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Et bailler... Et dormir...

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Et bailler... Et dormir...

Qui, de nos jours, sait encore bâiller de tout son cœur, à s'en décrocher la mâchoire ? Je ne parle pas du vague bâillement gêné, retenu, pudiquement caché par la main et qu'il faut réprimer aussi vite qu'on le peut. Non, je parle du bâillement plein, profond, qui vient du tréfonds de son être, celui qu'on observe avec joie et intérêt chez le lion, le tigre, ou tout simplement chez le chien ou le chat. Pourquoi donc est-ce une jouissance de voir le minet ou le bébé bâiller à cœur joie, s'abandonner à ce bâillement long, voluptueux, le plus souvent doublé d'un étirement de tout le corps ? N'est-ce pas une parcelle du paradis perdu que nous retrouvons là ? Et combien l'animal ou le petit enfant ont l'air heureux après un tel bâillement qui précède soit un sommeil profond et paisible, soit, au contraire, qui évçille et permet de se consacrer tout entier, tout neuf, en pleine conscience/ au monde qui les entoure.

Car, voyez-vous, c'est bien cela qu'induit le vrai bâillement qui fait respirer profondément et relaxe, qui nous endort ou nous réveille, selon le cas et selon les besoins de l'organisme à ce moment précis. Et, parce que bâiller est la forme originelle de la respiration profonde et l'étirement celle de la relaxation, cela mérite bien qu'on s'y attarde.

si on essayait

Je vous propose d'imiter de notre mieux ce bâillement. Ouvrons la bouche et la gorge aussi largement que faire se peut et même au-delà, comme s'il fallait avaler tout rond un œuf d'autruche ! Sentez-vous comme la voûte du palais se soulève et comme la luette est « aspirée

» vers le haut ? La gorge s'ouvre toute grande, toute ronde et nous la gardons ainsi longtemps, avec force, en inspirant un Ah ! silencieux. Nous rejetons l'air avec des ha ! ha ! ha ! — toujours en gardant la bouche grande ouverte — et nous répétons tout ce manège jusqu'à ce qu'une incitation spontanée survienne et qu'il ne soit plus possible de fermer la bouche délibérément. Oui, il faut attendre jusqu'à ce qu'elle se referme toute seule, jusqu'à ce que « cela » ait fini de bâiller. Cela vous semble un peu risible ? Peut-être et pourtant ce ne l'est pas du tout. Car c'est grâce à ce bâillement que nous réactivons notre potentiel de respiration profonde.

était-ce vraiment réussi ?

Commencez par vous demander si l'essai était vraiment réussi et si vous n'êtes pas demeuré à un simple début.

En bâillant ainsi de tout votre soûl, des larmes ont-elles surgi ? Avez-vous éprouvé le besoin de vous moucher ? Vous êtes-vous senti heureux et avez-vous ressenti une bonne chaleur dans tout le corps ? Si oui, tout cela vous indique que vos glandes, vos vaisseaux sanguins, vos muqueuses et tout votre système végétatif s'est mis en action et a été solidement stimulé ! Avez-vous aussi ressenti combien les joues se sont ouvertes et comme l'impulsion s'est propagée aux membres de telle façon que les bras, les jambes et le tronc se sont ouverts tout comme les joues et la gorge ? Avez-vous pu inspirer si totalement que toute la base du tronc s'est épanouie, c'est-à-dire la taille, la partie dorsale du bassin, les flancs et le ventre sous le nombril ? Oui, notre façon de bâiller est le meilleur test d'aptitude à la vraie respiration profonde ! Je suppose que, chez la plupart de ceux qui en auront fait l'essai, il ne se sera pas produit cette respiration qui traverse tout, comme décrit ci-dessus.

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pourquoi cela ne « marche-t-il » pas ?

Mais pour quelle raison le bâillement reste-t-il souvent si superficiel, si insignifiant ? Où reste ce grand bâillement du chat et du nouveau-né ? Oui, où reste-t-il ? Il demeure embourbé dans nos contractures, dans nos tensions. Ce sont nos tensions inopportunes, nos dystonies acquises qui le retiennent, qui ne lui donnent pas l'occasion de se développer, de s'épanouir. N'auriez- vous pas, par hasard, l'habitude de serrer les dents sans le savoir ? Les muscles des joues, des mâchoires, du bout du menton sont-ils tendus ? Avez-vous l'habitude de garder les épaules hautes ? Aimeriez-vous, par hasard, serrer les avant-bras contre la poitrine ? Tout ceci, ainsi que tant d'autres attitudes incorrectes, freinent la respiration libre et aisée et inhibent les réflexes respiratoires corrects. Tant de gens sont tendus au point de ne plus pouvoir se rappeler avoir jamais bâillé. Pour tant de gens, bâiller est tabou, à cause de leur éducation-modèle qui leur a interdit et désappris le bâillement.

Bien sûr, il n'est pas indiqué de bâiller ainsi en présence d'autres personnes. D'ailleurs, quand nous aurons dissous ces tensions inopportunes, quand nous aurons récupéré la respiration libre, pleine et entière, alors il ne sera plus nécessaire de répéter si souvent ce phénomène naturel qu'est le bâillement.

le bâillement régulateur

La règle serait de ne bâiller spontanément qu'au coucher, au réveil ainsi qu'à la pause de la mi- journée. Dans ces cas, le bâillement sert de régulateur des fonctions principales tandis que l'étirement efface tant les surtensions que les sous-tensions des tissus pour y rétablir le tonus correct et entretenir la respiration spontanée idéale. (Je reviendrai plus loin sur la façon correcte de bien s'étirer). Ce que nous voulons d'abord, c'est apprendre, grâce à la façon dont se déroule notre bâillement, comment nous respirons.

En effet, que le bâillement trouve son origine dans le besoin de respirer profondément et de s'étirer, découle de ce que nous venons de voir. Sont d'abord étirés au moins les muscles du visage mais, pendant un vrai bâillement, ce sont tous les muscles du tronc qui s'ouvrent, du bassin jusqu'à la gorge et même jusqu'au nez. Nous laisserons les spécialistes se préoccuper de l'aspect scientifique du bâillement surcharge du sang en CO2 et autres déchets, ainsi que les processus nerveux et chimiques qui participent au bâillement — ce qui nous intéresse, ce sont les aspects pratiques.

Maintenant, réprimez un bâillement et observez comme l'air se presse dans ce cas contre la partie supérieure du thorax. La plupart des gens se satisfont de cette impression et croient respirer suffisamment, avoir bien soupiré ou bien bâillé. Ils ne se doutent pas que cette respiration haute, courte et retenue, provoque bien des désordres organiques. Observez attentivement comment l'animal, le petit enfant et l'adulte «primitif» dont le souffle n'est pas encore perturbé, se remplissent tout le ventre, y compris les flancs et le dos, comment tout cela s'élargit, s'emplit par la seule magie du souffle ! Et que ceci ne si- produit pas seulement lors du bâillement mais à chaque mouvement respiratoire.

la vraie respiration

La vraie respiration ne consiste pas à aspirer l ' a i r avec force, mais bien par un mouvement subtil de succion légère, à laquelle participent non seulement le nez et la gorge, mais l'ensemble du thorax et même de la tête, en un mouvement qui se crée de l'espace sans effort.

Chez la plupart des gens, des civilisés s'entend, la partie inférieure du tronc, la « base respiratoire

», demeure soit bloquée, rigidifié, soit avachie et lente. Dans les deux cas, les dernières côtes

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et le fond du bassin, donc ce qui constitue justement la base réelle de la vraie respiration, ne participent ni au bâillement, ni à l'acte respiratoire. Voilà pourquoi le thorax et l'espace pulmonaire ne se mettent en mouvement que lentement et de manière saccadée et ignorent ce mouvement ample et libre de la respiration naturelle.

libérer les « soupapes

Toutefois, pour libérer la base du tronc en vue du mouvement et de la respiration, il faut d'abord débloquer les « soupapes » du corps. La première de ces soupapes ce sont les sphincters de la base du tronc (région du muladhara) qui sont souvent contractures. Ces sphincters, c'est bien connu, réagissent les premiers en cas de grande frayeur, par exemple. Faites donc mulabandha, c'est-à-dire contractez les sphincters de l'anus, et observez combien leur contraction limite le souffle. Si ces sphincters demeurent contractures en permanence, de façon inconsciente, ils empêchent la respiration pleine et entière, libre et vivifiante. Et un bâillement vrai, profond, prolongé jusqu'à saturation devient impossible dans cet état de tension du diaphragme pelvien, c'est-à-dire de la base du tronc. En même temps, observons l'autre pôle du corps, la tête, où se trouvent deux autres soupapes : le nez et la gorge. Observez-vous : sentez-vous, comme cela a été décrit plus haut, que la gorge est bien ronde et avez-vous l'impression qu'elle est très large, même avec la bouche close et pouvez-vous faire un grand ââ, et non un K avorté et comprimé ?

Et le nez ? Observez comme, chez la plupart des gens, les côtés et les ailes du nez sont immobiles, figés. Essayez maintenant de laisser s'ouvrir les côtés du nez ainsi que les muqueuses, comme si vous vouliez humer quelque chose avec un maximum d'attention et d'intensité : aussitôt les narines s'ouvrent. Et si, maintenant et simultanément, vous pensez à libérer, à détendre les sphincters de la base du corps, vous observerez à quel point l'espace respiratoire s'amplifie dans le haut comme dans le bas et sans effort. Bien sûr, tout cela suppose que les vêtements (ceintures, soutiens-gorge, par exemple) n'empêchent pas mécaniquement ce mouvement libre et naturel. Quand le nez est souple et s'ouvre bien spontanément, le souffle est ressenti jusque dans le cerveau. Par contre, quand le nez est rétréci, serré, quand les muqueuses sont bloquées, la respiration est sifflante, bruyante. Entre ces deux éventualités, il y a le cas d'un espace nez-gorge atone, affaibli, ce qui provoque souvent le ronflement pendant le sommeil. Il est encore plus favorable de ressentir que le nez et la gorge sont très ouverts, même en gardant les lèvres closes, afin d'ouvrir et de desserrer, par voie réflexe, la base du corps et ses sphincters.

n'oublions pas la bouche

Pour la perception vivante du souffle, la relaxation des lèvres est indispensable. Les lèvres doivent se toucher en douceur, ne pas être serrées, pincées, pendant que nous inspirons et expirons librement, sans bruit. De même, les dents ne doivent pas être serrées mais légèrement détachées. N'oublions pas la langue : repose-t-elle au fond de la bouche comme si elle était posée sur un plat ! Ou, au contraire, « navigue-t-elle » quelque part entre la mâchoire supérieure et l'inférieure ? Ou se presse-t-elle contre le palais et y demeure-t-elle suspendue comme une chauve-souris ? Si c'est le cas, poussez la langue le plus loin possible devant vous, puis ramenez- en lentement le bord vers le menton ! Constatez-vous combien les joues s'étirent ? La gorge est-elle bien ronde et ouverte ?

Vous souvenez-vous de notre première expérience de bâillement ? Fort bien. Maintenant, rentrez la langue, sans refermer la bouche, et essayez de la ramener aussi loin que possible vers l'arrière-gorge, comme si vous alliez l'avaler. Sentez-vous comme la luette est attirée vers le haut, comme le palais se voûte en coupole et comme le fond de la bouche s'affaisse ? Ceci est une magnifique préparation au vrai bâillement et, chez de nombreuses personnes, pendant ce jeu avec la langue, le réflexe du bâillement se déclenche tout seul. Je répète : il est indispensable que la bouche reste ouverte jusqu'à ce que « cela » ouvre à fond tous les espaces depuis la base

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jusqu'aux joues et qu'on ait bâillé à fond, jusqu'à « plus soif ».

Mais si ce bel étirement et cette relaxation ne se sont pas produits, après avoir étiré la langue vers l'avant puis retirée vers l'arrière, laissez-la retomber où et comment elle le veut. Et observez où elle repose maintenant. Etirez-vous aussi fort, aussi souvent et aussi longtemps qu'il le faudra jusqu'à ce que la langue se dépose d'elle-même, apaisée, au fond de la bouche, où elle pourra se reposer comme un chaton qui ronronne dans son panier.

Si, lors de bâillements ordinaires, vous ressentez de minimes incitations qui vous font rebâiller sans pouvoir vous arrêter, vous saurez que toutes les crispations et toutes les dystonies de votre organisme n'ont pas encore disparu. Lors de ces faibles impulsions au bâillement on ne parvient pas à cette bienfaisante relaxation qui fait perler des larmes au coin de l'œil et réchauffe tout le corps, ni non plus à cette libération du souffle et à l'harmonisation de toutes les énergies pour poursuivre la tâche, de même qu'au repos paisible qui précède le vrai sommeil profond et réparateur. Un tel minibâillement n'est que l'ombre du vrai bâillement.

la suspension spontanée du souffle

Abordons maintenant un aspect essentiel que vous pouvez observer par vous-même : il est caractéristique de l'authentique bâillement naturel en ce sens qu'il implique une inspiration puis une expiration assez superficielles et qu'entre les deux phases s'installe une suspension spontanée du souffle dans la position hâ de la bouche et de la gorge — accompagnée de l'action réflexe mentionnée ci-dessus — tandis que la base s'élargit et que les muscles des joues et les autres muscles du masque demeurent fortement étirés.

Cet arrêt du souffle ou ce silence respiratoire — la cessation spontanée des mouvements respiratoires — est souvent déconseillé en Occident, sous prétexte qu'il serait dangereux. Et, à première vue, pas tout à fait à tort. En effet, la rétention du souffle par la force, la course à la durée à l'aide du chronomètre, comme cela se fait parfois, loin de détendre le corps y crée des contractures néfastes.

Maintenant, prenons un minimum d'air, une « gorgée », et attendons calmement, en écoutant notre corps ; viendra le moment où spontanément l'air entrera en nous. Nous découvrons ainsi ce qui, pour l'Occidental, est l'exercice préparatoire le plus inoffensif à la suspension du souffle, laquelle est indispensable pendant la méditation yogique ou le zazen, car cela constitue une partie essentielle de la respiration dite « spirituelle ».

Comparons ceci avec les paroles du maître Zen Awa, dans le livre de Herrigel Le Zen, ou l'Art chevaleresque du Tir à l'Arc : « L'inspiration lie et relie, mais c'est dans l'arrêt du souffle que se produisent les choses justes ».

Dans l'état de méditation profonde, pendant le « souffle de l'esprit », la suspension du souffle se produit d'elle-même, et vous vous êtes aperçu que la même chose arrive quand on bâille vraiment à fond et qu'elle s'installe entre une inspiration et une expiration peu profondes. C'est pendant cette phase intermédiaire qu'a lieu la mise hors circuit du travail de l'intellect et, ici aussi, nous remarquons la parenté entre le grand bâillement et la suspension du souffle, le vide plus ou moins long qui apparaît dans l'état de méditation, le nommé kevala kumbhaka du yoga.

N'est-ce pas ici comme ailleurs que nous découvrons dans des processus naturels les lois spirituelles correspondantes et que nous en devenons conscients ?

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les résultats psychosomatiques

Ne considérons ici que l'effet psychosomatique le pins simple des suspensions spontanées du souffle : les processus autonomes du corps — modifications chimiques dues à la respiration, le métabolisme, les fonctions glandulaires, etc. — sont activés, le mental se calme, l'esprit devient clair et lucide. Tout ceci, un observateur attentif et sensible le remarquera sans peine.

Observons encore le chien, le chat ou tout autre félin, ainsi que le jeune enfant et admirons leur magnifique souplesse, la liberté de leurs mouvements et leur paix dans le repos. En vérifiant, comme indiqué plus haut, si vos propres « soupapes » sont libérées, si les muscles de la langue, des joues et du visage sont bien détendus, il vous sera évident que cette relaxation partielle ne devient authentique et ne se répercute sur le souffle que si vous êtes totalement traversé par le courant vital dans tout le corps et l'esprit, si vous êtes totalement abandonné.

Découvrir, puis désapprendre les attitudes psychiques ou les tensions inopportunes dans le corps est une question d'auto-observation et d'auto-éducation qui peut parfois requérir une aide compétente. Néanmoins, si vous avez retrouvé le vrai bâillement, celui qui vous ouvre l'espace à la base du tronc, dans ce cas vous êtes déjà bien libéré et, dans la mesure où vous atteignez un meilleur équilibre physique et psychique, vous êtes déjà un être humain plus heureux, car savoir vraiment bâiller est réellement un test respiratoire et relaxatoire. La liberté plus grande du souffle est aussi l'indice d'une vie plus profonde, plus pleine, plus riche.

Quant à moi, en l'écrivant, hââ, j'en bâille. Et vous ? Bonsoir !

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