• Aucun résultat trouvé

Les rivières et les fleuves acheminent vers l océan l eau, précieux liquide né de l interaction. Rivières et fleuves : changement global

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Les rivières et les fleuves acheminent vers l océan l eau, précieux liquide né de l interaction. Rivières et fleuves : changement global"

Copied!
8
0
0

Texte intégral

(1)

64

rivières et fleuves : acteurs de la dynamique planétaire et du changement global

Jérôme Gaillardet

Laboratoire de géochimie-cosmochimie Institut de physique du globe de Paris Université Paris 7

gaillardet@ipgp.jussieu.fr Christian France-Lanord

Centre de recherches pétrographiques et géochimiques (CRPG)

CNRS, UPR-2300 cfl@crpg.cnrs-nancy.fr

Les fleuves intègrent les processus d’interaction qui se produisent entre la lithosphère, la biosphère et l’atmosphère, à des échelles allant de la parcelle au continent.

Les étudier permet de mettre en évidence des couplages entre la dynamique interne et externe de

notre planète et de construire des modèles d’évolution du climat

à longue échelle de temps.

Les surveiller est indispensable dans le contexte du changement

planétaire dans lequel

l’humanité est entrée. Rivières et fleuves :

acteurs de la dynamique

planétaire et du

changement global

co up la ge cl im at iq ue Les fleuves, drains des continents

L

es rivières et les fleuves acheminent vers l’océan l’eau, précieux liquide né de l’interac- tion de l’atmosphère, de la biosphère et de la lithosphère. Mais ce volume de 37 400 km3 annuellement apporté aux océans n’est pas de l’eau pure car elle véhicule des matières dissoutes, des particules organiques et minérales en suspension, ou des sables. Si la plupart des rivières françaises sont plutôt limpides, il n’en est pas de même dans la chaîne himalayenne, où les rivières sont brunies par une charge sédimentaire dépassant facilement le gramme par litre, ni dans les grandes forêts boréales et tropicales humides où les rivières sont noires à cause de la présence de matière organique dissoute (figure 1).

La composition minéralogique et chimique des fleuves et rivières est désormais bien identifiée. La boue et les sables des fleuves sont constitués de minéraux primaires, d’ar- giles et d’oxy-hydroxydes de fer, de composés organiques et parfois de calcaire arrachés aux reliefs ou aux sols. Les substances dissoutes dans l’eau proviennent de la pluie qui, en lessivant les aérosols atmosphériques, se charge en éléments dissous, et surtout des interactions chimiques entre l’eau des sols et les roches. Depuis peu, l’influence des acti- vités humaines sur la phase dissoute des rivières est visible et, dans certains cas dominante, pour les rivières des zones les plus peuplées d’Europe ou d’Amérique du Nord, Image Landsat du delta du Gange.

Landsat image of the Ganges delta.

© http://earthasart.gsfc.nasa.gov/images/ganges.jpg

(2)

ou pour certains éléments chimiques comme les métaux, l’azote ou le soufre [Meybeck (2003)].

À l’exception de régions très industrialisées ou arides, la composition chimique des rivières est d’abord détermi- née par la nature des roches qu’elles drainent. La présence de calcaire ou d’évaporites influence nettement la qualité chimique des eaux de rivière dès lors qu’elles affleurent dans un bassin versant, [Négrel et al. (1993)].

À quelle vitesse nos continents disparaissent-ils ?

Les plus grands fleuves sont surveillés pour suivre l’évo- lution de leur débit et de la quantité de matériaux qu’ils charrient. Dans la plupart des cas, la charge dissoute est mineure par rapport à la charge sédimentaire, et le trans- port de matière sous forme solide reste le mode dominant. La minéralisation des fleuves est faible par rapport à celle de l’eau de mer (35 g/l) et dépasse rare- ment le gramme par litre. La moyenne mondiale de la salinité des plus grands fleuves est de 100 à 150 mg/l. La charge sédimentaire varie selon les régions et leur régime hydrique : les plus fortes concentrations sont mesurées dans les fleuves et rivières drainant des chaî- nes de montagnes actives. Alors que les teneurs en sédiments avoisinent les quelques milligrammes de matière par litre dans la Loire ou la Seine, des teneurs supérieures au gramme par litre sont courantes dans le Gange, le Brahmapoutre ou les rivières drainant les îles volcaniques. En Chine, le fleuve Jaune constitue une exception (plusieurs dizaines de gramme par litre) car il draine des couches géologiques très friables où la défo- restation a exacerbé l’érosion. Dans la plupart des grands systèmes, tous les sédiments arrachés aux zones où l’éro- sion est la plus active n’atteignent pas la mer mais sédimentent dans les plaines d’inondation.

Une collaboration franco-brésilienne, menée en France par l’IRD a permis de montrer que pour le Rio Madeira, un des affluents de l’Amazone, 2/3 des sédiments qui sont arra- chés aux reliefs dans les zones amont du bassin sédimentent dans la plaine amazonienne. Le temps de

Fig. 1 : Delta du fleuve Mackenzie dans l’océan arctique. Cette image, prise de l’espace, montre la dispersion des sédiments en suspension et des sables charriés sur le fond du fleuve dans l’océan.

Fig. 1: The Mackenzie River delta in the Artic Ocean. The image, taken from space, shows the dispersion of suspended sediments and sand swept along the river bed in the ocean.

© NASA

:!)2% /" 9%.)33%) :!-"%3% !-/52 ,%.! -522!9$!2,).' 0!2!.! 3!).,!52%.4 -!#+%.:)% #/,5-")! ,)-0/0/ 95+/. 4/#!.4).3 &2!3%2 /2b./15% -)33)33)00) 3(!4%,ß!2!" !-!:/.% 8)*)!.' -%+/.' ).$53 #(!.'*)!.' 2(Î.%'!.'%3 )22!7!$9 "2!(-!0/542% -!'$!,%.! (/.'ß(%

.!2-!$!(5!.'(%

0

Dénudation physique

DmNUDATIONßPHYSIQUEßETßCHIMIQUEßDESßRELIEFSßPARßGRANDSßBASSINSßHYDROGRAPHIQUES ENßTKMßAN

Dénudation chimique

.),

.)'%2

+/,)-!

Fig. 2 : Flux spécifiques d’érosion et d’altération chimique des soixante plus grands fleuves de la planète.

Malgré une grande diversité des vitesses d’érosion et d’altération, le mode d’érosion dominant actuel est l’érosion mécanique.

Fig. 2: Specific erosion and chemical weathering fluxes for the planet’s sixty largest rivers.

Despite highly variable erosion and weathering rates, the erosion mode that currently predominates is mechanical erosion.

© J. Gaillardet, 2006.

résidence moyen des sédiments en suspension dans les grands systèmes fluviaux est mal connu. Des bilans de transport et des méthodes géochimiques par l’utilisation d’isotopes permettent de l’approcher. Pour l’Amazone, le temps de résidence moyen des sédiments dans le bassin est de l’ordre de 15 000 ans. Ce paramètre détermine la vitesse à laquelle le flux de sédiment des fleuves répond à des sollicitations externes, climatiques, tectoniques ou anthropiques en période de climat interglaciaire analogue à l’actuel. Malgré ces incertitudes, les quantités de sédi- ments charriés et les débits moyens peuvent être combinés pour calculer des flux de matière solide ou dis- soute aux océans. L’ensemble permet de calculer que le flux global de sédiments apportés à l’océan avoisine les 20 milliards de tonnes par an. Les flux spécifiques de la dénudation physique et chimique des grands bassins sont comparés sur l’histogramme de la figure 2.

65

Géosciences numéro 9 avril 2009

(3)

66

En moyenne, le rapport des flux d’érosion mécanique sur les flux d’érosion chimique est de 10, rapport qui n’est sans doute pas resté constant dans l’histoire géologique car il est lié à l’existence de la chaîne himalayenne.

En utilisant une densité moyenne des continents égale à 2,7, on peut exprimer la vitesse d’érosion totale pour les grands bassins versants et d’autres régions plus localisées (figure 3). Les régions où le relief est impor- tant connaissent la vitesse d’érosion la plus grande. De petites régions dans des contextes tectoniques ou vol- caniques très actifs, comme Taiwan ou les îles volcaniques, peuvent avoir des vitesses d’érosion consi- dérables. Des précipitations importantes, des pentes fortes et une tectonique active y maintiennent un régime d’altération et d’érosion important. Lorsque ces zones sont prises en compte, le chiffre global de l’éro- sion terrestre avoisinerait les 100-150 mm / 1 000 ans.

L’érosion est un acteur majeur du cycle géologique.

L’altération et l’érosion créatrices

L’érosion des roches n’est pas seulement un moyen de détruire les reliefs. C’est aussi un des mécanismes régu- lateurs de la composition de l’atmosphère et des océans.

Pour comprendre cela, il faut rentrer dans l’intimité des réactions chimiques qui se produisent lorsque l’eau entre au contact avec les minéraux, et envisager le cycle du car- bone à l’échelle globale. Dans les sols, la majorité des réactions d’altération sont des hydrolyses favorisées par l’acidité. Dans la nature, cette acidité dérive du CO2 atmosphérique et est produite par dissolution directe ou par décomposition de la matière organique des sols.

L’altération des minéraux peut donc être considérée comme une réaction de neutralisation de l’acidité du CO2 par les bases des roches. En consommant du CO2 atmos- phérique, l’altération des roches libère des ions ou molécules (les éléments les plus solubles, comme les ions Na+, K+, Ca++, Mg++, SiO2), de l’alcalinité (essentiellement l’ion HCO3-) et participe à la néoformation de minéraux secondaires à partir des ions les moins solubles (Al3+, Fe3+) – cf. article Ricordel-Prognon et al. dans ce numéro. Dans l’océan, sursaturé vis-à-vis de la calcite, cette alcalinité et les ions calcium se combinent sous forme de calcaire (précipité par les êtres vivants à coquilles et tests carbo- natés). Le CO2 initialement atmosphérique est ainsi transformé en calcaire où il peut être stocké pour des cen- taines de millions d’années. L’altération des roches suivie

Fig. 3 : Vitesse de dénudation totale (physique et chimique) des continents (de densité moyenne 2,7) calculée pour les grands bassins fluviaux.

Les records de vitesse d’érosion sont atteints pour les bassins de chaîne active si l’on excepte le Huang He, évidemment très impacté par les activités humaines.

Localement, des vitesses de dénudation totale plus importantes peuvent être atteintes, dépassant les 4 mm par an (ou 4 m par millénaire) !

Fig. 3: Total denudation rate (physical and chemical) on continents (average density 2.7) calculated for the great river basins. Record erosion rates are attained in the basins associated with active chains, with the exception of the Huang He, where human activity is obviously a governing factor. Locally, even higher total denudation rates may occur, exceeding 4 mm per year (or 4 m per 1000 year period)!

© J. Gaillardet, 2006

(4)

67

Géosciences numéro 9 avril 2009

streams and rivers: important players in planetary dynamics and global change

de la précipitation des calcaires est donc un moyen dont dispose la planète pour séquestrer le carbone sous la forme de carbonates. Une altération plus vigoureuse, pour des raisons géologiques, climatiques ou anthropi- ques doit inévitablement conduire à une précipitation de calcaire dans l’océan tant que son degré de sursaturation vis-à-vis de la calcite est maintenu. Ce mécanisme laisse envisager la possibilité d’une régulation de la teneur en CO2 et du forçage climatique qui lui est lié.

La séquestration du carbone atmosphérique n’est pas seulement possible grâce à la formation de calcaires dans les océans. Pour agir sur les teneurs en CO2 atmosphérique, l’érosion peut également séquestrer du carbone sous forme de matière organique dans les sédiments marins. Des études sur le système hima- layen montrent que, même si les teneurs en carbone organique dans les sédiments charriés par les fleuves Gange et Brahmapoutre sont faibles (de 0,1 à 0,8 %, cf. encadré), les quantités annuelles de sédiments exportés (de 1 à 2 milliards de tonnes) sont telles que

Les sédiments des grands fleuves ne sont pas distribués de façon homogène dans la tranche d’eau, qui dans l’Ama- zone peut atteindre une centaine de mètres de profondeur.

Les plus grandes rivières peuvent être scrutées à l’aide d’un courantomètre acoustique profileur appelé ADCP (ci- dessous une section du Gange au Bengladesh), qui permet de mesurer des débits instantanés mais aussi de carto- graphier les zones maximales de vitesse et la turbidité.

1 Acoustic doppler curent profiler.

Des prélèvements le long de profils verticaux de vitesse permettent d’échantillonner toute la gamme de taille de grains que transportent des fleuves. Ceci est illustré ici pour le Gange par les relations entre la concentration en carbone organique particulaire et le rapport Al/Si, qui est un indice de la proportion relative d’argiles (particules fines) et de sables (particules grossières). n

> Le fleuve, une machine à trier les minéraux

le flux de carbone organique apporté à l’océan dépasse de dix fois le flux de carbone sous forme d’ion HCO3- issu de l’altération des silicates continentaux et effectivement précipité en carbonates [Galy et al.

(2007)]. L’efficacité de cette séquestration est contrée par la minéralisation de la matière organique qui a lieu tout au long du transport. Elle reste un enjeu de recherche sur la plupart des grands systèmes d’éro- sion mais il est clair que les systèmes les plus actifs du point de vue de l’érosion physique seront ceux qui per- mettront la plus grande préservation de carbone organique en l’enfouissant rapidement et en le sous- trayant de l’action destructrice de l’oxygène.

Une Terre chaude est une Terre qui altère plus vite et par conséquent séquestre d’avantage son CO

2

atmosphérique.

Source : Galy et al. (2008).

(5)

68

rivières et fleuves : acteurs de la dynamique planétaire et du changement global

Les couplages planétaires impliquant l’altération et l’érosion

Parce que l’érosion est un acteur majeur du cycle géo- logique, elle est l’actrice de nombreux couplages entre l’activité de la Terre interne et la dynamique des enve- loppes superficielles dont l’énergie est fournie par le soleil. Le premier des couplages est « mécanique » en reliant climat et orogenèse. Si l’érosion physique est importante sur les reliefs (figure 4), le déplacement de masse à la surface vers la périphérie des chaînes impli- que un déplacement de masse compensatoire dans la lithosphère, qui entretiendrait le relief.

Mais il existe sans doute d’autres couplages plus glo- baux entre l’activité interne et le climat. Des études basées sur la géochimie des rivières ont montré que les vitesses d’altération d’un certain type de roche (par exemple le basalte) sont d’autant plus importantes que la température de surface est élevée. Une Terre chaude est donc une Terre qui altère plus vite et par consé- quent séquestre d’avantage son CO2 atmosphérique

de carbone ainsi fixée par l’altération des roches et séquestrée sous la forme de calcaire est de 0,07.1015 g de carbone, une quantité équivalente à l’apport de CO2 à l’atmosphère par les volcans. Une quantité identique serait impliquée dans la séquestration du carbone organique, mais ce chiffre est moins bien connu.

Fig. 4: Natural carbon capture occurs when rocks undergo weathering from soil or atmospheric CO2 or limestone precipitation in the oceans. The second natural capture mechanism entails riverine export of organic material from soils, where they would normally be mineralized. The estimated carbon currently being trapped by rock weathering and capture as limestone is 0.07.1015 g of carbon, i.e., a quantity equivalent to the CO2 being input to the atmosphere by volcanoes. A comparable amount could be involved in the capture of organic carbon, but the figure is less well constrained.

© D'après J. Gaillardet, 2006

sous la forme de calcaire. D’où la possibilité d’une régu- lation de la teneur en CO2 de l’atmosphère qui pourrait être compensée par une augmentation de l’altération continentale, de l’export d’alcalinité par les fleuves et la précipitation de calcaire. Cette théorie, homéostasi- que, connue sous le « modèle du thermostat » de James Walker, est confirmée par les études expérimentales sur l’altération des roches. Plusieurs modélisations ont été tentées pour évaluer la sensibilité de cette rétroaction planétaire. Ainsi, on a pu montrer que la mise en place des Traps basaltiques du Deccan à la limite Crétacé- Tertiaire, en ayant injecté rapidement dans l’atmosphère 20 000.1015 g de carbone (par comparaison, l’homme y a injecté environ 500.1015 g), a eu pour effet immédiat une hausse très nette de la température du globe, mais a également entraîné une altération chimique massive

Le chiffre global de l’érosion terrestre avoisinerait les 100-150 mm/1000 ans.

Fig. 4 : La séquestration naturelle du carbone est accomplie par l’altération des roches par le CO2 des sols ou de l’atmosphère et la précipitation de calcaire dans l’océan. La seconde forme de séquestration naturelle est l’exportation par les fleuves de matières organiques des sols où elles doivent être normalement minéralisées. On estime aujourd’hui que la quantité

(6)

streams and rivers: important players in planetary dynamics and global change

Les fleuves d'Amazonie acteurs de la sédimentation côtière. Fleuve Oyapock, frontière entre la Guyane française et le Brésil.

Amazonian rivers, important players in coastal sedimentation. The Oyapock River, marking the border between French Guiana and Brazil.

© Ph. Weng, BRGM

Publicité

(7)

rivières et fleuves : acteurs de la dynamique planétaire et du changement global

des coulées et la précipitation de carbonates dans les mers. Le modèle indique qu’il n’a fallu « que » quelques millions d’années pour que l’atmosphère de la Terre soit purifiée de son CO2 en excès et que la température globale retrouve une valeur proche de celle qu’elle connaissait avant la crise [Dessert et al. (2001)].

D’autres auteurs ont modélisé les effets de variations de la configuration des continents sur la répartition des précipitations et donc sur l’altération des roches pour montrer que les périodes de dislocation conti- nentale induisent une augmentation de l’altération et donc une baisse de la teneur en CO2. Le couplage entre la tectonique des plaques et les enveloppes externes trouve également son illustration dans le lien qui existe entre altération chimique et érosion physique. Plusieurs études ont montré que l’altération chimique des roches est amplifiée dans les chaînes de montagne [Dupré et al. (2003)]. Si la chaîne hima- layenne ne représente que 0,3 % de la surface drainée aux océans, la consommation de CO2 par l’altération des roches est de 2,6 % du flux mondial. Les données des grands fleuves mondiaux indiquent l’existence d’un couplage entre les flux d’érosion mécanique et les flux d’altération chimique. Ce couplage signifierait que l’érosion physique favorise l’altération chimique par la mise à disposition de surfaces fraîches sans cesse renouvelées et qu’en échange, l’altération chimi-

que prépare leur désagrégation, en dissolvant préférentiellement les minéraux les plus vulnérables.

Les glaciers ont depuis longtemps été reconnus comme de puissants agents d’érosion mécanique et la poussière qu’ils fabriquent possède une surface spécifique très réactive vis-à-vis du CO2 atmosphérique.

Enfin, l’exportation de carbone organique et sa séquestration dans les sédiments marins sont égale- ment stimulées dans les zones de montagne, où elle est directement liée au flux d’érosion physique.

Toutes ces observations montrent l’existence d’un lien direct entre orogenèse et climat. Si les grandes pério- des de construction de chaîne de montagne sont associées à une augmentation significative de l’éro- sion (figure 5) et de l’altération chimique, alors, on doit s’attendre à ce qu’elles soient marquées par une baisse de la teneur en CO2 de l’atmosphère et donc par un coup de froid planétaire. Une étude basée sur les isotopes de l’oxygène dans les Brachiopodes, pour toute la durée du Phanérozoïque tend à prouver que ce lien existe et que les grandes orogenèses refroidis- sent le globe [Veizer et al. (2003)]. Pour nourrir les modèles et tester la sensibilité du couplage entre oro- genèse et climat, de nombreuses observations et mesures sur les vitesses d’érosion et d’altération doi- vent être encore accumulées.

Fig. 5 : L’enregistrement de l’érosion dans la chaîne

himalayenne. Cette courbe montre les volumes de sédiments issus de l’érosion mécanique de la chaîne himalayenne piégés dans les bassins sédimentaires péri-himalayens, marins et continentaux. Elle établit clairement le lien entre orogenèse et érosion mécanique.

Fig. 5: The erosion record in the Himalayas. This curve depicts the sediment volumes produced by the mechanical erosion of the Himalayan Chain and trapped in foreland sedimentary basins, both marine and continental. It clearly attests to the connection between orogeny and mechanical erosion.

© F. Métivier, Thèse. 1996.

ÄGEßENßMILLIONSßD´ANNmES

4AUXßD´ACCUMULATIONßDEßSmDIMENTSßKMAN

#OLLISION

%PAISSEURßDESßSmDIMENTS CmNOZOtQUESßM

Les fleuves sont des sentinelles qui nous donneront les clés

de l’évolution de la planète.

70

(8)

streams and rivers: important players in planetary dynamics and global change

Bibliographie : Dessert C., Dupré B., Francois L.-M., Schott J., Gaillardet J., Chakrapani G. J., Badjope S. Erosion of Deccan Trapps determined by river geochemistry: impact on the global climate and oceanic 87Sr/86Sr. Earth. Planet. Sc. Letters. 188, 83-98 (2001). Dupré B., Dessert C., Oliva P., Goddéris Y., Viers, J., Francois, L., Millot R., Gaillardet J. Rivers, Chemical weathering and the Earth’s climate. C. R. Geosciences 335, 1141-1160 (2003). Gaillardet J. L’eau, le CO2 et le climat de la Terre. In Les climats passés de la Terre, De Wever Editeur, Vuibert (2006). Galy V., France-Lanord C., Beyssac O., Faure P., Kudrass H., Palhol F. Efficient organic carbon burial in the Bengal fan sustained by the Himalayan erosional system, Nature, 450, 407-410 (2007). Meybeck, M. Global occurrence of major elements in rivers. In Treatise on Geochemistry, Holland HD, Turekian KK (eds) (2003). Négrel, P., Allègre, C. J., Dupré B. and E. Lewin E. Erosion sources determined by inversion of major and trace element ratios and strontium isotopic ratios in river water: The Congo Basin case. Earth Planet. Sci. Letters 120 (1993). Raymond P., Oh N. H., Turner E., Broussard W. Anthropogenically enhanced fluxes of water and carbon from the Mississippi River. Nature 451, 449-452 (2008). Veizer, J., Godderis, Y, Francois L. Evidence for decoupling of atmospheric CO2 and global climate during the Phanerozoic eon, Nature, Volume 408, Issue 6813, pp. 698-701 (2000).

Streams and rivers:

important players in planetary dynamics and global change

Rivers are the messengers from the continents to the ocean. They integrate the water-rock interactions occurring in soils and provide the solutes (due to chemical weathering) and solid materials (due to physical erosion processes) to the oceans. By analyzing their composition, fluxes of chemicals and solids can be calculated. The study of rivers indicates that the type of rocks in their basins is the main parameter influencing their composition, although atmospheric deposition, biospheric interactions, climate, tectonics, or physical erosion also play key roles.

The consumption of CO2 by weathering reactions and subsequent precipitation of carbonates as well as the burial of organic matter in sedimentary basins are major ways for the Earth to buffer the amount of CO2. in the atmosphere. Climate models, in part, use weathering reactions to predict the long-term evolution of climate. There is an urgent need for more study and monitoring of rivers, especially in the context of global changes that our planet is going to experience.

!NNmES

&LUXßDEßBICARBONATEßDUß-ISSISSIPPIß4G#AN

La composition chimique

des rivières est, au premier ordre, déterminée par la nature

des roches qu’elles drainent.

Fig. 6 : L’évolution du flux d’alcalinité transporté par le fleuve Mississippi aux États-Unis depuis les années 1950 montre que les eaux de ce fleuve deviennent de plus en plus alcalines.

L’interprétation de cette courbe n’est pas définitive mais cette évolution pourrait être liée au changement d’occupation des terres.

Fig. 6: The evolution of the alkalinity flux transported by the Mississippi River (USA) since the 1950’s reveals that the waters of this river are becoming increasingly alkaline.

The interpretation of this curve is not definitive, but this change could be linked with changing land-use.

© Raymond et al. (2008).

Nous devons surveiller nos fleuves

Les fleuves sont des sentinelles qui nous donneront les clés de l’évolution de la planète. Face au change- ment global récent de notre environnement, il est urgent de surveiller les flux d’eau qu’ils transportent, mais aussi leur composition chimique qui renseigne sur l’état des sols et des réactions qui s’y déroulent, leur charge sédimentaire qui entraîne avec elle les sols [Meybeck (2003)]. Une étude récente [Raymond et al, (2008)] montre que l’alcalinité du Mississipi a aug- menté de 40 % depuis 1950 (figure 6). La contamination de nos rivières par les métaux est désormais également démontrable. Pour apprendre à gérer la précieuse ressource qu’est l’eau, il est important de mieux comprendre comment le changement d’utili- sation des terres, le changement de composition chimique de l’atmosphère et le changement climati- que ont modifié et vont modifier la nature de nos rivières et de nos nappes.

Il est devenu urgent d’organiser la communauté scien- tifique et de fédérer des réseaux de bassins versants internationaux. Il est essentiel de ne pas se cantonner à la petite échelle qui intéresse surtout l’agronome ou l’ingénieur, mais d’étudier aussi la réponse des plus grands systèmes fluviaux mondiaux au changement planétaire de notre environnement. n

Photo panoramique prise en juillet 2008 depuis le nouveau parc d'énergie hydraulique créé à Minneapolis, Minnesota, sur le fleuve Mississippi. De cet angle on voit le barrage inférieur des chutes de Saint Anthony.

Panoramic photo taken in July 2008 from the new Water Power Park on the Mississippi River (Minnesota). Visible from this vantage:

the lower portion of Saint Anthony Falls.

© Bobak Ha'Eri, Wikipedia Commons.

Références

Documents relatifs

Partager des informations et confronter des expériences qui ont déjà démontré leur pertinence, tels sont les objectifs de la ren- contre régionale «Coopération internationale dans

Défavorable au projet , comporte neuf thèmes différents Certains de ces thèmes sont spécifiques au dossier , d’autres plus généraux : potentiel éolien , d’ordre

L’enfant dysphasique est alors considéré comme étant exempt de tout trouble de la pensée et/ou de l’organisation de la pensée ; si ceux-ci sont à la rigueur envisagés,

GIBELLO (1986) a vu une suite à cette difficulté dans la conception de la représentation de mot : dans l’ensemble de l’œuvre de FREUD, des représentations de mots sont

Isabelle Backouche (EHESS), Michel Beuthe (Université catholique de Louvain-la-Neuve), Antoine Beyer (IFSTTAR- SPLOTT), Jacques Charlier (Université catholique de

Pour les participants arrivant par TGV : arrivée en gare TGV de Mâcon-Loché en provenance de Paris, jeudi 13 septembre à 9 h 27 (départ 7 h 49) : une navette est mise à la

Pour mieux comprendre ce type de structure et leur évolution dans ce récit, nous avons relevé des marques correspondant à une verbalisation de la spatialit é, et

assimilation non plus dans le sens d'une intégration déformante des objets au sujet : assimiler l'objet revient à participer aux systèmes de transformations dont