Mesure des pertes de croissance radiale
sur
quelques espèces de Pinus
dues à deux défoliateurs forestiers.
I - Cas de la processionnaire du pin
en
région méditerranéenne
Nathalie LAURENT-HERVOUËT
INRA, Centre de Recherches forestières
INRA, Centre de Recherches
forestières
Station de
Zoologie forestière,
Ardon, F 45160 OlivetRésumé
L’impact
des défoliations dues à la processionnaire dupin
(Thounzetopoeo pityocompa Schiff.) sur l’accroissement radial despins
a été étudiégrâce
à ladendrochronologie
auMont Ventoux sur les pins noirs d’Autriche (Piuus nigra Arn. ssp. nigricans Host.) et dans
la vallée du Niolo en Corse sur les
pins
laricio (Pinus nigra Arn. ssp. laricio Poiret). Lestémoins, non attaqués dans les sites étudiés sont constitués par des cèdres (Cedrus atlantica Manetti) au Ventoux et par des pins maritimes (Pinus pinaster Ait.) en Corse. Une étude
dendroclimatologique
a permis de connaître l’effet des facteursclimatiques
sur l’accroissement afin de l’éliminer et d’étudieruniquement
l’effet de laprocessionnaire.
Au Ventoux, on a pu détecter un cerne nul en 1968 dans deux
placettes après
la forte attaque de 1966-1967. L’étude desvingt-cinq
dernières années montre les faits suivants :1) l’accroissement est davantage influencé par les attaques de processionnaires que par le climat ;
2) une défoliation à l’automne n - 1 et au
printemps
n estrépercutée
sur l’accrois-sement de l’année n + 1 ;
3) la perte globale enregistrée est de 35 p. 100 dans la
placette
la plus attaquée.En Corse, les pertes d’accroissement atteignent 20 p. 700 sur l’ensemble des
vingt-huit
années de l’étude mais les attaques qui n’ont lieu qu’un an sur deux doivent
particulièrement
compliquer leproblème
par rapport au Ventoux. Apparemment, seule lapremière
gradation de 1964-1966 s’est répercutée sur l’accroissement. Celle de 1974-1976 ne semble pas avoireu
d’effet,
le taux de défoliation observé pendant cette période atoujours
été inférieur à 50 p. 100.Mots clés :
Pinus, Thaumetopoea
pityocampa, pertes d’accroissement, dendrochronologie.Introduction
Certaines
gradations importantes
d’insectes défoliateurs entraînent la défoliationparfois
totale des arbres-hôtes. C’est le cas desattaques
de laprocessionnaire
dupin
(Thaumetopoea pityocampa Schiff.)
dans le midi de la France et duLophyre
dupin
(Diprion pini L.)
enrégion
Centre et dans I*Ile-de-France. Il peut alors en résulter de gravesconséquences
pour la santé et la croissance de l’arbrequi
se trouve démunide tout
appareil respiratoire
et assimilateur. Lespertes
de croissance occasionnées par les défoliations dues à laprocessionnaire
dupin
ont été étudiées par différentes méthodes :- soit par défoliation artificielle
(J OLY , 1959 ;
POLGE &G ARROS , 1971)
- soit
après
défoliation « naturelle » par les insectes.Deux méthodes sont
possibles :
on contrôle lesattaques
endéposant
des coloniesde
processionnaires
sur les arbres à étudier(C ADAHIA
&Irrsun, 1970)
ou bien on étudie les accroissements d’arbres ayant subi des infestations « naturelles ». LEMOINE(1977),
à l’issue d’uneattaque
deprocessionnaires importante
mais isolée dans letemps
dans les Landes de
Gascogne
a suivipendant
5 ans l’accroissement des arbresattaqués
et des arbres témoins. Au MontVentoux,
où lespins
noirs d’Autriche sont soumis à desgradations périodiques
de laprocessionnaire,
BOUCHON et ToTrt(1971)
ont utilisé la
dendrochronologie.
C’est cette méthode que nous avons choisie pour étudierl’impact
des attaques deprocessionnaires
sur l’accroissement radial despins
noirs d’Autriche
(Pinu.s /)/.!’f<
Arn. ssp.ni g ricans Host.)
au Mont Ventoux et despins
laricio(Pin l iS nigra
Arn. ssp. 1(ii-i(-ioPoiret)
dans les montagnes corses en pro- fitant des données depopulations
recueillies par le Service forestier au Mont Ventouxdepuis
1958 et par ]’INRA(G ERI ) depuis
1966 en Corse.Grâce à l’étude des cernes d’accroissement
annuel,
on peut chiffrer lespertes
d’accroissement subies lors desgradations
connues et rechercher l’existence desgradations
antérieures. Les variations d’accroissement pouvant être influencées par de nombreux facteurs(climat,
activitéshumaines, attaques
d’insectes ou dechampi- gnons),
la connaissance de ces facteurs estindispensable
notamment la connaissance des facteursclimatiques qui jouent
un rôleprépondérant (F RITTS , 1976).
Nous avonsdonc recherché dans les difféi-enies
régions
étudiées des séries de données météoro-logiques correspondant
aux accroissements observés et aux notations effectuées surl’importance
despopulations
d’insectes, la connaissance del’impact
des facteursclimatiques
constituant unpréalable indispensable
à l’étude de l’influence desattaques
deprocessionnaires.
1. Matériel et méthodes 1.1. Matériel I.11. Au Ventoux
L’étude a été effectuée sur les trois
placettes
de la forêt domaniale de Malaucènecontenant
respectivement 58,
38 et 60pins,
surlesquels
le service forestier acompté
les nids à
chaque printemps depuis
1958 et établi le nombre moyen de nids parpin
et par
placette.
Lesplacettes
1 et 2exposées
au S.S.E. sont établiesrespectivement
à 700 et 720 m d’altitude dans unpeuplement
clairiéré depins
noirs d’Autriched’environ 90 ans, elles sont
régulièrement attaquées,
laplacette
1comprend éga-
lement des
cèdres ;
laplacette 3,
à 560 md’altitude,
situéeplus
à l’ouest est établie dans unpeuplement plus régulier ;
elle subitgénéralement
moinsd’attaques.
Nousavons
prélevé
en octobre 1983vingt
carottes depins
noirs d’Autriche à la tarière de Pressler de 5 mm danschaque placette
etvingt
carottes de cèdres dans laplacette 1 ;
cette essence non
attaquée
nous servant detémoin,
considérant que ces cèdres installésrécemment dans cette
partie
du Ventoux sont soumisuniquement
auxphénomènes généraux
et ne subissent pas d’accidentparticulier
àl’espèce.
Pour la connaissance du
climat,
nous avons pu travailler sur les relevés despréci- pitations
ettempératures
mensuellesenregistrées depuis
1972 par le S.T.E.F.C.E.(Service Technique
d’Etude des FacteursClimatiques
et del’Environnement)
de l’INRAd’Avignon
dans la combe de Bramefam à 710 m, trèsprès
desplacettes
d’échan-tillonnage
etégalement
sur les relevéspluviométriques
mensuels effectués de 1958 à 1975 auvillage
de Malaucène à 300 m d’altitude. Les informations recueillies de 1972 à 1975 dans les deux sites nous ontpermis
d’établir unerégression
linéaireentre les
précipitations
de Bramefam et celles de Malaucène et de calculer ainsi uneestimation de la
pluviométrie
mensuelle de Bramefam de 1958 à 1972.1.12. Ea Corse
Les
placettes
d’étude ont été choisies dans la vallée d’altitude du Niolo afin de bénéficier des indices d’infestation deprocessionnaires
calculés par zones et souszones
après enquête depuis
1966 par l’INRA(G ER i, 1971, 1975, 1980, 1983).
Diffé-rents indices ont été
calculés,
nous avons utilisé l’indice suivant : 0 Aucun nid1 Présence d’un ou de
quelques
nids dans lepeuplement
2 Infestation faible
(moins
d’un nid parpin)
3 Un nid par
pin
environ4 Entre 1 et 5 colonies par
pin
5 Entre 5 et 10 colonies par
pin
en moyenne 6 Entre 10 et 20 colonies parpin
en moyenne 7 Plus de 20 colonies parpin
en moyenneLes
parcelles
« PK 51 » et« Tilerga » respectivement
à 950 et 920 m d’altitudeet en
exposition
E.N.E. et E.S.E. sont situées dans despeuplements
très clairiérésqui occupent
d’anciennes terres de culture recoloniséesdepuis
80 ans par la forêt. Laparcelle
« Casamaccioli» exposée
au N.O. à 1 050 m estpeuplée
par une futaieassez dense d’arbres
âgés (environ
150ans).
Danschaque parcelle,
20 carottes depins
laricio ont étéprélevées
enjuin 1983,
le témoin a été constitué de 20 carottes depins
maritimesprésents
dans laparcelle
deTilerga,
essence très peuattaquée
enCorse au-dessus de 900 m.
On a utilisé les informations
climatiques
provenant des différentspostes
météo dela
vallée, implantés
soit par l’O.N.F.(Popaja
à 1 000m),
soit par le S.T.E.F.C.E.(Fras- cajo,
980m)
et PK 51(920 m).
Nous avons ainsi pudisposer
de lapluviométrie
men-suelle de 1955 à 1981 et des
températures
mensuelles de 1955 à 1966 et de 1974 à 1981.1.2. Méthodes
1.21.
Synchronisation (Murrnu’r, 1978 ; T RENARD , 1982)
Un
graphique
des accroissements annuels en fonction dutemps
est construitpour
chaque
carotte ; danschaque placette
et pourchaque
essence onprocède
à lasynchronisation :
on admetd’après l’hypothèse
de DOUGLASS en 1937(in T RENARD ,
1982)
que les arbres d’une même essence en un même lieuréagissent
de la mêmefaçon
auxphénomènes
extérieurs ; les courbes individuelles devraient doncprésenter
des variations
identiques
etsynchrones. Toutefois,
on a souvent lephénomène
sui-vant
(fig. 1 )
:En remontant dans le temps, les courbes sont
synchrones jusqu’à
une annéei,
pour les années antérieures elles sont décalées d’une année l’une par
rapport
à l’autre.Il peut y avoir deux
explications.
- Il manque le cerne de l’année i ou de l’année i - 1 sur la courbe
(1).
L’absencede ce cerne
peut provenir :
! d’un oubli lors de la lecture ;
! d’un cerne très mince et peu
marqué qui
a été lu avec un autre cerne ; d’une croissance radiale nulle.- Sur la courbe
(2),
il y a un cerne double l’année i ou i— 1correspondant
soità une erreur de lecture à cause d’une inclusion de résine par
exemple,
soit pour une même année devégétation
à l’élaboration de deux assises de bois initial et deux assises de bois final.Un examen minutieux de
chaque
carotte et lacomparaison
avec les courbesdes autres arbres
permet généralement
de choisir l’une de ceshypothèses.
Puis onconstruit une courbe
standard ;
elle est constituée par la moyenne des accroissements annuels des arbres ayant les courbes les mieuxsynchronisées
entre elles. Ce sontsouvent de gros
arbres,
afin de diminuer les erreurs dues aux lectures de cernes.L’intérêt de cette courbe est de faire ressortir les accidents collectifs en éliminant les arbres
(1/4
de l’effectifenviron) qui présentent
detrop
fortes variations indi- viduelles.1.22.
Analyse statistique
L’analyse
enrégression multiple
etl’analyse
encomposantes principales
ont étéutilisées pour rendre compte des relations accroissement-climat et accroissement-
attaque.
1.221.
L’analyse
enrégression multiple
Elle permet
d’expliciter
une variable(l’accroissement annuel)
en fonction deplusieurs
variablesexplicatives (variables climatiques
et variablesd’infestation)
suivantle modèle :
n
v - &dquo;5: -4- + C +Il avec y . variable
expliquée
x
i : ième variable
explicative
a
i 1 coefficient de
régression
de la ième variableexplicative
C . constante
I
t
: résidu(variable aléatoire)
Nous avons utilisé un programme de
régression multiple progressive
où lesvariables explicatives
sont introduites une à une parpalier (Bne H ncou et a A , 1981).
Compte
tenu de de labibliographie (F RITTS , 1976),
nous avonssupposé
que le climat était le facteurprépondérant
de l’accroissement et fait d’abordplusieurs régressions multiples progressives
avec toutes les moyennes mensuelles detempératures
et lesmoyennes
mensuelles,
bimensuelles et trimestrielles deprécipitations correspondant
àl’année de
végétation (septembre
n — 1 à aoûtn),
cequi
apermis
de sélectionner les variablesimportantes qui
seules ont été finalement conservées dansl’équation
de
régression (LnuaEN-r-N!avouëT, 1984).
Pour la Corse comme au
Ventoux,
l’étude a été effectuée sur l’ensemble des années pourlequel
onpossède
des donnéesclimatologiques puis
au Ventoux enexcluant les années succédant à de fortes
gradations
pour éliminer l’incidence des attaques deprocessionnaires.
Dans un deuxième temps, on a étudié l’effet desattaques
sur l’accroissement en choisissant comme variables
explicatives
de l’accroissement de l’année n, lespopulations
observées auprintemps
des années n, n -1, n
-2, n
- 3et les variables
climatiques
sélectionnéesprécédemment.
Puis nous avons étudié pour leVentoux,
l’effet despopulations
des années n, n -1, n - 2, n - 3,
sur les écartsP i
entre les valeurs observées des accroissements
y i obs
et leur estimation par le modèle derégression !ith
avec les facteursclimatiques
établi au cours des années sansattaque. On a alors pu calculer la
perte
d’accroissement radialP! : P
j
= y,obs
-Yj th
où
y j obs
est l’accroissement radial observél’année j
et5 } h
l’estimation de l’accrois- sementcompte
tenu du climat avec :’
n
!jth
- L aijxij !- C avec xij valeur pourl’année j
de la variableclimatique
sé-i=1 1
lectionnée i.
Pour le Mont
Ventoux, l’équation
de larégression
est calculée sur les annéessans
attaque ;
enCorse,
elle est calculée àpartir
despins
maritimes.1.222.
L’a /M/ y.se
en cotiiposaiitesprincipales
L’analyse
encomposantes principales
permet de réduire le nuage multidimen- sionnelreprésentant
les données à un nombre limité d’axes : lespremiers
axesprin- cipaux (CAILLIEZ
ôcPAGES, 1976).
Cette méthode a été utilisée pour
analyser
les données recueillies arbre par arbre dans uneplacette
en Corse. Dans cetteplacette (PK 51)
lesprincipales caractéristiques dendrométriques
de 11pins
ont été notéesdepuis
1972 ainsi que le nombre de nids deprocessionnaires
àchaque printemps
et un indice de défoliationquoi
que ce dernier ait été relevé defaçon
moinssystématique. L’analyse
encomposantes prin- cipales
aporté
sur les variables d’accroissements individuels de 1972 à 1982 et les nombres de nids des annéespaires
de 1972 à 1982.On
peut
travailler sur deuxtypes
de matrices : MATRICE A :Les résultats de
l’analyse
avec la matrice A étant peu démonstratifs en raison de l’absence deprocessionnaires
un an surdeux,
seuls les résultats del’analyse
avecla matrice B seront
exposés.
Nous avons deplus
introduit en variablessupplémen-
taires c’est-à-dire ne
participant
pas au calcul des axes les variablesdendrométriques
pour
chaque
arbre :hauteur, circonférence,
surface terrière de laplacette
située autourde
chaque
arbre et mesurée aurelascope
de Bitterlich ainsi que le nombre total de nidssupportés
de 1972 à 1982.2.
Rappels
sur labiologie
de laprocessionnaire
La
processionnaire
dupin (Thaumetopoea pityocnmpa Schiff.)
est unlépidoptère 7’haumetopoeidae,
Les œufs sontpondus
entre le 15juillet
et le 15 août et éclosententre août et
septembre,
les chenilles défoliati-ices s’alimentent la nuit et subissent quatre mues. Leursdégâts
deviennentimportants
àpartir
du troisième stadelarvaire ;
au
quatrième stade,
àl’automne,
elles tissent de grosses bourses de soiequi
selonD EM O L I
N
(1965, 1969 b) jouent
le rôle de volantsthermiques
et de radiateurs solaires constituant leurprotection
durant lapériode
hivernale.Après
leur évolutionlarvaire,
de mars àjuin,
suivant lesrégions,
les chenillesdescendent en
procession
desarbres,
s’enfouissent dans lesol,
tissent un cocon et y subissent lanymphose.
La sortie des adultes dans lesrégions
d’altitude du midi de la France a lieu du 15juillet
au 15 août. Lespapillons s’accouplent
etpondent
dans les48 heures
puis
meurent. Le choix des arbres par les femelles ainsi que lespreferendums thermiques
des chenilles(D EMODN ,
1969 a,1971, 1974)
ont desconséquences
sur larépartition
desattaques
dans lepeuplement :
lespeuplements clairières.
les lisièreset en
montagne
lespins
enexposition
sud sont lesplus attaqués (G ERI , 1980, 1983).
Lecycle biologique
peut varier d’unerégion
à l’autre : au MontVentoux,
où l’habitat deschenilles,
limité à 900 m, estplus
chaud que dans les forêts d’altitude de Corsequi
s’étendentjusqu’à
1 500-1-600 m (GERI 8c MtLLlER, 1985), lecycle
est annuel.Dans les montagnes corses, au-dessus de 900 m, le
développement
estplus
lent, l’insecte ne peut pas effectuer la totalité de soncycle biologique
en uneannée,
celui-cidevient bisannuel
(D EMODN ,
1971 ) ; suivant les vallées les vols d’adultes ont lieu les annéespaires (Vizzavone, Verghello, Restonica, Asco)
ouimpaires (Niolo, Aïtone).
3. Résultats obtenus au Ventoux 3.1. Courbes st(itid(ir(l
Les trois courbes standard
(fig. 2)
obtenuesaprès
avoirsynchronisé
lespins
de
chaque placette
sontsynchrones
entre elles etsynchrones
avec la courbe descèdres,
sauf de 1967 à1974, période pendant laquelle
lasynchronisation
apermis
de détecter la
présence
de cernes nuls en 1967 pour lespins
de laplacette
2 et en1968 pour les
pins
desplacettes
1 et 2. La courbe despins
de laplacette
3 montre verscette
époque
une baisse d’accroissement mais pas de cerne nul. Lacomparaison
des courbes d’accroissement avec la courbe
d’attaques
deprocessionnaires
montreque la
période pendant laquelle
on observe des cernes nuls et pourlaquelle
lescourbes
pins-cèdres
ne sont passynchrones correspond
à lapériode
d’infestation maximale.Le cerne nul observé en 1968 dans les
placettes
1 et 2 semble être la consé- quence de la très forteattaque
de1967,
laplacette
3 moinsattaquée
a subi unechute d’accroissement moins brutale. On assiste
ensuite,
alors que le nombre moyen de nidsdiminue,
à unerécupération
difficile despins qui
dure 5 ans.La
comparaison
des courbes d’accroissement avec la somme desprécipitations
de mars à août montre une certaine concordance en dehors de la
période
1967-1974pour les
pins
etpendant
toute la durée 1957-1983 pour les cèdres. Les accroissements despins
sont très liés à laprocessionnaire
dupin pendant
lespériodes d’infestation, proportionnellement
auxattaques
subies : lesplacettes
1 et 2 trèsattaquées présentent
des cernes
nuls,
laplacette 3,
la moinsattaquée, présente
seulement une baissed’accroissement. En dehors des
grandes périodes d’infestation,
l’accroissement despins
est semblable à celui des cèdres et est lié auxprécipitations.
Iln’apparaît
pas de relation entre les accroissements et les datesd’éclaircies,
l’action de l’homme auVentoux ne se
répercute
pas directement sur l’accroissement radial.3.2.
Influence
ctar climat sur l’accroissementLe tableau 1 montre que pour l’ensemble des
années,
le meilleurajustement
estdonné par les cèdres et la
placette
depins
la moinsattaquée, cependant
les coefficients de corrélation et les tests F montrent que le meilleurajustement
del’équation
derégression
aux données est obtenu pour les années horsattaque,
c’estpourquoi
nousprendrons
par la suite les variables etl’équation
derégression
obtenues horsattaque.
Ceci confirme l’incidence des
attaques
deprocessionnaires
sur les accroissements despins
et la nécessité d’enapprécier l’importance compte
tenu des variables clima-tiques.
Les mois
importants
semblent être ceux du début de la saison devégétation
(mars,
avril, juin),
cequi correspond
aux résultats de l’étudegraphique (fig.
1) maiségalement
les mois de l’automne-hiver de l’annéeprécédente (septembre, octobre, décembre)
lapluviosité
de cettepériode
permet la reconstitution des réserveshydri-
ques du
sol,
tandis que lesprécipitations
duprintemps
évitent un stresshydrique
endébut de saison de
végétation.
3.3.
Infhrence
de IIIprncessionnait-e
sur 1’ticc-i-oisseiiietit 3.31. Etude sur 1’(ic-t-i-oisseiiieiit tLes résultats des
régressions multiples progressives
ayant comme variableexpli- quée
l’accroissement de l’année n et comme variablesexplicatives
les variablesclimatiques précédemment
sélectionnées et les données depopulation
deprocession-
naires par
placette
sontprésentés
pour laplacette
1 tableau 2. Des résultats très voisins sont obtenus pour lespins
des autresplacettes.
Lapremière
variable introduite est le nombre de nids de l’annéeantérieure,
lespluies
duprintemps
(mars,avril)
viennent
ensuite,
suivies des attaques des autres années. Lesattaques présentent
avec l’accroissement un coefficient de
régression négatif
alors que pour lespluies
le coefficient est
positif.
Ilapparaît donc,
contrairement à notrehypothèse
que ce sont lesattaques
deprocessionnaires
et non le climatqui
influencent leplus
l’accrois-sement des
pins
au Ventoux.Un calcul
identique
a été effectué pour les cèdres. Il ne montre, bienentendu,
aucune incidence des
attaques
deprocessionnaires
et ce sont lesprécipitations qui
conditionnent le
plus
l’accroissement. La perte de croissance un anaprès l’attaque
sur les
pins
noirs d’Autriche du Ventoux adéjà
été notée par BOUCHON & TOTH(1971). ).
Elle
s’explique
si l’on considère que les conifères et les feuillus de la zonetempérée
utilisent des réserves
photosynthétisées
et stockées l’annéeprécédente
pour élaborerle bois de
printemps
et effectuer leurpremière
croissance en hauteur(K ULMAN , 1971). ).
3.32. Etude de la
différ-ence
entre valeur observée et valeur estimée de l’accroissemertt On étudie comment le termeP, = y i obs
-;th qui représente
la part de l’accrois- sementindépendante
du climat est influencée par lesattaques.
Les résultats sontpré-
sentés pour la
placette
1 tableau3,
ces résultats sont concordants pour les troisplacettes.
Dans tous les cas, les variablesexplicatives
sélectionnées enpremier
sontles nombres de nids des années
précédentes
et enparticulier
le nombre de nids de l’année n-1,
le nombre de nids de l’année(Nid N)
esttoujours
très peuexplicatif.
La valeur élevée des tests
d’ajustement global
et des coefficients de corrélationmultiple
montrent l’étroite corrélation deP i
avec lesattaques
cequi justifie
1titili-sation de ce terme comme un estimateur des
pertes
d’accroissement annuelles.3.4. Calcul des pertes d’nccroissement
Les
pertes
d’accroissement annuelles sontreprésentées
sur lafigure
3 pourle!,
trois
placettes comparativement
au nombre moyen de nids parpin.
Legraphique
met en évidence l’incidence des infestations de
processionnaires
de l’annéeprécé-
dente,
les pertesP j
sonttoujours significatives
à la suite des annéesd’attaque.
Leterme
P i
est rarementpositif
etsignificatif,
c’est le cas de 1973 pour laplacette
1.Il est
possible
que l’abondantepulviosité
estivale de 1973 ait favorisé l’accroissement au-delà des limitesprévues
par le modèleclimatique ;
mais ce faitpeut également
résulter d’une
reprise
de l’accroissementsupérieure
à la normaleaprès
de forte4attaques,
phénomène déjà
observé par POLGE & GARROS(1971)
et WFaB & W!cKMnt!(1978).
Eneffet,
cettereprise
s’observe surtout dans lesplacettes
lesplus attaquées.
Sur
plusieurs années,
lespertes
d’accroissement radial peuvent être calculées de la mêmefaçon.
On a pour n années :»
1 !’..
-1-&dquo;!!;,..1.... j
., ,_.u !- _._,_.’!.!!+n!! ....J’.(_..:&dquo;.-... ,J&dquo; .,!..-.,La
signification
de laquantité P&dquo;
est testée par le test decomparaison
de deuxséries de moyennes
appariées (ici
l’unethéorique,
l’autreobservée)
pour despetits
échantillons
(ScnwnR-rz, 1969).
Les calculs ont été détaillés en fonction deplusieurs périodes correspondant
d’une part auxgradations (1979
à 1982 et 1968 à 1972) et d’autre part à lapériode
entière pourlaquelle
nouspossédons
des donnéescomplètes ( 1959
à1982)
etpendant laquelle
se sont succédées desphases
degradation
et d’inter-gradation.
Sur lapériode
1979-1982qui
a suivi une remontée depopulations
àpartir
de 1976puis
un traitement d’unegrande partie
de cette face du Ventouxen
1979,
ilapparaît
une réduction d’accroissementqui
n’est passignificative
sansdoute à cause du très faible nombre de
degrés
de liberté. Par contre, la perte de croissance est trèssignificative après
lagradation
de 1967 ainsi que sur l’ensemble des années. Pour lapériode 1968-1972,
lespertes
d’accroissement enpourcentage d’épaisseur
de cerne sontrespectivement
pour les troisplacettes
de76,5, 82,6
et63 p. 100. Durant la
période 1959-1982,
lespertes globales
sontrespectivement
de 33,3,34,3
et25,7
p. 100.4. Résultats obtenus en Corse
4.1. Etude des courbes standard
Les courbes standard des
pins
laricio obtenues dans les troisplaccttes, présentées figure 4,
sontsynchrones
bien que celle de laplacette
Casamaccioli constituée de très vieux arbres(150
à 200 ans) soitbeaucoup plus aplatie.
Les courbes de PK 51 et deTilerga,
assez concordantes avec la courbe depins maritimes, divergent
de 1964 à 1970. Cettedivergence correspond
à unepériode
de forte infestation dans le Niolo(gradation
de1964-1966 ; G ERI , 1971),
si l’on tientcompte
d’une certainepériode
derécupération après
lesattaques ;
l’incidence d’une autrepériode d’attaque (1972
à1976) qui paraît
s’être traduite par une défoliationplus
limitée dans lesplacettes n’apparaît
pas nettement. En revanche une autrephase
de réduction des accroissementssur le laricio s’observe de 1950 à
1954,
ellecorrespondrait également
à de fortes attaques deprocessionnaires
observées par les habitants de la vallée. La courbe despins
maritimes comme celle despins
laricio en dehors despériodes d’attaque
suitassez bien la courbe des
précipitations.
Ilapparaît
donc que lepin
maritime est unbon témoin des
pins
laricio et que les défoliations dues à laprocessionnaire
peuvent avoir un rôlenégatif
sur l’accroissement.4.2.
Influence
rlu climat srrr l’accroissementPossédant des données de
population
moinsprécises qu’au
Ventoux(indices
d’infestation au lieu du nombre moyen de nids par
pin)
et les années sansattaque
semblantplus
difficiles àpréciser qu’au
Ventoux en raison ducycle
bisannuel de laprocessionnaire,
nous n’avons pas déterminé arbitrairement depériode
horsattaque
mais effectué lesanalyses
enrégression multiple
pour sélectionner les variables clima-tiques
sur l’ensemble des années. Les résultats de cette sélection montrent que ce sont lesprécipitations
de mars,avril,
mai etjuin qui
sont trèsimportantes
dans le Niolo :elles évitent le stress
hydrique
en début de saison devégétation
et ont une influencepositive
sur l’accroissement.4.3.
Irtfluence
des attaques deprocessionnnires
4.31. Etude sur les moyennes d’accroissenzents
L’étude en
régression multiplie
des accroissements en fonction des variablesclimatiques
et des indices d’infestation ne met en évidence aucun effetsignificatif
des
attaques.
Onpeut
considérer différents facteursqui
mettent en cause le bien fondéde cette
analyse :
- le
cycle
bisannuel de laprocessionnaire
entraîne l’introduction d’une infes- tation nulle un an surdeux ;
- la
prise
encompte
desattaques
des trois années antérieures limite le calculaux années 1969 à 1982
(les enquêtes n’ayant
commencéqu’en 1966) :
les annéesde forte
gradation,
confirmées par l’étude desynchronisation,
ne sont pasprises
en considération durant cette courtepériode.
Dans cesconditions,
nous avons testél’influence des
attaques
sur l’accroissement despins
laricio par une méthode indirectegrâce
auxpins
maritimes témoins. On suppose que la valeur de l’accroissement calculée sur lespins
maritimes àpartir
de larégression
avec les facteursclimatiques
est
proche
de l’accroissement que devrait avoir lepin
laricio s’iln’y
avait pasd’attaque.
Cette valeur estimée est
comparée
par un test t aux accroissements observés pour le laricio dans les deuxplacettes
ayant subi de fortesattaques (PK
51 etTilerga) (tabl. 4).
TARI - F.AU 4
Les différences
(valeur
observée-valeurestimée)
sontnégatives
etsignificatives
pour les années 1965-1966-1967-1968correspondant
à unepériode
de fortegradation
miseen évidence par l’étude
démographique (Geat, 1971,
1983 a,b). Cependant
au vu deces différences
significatives
en 1965 et1966,
il est vraisemblable que lagradation
ait
déjà
atteint un fort niveau dès 1962-1964. Enrevanche,
comme pour les courbesstandard,
il n’est rien observé durant lapériode
1972 à 1976. AuTilerga,
on observeégalement
un incident au cours de l’année 1971qui
ne peut êtreimputé
à la proces- sionnaire car sur les courbes standard ilapparaît
aussi bien sur les laricio que surles maritimes. Il
pourrait
être du à un incendie ou à une action différée de la sécheresse de 1970. Les défoliations dues à laprocessionnaire
ont donc causé dans lesplacettes
observées en Corse des pertes d’accroissement notables bien que moins
importantes qu’au
Ventoux : onn’y
observe pas de cerne nul.4.32. Etude sur les accroissements individuels
Cette
analyse, compte
tenu des données existantes arbre par arbre au PK51,
n’apu être effectuée
qu’à partir
de 1972. Elle neprend
donc encompte
que la secondepériode d’attaque
dont lesconséquences
sur l’accroissement ne sont apparues ni sur les courbesstandard,
ni dans lesanalyses
enrégression multiple.
Lepourcentage
d’inertie du nuageexpliqué
par les troispremiers
axes est de 48,9 p. 100 pour lepremier, 14,1
p. 100 pour le second et 12 p. 100 pour le troisième.L’examen des corrélations avec les deux
premiers
axes(fig. 5)
montre que lepremier
axe est très lié à la fois aux accroissements et auxpopulations
de proces-sionnaires ;
sur l’axe2,
les nombres de nids sont dans lapartie négative
del’axe,
lesaccroissements sont
généralement
dans lapartie positive,
ils sont trèsproches
deux àdeux si l’on considère les années consécutives 1972 et
1973,
1974 et1975...). I( n’y
adonc pas de différence d’accroissement entre les années
paires
et les annéesimpaires
bien que les attaques n’aient lieu
qu’un
an sur deux ; ce fait a par ailleurs été confirmé par uneanalyse
discriminante. Sur l’axe2,
les accroissementss’opposent
aux popu-lations,
enparticulier
au nombre de nids total et auxpopulations
fortes de1972,
1974 et 1976 ainsiqu’aux populations beaucoup plus
faibles de 1982. Cette relation peutprovenir
des liaisons entre lespopulations
elles-mêmes d’année en année par lephénomène
depin piège
confirmé par GERI & MILLIER(1985).
C’est l’accroissement de 1978qui s’oppose
leplus
aux attaques sur l’axe2,
il est situéaprès
lapériode d’attaque
de 1972 à1976,
cetantagonisme pourrait
traduire un effet cumulé de l’infestation serépercutant
sur cet accroissement.En ce
qui
concerne les variablessupplémentaires,
la densités’oppose
à la foisau nombre de nids total et à un vecteur
imaginaire
« accroissement moyen ». Eneffet,
lespeuplements
denses sont moinsattaqués
du fait ducomportement
des adultes(D EMOLIN
,
1969a)
et de ladynamique
despopulations
de laprocessionnaire (G ERI ,
1983 a), par ailleurs dans les boisements
serrés,
les arbres ont un accroissement radial moindre que dans despeuplements
clairs. Les vecteurs circonférence ethauteur,
trèsliés entre eux, sont
orthogonaux
aux nombres de nids engénéral
et au nombre denids total en
particulier :
la taille des arbres semble êtreindépendante
desattaques
subies.La
représentation
des individus dans lepremier plan principal (fig. 6 b)
ainsique leurs
caractéristiques principales (fig. 6 a)
confirme ces résultats. Sur l’axe1,
les arbres 1 et 4s’opposent :
l’arbre 4 forme lesplus
faibles accroissements et est très peuattaqué,
l’arbre 1possède
les accroissements et le nombre de nids lesplus
forts. Surl’axe
2, s’opposent
lespins
2 et 11 et lespins 5,
6 et 8qui
ont tous un accroissement moyen ; mais lespins
2 et 11 ont un rapport accroissement sur nombre de nids fort tandis que lespins
5, 6 et 8 ont un rapport accroissement sur nombre de nids faible : l’axe 1 est un axe de fort accroissement et forte attaque alors que l’axe 2 traduit l’incidence des attaques sur les accroissements. Il fautsouligner
les faits suivants : si l’on considère les surfacesterrières,
l’arbre1 qui
a laplus
forte moyenne d’accrois- sements et leplus grand
nombre total de nids est un arbre trèsisolé,
alors que les arbres3,
4 et 10qui possèdent
lesplus
faibles accroissements et lesplus
faibles atta-ques
appartiennent
à desbosquets
denses. L’arbre 1, du fait de sonisolement,
bénéficie d’une bonne croissance et est très attractif pour lesprocessionnaires
alors que lesarbres
3,
4 et 10gênés
par leursvoisins, poussent
mal et sont peu attractifs. Bien que les attaques deprocessionnaires
aient eu mêmeaprès
1972 unléger
effetdépressif
sur les
accroissements,
il semble quel’hétérogéncité
dupeuplement
soit une causeimportante
de la difficulté de le mettre en évidence.Dans ces
peuplements naturels,
lescaractéristiques
de l’arbre et de son envi- ronnementforestier,
trèshétérogènes
d’un arbre à un autrejouent
un rôleimportant
sur la liaison entre les accroissements et les
attaques
deprocessionnaires ;
la densitédes
peuplements
enparticulier
conditionne à la fois la croissance despins
et l’im- portance des attaques. Nous avonscomplété
cette étude de l’incidence des attaquessur les accroissements
depuis
1972 en considérant les indices de défoliation.Depuis 1972,
aucun arbre n’a été défeuillé àplus
de 50 p. 100. Or RAI=Es(1970)
estimequ’en
dessous de cette limite, l’effet d’une défoliation ne se fait pas sentir sur l’accrois- sement. WEBB et W!cKMnrr(1978)
donnent deuxexplications
à cephénomène :
- en
temps normal,
les feuilles de la base ou du centre de la couronne n’attei- gnent pas l’intensité lumineuse pourlaquelle
laphotosynthèse
est maximale : en casde défoliation
partielle,
ces feuillesreçoivent plus
de lumière et ont une assimilationchlorophyllienne plus forte ;
- les
aiguilles
sont trèsexigeantes
encarbone,
la perte desaiguilles
par défo- liation entraîne une diminutionimportante
de la demande en carbone. Cephénomène
peut être renforcé en Corse du fait de l’absence
d’attaque
tous les deux ans, cequi
laisse à l’arbre le temps de
récupérer.
Ceciexpliquerait
la faible incidence des atta- ques de 1972 à 1976 sur la croissance des arbres. Le seul effet estprobablement
uneffet cumulatif dû à la défoliation
répétée pendant plusieurs cycles
de l’insecte quesuggère l’analyse
en composantesprincipales.
4.4. Calcul de !a perte d’accroissement 4.41. Pertes d’accroissement tiiiiiiielles
Les pertes d’accroissement radiales annuelles sont estimées :
P i
=y ; obs
-5’¡th
où!itli
est l’accroissement calculé en fonction du climat àpartir
del’équation
derégression
établie sur lespins
maritimes. Elles sontreprésentées figure
7comparati-
vement à l’indice d’infestation moyen observé