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Le pire des mondes possibles

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Géographie et cultures 

62 | 2007

La nature dans les villes du Sud

Le pire des mondes possibles

Catherine Fournet-Guérin

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/gc/2402 DOI : 10.4000/gc.2402

ISSN : 2267-6759 Éditeur

L’Harmattan Édition imprimée

Date de publication : 1 juillet 2007 Pagination : 132-134

ISBN : 978-2-296-05038-9 ISSN : 1165-0354 Référence électronique

Catherine Fournet-Guérin, « Le pire des mondes possibles », Géographie et cultures [En ligne], 62 | 2007, mis en ligne le 24 décembre 2012, consulté le 22 septembre 2020. URL : http://

journals.openedition.org/gc/2402 ; DOI : https://doi.org/10.4000/gc.2402 Ce document a été généré automatiquement le 22 septembre 2020.

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Le pire des mondes possibles

Catherine Fournet-Guérin

1 Le dernier ouvrage de Mike Davis1, célèbre géographe américain, s’avère déconcertant de prime abord, ne serait-ce qu’en raison des choix de traduction et de celui de la photographie de couverture, deux éléments qui d’emblée entraînent le lecteur sur de fausses pistes. En effet, le terme de slums a été traduit en français par bidonvilles, ce qui pourrait maladroitement faire croire à une réduction et à une simplification du sujet, alors que Davis aborde en fait l’ensemble des lieux de concentration de pauvreté urbaine dans les pays en développement ; par ailleurs, le gros plan sur une favela de Rio de Janeiro en couverture semble sacrifier au mythe de la ville monstrueuse et tentaculaire. Or l’objectif de l’auteur n’est pas de critiquer a priori l’urbanisation, mais de dénoncer vigoureusement les très nombreuses difficultés auxquelles sont confrontés les citadins pauvres.

2 Ce livre n’en constitue pas moins un objet très original et qui vise délibérément à choquer ses lecteurs. Il s’agit bien d’un ouvrage scientifique, comme l’atteste par exemple une bibliographie extraordinairement riche qui constitue une mine pour toute personne intéressée par les villes des pays en dévelppement, mais qui comporte également les caractéristiques d’un essai polémique et engagé, ce qui en rend la lecture stimulante. Le lecteur tantôt partage les indignations de l’auteur dénonçant les injustices multiples dont sont victimes les citadins pauvres, tantôt s’emporte contre le caractère outré de certaines remarques, contre des métaphores douteuses (« amibe géante » pour désigner Mexico) ou encore peut être dérouté par un style très provocateur, à l’instar du titre d’une partie intitulée « Vivre dans la merde ».

3 Le lecteur curieux des questions sociales dans les villes du Sud trouvera dans ce livre une matière extrêmement dense, des réflexions pluridisciplinaires passionnantes (écologie urbaine, économie du foncier, rôle du politique à différentes échelles), des thèmes rarement abordés en géographie urbaine comme celui des accidents de la route ou des contraintes pesant sur tous les aspects de la vie intime, ainsi qu’une quantité impressionnante d’exemples très précis susceptibles de constituer une matière pour illustrer des cours. L’apport est donc à la fois intellectuel et très concret.

Le pire des mondes possibles

Géographie et cultures, 62 | 2007

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4 L’ouvrage s’organise en huit chapitres abordant chacun un aspect de la vie des pauvres en ville. Les deux premiers présentent un panorama global de la situation ainsi qu’une typologie fine des slums, avec quantité de données statistiques utiles ; c’est aussi dans ce premier chapitre qu’on trouve des généralisations hâtives, des jugements de valeur contestables et des clichés (« une mer » de bidonvilles entourant la ville). Le troisième chapitre est consacré aux responsabilités des États dans l’abandon des quartiers pauvres, dans le contrôle ou non de l’exode rural, tandis que le chapitre 4 fustige le rôle dévastateur des acteurs internationaux que sont tant la Banque mondiale que les grandes ONG, dont l’action bien pensante est ici vigoureusement dénoncée. Dans ces deux chapitres sont longuement traitées la vulnérabilité des locataires et les conditions d’exploitation des habitants (internes, par les pouvoirs publics…). Les pratiques d’expulsion et de violences à l’encontre des slums font l’objet du chapitre 5, dans lequel sont également abordés les motivations et les conséquences d’opérations d’aménagement (éviction pour la tenue des Jeux olympiques par exemple) ; en contrepoint sont évoqués les quartiers sécurisés fermés, ces off worlds qui s’isolent par crainte de la proximité avec les slums. Le chapitre 6 consacré à l’écologie du bidonville frappera sans doute beaucoup le lecteur par la crudité et le réalisme de ses descriptions : surexposition aux aléas naturels, mortalité infantile, évocation des pathologies urbaines, et bien sûr question du devenir des eaux usées et de l’accès aux toilettes, thème qui hante Mike Davis et qui donne lieu à des pages qui restent en mémoire. Le chapitre 7 revient sur les plans d’ajustement structurel et sur leurs conséquences sur les citadins pauvres. Enfin, le chapitre 8 s’attarde longuement sur le thème du secteur informel, tout en soulignant la nécessité de ne pas céder au mythe facile de la débrouillardise. Pour justifier cette position, des pages sont consacrées au travail des enfants. L’ouvrage se termine sur une vision très pessimiste, fondée sur une analyse de polémologie urbaine qui s’avère sans doute la moins convaincante du livre et la plus discutable (mise en parallèle du terrorisme urbain, de la pauvreté et des nouvelles stratégies militaires américaines).

5 Le pire des mondes possibles est en fait un ouvrage qui défend passionnément la cause des citadins pauvres, contrairement au présupposé que son titre français laisse entendre.

C’est un livre frappant, par moment irritant par son ton excessif, mais dont la lecture s’avère très enrichissante. Même si de nombreux arguments prêtent à discussion et si des thèmes permettant de développer une approche plus optimiste ont été négligés (comme la vie quotidienne dans les slums, ses lieux de loisirs, ses réseaux de sociabilité…), Davis ne laisse jamais son lecteur indifférent.

NOTES

1. . Mike Davis, 2006, Le pire des mondes possibles. De l'explosion urbaine au bidonville global, Paris, La Découverte, 249 p.

Le pire des mondes possibles

Géographie et cultures, 62 | 2007

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AUTEUR

CATHERINE FOURNET-GUÉRIN

EA Habiter – université de Reims – ENeC-UMR 8185 catherine-guerin@wanadoo.fr

Le pire des mondes possibles

Géographie et cultures, 62 | 2007

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