaque augmentation de 1 point de pourcentage du ratio de fonds propres des banques une fois les nouvelles règles en vigueur… le taux de croissance annuel ne diminuerait que de 0,04 point de pourcentage sur une période de 4 ans et demi »14.

En se basant sur des hypothèses prudentes, les résultats du Macroeconomic Assessment Group (MAG) montrent que les nouvelles normes ne devraient avoir qu’un impact modeste sur la croissance économique au cours de la période de transition, alors que les résultats du Long-term Economic Impact Group (LEI) montrent que les avantages économiques associés aux exigences en fonds propres plus élevées et celles sur la liquidité excéderont largement les coûts15.

En outre, les avantages économiques à long terme l’emportent nettement sur les coûts associés au renforcement du dispositif: « S’agissant des avantages associés à l’éventualité réduite d’une crise financière, chaque réduction de 1 point de pourcentage d’une telle éventualité en cours d’une année se traduit par un gain annuel de production compris entre 0,2% et 0,6% selon l’hypothèse retenue » (BRI [2010]). Toutefois, cette étude contredit les conclusions du rapport l’IIF qui estimait que les mesures de Bâle III coûteraient 3 points de croissance au PIB mondial sur 5 ans: « On pourra reprocher à ces études, issues des deux camps, qu’elles sont produites par des organismes à la fois juge et partie »16.

Le rapport de l’IIF17 évoque une perte de PNB sur la zone Euro de € 853 milliards et € 4,8 millions d’emplois qui ne seraient pas créés sur les 10 prochaines années: « Ce sont des chiffres qui dans une période de déficit public record font réfléchir. Si le marché ne permet pas de supporter ces augmentations de capital, les banques seront forcées de réduire leurs actifs pondérés au risque (risk- weighted assets) pour respecter le ratio de solvabilité, et donc d’avoir un portefeuille d’actifs plus conservateurs; ceci limitera d’autant plus l’accès et les conditions au crédit pour certains secteurs d’activités. On peut d’ailleurs se demander dans quelle mesure l’esprit d’entreprise sera récompensé et adéquatement financé » (Denayer [2010]).

13 Le Comité de Bâle a publié en mars 2010 un document (Report and Recommendations of the Cross-border Bank Resolution Group) dans lequel il énonce des mesures pratiques destinées à améliorer la gestion de crise et la résolution des défaillances transfrontières.

14 Le Comité de Bâle et le Conseil de stabilité financière (CSF) ont publié en date du 18.08.2010 deux rapports relatifs à l’impact de Bâle III: (un rapport établi par le MAG Macroeconomic Assessment Group sur les implications macroéconomiques durant la phase de transition du projet de normes réglementaires renforcées et un rapport élaboré par le LEI Long-term Economic Impact Group sur l’impact économique à long terme des nouvelles normes).

15 Le MAG indique qu’en partant de la position moyenne du capital de 5,7% pour les grandes banques et en la portant à 7% la baisse maximale induite du niveau du PIB en découlant serait de 0,22% et la croissance annuelle serait de 3 points de base en-dessous de son niveau de référence au cours de cette période.

16 Société Générale (2010), « Banques: L’impact de Bâle III serait limité sur l’économie », Actualité Bourse, 19 août.

17 Rapport de l’Institut of International Finance (2010), « Interim Report on the cumulative Impact on the Global Economy of Proposed Changes in the Banking Regulatory Framework », Juin.

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De sa part, Prot (2010) estime qu’avec le calendrier de mise en œuvre, l’impact macro-économique de Bâle III devrait être moindre que celui prévu par l’IIF et il devrait se rapprocher des estimations de la BRI. Pour Nouy (2010), les accords de Bâle III ont fait l’objet d’appréciations très critiques de certaines études: « On dénonce le caractère trop alarmiste, notamment l’étude de l’IIF, dont les conclusions très pessimistes sont finalement peu crédibles », en admettant que si les accords de Bâle III ne vont poser aucune difficulté quant à la mise en place des liquidités de long terme, des problèmes pourraient intervenir pour les ratios à court et moyen termes (le coût de la liquidité pour les banques va augmenter).

Pour Draghi (2010), les normes de Bâle III auront un impact modeste sur l’économie pendant leur mise en place alors que sur le long terme, elles auront un effet bénéfique: « Les coûts macroéconomiques de la mise en place de normes plus solides sont raisonnables surtout avec des aménagements appropriés pendant la période de mise en place, alors que les bénéfices à plus long terme pour la stabilité financière et une plus grande stabilité de la croissance économique sont importants ».

Pour López & Maes (2011), Bâle III devrait impliquer l’adoption de conditions d’octroi de crédit plus strictes pour certaines activités commerciales: « Un moyen d’accroître le ratio de solvabilité consiste à réduire l’octroi de nouveaux prêts, réduisant ainsi l’accès au crédit des entreprises. Si les grandes entreprises auront la possibilité d’aller directement dans les marchés pour lever des capitaux afin de suppléer à l’offre bancaire réduite, les PME non seulement connaîtront des conditions bancaires bien moins intéressantes, mais qui plus est, lever des fonds propres ou émettre de la dette continuera à être une option bien trop coûteuse ».

Toutefois, les activités de négociation devraient être massivement impactées par le ratio de levier et les nouvelles exigences de fonds propres dues au titre du portefeuille de négociation et du risque de contrepartie, combinées au nouveau régime des grands risques ce qui constitue un objectif clair de la réforme: « Certaines études d’impact menées par des établissements de crédit prévoient des baisses drastiques de leur ratio de solvabilité nécessitant des niveaux de recapitalisation importants... en simulant le ratio de liquidité à court terme qui exclut de nombreux actifs en tant qu’actifs éligibles, ces mêmes études prévoient un risque d’amplification des besoins de financement et une contraction de la diffusion du crédit qui pèseront négativement sur la croissance » (Flaunet [2010]).

Bâle III aura des impacts significatifs sur les conditions d’exercice du métier de banquier et sur le business model des établissements: le capital réglementaire des banques sera directement impacté du fait de l’augmentation des exigences réglementaires en capital et de la réduction du ratio Core Tier One. Chaque banque sera impactée de façon différente en fonction de son niveau actuel de fonds propres réglementaires et de sa stratégie de financement. La BNP Paribas va par exemple conserver chaque année autour de deux tiers de ses résultats: « Nous disposerons dès 2013 d’un ratio Core Tier One sensiblement supérieur à 7% dans les conditions de Bâle III » (Prot [2010]).

L’impact de Bâle III sera significatif mais gérable entraînant une augmentation des actifs moyens pondérés de € 70 milliards sur un total de € 630 milliards (dont € 60 milliards correspondent au durcissement des exigences pour les activités de marché) et cet impact diffère pour chaque banque suivant sa capacité à se mettre en conformité avec Bâle III18. Toute augmentation des fonds propres s’accompagne d’une réduction du risque qui compense le coût total des fonds propres laissant ainsi

18 PROT B. (2010), « L’impact de Bâle III sera significatif mais gérable », BNP Paribas, Espace Financières Easy Bourse, 5 novembre.

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inchangés les taux offerts aux emprunteurs: « Dans le secteur bancaire sans que la neutralité soit parfaite, on observe empiriquement que les banques bien capitalisées font face à un coût du capital beaucoup plus faible » (Kashyap, Stein & Hanson [2010]).

Plusieurs auteurs ont cherché à évaluer empiriquement l’augmentation du coût du capital associé à un accroissement du ratio de fonds propres et trouvent des effets faibles sur les taux proposés aux clients: une augmentation de 10 points de pourcentage du ratio de fonds propres au détriment de la dette ne conduit au plus qu’à une augmentation des taux de financement de 25 à 45 points de base (Ben Jelloul [2011]). En outre, les données historiques ne permettent pas de déceler d’effet systématique des ratios de fonds propres sur les taux proposés aux entrepreneurs (Kashyap, Stein & Hanson [2010]). Le coût de financement des banques pourrait directement augmenter et les ratios de liquidité pourraient conduire à une amélioration du rating des banques.

Les gouverneurs de banque centrale et responsables du contrôle bancaire ont adopté des dispositions transitoires pour mettre en œuvre les nouvelles normes; des dispositions qui vont contribuer à ce que le secteur bancaire puisse satisfaire à des niveaux de fonds propres plus élevés (grâce à une limitation des distributions de bénéfice et à des augmentations de capital raisonnables) tout en continuant de favoriser l’octroi de prêts à l’économie (BRI [2010]).

Ces nouvelles normes seront appliquées de manière progressive à partir de 2013 et mises en place définitivement en 2019: « Les périodes de transition permettront aux banques de satisfaire aux nouvelles normes tout en soutenant la reprise économique » (Trichet [2010]). Le Comité de Bâle est déterminé d’assurer la transition en poursuivant de près l’impact et l’évolution des nouveaux ratios, les effets de l’application des normes et le cas échéant, de tenter de remédier aux conséquences imprévues (Tableau n° 5).

Tableau n° 5: Planning progressif de mise en œuvre des nouvelles normes

2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019

Ratio Core Tier 1 3,5% 4% 4,5% 4,5% 4,5% 4,5% 4,5%

Matelas de précaution 3,5% 4% 4,5% 5,125% 5,75% 6,375% 7%

Ratio Tier 1 4,5% 5,5% 6% 6% 6% 6% 6%

Matelas de précaution 4,5% 5,5% 6% 6,625% 7,25% 7,875% 8,5%

Ratio de solvabilité 8% 8% 8% 8% 8% 8% 8%

Matelas de précaution 8% 8% 8% 8,625% 9,25% 9,875% 10,5%

Déductions sur la composante actions ordinaires du Tier 1*

20% 40% 60% 80% 100% 100%

Ratio de liquidité à court terme

Début période d’observation

Ratio minimal Ratio de liquidité à long

terme

Début période d’observation

Ratio minimal

Ratio de levier Période de supervision Période de tests de l’indicateur Validation

* y compris les montants au- delà du seuil fixé pour les actifs d’impôts différés (Mortgage Servicing Rights) et participations dans les établissements financiers.

Source:

BRI (2010), « Le Groupe des gouverneurs de Banque Centrale et des responsables du contrôle bancaire a relevé les exigences internationales de fonds propres », Bâle, Communiqué de presse, Annexe n° 2, 12 septembre.

BRI (2010), « Réponse du Comité de Bâle à la crise financière: Rapport du G20 », Dispositions transitoires, Annexe n° 1, octobre.

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