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DANS LE CADRE DES AUDIENCES PUBLIQUES DU BAPE SUR : LA RÉSERVE ÉCOLOGIQUE DE L ÎLE BRION DES ÎLES-DE-LA-MADELEINE

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MÉMOIRE PRÉSENTÉ PAR LUCIE D’AMOURS

DANS LE CADRE DES AUDIENCES PUBLIQUES DU BAPE SUR : LA RÉSERVE ÉCOLOGIQUE DE L’ÎLE BRION

DES ÎLES-DE-LA-MADELEINE

18 OCTOBRE 2018

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Introduction

Madame Marie-Hélène Gauthier, présidente et Madame Julie Forget, commissaire, merci de cet important travail que vous faites, en compagnie de toute cette impressionnante commission d’enquête du BAPE. Je n’ai malheureusement pas pu assister aux audiences, étant en déplacement à l’international à m’imprégner d’Îles ailleurs dans le monde, mais heureusement votre site web était bien accessible et j’ai pu écouter toutes les séances de cette audience et consulter les documents mis en ligne. J’ai l’impression de bien vous connaitre maintenant, suite à cet important exercice auquel vous vous êtes prêtées dans l’objectif de voir plus clair dans cet

« épineux » dossier. Vous me permettrez donc à mon tour, puisque je présente ce mémoire à titre personnel, une présentation de mes expériences en relation avec le dossier actuel, puis un développement sur le contexte évolutif de cette réserve analysé à plusieurs niveaux, pour conclure par quelques constatations et recommandations. Les photos qui accompagnent ce mémoire sont de l’auteure ou son conjoint, Michel Papageorges.

Présentation de l’auteure

Biologiste de formation, j’ai grandi en partie au Nouveau-Brunswick, puis à Québec et l’île d’Orléans. J’ai œuvré comme naturaliste dans des parcs et réserves en Gaspésie (Centre d’histoire naturelle de Percé- Ile Bonaventure), de façon saisonnière, de 1974 à 1979. J’étais à ce moment également 2e aide-pêcheuse au homard, puis à diverses autres espèces de poissons (morue et petit hareng d’automne)-calmars-thon rouge. Ces expériences m’ont amenée aux Îles à l’été 1980, afin d’y mettre en place des sentiers et un programme d’interprétation à la Réserve nationale de faune de la Pointe-de-l’Est, nouvellement créée, en compagnie de trois autres naturalistes madelinots que j’avais alors engagés. J’habitais à Grosse- Île, communauté que j’ai appris à connaitre et apprécier grandement. Par la suite, j’ai travaillé quelques années sur un projet d’élevage de homards en suspension dans les lagunes pour une entreprise privée, puis avec le ministère des Pêches et Océans afin d’étudier les homards juvéniles (de la larve à l’adulte mature) et les conditions de leur croissance. Nous passions alors 10 à 12 d’heures par jours dans un enclos de 40m2, à 3 plongeurs de larges, à observer, inventorier, échantillonner.

Puis, j’ai agi comme enseignante de biologie, d’abord aux adultes avec le Collège de la Gaspésie, puis au régulier avec le nouveau campus des Îles dès 1984. J’ai alors contribué à monter plusieurs cours et programmes, dont l’un sur l’écogestion des milieux côtiers.

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2 J’ai par la suite agi comme conseillère pédagogique où j’étais notamment responsable du support pédagogique aux enseignants, des évaluations de programme et de la mobilité internationale pour les quatre campus, jusqu’à ma retraite en 2015. Tout au long de ma carrière d’enseignante, j’ai mis en place et supervisé un comité en environnement qui poursuit son travail de façon admirable et participé assidument à des organisations bénévoles comme la commission des études.

En parallèle de ces exemples d’activités professionnelles, j’ai contribué à développer plusieurs organisations environnementales et socio-économiques aux Îles, dont notamment Attention Fragîles, le comité ZIP des Îles, le CLD et CRCD locaux et le CERMIM (centre d’étude sur les milieux insulaires et maritimes). J’ai initié quelques projets dont le programme local de rétablissement du pluvier siffleur, de même que d’autres espèces à statut précaire et plus récemment, la gestion intégrée de nos plans d’eau intérieurs et la gestion intégrée de l’eau douce-salée via une Table de concertation locale.

Et Brion… J’allais régulièrement à l’Île Brion, dès 1980 et l’ai parcourue en long et en large à maintes reprises. Nous avons été témoin de la mise en vente de l’Île (au plus offrant) par la SAREP. J’ai suivi de près le tribunal qui a suivi l’avis d’expropriation de 1984, pour finalement rendre jugement en décembre 1986. J’ai par la suite accompagné sur place plusieurs spécialistes et gens de la CAPIB afin de partager mes connaissances de ce territoire. J’ai rédigé le programme éducatif et eu quelques petits contrats du ministère en lien avec ce programme. J’ai effectué quelques projets de recherche sur l’Île, dont l’un pour faire le suivi du site incendié en 1994. J’ai également accompagné, au fil des ans, de nombreux chercheurs en botanique, géomorphologie, taxonomie, ornithologie, foresterie, etc, et guidé les gens du ministère (localement, direction régionale et conservation du patrimoine écologique) annuellement sur l’Île jusqu’en 2004. Je me suis aussi régulièrement impliquée à former le personnel saisonnier oeuvrant sur l’Île(souvent sur des projets d’emploi étudiants). La majorité de ce travail était bénévole et même souvent « à mes frais » concernant le transport et le séjour. En 2016, j’ai finalement envoyé, à la demande d’un promoteur local, une évaluation de situation et proposition de renouvellement du programme éducatif.

J’ai reçu quelques distinctions au fil de ma carrière, notamment en pédagogie et pour mes implications bénévoles en environnement, dont le prix Rescousse 2016 en lien avec la protection des espèces en péril et des milieux fragiles.

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Contexte évolutif de la réserve

D’entrée de jeu, il m’apparait essentiel de mentionner que la Réserve écologique de l’Île-Brion a toujours été une réserve « pas comme les autres ». Revenons sur son contexte de création. Lors du tribunal d’expropriation de 1986, qui dressait un portrait de tous les attributs de l’Île à ce moment, on mentionnait que :

l’Île n’est munie d’aucun service public et que l’eau potable y est rare. On rappelle le statut d’aire de conservation du projet de schéma d’aménagement de la MRC. Des témoins experts font état des raisons pour lesquelles cette île mérite le statut de réserve écologique et se prête peu aux activités récréatives qui auraient pu mener à la création d’un parc de conservation. La flore de l’Île et sa couverture végétale en font son grand intérêt. On mentionne aussi que : « La pointe est semble être le site de rassemblements de phoques en quantité considérable. »1 Concernant l’évaluation monétaire de l’Île, on dit que « La poussée sociale est sûrement dans le cas de l’Île Brion un élément qui doit être pris en considération pour fixer cette valeur. Elle a une influence directe sur la faisabilité d’un projet d’utilisation. »2 On rappelle qu’un éventuel acheteur privé « devra avoir le goût de laisser la population environnante venir sur son Île » et on revient sur « le sentiment de possession patrimoniale qu’entretiennent les Madelinots à l’égard de l’Île Brion, leur désir de conserver cette Île dans son état écologique actuel, tout en y conservant l’accès qui a toujours été leur lot. »3 On y mentionne finalement que la preuve est claire et a été faite sur les fins de réserve écologique et éducative pour ce territoire avant de se lancer dans de savants calculs sur la valeur du tout. Il va sans dire que j’étais aux premières loges puisque ces experts qui témoignaient étaient pour plusieurs d’anciens professeurs de l’Université Laval, collègues de travail et amis personnels aux Îles. Dès le départ, cette réserve a ainsi été établie et acceptée par tous comme « une réserve pas comme les autres » et je crois pouvoir affirmer sans me tromper que jamais les Madelinots n’auraient accepté une réserve écologique sous cloche de verre, comme c’était le cas des réserves écologiques de partout ailleurs au Québec. Certaines que j’ai alors visitées étaient même entourées d’une belle « clôture Frost » pour limiter les intrus à deux pattes. Trente années plus tard, il est bien légitime de se questionner sur le : où tout cela nous a-t-il menés?

et ce territoire a-t-il bien joué son rôle dans notre contexte particulier de réserve éducative où l’on est bienvenue aux Îles-de-la-Madeleine?

1Cour provinciale, chambre d’expropriation, dossier No 020-34-000639-838, juge Guy Dorion, 5 décembre 1986, p. 9

2 Ibidem, p. 15

3 Ibidem p. 15

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Le programme éducatif… vigie du golfe et gardienne du temps!

Malgré les difficultés liées à l’isolement de cette réserve et son contexte maritime unique, la CAPIB (Corporation pour l’accès et la protection de l’Île Brion) qui comprenait des gens du conseil municipal ou de la communauté de Grosse-Île, a fait un travail vraiment fabuleux avec les maigres moyens disponibles. Rappelons qu’ils ont mené les consultations pré-réserve, avec la municipalité de Grosse-Île, sur la création de cette éventuelle réserve. Au début de cette aventure, le ministère de l’Environnement aidait à trouver des partenaires financiers et on a même vanté le partenariat alors établi4. Les randonnées éducatives étaient offertes et on gérait les campeurs ayant accès à quelques sites bien délimités dans la partie hors réserve et des feux étaient permis sur des sites établis à cette fin. Les activités de la partie hors réserve étaient d’ailleurs bien déterminées à l’intérieur du protocole liant la CAPIB au Ministère; la chasse, armes, pièges, bruit, déchets laissés sur place étaient interdits. Le document de zonage ayant servi de base à cette partie dans le plan de conservation mentionne que cette zone alors appelée « d’accueil » dont la délimitation précise restait à déterminer par arpentage en 1988, est confiée à la CAPIB qui y « exercera un rôle équivalent à celui du propriétaire. Elle pourra y développer des aménagements et pratiquer les activités qu’elle envisage, en harmonie avec les objectifs de conservation de la réserve écologique. »5 Il est intéressant de rappeler les quatre objectifs de conservation permis par une réserve écologique tels que décrits dans le plan de conservation où l’on mentionne que la Réserve Écologique de l’Île-Brion répond à ces objectifs. :

« -assurer la préservation de la diversité écologique du Québec, c'est-à-dire, les écosystèmes et leurs composantes, incluant les processus écologiques, la diversité génétique, par la sauvegarde permanente d'échantillons de milieux naturels;

-maintenir à l'état naturel des sites de référence pour pouvoir évaluer, par comparaison avec les milieux utilisés par l'homme, les conséquences écologiques de l'activité humaine sur les milieux naturels;

-constituer des lieux privilégiés pour le développement de la recherche scientifique et la surveillance environnementale en milieu naturel;

-développer, s'il y a lieu, des activités éducatives visant à sensibiliser le public à la nécessité de protéger des milieux naturels.6 »

4Voir extrait de la revue Habitats : La gestion de la réserve écologique de l’Île-Brion, un exemple de partenariat, Ginette St-Onge, Ministère de l’Environnement du Québec, Vol 1, No3, octobre 1990. (Document soumis à la Commission)

5Zonage de l’Île Brion, Linda Saint-Michel, Ministère de l’Environnement, Direction du patrimoine écologique, mai 1988, p. 6 de 15 (document également soumis à la commission)

6 Plan de conservation de la réserve écologique de l’Île-Brion, Ministère de l’Environnement, Direction du patrimoine écologique, avril 1991, p. 3 de 66 sauf annexes.

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5 La question de l’évaluation par comparaison des milieux utilisés par l’humain est à la base du programme éducatif de cette réserve. En effet, la prémisse de départ visait à mieux faire connaitre et valoriser ces milieux exceptionnels, surtout par les Madelinots, afin d’en dégager un sentiment de fierté permettant de mieux comprendre l’objet de ce type d’aires protégées et donc de contribuer localement à leur conservation. Pour rejoindre cet objectif, il faut donc bien connaitre notre réserve afin d’effectuer cette comparaison et d’en faire ressortir l’importance de conservation. Cette connaissance demande une recherche scientifique en continu. J’y reviendrai.

Un ancien quai et une jetée rendaient l’accès à l’île plus facile qu’aujourd’hui. Une énorme quantité de bois d’épave était disponible du côté ouest (pour les feux des campeurs) et une plage permettait alors de contourner à pied cette pointe à l’ouest à marée basse. Pour les sentiers, rien n’était vraiment officiel; on employait les anciens sentiers faits par le tracteur des gardiens de phare et les charrettes des anciens habitants de l’île ou les tranchées sillonnant l’île en longueur et largeur, faites par la machinerie lourde de la SAREP. L’on voulait avant tout favoriser la découverte de la partie hors réserve, son phare, sa plage, sa forêt rabougrie et les traces de ses anciens habitants, tout en rendant l’accès à la réserve comme une forme de privilège suite à une bonne introduction au concept de réserve écologique. Les gens de la Direction régionale de l’environnement, basés à Ste- Anne-des-Monts, venaient en effet fréquemment faire un état des lieux avec les partenaires locaux au début de la réserve. J’ai donc fait une proposition de sentiers éducatifs, à la demande du ministère au printemps 1992.

La CAPIB, qui avait fort à faire avec la question du transport marin à l’Île n’avait alors pas réussi à produire un programme éducatif officiel, tel que demandé dans l’entente de 5 ans qu’ils avaient signée avec Habitat Faunique Canada et qui était gérée par la Fondation de la faune7 en même temps que l’entente de gestion avec le ministère de l’Environnement, suite à la création de la réserve. Le programme éducatif était et est toujours une condition d’accès à la réserve écologique.

Étant alors en congé sabbatique suite à la naissance de mes enfants, j’ai accepté de produire ce document, avec une échéance de quelques semaines, moyennent mes frais de gardiennage. Bien du bénévolat de plusieurs individus (dont Raymond Gauthier que je remercie grandement)et de multiples démarches ont entouré ces actions. Le ministère a alors dit que ce programme répondait tout à fait à ses attentes. Ce dernier me demande ensuite d’évaluer ledit programme et d’analyser la fréquentation des sentiers. Le plan de conservation recommandait en effet un maximum quotidien de 15 personnes et annuel de 1000.

7Disponible en annexe du Plan de conservation, document DB3

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6 Ces chiffres étaient relatifs et devaient être revus suite à une étude de l’impact de la fréquentation plus formelle. Malgré un rapport où je démontre que le milieu ne souffre aucunement de la faible fréquentation du moment, inhérente aux difficiles conditions météorologiques, la direction régionale (son directeur) ressort des chiffres démontrant qu'à quelques reprises, la quantité quotidienne de visiteurs autorisés dans la réserve a été dépassée. Ce fut un prétexte pour ne pas renouveler les ententes et partenariats de la part de la direction régionale. On sentait une volonté de fermeture dudit milieu et on malmenait les partenaires locaux, ceux-là mêmes qui garantissaient une présence et par le fait même une belle dynamique de fréquentation, de surveillance et d’éducation à la conservation.

Plusieurs autres personnes et organisations fréquentaient l’île à ce moment pour y débarquer dans la partie hors réserve sans réellement appliquer le programme éducatif. La responsable locale pour le ministère de l’Environnement, Solange Renaud, a alors produit des scénarios éducatifs et fait un travail fabuleux en lien avec le programme éducatif. Malheureusement, elle était souvent en congé bien mérité l’été et les remplaçants (des étudiants) devaient avoir des plaintes officielles pour pouvoir faire une tournée sur l’île et s’occuper du nettoyage et autres problématiques d’accès incontrôlé de cette période.

Depuis, il y a eu d’autres tentatives, par CAMI en 2002, puis l’organisme Vert et Mer (Atlantis Yourte) voit le jour et des pourparlers avec CAMI, la Municipalité de Grosse-Île et le Ministère de l’Environnement, de même qu’une étude de faisabilité réalisée en 20038 sur un concept de campement écologique dans des yourtes, permet la dispensation d’un réel programme éducatif comprenant plusieurs formules différentes, en fonction des besoins de la clientèle. Cette entreprise, dirigée par des gens ayant étudié en environnement, est spécialisée en écotourisme et applique le concept de « leave no trace », alors en plein essor et visant à se comporter de façon à laisser le milieu dans le même état qu’il était à l’arrivée du visiteur. À cette période, le responsable des réserves à la direction régionale, Claude Foucault, est très au fait de son dossier, fait des visites fréquentes à l’Ile et a le plus grand respect et support envers les partenaires. Un appel d’offres est lancé par le Ministère et Vert et Mer signe par la suite une entente et dispensera des activités éducatives sur l’Île pendant quelques années jusqu’à environ 2005. Le transport est d’abord assuré en partie par l’entreprise Vert et Mer, puis par Excursion en mer qui installe alors des ancrages temporaires afin de permettre un débarquement sécuritaire par le biais d’un petit ponton, les structures de l’ancien quai et du débarcadère en bois se dégradant de plus en plus.

8ATLANTIS YOURTE, 2003. Hébergement écologique sur l’Île Brion – Compte-rendu de l’étude de faisabilité, Été 2003. Produit par Fanny Arseneau et Sébastien Côté, Îles-de-la-Madeleine, octobre 2003. 16 pages + annexes.

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7 Notons que ce fait est intéressant, car normalement, il ne devait pas y avoir d’activités par des entreprises commerciales à l’île, ce que sont les deux entreprises mentionnées, car oui, aux Îles comme ailleurs, les gens doivent bien gagner leur vie, comme quoi on peut parfois faire des exceptions selon la situation! Par la suite, quelques entreprises dont Excursion en mer font des visites autour de l’Île Brion et débarquent lorsque possible dans la partie hors réserve. N’étant pas la responsabilité de personne, l’Île redevient un territoire négligé, abandonné et une zone récréative pour plusieurs, comme c’était le cas dans les années préréserve écologique. Aucun organisme local n’en a réellement la responsabilité, la plupart n’ayant pu survivre aux nombreuses contraintes inhérentes à ce territoire.

Plusieurs tentatives se sont donc soldé par un abandon des activités dû à des difficultés de toute nature dont un manque de financement, oui, mais souvent de l’incompréhension des réalités locales et les reproches et exigences plutôt que les encouragements et aide. Je crois que l’attitude des représentants du ministère doit être analysée en profondeur, car son influence est majeure dans ce type d’activités déjà très difficiles à mener adéquatement vu les nombreuses contraintes du territoire. Parfois des responsables régionaux des réserves de leur territoire prenaient le temps de bien comprendre ces problématiques et faisaient preuve de gros bon sens et d’ouverture requises par ce genre de travail; trop souvent, on se butait à des fonctionnaires très fermés et pas très au courant du contexte unique d’accès de cette réserve éducative. S’il y a renouveau de ce programme, il faudrait prendre le temps de bien revoir le tout sur la base des particularités actuelles du milieu et des documents que j’ai faits en 20169 (et dont j’ai repris quelques extraits dans cette partie) concernant cet aspect et qui visait alors à démontrer que les sentiers actuels étaient pour plusieurs impraticables suite à l’évolution du milieu, particulièrement son érosion, et qui proposaient 3 nouveaux parcours éducatifs adaptés aux nouvelles contraintes et besoins. J’accompagnais alors une entreprise du milieu, bien implantée à l’Île Brion dans ses excursions en mer…et désireuse d’avoir accès à la réserve écologique et non seulement au secteur hors réserve. Fait intéressant, nous avions alors demandé un budget de 15,000$ afin de sauver la « cookhouse » servant de centre d’accueil et de refuge, refaire un site de toilettes et une montée sécuritaire pour accéder à l’Île. Seul le matériel était calculé et des bénévoles se chargeaient des travaux, comme cela s’était déjà fait il y a une quinzaine d’années alors que le biologiste Sébastien Cyr y avait été très impliqué bénévolement. Ces démarches ont été faites auprès de la direction des aires protégées, en contact avec la direction régionale.

9 Le programme éducatif à la réserve écologique de l’Île-Brion, état de situation et recommandations, mars 2016, 36 pages et Évaluation du secteur est, zone éducative #3, mai 2016, 9 pages

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8 Ayant respecté toutes les échéances fixées par ces directions afin d’avoir des réponses rapides permettant de bien entamer la saison 2016 et faire les aménagements qui s’imposaient, et après nous avoir mentionné que les budgets devraient être disponibles, on nous a oubliés, le dossier étant apparemment resté figé sur un bureau à la direction régionale. Le partenaire, alors encore passionné par ce projet et cette île qu’il connaissait si bien et fréquentait sur une base écotouristique depuis plus de 20 ans, avait déjà investi et acheté un nouveau ponton pour lequel il avait un certificat d’autorisation et des toilettes spéciales portables.

Excursion en mer a donc effectué quelques activités dans la partie hors réserve en 2016, mais les visiteurs revenaient souvent très déçus d’accéder à une réserve dans ces conditions périlleuses, faute d’aménagements adéquats : débarquement sur les rochers recouverts de montagnes d’algues qui s’y accumulent ces dernières années suite à la disparition de la jetée, du quai et de la plage; odeurs, puis montée dans une falaise remplie de déchets qui sont tombés dans le seul corridor d’accès possible;

absence de toilettes respectables; centre d’accueil (cookhouse) à l’abandon et farci de moisissures; nombreux déchets jonchant le territoire; marche dans un sentier aux nombreuses embuches, car ce territoire se transforme en gros milieu humide suite à la mort de la forêt (attaquée par plusieurs insectes)et aux écoulements d’eaux qui se produisent depuis. Les moustiques y sont donc légions tout l’été. En arrivant à la plage, de multiples phoques y sont et comme c’est un site de reproduction depuis peu, il y a des phoques morts et des restes de placenta, des fientes en quantité, odeurs nauséabondes, ce qui fait que la randonnée est loin d’être agréable et les gens, n’ayant pas eu la préparation nécessaire et ne comprenant aucunement tous les phénomènes évolutifs en cours, revenaient déçus. Lorsque le vent se met de la partie et qu’ils reviennent en plus trempés jusqu’aux os, la journée n’est pas spécialement idyllique.

En conclusion de cette partie, je dirais qu’il faut prendre le temps de bien revoir nos objectifs éducatifs et les clientèles concernées. Je crois qu’il faudrait une approche facilitée pour les Madelinots, premiers concernés par la conservation de ce milieu. Il y a moyen de bien préparer ces clientèles ailleurs aux Îles, avant leur visite sur l’île et surtout avant de pénétrer dans la réserve, privilège demandant une base de connaissance sur ce contexte particulier. La communauté de Grosse-Île pourrait participer à cela par un petit centre d’interprétation des milieux naturels, dont l’Île Brion. Le tour de l’Île en soi est vraiment féérique avec les colonies d’oiseaux marins et la beauté des lieux, les phoques qui suivent les bateaux, etc.

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Si l’on renouvelle le programme éducatif, il faudra suivre les cadres de référence existants10 qui ont guidé l’actuel programme éducatif. Il importe aussi de faire une réflexion en profondeur et de bien prendre en compte l’aspect « phoques », lesquels occupent et modifient actuellement le territoire, dont les espèces à statut précaire. Des données rigoureuses et récentes issues de recherche à ce sujet seront nécessaires. La notion de « services écosystémiques » issue du MEA (Millenium ecosystem assessment) paru en 2005 doit absolument être considérée, notamment quand on parle de services d’approvisionnement et de prélèvement par rapport aux services de régulation, de support et culturels. Il faudra aussi y mettre les énergies nécessaires (ressources humaines et financières dont 30,000$ a été annoncé pour ce renouvellement du programme éducatif par la ministre Mélançon le 16 août 2018). Cela nécessitera surtout une très bonne connaissance du dossier, une compréhension et des encouragements par les fonctionnaires face au contexte particulier de cette réserve éducative ou on a cru à tort qu’en

« laissant faire », tout irait bien!

10L’éducation et la formation relative aux réserves écologiques du Québec : cadre de référence, Jean Robitaille et Marcel Lafleur, Ministère de l’Environnement du Québec, Direction de la conservation et du patrimoine écologique, Mai 1992, 51 pages.

Phoques gris (île de l’est), maison des Dingwell et oiseaux marins dans les éboulis de roches (littoral sensible) au pied des falaises du nord.

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10 Un petit mot sur la surveillance et la signalisation….

Du temps de la CAPIB, la surveillance de ce territoire était bien menée puisqu’il y avait des employés présents de façon saisonnière. La CAPIB était donc considérée comme gardien et suivait les recommandations du Plan de conservation (p. 44) lequel mentionnait la nécessité de faire une tournée par semaine au printemps et au début de l’automne et trois par semaine l’été. Ces tournées servaient souvent de sensibilisation aux réalités de la réserve écologique lorsque des gens étaient rencontrés sur le territoire protégé; elles permettaient aussi d’évaluer, d’entretenir, de nettoyer aussi parfois ce territoire exceptionnel.

Par après, ces fonctions ont parfois été effectuées par les agents de Pêches et Océans Canada lorsqu’ils étaient près de ce territoire ou par les agents de la faune qui ont eu un petit bateau à une certaine étape. Les gens de CAMI en 2002, de Vert et Mer par la suite, ont signé des protocoles incluant la surveillance et ont donc eu accès à la réserve où ils faisaient des tournées régulières en même temps que, parfois, les activités du programme éducatif. La Municipalité de Grosse-Île a aussi eu quelques contrats de surveillance. Tout cela a brusquement cessé lorsque Vert et Mer a dû déclarer forfait à mi-chemin de cette entente avec le ministère vers 2005. Puis un genre de protocole de « communication » et d’activités de gestion (non précisées) a été établi entre CAMI-la Municipalité de Grosse-Île et le Ministère (document DB5) de 2008 à 2013. Excursion en mer a aussi joué ce rôle en faisant le tour de l’Île et en accédant à la partie hors réserve, mais rien d’officiel et surtout de régulier n’a été mis en place à ma connaissance depuis ce temps. J’ai eu connaissance de plusieurs voyages d’Excursion en mer qui revenaient avec des déchets de toutes sortes.

Sûrement bien d’autres ont contribué à ce ménage de « passants » pour tenter de ramasser ce que d’autres passants laissaient sur place, car aucun contrôle ni aucun souci apparent de replacer la signalisation et les pancartes identifiant les limites de la réserve n’ont été entrepris malgré de nombreuses demandes au ministère. On a cru à tort qu’en « laissant faire », tout irait bien!

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Et la recherche…

« L’un des objectifs de création d’une réserve écologique est de pouvoir réserver des territoires à la recherche scientifique. Cette recherche doit permettre d’augmenter nos connaissances fondamentales sur la nature et le fonctionnement des écosystèmes. (…) La réserve écologique permet aussi de suivre l’évolution des milieux naturels en comparaison de milieux identiques affectés par l’activité humaine et de servir de témoins de la qualité de l’environnement »11

Le plan de conservation parle d’un fond de recherches dont les priorités vont aux réserves écologiques et qu’il est important de faire connaitre ces possibilités aux universitaires, notamment à Rimouski. Parmi les six thèmes prioritaires de recherche, on mentionne « l’état, le dynamisme et le suivi des populations naturelles. »12

Des documents d’orientation ont été produits concernant l’encadrement de cet aspect de recherche dans les réserves écologiques. Dans l’un d’eux13 on en donne les grands principes directeurs, notamment d’utiliser les réserves écologiques comme réseau témoin pour l’acquisition de données environnementales à long terme… ce que l’on appelle la surveillance environnementale, aspect fondamental à effectuer dans les réserves écologiques. On y relève aussi deux types de réserves écologiques en regard de cette recherche : les « représentatives » et les

« spéciales » pour lesquelles les outils de gestion scientifique ne seront pas les mêmes. Les premières ne donnent pas lieu à des interventions, alors que les deuxièmes doivent s’accompagner d’une gestion scientifique serrée lorsqu’il s’agit de protéger un patrimoine écologique d’espèces fauniques et floristiques rares et pour lesquels des interventions peuvent être suggérées comme découlant de cette recherche sur la biologie et le fonctionnement des communautés rares, domaine que l’on dit à bâtir. On mentionne que « les réserves écologiques spéciales pourraient donc devenir des sites pilotes pour la réalisation d’expérience de gestion scientifique d’espèces vulnérables, menacées ou rares. »(…) « La responsabilité de faire ces choix (législatifs, administratifs et organisationnels) incombe en dernier lieu au ministère de l’Environnement, mais celui-ci doit être conscient que la participation des milieux de recherche, des organismes environnementaux et autres ministères, gestionnaires de territoires, est

11 Plan de conservation de la réserve écologique de l’Île-Brion, Ministère de l’Environnement, Direction du patrimoine écologique, avril 1991, p. 56

12 Ibidem, p. 58.

13Principes directeurs pour la gestion des réserves écologiques, deuxième volet : réserves écologiques et recherche scientifique:

pour l’amélioration des connaissances liées aux écosystèmes naturels, document d’orientation, Chantal Dubreuil, Direction du patrimoine écologique, Ministère de l’Environnement, décembre 1985, 33 pages.

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12 indispensable pour mettre en application tous les principes énoncés »14. Or l’Île Brion est une réserve à la fois représentative et spéciale selon le plan de conservation (p. 13). Ce document concernant les principes directeurs mentionne aussi que le plan de conservation doit établir un plan d’action à chaque 5 ans concernant les priorités et les coûts pour les programmes de conservation, de recherche scientifique et d’éducation (p. 22). On y parle abondamment du rôle catalyseur du ministère au bénéfice de la collectivité dans son ensemble et on y propose un modèle de financement, d’aide et de support aux chercheurs. Ces principes étaient prometteurs et j’ai rédigé le programme éducatif dans cette optique de collaboration serrée indispensable entre recherche et éducation.

Quelle ne fut pas ma consternation à la présentation du document DB31 par M.

Bouchard aux audiences, sur l’encadrement actuel de la recherche scientifique et qui ne fait brièvement part que de normes et exigences! On a perdu l’essence même de cet important volet! Il a été dit à plusieurs reprises que la réserve écologique était comme un « musée »; or au contraire, ce territoire n’a rien de statique, mais plutôt une dynamique incroyable qu’aucun musée ne pourrait rendre, même si très proactif.

Plutôt un laboratoire naturel

!! Et un laboratoire, on y travaille, on ne fait pas que le visiter et surtout, on ne l’ignore pas!

Les organismes en lien avec une entente de gestion de la surveillance et du programme éducatif ont régulièrement fait état de travaux à réaliser, autant concernant les travaux de recherche élémentaires que l’entretien de base des infrastructures de l’Île pour la sécurité même des gens qui y travaillaient. J’ai accompagné directement ou indirectement (préparation) plusieurs scientifiques qui ont fait des recherches sur l’Île. Ces travaux ont souvent bien alimenté le programme éducatif et permis de mieux connaitre le territoire et les phénomènes qui s’y produisent. Mentionnons les travaux de Jean-Marie Dubois, géographe, et son intéressant rapport de « lecture du territoire » qui a grandement alimenté le programme éducatif et qui dès 1991 suggérait d’autres pistes de recherches très intéressantes. Il mentionnait notamment le grand intérêt de produire une carte qui intégrerait les données à la fois terrestres et marines des différents ministères provinciaux et fédéraux. Il recommandait aussi une analyse des photos aériennes et l’établissement de bornes terrain qu’on suivrait sur une dizaine d’années afin de quantifier l’évolution des côtes15.

14 Ibidem p. 8 et 9.

15Géomorphologie et évolution du quaternaire de l’Île Brion : rapport d’exploration de 1991, Jean-Marie Dubois, Rapport 91-R-24, département de géographie et télédétection, Université de Sherbrooke, octobre 1991, p. 14 et 15.

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13 Dernièrement, en 2009 et 2010, le taxonomiste Dr Paul Catling faisait un inventaire de la végétation de l’Île Brion16 et ces données n’ont malheureusement pas pu être intégrées au portrait du territoire fait par Attention FragÎles en 2010. Le Dr Catling n’a eu aucun support ou encouragement et encore moins diffusion de ces intéressantes recherches auxquelles j’ai été associée de près, la botanique ayant toujours été d’un grand intérêt pour moi! Nous nous sommes buttés à de nombreuses contraintes, normes et exigences. Attention FragÎles a souvent pris sous son aile de tenter de faciliter le transport des chercheurs qui doivent aller à l’Île Brion, et ce, de la façon la plus sécuritaire possible. Cet organisme inventorie annuellement, pour le compte de Service canadien de la faune, les espèces aviaires à statut précaire dont le pluvier siffleur et le grèbe esclavon. Les colonies d’oiseaux marins sont également bien suivies par le SCF et leurs rapports et bases de données montrent des colonies globalement en très bon état; ces résultats sont fondamentaux pour dispenser le programme éducatif.

Ces recherches et plusieurs autres ne sont malheureusement pas diffusées largement sur le territoire (autres que par l’organisme lui-même parfois) et ont une utilisation très cloisonnée. Il faut fouiller longtemps quand on a besoin de tels résultats, pour l’enseignement par exemple, ce qui a souvent été mon cas. Jadis, aux premiers temps de cette réserve, il y avait un « fil de communication » entre la direction du patrimoine, la direction régionale, dont la représentante locale et le milieu.

L’objectif de recherche et d’éducation de ces territoires doit pourtant permettre « la diffusion des résultats de recherches et l’ensemble des connaissances scientifiques reliées à celles-ci pour le bénéfice du public et notamment pour les milieux d’enseignement. »17

De mon côté, j’ai fait le suivi du site de forêt rabougrie incendié en 1994. Bien que le support du Ministère ait été nettement plus important aux premiers temps de ce suivi, le contexte actuel18 fait qu’il est bien difficile (et onéreux pour moi) de poursuivre ces travaux. Ma dernière évaluation de 2015 est encore sous forme de notes de terrain, m’étant plutôt concentrée sur le renouvellement potentiel du programme éducatif. Comme ce site se situe en arrière dune, j’ai toutefois fait une analyse des traces de phoques retrouvées sur place et de la végétation qui s’installe de plus en plus sur la plage de l’ouest; j’aborderai cet aspect dans la prochaine section.

16 Ces deux rapports auxquels j’ai participé sont déposés à la commission avec mon mémoire.

17 Anonyme, 1985, Les réserves écologiques au Québec (ou la protection intégrale et permanente d’échantillons du patrimoine naturel du Québec), Direction du patrimoine écologique, Ministère de l’Environnement du Québec, p. 17 de 37

18 Formulaires non adaptés et complexes à remplir, délais importants de réponse et encouragements-intérêts non démontrés

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14 Il faut impérativement faire un suivi de cette plage-dune dans le contexte actuel et y inventorier la végétation. J’avais d’ailleurs participé à un inventaire de ce secteur en 1995 avec la botaniste Gisèle Lamoureux qui suggérait quelques avenues de recherche dans son intéressant rapport. Mais où est cette recherche qu’on dit prioritaire sur les écosystèmes terrestres, leur état, leur comparaison avec leurs vis-à-vis bien humanisés du territoire des Îles, les services écosystémiques qu’ils nous rendent, etc? Et quel est actuellement l’objectif de ce rôle du Ministère qui, loin d’agir comme un « catalyseur » de tout ce champ de recherche auprès de la communauté scientifique, est plutôt passif, quasi sur la défensive et fait preuve d’une série d’exigences et d’aucun support apparent lorsqu’un courageux chercheur présente une proposition?

I’Île Brion est certainement l’une des seules réserves écologiques façonnée, influencée et « altérée » par cette pleine mer qui l’entoure. L’on doit pouvoir étudier ces aspects conjointement, de façon intégrée. On ne peut dire « nous on ne s’occupe que du terrestre » dans un tel contexte où l’évolution de cette réserve est déterminée par ce qui arrive de l’eau (oiseaux marins, phoques notamment) et a un impact déterminant sur l’Île, ses littoraux, sa végétation. Il est impératif de suivre de façon rigoureuse ce qui se passe actuellement sur l’Île concernant le lien phoques gris- milieu terrestre et que ces résultats soient partagés avec les Madelinots afin d’avoir de réelles données à partir desquelles on peut plus facilement proposer des avenues de solution.

Concernant ce dernier aspect, cela m’a surprise qu’on ne fasse pas appel à l’expertise de Parc Canada qui, à l’Île de Sable a certainement mené ou collaboré à des recherches concernant l’impact du phoque gris sur le territoire terrestre. Ainsi, la revue Nature Sauvage a fait un encart sur une recherche parue dans la revue Ecology en août 2016 où le biologiste Philip D. McLoughlin de l’Université de Saskatchewan et son équipe « ont en effet découvert que les excréments des phoques fertilisent les plages et les dunes, favorisant le transfert de riches nutriments de la mer, dont l’azote, vers le sol de l’Île, ce qui, en retour, améliore la croissance des graminées et autres plantes dont se nourrissent les chevaux. »19 On mentionne la population de phoques gris passée de 1000 à 400,000 depuis 1960 et celle des chevaux sauvages, qui était stable pendant longtemps a subi une croissance notable ces dernières années. On conclut en mentionnant « La nature ne fonctionne pas en vase clos. Selon les chercheurs, la croissance concomitante de ces deux populations témoigne de l’interconnexion entre deux écosystèmes distincts. »20

19Surf and turf, Nature Sauvage, Hiver 2016-2017, No 34, p. 13.

20 Surf and turf, Nature Sauvage, Hiver 2016-2017, No 34, p. 13.

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15 Ces intéressants liens nous rappellent l’importance de la mortalité des saumons dans les rivières de l’Ouest canadien (pouvant paraitre négatif à première vue d’humain), phénomène démontré essentiel à la croissance des forêts de cèdres géants qu’on y trouve. Il est essentiel d’étudier globalement les phénomènes avant de porter des jugements sur leurs effets globaux, même si localement ces effets apparaissent et sont parfois très nocifs (bris d’équipements qu’on ne peut nier). Et s’il en allait de même entre les phoques gris et les crustacés, notamment les homards? Mes lectures et observations des dernières années faites dans ma vie d’aide-pêcheuse, sous l’eau lors des recherches sur les homards juvéniles et à l’Île Brion où les algues sont de plus en plus abondantes (à tel point qu’elles mettent à mal et empêchent même parfois les débarquements de visiteurs, c’est ce qui est arrivé lors de la visite du sous-ministre, M. Patrick Beauchesne le 2 août 2017, malgré une température idéale). Si l’on consulte les débarquements de homards de la zone 22 qui couvre le territoire entourant les Îles21, on remarque qu’ils n’ont jamais atteint les niveaux actuels et fracassent de nouveaux records annuellement.

Certes d’autres facteurs sont en cause (changements climatiques notamment) et les mesures de gestion y sont pour quelque chose et je salue le travail des pêcheurs des Îles; mais ces débarquements augmentent aussi ailleurs dans le golfe.

Je pose donc l’hypothèse suivante : les phoques stimulent la croissance des algues par leurs déjections, ce qui crée de meilleurs abris pour les homards qui de surcroit voient leurs principaux prédateurs diminuer au stade juvénile (poissons de taille intermédiaire) du fait de leur consommation par ces phoques. Les algues entrainent alors la croissance des oursins (dont c’est l’aliment de base) et favorisent celle des crabes communs (qui s’y cachent plus aisément), tous deux sources alimentaires de base au homard22. Ainsi les phoques gris qui constituent une nuisance localisée par leur impact négatif sur les équipements ne seraient-ils pas plus globalement un élément stimulateur du réseau trophique menant au homard adulte? Les observations des pêcheurs de Grosse-Île sur le peu de homards juvéniles qui entrent dans les cages comparativement à jadis vont dans ce sens également puisqu’on peut aisément penser que les homards juvéniles, friands d’oursins et bien camouflés dans les lits de laminaires, ont moins tendance à se déplacer pour chercher de la nourriture ailleurs comme dans une cage par exemple! En conclusion, il faut étudier cet écosystème de façon la plus intégrée possible en ne présumant pas que l’impact des phoques n’est que négatif sur le territoire.

21http://www.dfo-mpo.gc.ca/fm-gp/peches-fisheries/ifmp-gmp/lobster-homard/area-zone-22-fra.htm#anx1, p. 36 de 54. [page consultée le 12-10-2018]

22 De nombreuses études ont été menées sur ce sujet d’interdépendance homard-laminaires- oursins, notamment dans la Baie Ste- Mary’s en Nouvelle-Écosse. La recherche à laquelle j’ai participé analyse aussi les conditions de croissance des homards juvéniles et la relation crabe-homard. Voir http://www.nrcresearchpress.com/doi/pdf/10.1139/f87-230

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16 Il faut user de rigueur et faire un blitz de recherche pour mieux comprendre ce territoire et que la réserve joue pleinement son rôle en regard de cet aspect de recherche permettant aussi de mieux dispenser le programme éducatif.

Le zonage de l’Île Brion et ses milieux sensibles…

Puisque cet aspect, très en lien avec la problématique de cette audience, a été peu, voire pas abordé lors des séances, je me permets une petite remise à niveau. J’ai écrit à la commission au tout début de ce processus afin de leur demander de trouver et déposer un document concernant la version définitive du plan de zonage produit par Linda Saint-Michel en 1988. Je ne crois pas qu’on l’ait retracé, mais on a déposé le document DB3.1 et DB3.2, des cartes qui reprennent partiellement l’information de cet intéressant document.

Le document de base, ayant servi au Plan de conservation, lequel reprend très partiellement les éléments pertinents, trace le portrait des différents habitats. On y mentionne notamment que « contrairement à la situation qui prévaut sur l’archipel, les dunes de l’Île Brion sont demeurées dans un état exceptionnel de conservation. Elles n’ont pas subi de perturbations anthropiques liées entre autres au piétinement ou au passage de véhicules tout-terrain. (…) À cet égard, le secteur des dunes est un des sites le plus sensible de l’Île Brion. »23 Je dois donc mentionner ma stupeur lorsque l’on a dit, aux audiences qu’il faudrait aller en VTT jusqu’au fond des dunes pour chercher les carcasses des animaux qui seraient abattus! Il a également été mentionné que ces véhicules causaient moins de dommages au milieu que les phoques gris et que ces derniers étaient rendus jusqu’au fond des dunes, dans la forêt, près des étangs et que de nombreuses photos le prouvaient. On a demandé le dépôt des photos en question et je n’ai encore rien vu dans la documentation déposée.

23Zonage de l’Île Brion, Linda Saint-Michel, Ministère de l’Environnement, Direction du patrimoine écologique, mai 1988, p. 5 Algues, zone de débarquement plantes très vigoureuses sur la plage traces de phoques sur la plage

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17 J’ai moi-même visité ces lieux en 2015, en me rendant pour faire l’ évaluation du site incendié dont je fais le suivi et discuté avec les gens d’Attention Fragîles qui y vont régulièrement, dont à deux reprises cette année, car c’est le site de nidification du grèbe esclavon, espèces à statut précaire. Bien qu’on voie des traces de phoques à d’autres endroits sur la plage, nous n’avons observé aucune trace apparente dans les dunes fixées du site de la forêt-étangs. De mon côté, j’ai cependant observé des traces du passage d’humains dans ces milieux fragiles, mais ce n’était pas majeur et je n’ai pas fait d’analyse détaillée. La situation est sans doute différente en janvier de ce qu’elle est en été, mais il y a souvent fort peu de neige à cette période et les lichens (Cladonia) qui prennent des décennies à pousser, car ils sont le fruit d’une symbiose algue-champignon, sont gelés et excessivement fragiles à tout piétinement. C’est aussi un site bien couvert par l’Hudsonie tomenteuse, une plante susceptible d’être désignée menacée ou vulnérable au Québec24.

La zone de conservation éducative est bien présentée dans le document de Saint- Michel, de même que son accès contrôlé. On y mentionne que les aménagements devront être réduits au minimum et conçus en fonction des besoins sur le plan éducatif. Ainsi, nous avions par la suite aménagé des aires de circulation, apparaissant comme des tracés en rouge sur la carte DB3.2. Ces tracés sont aujourd’hui impraticables et le tracé qui part de Anthony’s Nose et monte vers la Butte de l’homme mort est le site du feu de 1994 où les arbres morts de la forêt rabougrie et mature ont laissé place à des étendues d’herbacées infranchissables.

Ces tracés utilisaient aussi les anciennes tranchées de la SAREP qui ont évolué en devenant plus touffues de végétation que la forêt environnante, elle-même en forte régénération suite aux ravages d’insectes. Ces phénomènes sont naturels et comme cette forêt boréale est justement peu sujette aux feux naturels à cause d’un fort taux d’humidité, elle donne lieu à des chablis et des épidémies d’insectes à partir d’une certaine étape de maturité. Ces forêts sont de plus bien entourées par des arbres rabougris, parfois très âgés, et permettant un effet déflecteur lors de grands vents, ce qui protège la forêt en entier. Cette forêt rabougrie était présente partout en bordure des forêts des Îles jadis et il n’en reste que quelques petits ilots. Son étude serait donc très pertinente pour observer les effets sur la forêt dans des sites à l’exposition semblable à l’île Brion et ailleurs aux Îles. Ce document décrit finalement la zone de conservation intégrale où l’accès est très limité aux seules fins de recherche scientifique et inventaires permettant de mieux connaitre ce territoire unique. Les critères de sensibilité, unicité, fragilité et rareté sont explicités pour ces choix. On y décrit finalement les sites sensibles et leurs caractéristiques.

24À ce sujet, le document DB8 de l’enquête 335 du BAPE sur les enjeux liés à l’implantation d’éoliennes dans un habitat floristique en dresse le portrait actuel au Québec.

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18 Ce zonage résulte d’analyses rigoureuses sur le terrain par plusieurs scientifiques spécialistes de ces questions, dont Grandtner et Mousseau25 notamment, qui ont effectué des recherches détaillées de ce milieu exceptionnel. La totalité de l’Île de l’est, la forêt, les dunes et les marais inclus dans cette zone sont de protection intégrale, comme on peut le voir sur la carte DB3.2. Or une des échoueries de phoque gris se situe sur l’Île de l’est (on la voit sur la page couverture de ce mémoire). Tout comme les dunes fixées du sud, ce secteur doit impérativement rester sous protection intégrale. Je l’ai parcouru avec quelques spécialistes ornithologues et botanistes, avant et au début de l’histoire de cette réserve et ai toujours eu l’impression d’altérer ce milieu, même en prenant le plus grand soin!

Il n’est pas facile de comprendre ces caractéristiques lorsqu’on est habitués à parcourir des parcs récréatifs. Pour avoir travaillé dans de tels parcs, je sais que l’approche est complètement différente. Ce statut de réserve écologique a pourtant été longuement réfléchi au départ, par plusieurs spécialistes. À ce sujet, un document de 4 pages (qui est peut-être un extrait d’un autre document que je n’ai pas retracé) sur l’intérêt et l’importance de l’Île Brion sur le plan de la conservation avait été produit par la Direction du patrimoine écologique du Ministère de l’Environnement vers 1985(non daté). On y explique très clairement pourquoi cette Île doit être une réserve écologique et non un parc et on mentionne les liens faits entre tous les ministères à ce sujet, à cette période. L’éloignement et l’isolement étaient des facteurs limitants pour un concept de parc, mais aussi d’autres facteurs écologiques. On conclue ce document en disant à propos de la Réserve écologique de l’Île-Brion, qu’ « il n’existe pas au Canada de réserve écologique qui rassemble autant de caractéristiques écologiques et d’habitats parmi lesquels se trouvent des habitats essentiels (sauvagine, oiseaux marins, espèces menacées ou rares) associés à l’environnement géologique, géographique, floristique, faunique et maritime de l’Est Canadien centré autour du golfe Saint-Laurent. »26

Malgré qu’on ne peut y accéder, il est donc primordial que l’on puisse retirer des enseignements du pourquoi de ces lieux sous protection intégrale, surtout sur un territoire comme les Îles. Si un secteur était accepté pour y effectuer une chasse temporaire de contrôle sur la plage du sud, on pourrait bien documenter l’échouerie de cette zone témoin que constituerait l’Île de l’est où il a d’ailleurs été dit par un chasseur que les phoques n’y avaient pas de petits et donc que la chasse n’y était pas justifiée ni demandée.

25Synthèse des données écologiques de l’Île Brion, Îles-de-la-Madeleine, Québec, Pierre Mousseau,Centre de recherches écologiques de Montréal, mai 1984

26Intérêt et l’importance de l’Île Brion sur le plan de la conservation, Direction du patrimoine écologique, Ministère de l’Environnement, p. 4 de ce document de 4 pages (non paginé)

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19

Les phoques gris …

Je dois dire que je suis régulièrement déçue du manque de rigueur qui entoure ce dossier et des chiffres qu’on envoie à la volée, autant du côté des journalistes que des intervenants locaux et parfois nationaux. On est devant une population de phoques gris qui, fortement décimée au 19e siècle, augmente constamment depuis 1960, moment où on a commencé à la suivre de plus près. L’on parle souvent de 500,000 voire 600,000 et même plus, de phoques dans le golfe (cela a d’ailleurs été dit au début des audiences), alors que les données scientifiques établissent l’entièreté de la population canadienne à 424,000 individus environ, dont 44,100 dans le golfe27. On a aussi mentionné, lors de la présentation de M. Gilbert, qu’il y avait 4383 phoques à l’Île Brion, dont 1463 chiots en 2016 et que ces derniers chiffres (chiots) avaient probablement doublé cette année (données non publiées). Les phoques gris utilisent toutes les plages de l’Île Brion (3 secteurs, dont deux à l’ouest et un sur l’Île de l’est). On a aussi mentionné que cette espèce était intelligente, n’aimait pas le dérangement, du fait de sa prédilection pour les territoires protégés un peu partout au Canada, dont le golfe. Le phoque gris est piscivore et a un fort impact sur le rétablissement de certaines populations de poissons, dont la morue, mais il est sans doute un peu opportuniste également, comme le sous-tendent les chasseurs et pêcheurs, lorsqu’ils mentionnent avoir vu de la prédation de homards rejetés à la mer et de jeunes oiseaux déposés sur l’eau!

De là à décimer les colonies d’oiseaux marins et les populations de homards de l’Île Brion comme il a été mentionné à quelques reprises, rien ne démontre cela et certainement pas les inventaires d’oiseaux faits par le SCF et les données de débarquements de homards. Mais il serait intéressant de poursuivre les études relativement à cette colonie de phoques bien accessibles et documenter tout ce qui peut l’être de façon rigoureuse et objective. Cela nous aiderait certainement à avoir des objectifs plus clairs dans la présente situation sur ce que l’on veut faire réellement :

1-s’agit-il de diminuer la nuisance causée localement aux engins des 40 pêcheurs qui utilisent le secteur de l’Île Brion?

2-veut-on alimenter de façon durable une industrie localement en ayant accès à cette ressource située à proximité et à d’autres territoires pour compléter ce besoin exprimé de 12 à 15,000 phoques annuellement pour l’usine de Total Océans?

3-veut-on diminuer cette population en pleine expansion dans le golfe et qui a un impact important sur les pêcheries dont celle de la morue au niveau des parasites (ver de la morue) et de son prélèvement?

27Selon l’avis scientifique de 2017 de Pêches et Océans canada, p. 3, apparaissant comme document DB11

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20 On pourrait avoir tendance à répondre qu’on veut faire tout ça, mais ce n’est pas très scientifique et dans le contexte de la réserve écologique de l’Île Brion, je crois qu’il faut avoir un objectif précis pour pouvoir bien en analyser les tenants et aboutissants. On a dit à plusieurs reprises aux audiences (Cédric Arseneau du MPO) que l’on aurait fort peu d’impact sinon pas du tout sur l’option 3 en ouvrant la chasse à l’Île Brion. Si l’on penche pour la question 2, on va effectivement diminuer la problématique #1, mais il va falloir bien suivre l’impact de ces prélèvements et agir de façon à limiter les dérangements pour le milieu bien sûr, mais les phoques aussi si on ne veut pas les voir décamper… ce qui règlerait l’option 1 cependant! Cette activité peut donc être éphémère dans l’histoire de l’Île Brion qui elle est protégée de façon pérenne et envers laquelle nous avons une responsabilité pour les générations futures! La solution proposée, s’il y en a une, devra donc l’être dans cette optique.

Il est intéressant de noter que s’il est bien une espèce qui « explose » en ce moment sur la planète, ce sont les humains. La cause de ce phénomène est en lien avec la problématique qui nous concerne : nous avons peu à peu éliminé tous les grands prédateurs qui nous menaçaient ou nous faisaient compétition, dont les requins, les orques épaulards, les bélugas, les ours polaires, les morses et bien d’autres qui étaient prédateurs de phoques. Maintenant, nous faisons face à un débalancement écosystémique et sommes quasi les seuls à pouvoir « contrôler » ces populations de pinnipèdes. La lecture récente d’un livre m’a démontré à quel point ce phénomène pouvait avoir des répercussions importantes. Chasse, biologie et valeur économique du marsouin blanc ou Béluga du fleuve et du golfe Saint-Laurent28 détaille les méthodes de chasse au béluga. J’en avais parlé au forum sur le phoque gris qui s’est tenu à Québec le 9 juin 2016 et auquel j’avais été invitée. On y mentionnait que les méthodes de chasse devaient être revues pour le phoque gris, notamment pour permettre la chasse en mer ou en bordure des côtes. Or ce livre fait état de diverses méthodes développées en mer au fil des années 1920-44 pour un mammifère marin qu’on considérait nuisible à cette époque dans le Saint- Laurent et pour lequel une prime était offerte. On le disait responsable de la diminution de certaines espèces de poissons, dont le saumon. Cette chasse, arrêtée en 1979 a eu les conséquences que l’on connait et cette espèce emblématique du Saint-Laurent est aujourd’hui en péril. Il a en été de même pour le morse et d’autres!

Certes, nos méthodes de gestion sont meilleures qu’elles étaient et les informations de Pêches et Océans aux audiences à ce sujet étaient fort éloquentes.

J’ai été membre du comité de suivi qui a fait suite au forum, particulièrement pour les aspects du plan d’action concernant l’Île Brion.

28Par Vadim-D Vladykov, Département des pêcheries, Québec, 1944, 191 p.

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21 Quand il est devenu évident que le statut de l’Île interdisait toute chasse, l’on m’a remerciée de ce comité. J’ai été impressionnée de voir comment l’industrie était bien présente autour de la commercialisation possible de ce produit et que les subventions les encourageaient à développer l’infrastructure de cette industrie. Je me sentais aussi interpelée par le plan d’action qui a été produit, particulièrement les points 6 c et d29 pour lesquels je m’attendais à ce qu’il y ait des liens avec le MDDELCC pour enfin débuter le suivi des colonies de phoques de l’Île Brion, l’étude de leur biologie et l’impact de leur présence sur ce territoire. J’ai souvent questionné les liens avec le MDDELCC et ce ministère devait assister à ce comité, mais n’y a jamais été du temps où j’en faisais partie. C’est dommage. Il est plus que temps de se parler et de faire les liens qui s’imposent entre ministères et divisions! Ce forum a aussi fait consensus sur l’aspect durable de cette industrie à développer et qu’il ne fallait pas tout faire en fonction des seuls besoins de l’industrie, mais aussi considérer d’autres aspects plus globaux. Il avait été clairement dit qu’on ne devait pas développer en fonction de l’Île Brion, où l’on a mentionné à un certain moment qu’on pourrait y abattre le quota de 60,000 phoques gris annuellement étant donné qu’ils se renouvelleraient à mesure. Il a été dit très clairement que le défi constituait à développer un cahier de bonnes pratiques et à redorer le blason de cette activité de chasse au niveau international. Il faut donc user de prudence!!

Rares sont les secteurs où de telles conditions « gagnantes » sont réunies : On a une industrie prête à utiliser plusieurs parties de l’animal et qui a certes tiré des leçons de l’expérience « Tamasu » qui a été amplement subventionnée, a causé bien des problématiques locales, notamment avec les résidus (peaux, carcasses) issus du traitement de cette huile et n’a pas survécu. On a une population dont la chasse au phoque a quasi toujours fait partie des traditions et qui a certes une bonne base de connaissances dû à cet historique malgré que les conditions de chasse (sur la glace vs sur terre) et le type d’animal (phoque du Groenland vs phoque gris) changent. On a des intervenants fédéraux qui suivent de près l’évolution de ces populations et tentent d’établir des quotas et des méthodes éthiques de chasse et des intervenants provinciaux (MAPAQ) qui encouragent et participent au développement de ce secteur. Je vous dirai que j’ai rarement vu surgir un plan d’action d’aussi belle façon et si rapidement que le 9 juin 2016! Et ce plan semble fort bien fait. On a une boucherie et un abattoir local que l’on optimise avec les phoques et qui aurait du mal à survivre sans cet apport; on a surtout un boucher local qui fait de la transformation impressionnante de ce produit, sans compter la promotion inhérente qui fait son chemin parmi les cuisiniers localement et ailleurs dans la province et sans doute plus loin!

29Document DB17 de la documentation déposée pour ce mandat du BAPE

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22 Et on a une des colonies de phoques en pleine croissance, à proximité dont l’une à l’île Brion, protégée de surcroit et donc susceptible d’assurer un « bassin de rétention » à une chasse que l’on veut durable!

Lors de ma participation au comité, on a parlé des chasses qui se faisaient à Pictou et ailleurs dans le golfe par les chasseurs des Îles. Il aurait été bien intéressant d’avoir ce portrait des prélèvements récents de phoques dans le golfe, le contexte qui entoure tout cela et de savoir ce qui a été accompli dans le plan d’action, de même qu’il aurait été pertinent d’avoir les résultats de l’étude entreprise au Corps mort sur plusieurs aspects biologiques et en lien avec les possibles contaminants dans cette espèce. Il semble très difficile d’avoir des données et rapports liés aux activités de chasse comme telle et c’est peut-être compréhensible vu la difficulté de cette entreprise et ses conditions de déploiement. Il eut certes été intéressant d’avoir des informations scientifiques et mémoires sur ces aspects de chasse, ses impacts, méthodes, déchets produits et leur traitement, etc., suite aux audiences. Il est bien difficile dans la situation actuelle d’entrevoir les impacts potentiels sur ce milieu exceptionnel.

J’aimerais toutefois revenir sur le contexte de la Réserve écologique de l’Île Brion. Il est très impressionnant de voir à quelle vitesse la colonie de phoques s’est installée sur le territoire. On a une réserve qui, dans l’optique de départ de protéger des espèces menacées, protège maintenant une espèce qu’on pourrait qualifier d’invasive et qui attire tout son lot de prédateurs avec elle. Les goélands, corneilles, renards et même coyotes, semble-t-il, sont bien présents pour utiliser les restes de carcasses et autres détritus laissés par les phoques. Il est primordial d’étudier tout cela dans la réserve écologique!

Les aires protégées et les espèces menacées…

Il faut oublier cet endroit comme site de nidification du pluvier siffleur en ce moment. Cette plage n’a d’ailleurs jamais été très propice à la nidification de cette espèce en péril que j’ai observée à deux reprises seulement et qui ne semblent pas alors avoir produit de jeunes. Mais dans le contexte d’une réserve écologique, cela ne veut pas dire qu’elle ne pourra pas le devenir. Des colonies de sternes impressionnantes nichaient dans ce secteur avant la formation de la réserve.

L’impact sur le grèbe esclavon est à étudier en fonction de l’utilisation de l’arrière plage par les phoques. Pour ce qui est des autres espèces à statut précaire, elles ne semblent pas être dans le territoire occupé par les phoques gris selon le document DB30. Il serait certes intéressant de vérifier leur présence, surtout que la mousse Rhytidiadelphus loreus (ébouriffe lanière) croit dans les forêts humides, ce qui est particulièrement et de plus en plus le cas sur Brion!

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