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La balance des paiements et la compétitivité des nations

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Academic year: 2022

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La balance des paiements et la compétitivité des nations

Contents

1 La balance des paiements et la compétitivité 2

1.1 La balance des paiements . . . 2

1.1.1 De quoi est composé la balance des paiements ? . . . 2

1.1.1.1 Objet de la balance des paiements . . . 2

1.1.1.2 Comptabilité . . . 2

1.1.1.3 Types d’opérations . . . 2

1.1.1.4 Les différents soldes . . . 3

1.1.2 Interpréter les soldes . . . 4

1.1.2.1 Les signes des soldes . . . 4

1.1.2.2 La position extérieure nette (PEN) . . . 4

1.1.2.3 Une interprétation du solde des transactions courantes à nuancer . . . 4

1.1.2.4 L’ajustement structurel . . . 4

1.2 La compétitivité des nations . . . 5

1.2.1 Concepts et enjeux . . . 5

1.2.1.1 Définir la compétitivité . . . 5

1.2.1.2 Mesurer la compétitivité . . . 5

1.2.1.3 La spécialisation d’un pays . . . 5

1.2.1.4 La contrainte extérieure . . . 5

1.2.2 La balance commerciale française : qu’en est-il de la compétitivité française et de sa spécialisation productive ? . . . 6

1.2.2.1 La balance des courants française . . . 6

1.2.2.2 Des parts de marchés perdus . . . 6

1.2.2.3 Expliquer les pertes de parts de marché . . . 7

1.2.2.4 La spécialisation française . . . 8

1.2.2.5 La question de la compétitivité hors-prix . . . 8

1.2.2.6 Une interdépendance entre compétitivité-prix et hors prix . . . 8

1.2.2.7 Le cas de l’industrie automobile . . . 9

1.2.3 Les enjeux de l’excédent courant allemand . . . 9 1.2.3.1 L’excédent courant allemand provient d’une forte épargne du secteur privé . 9

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1.2.3.2 La modération salariale allemande, le vieillissement de la population et la

politique budgétaire, principales causes de l’excèdent . . . 9

1.2.3.3 Un déséquilibre déséquilibrant pour la zone euro . . . 10

1.2.3.4 Un plus grand dynamisme salarial . . . 10

1.2.3.5 Des conséquences positives de ce dynamisme salarial . . . 10

1.2.4 La compétitivité, une dangereuse obsession ? . . . 10

1.2.4.1 La vision de P. Krugman . . . 10

1.2.4.2 La productivité plutôt que la compétitivité . . . 11

1.2.4.3 Desserrer la contrainte extérieure . . . 11

1 La balance des paiements et la compétitivité

1.1 La balance des paiements

1.1.1 De quoi est composé la balance des paiements ? 1.1.1.1 Objet de la balance des paiements

La balance des paiements est un tableau statistique ayant pour but la comptabilisation des différentes transactions des résidents d’un pays (indépendant de leur nationalité) avec les non-résidents. Seul les flux sont comptabilisés : on connaît par exemple l’endettement extérieur français pour une année donnée, mais pas l’endettement global.

1.1.1.2 Comptabilité

La balance des paiements repose sur le principe de comptabilité en partie double. Toute opération donne lieu à deux écritures de même montant mais de sens inverse. Le premier enregistrement correspond à l’opération, et la seconde à la contrepartie. Chaque transaction s’inscrit donc au crédit et au débit.

On enregistre au crédit toutes les ventes ou cessions d’actifs par les résidents aux non-résidents, quel que soit le type d’actif : tout ce qui sort du pays est considéré comme crédit. À l’inverse, tous les achats ou acquisitions d’actifs par les résidents auprès des non-résidents, quel que soit le type d’actif concerné : tout ce qui entre est débit. Ainsi, un pays qui s’endette augmente la partie débit (augmentation d’engagements) tandis qu’un pays qui rembourse augmente la partie crédit (diminution des engagements). On peut raisonner de même avec les exportations et les importations. Aux erreurs et omissions près, la balance des paiements est donc par nature un document parfaitement équilibré. Quand on parle de déséquilibre de la balance des paiements, on fait un abus de langage pour parler de l’un des soldes.

1.1.1.3 Types d’opérations

On peut distinguer parmi les différents types d’opérations donnant lieu à une inscription dans la BP :

• Les transactions gratuites (don d’un État à un autre)

• Les revenus (versement du revenu de facteurs de production détenus par des résidents et utilisés par des non-résidents ou l’inverse, comme dans le cas d’une firme localisée dans un autre pays).

• Les investissements directs à l’étranger (entrant = crédit, sortant = débit)

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• Les variations d’avoirs de réserves (entrée ou sortie de devises, qui permettent d’équilibrer les comptes, en prenant en compte les taux de change des pays dans les transactions).

• Le tourisme : un non-résident qui passerait des vacances en France, et y consommerait, est considéré comme un échange extérieur.

1.1.1.4 Les différents soldes

Un solde correspond à la différence entre la colonne de crédit et la colonne de débit pour une ligne donnée de la balance des paiements.

Le compte courant recense l’ensemble des revenus engendrés par :

• les échanges de marchandises et services commerciaux (exportations et importations, dont la différence correspond au solde commercial)

• les revenus du travail (salaires des frontaliers et envoi des travailleurs immigrés dans leurs pays d’origine)

;

• les revenus du capital (intérêts et dividendes)

• les transferts unilatéraux (par exemple, les dons dans le cadre de l’aide au développement)

Les transactions courantes (marchandises, services, revenus des facteurs) représentent en valeur les mouve- ments les plus importants au sein de la balance des paiements.

Le compte de capital recense les transactions sur les actifs incorporels comme les brevets (acquisitions ou cessions), ainsi que les transferts de capitaux sans contrepartie, comme les annulations de dette entre gouvernements.

Le solde des opérations non-financières est la somme du solde des transactions courantes et du solde du compte de capital. Ce solde représente la capacité ou le besoin de financement de la nation qui seront couverts par les opérations du compte financier. Cela correspond en comptabilité nationale à la somme des capacités de financement des différents secteurs institutionnels (ménages, entreprises, APU).

Le compte financier recense l’ensemble des flux (entrants et sortants) de capitaux entre un pays et le reste du monde. On y trouve principalement :

• les investissements directs à l’étranger (IDE) qui concernent les entreprises et les actifs immobiliers dans une logique de prise de contrôle (plus de 10 % de la propriété pour distinguer un IDE d’un investissement de portefeuille).

• les investissements de portefeuille

• les prêts et les emprunts bancaires internationaux

• les achats et les ventes de titres libellés en devises par la banque centrale nationale dans le cadre de sa gestion des réserves de change.

La ligne « Autres investissements » correspond pour l’essentiel à des prêts bancaires.

Enfin, une ligne d’équilibrage (« Erreurs et omissions ») rétablit l’équilibre de la balance des paiements et permet d’en porter le solde à zéro. L’importance de cette ligne (1/6 du solde de compte courant pour la zone euro, 1/2 pour les États-Unis) est fortement corrélée avec la fraude fiscale et la non-déclaration des revenus.

Le solde de la balance globale (BG) est la somme du solde opérations non-financières (transactions courantes et compte de capital), du solde des flux financiers (on retire les avoirs de réserves) et des erreurs et omissions nettes. Ce solde récapitule l’ensemble des transactions effectuées par les agents privés entre l’économie et

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le reste du monde. Il indique donc la variation de la quantité de monnaie dans le pays due aux relations extérieures de ce pays avec le reste du monde. Si la balance globale est positive alors l’économie nationale reçoit davantage de paiements en provenance du reste du monde qu’elle n’y effectue de dépenses.

Le solde des avoirs de réserves (AR) précise les conséquences nettes de l’intervention des autorités monétaires pour réduire les déséquilibres de la balance globale. Il constitue la contrepartie de la balance globale, d’où BG + AR = 0.

1.1.2 Interpréter les soldes 1.1.2.1 Les signes des soldes

Le solde courant et le solde financier ont des signes inverses. Cela signifie qu’un pays ayant un déficit courant le compense par des entrées nettes de capitaux (il fait appel à l’épargne étrangère), et inversement un pays à excédant courant finance les déficits courants d’autres pays. On peut citer le cas de la Chine, aux forts excédents, qui a financé le déficit courant américain. La question des déséquilibres courants sera vue plus en détail dans le cours sur le SMI, et sur la zone euro.

1.1.2.2 La position extérieure nette (PEN)

Alors que la balance des paiements est un indicateur conjoncturel qui reflète la situation économique et monétaire du pays à un moment donné, la position extérieure est un indicateur structurel. C’est la différence entre les stocks d’avoirs et d’engagements sur l’extérieur. Si elle est créditrice, le pays est exportateur net de capitaux et détient des « avoirs nets » placés à l’étranger ; si elle est débitrice, le pays est importateur net de capitaux et c’est au contraire l’épargne étrangère qui est placée chez lui.

Concrètement, la PEN est créditrice si un pays détient plus de créances sur l’étranger que des pays n’en détiennent sur lui, et inversement pour une PEN débitrice. Aujourd’hui, la PEN française est négative, et une grande partie de la dette publique est détenue par des non-résidents.

1.1.2.3 Une interprétation du solde des transactions courantes à nuancer

L’excédent courant peut être un signe de bonne performance commerciale et créateur d’une capacité de financement. À l’inverse, un déficit des transactions courantes est signe d’un problème de compétitivité et d’obligation de faire appel à l’épargne extérieure.

Pour autant, un excédent peut aussi traduire un excès d’épargne (comme en Chine et en Allemagne), du fait d’un faible niveau d’importation. En outre, cela peut conduire à des situations de rentes qui dés-incitent l’activité productive. À l’inverse, un déficit temporaire peut être le signe d’un dynamisme économique, et de nombreux investissements dont les dividendes (au sens figuré) viendront plus tard. Cela peut correspondre à l’endettement extérieur des pays neufs au XIXe siècle. Un excès d’endettement extérieur peut néanmoins conduire à un sudden-stop (cf. cours sur le développement).

1.1.2.4 L’ajustement structurel

Un déficit de la balance courante correspond à une épargne nationale inférieure à l’investissement national.

Ce faisant, une compression de la dépense intérieure peut permettre de restaurer l’équilibre (baisse des importations notamment). Cette solution repose donc sur des politiques d’austérité (coupes budgétaires no- tamment), et correspond notamment aux plans d’ajustement structurels imposés aux pays en développement dans les années 1980. De telles politiques peuvent avoir des effets récessifs à court terme, et l’effet à long terme est très variable selon les pays.

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1.2 La compétitivité des nations

1.2.1 Concepts et enjeux 1.2.1.1 Définir la compétitivité

Pour l’OCDE (1996), c’est la capacité de nations ou d’ensembles supranationaux à générer de façon durable un revenu et un niveau d’emploi relativement élevés, tout en étant et restant exposés à la concurrence internationale.

Pour F. Bellone et R. Chiappini (La compétitivité des pays, 2016), c’est la « capacité d’un pays à tirer avantage de son intégration internationale dans le but d’améliorer sur le long terme le niveau de vie de l’ensemble de ses citoyens ».

1.2.1.2 Mesurer la compétitivité

Pour une entreprise, la compétitivité-prix mesure sa capacité à affronter une concurrence par les prix, et son évolution dans le temps. On distingue la compétitivité-prix à l’export de la compétitivité-prix sur le marché intérieur.

La compétitivité-prix à l’export est définie comme le ratio de l’indice des prix des concurrence sur les marchés extérieurs du pays et de l’indice des prix d’exportation nationaux.

La compétitivité-prix sur le marché intérieur compare les prix de production nationaux aux prix des produits importés.

Le taux de change peut affecter la compétitivité-prix en modifiant les prix internationaux marchandises vendues (une monnaie faible permettra aux étrangers d’acheter plus).

La compétitivité-coût est mesurée à partir des coûts salariaux unitaires (CSU). Les CSU sont définis comme le rapport des coûts salariaux (salaires bruts + cotisations patronales) par la valeur ajoutée produite (le PIB pour l’ensemble de l’économie). La compétitivité-coût est mesurée par le ratio des CSU du pays et des CSU des concurrents. Pour autant, il faudrait également tenir en compte du coût du capital (fiscalité sur les profits) ainsi que le coût des consommations intermédiaires (au vu de la décomposition internationale du processus productif) et du coût des matières premières.

La compétitivité hors-prix est définie comme la différence entre la compétitivité globale d’un pays et la compétitivité-prix. C’est tous les facteurs de la compétitivité qui ne sont pas affectés par le prix. Elle donc difficile à définir. Elle découle principalement de la technologie, de la marque et de la réputation.

1.2.1.3 La spécialisation d’un pays

Pour B. Balassa, il n’est pas possible d’observer ex ante les avantages comparatifs d’un pays, on ne peut le faire qu’ex-post. L’avantage comparatif révélé correspond à la part des exportations d’un produit dans le total des exportations d’un pays divisée par la part des exportations de ce pays dans les exportations mondiales. Plus ce ratio est proche de 1, plus le pays sera spécialisé dans le secteur du produit.

1.2.1.4 La contrainte extérieure

Ce concept est important pour comprendre les enjeux, notamment du SMI et du privilège exorbitant (cf. cours SMI).

Au niveau macro-économique, la contrainte extérieure représente la nécessité de préserver l’équilibre de la balance courante pour éviter les pressions à la baisse sur le taux de change de la monnaie nationale et un

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endettement extérieur excessif. La contrainte extérieure pèse d’autant plus que la dépendance énergétique à l’extérieur est forte, et qu’elle suppose d’importer. Cependant, elle est d’autant plus desserrée que la compétitivité d’un pays est forte (Japon, Allemagne) ou qu’un pays puisse très facilement s’endetter (États- Unis).

1.2.2 La balance commerciale française : qu’en est-il de la compétitivité française et de sa spécialisation productive ?

Cette sous-partie est la synthèse de plusieurs articles :

C. Emlinger, S. Jean, et V. Vicard, L’étonnante atonie des exportations françaises, 2019 Rapport du CAE, A la recherche des parts de marché perdues, 2015 Diverses notes DG-Trésor 2017-2019

1.2.2.1 La balance des courants française Pré-Covid

• Le solde courant de la France, qui synthétise l’ensemble des flux monétaires courants avec l’étranger et traduit la capacité ou le besoin de financement du pays, se situe à un niveau proche de l’équilibre (-0,8 % du PIB) en 2019

Le solde de la balance courante (échanges de biens, de services, de revenus et de transferts courants avec le reste du monde) de la France s’est dégradé continûment et significativement entre 1999 et 2011, passant de 3,4 % à - 1,0 % du PIB (75 milliards pour la balance des biens), pour se redresser légèrement depuis, sans tendance régulière, avec un déficit moyen de 0,7 % du PIB au cours des années 2015 à 2017. L’excédent courant allemand, a augmenté au cours de la même période, pour atteindre 8,1 % du PIB en 2017. C’est avant tout avec l’Allemagne et la Chine que la France a un déficit extérieur.

En ce qui concerne les échanges de biens et services, les parts de marché de la France dans le reste du monde ont reculé entre 1995 et 2015 (surtout pendant la première décennie) passant de 5,2 % à 3,5 % alors que celles de l’Allemagne et de l’Espagne sont stabilisées respectivement à 8 % et 2 %. Dans le même temps, les exportations françaises rapportées au PIB ont stagné de 29 % en 2000 à 31 % en 2019, alors qu’elles progressaient nettement dans les autres grands pays européens.

Le solde courant français est néanmoins soutenu par un important excédent du solde des revenus primaires (51md en 2019). Celui-ci est notamment tiré par le solde des revenus d’investissements directs à l’étranger (IDE), qui a fortement augmenté depuis le milieu des années 2000, apportant ainsi des revenus d’IDE élevés (3,3 % du PIB), un niveau supérieur à la plupart des pays développés.

Post-Covid

La crise du COVID-19 a eu un impact très négatif : le déficit courant atteint près de 47 milliards d’euros, soit un peu plus de 2 % du PIB. En 2020, la crise a eu un moindre effet sur la balance commerciale des biens qu’en 2011 : le déficit étant de -65 milliards. Cependant, la pénurie de touristes, et l’infléchissement des secteurs français de pointe en termes d’exportations, n’a pu que compenser très faiblement les difficultés à l’export.

En 2021, ce déficit s’est résorbé partiellement du fait de la reprise des activités touristiques. En juillet 2021, le déficit courant représente 3,5 milliards et devrait continuer de se stabiliser avec la reprise.

1.2.2.2 Des parts de marchés perdus

Le poids de la France dans le commerce mondial de biens est ainsi passé de 5,8 % en 1990 à 3,5 % en 2017 avant de stabiliser, notamment en raison de l’accroissement du poids des économies émergentes. Ainsi, la

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part de marché de la Chine pour les biens est ainsi passée de 1 % en 1980 à 13 % en 2017. Au total, entre 1995 et 2013, la part de marché de la France a reculé de 42 % pour les biens et services, alors que la baisse n’a été que de 10 % tout au plus pour l’Allemagne sur la période. La France a été exposée à un concurrence accrue, particulièrement marquée dans le secteur automobile (qui représente 16 % des exportations intra Union européenne de la France).

Le marché européen est le principal débouché des exportations françaises, et cette zone connaît une forte croissance commerciale, bien que moindre que l’Asie. La France n’a pris qu’une part modérée à ce dynamisme : ses exportations en Europe n’ont cru que de 26 % en valeur, et sa part de marché a reculé de 12 % en 2000 à 9 % en 2018.

1.2.2.3 Expliquer les pertes de parts de marché

Le rapport du CAE (A la recherche des parts de marché perdues,2015) souligne que ni le taux de change de l’euro, le positionnement géographique de la France, la positionnement sectoriel, la politique fiscale et de logement ne sont des facteurs suffisants pour expliquer le manque de compétitivité française, même s’ils peuvent jouer sur les prix des entreprises. Les pertes de parts de marché sont dues à l’insuffisance de la « compétitivité pure ». Enfin, le faible nombre d’entreprises exportatrices françaises reflète surtout la structure du tissu productif, avec un faible nombre d’entreprises de taille intermédiaire par rapport à l’Allemagne, plutôt qu’un problème réel. En revanche, la DG Trésor (2019) note le moindre dynamisme des marchés internationaux sur lesquels la France est insérée, ce qui peut expliquer les plus grandes pertes de marché.

La valeur des biens et services produits par les entreprises peut être décomposée en : les coûts de production (coûts salariaux et coût des consommations intermédiaires), les différentes taxes sur la production, nettes des subventions et la marge du producteur.

*Les coûts de productionù

Les pertes de parts de marché de la France au sein de l’UE s’expliquent en partie par une détérioration de sa compétitivité coût dans les années 2000. Entre 2000 et 2008, l’évolution des coûts salariaux unitaires a été de 3 points supérieurs en France par rapport à la zone euro dans son ensemble de 18 points supérieurs à celle de l’Allemagne.

La France a réalisé ces dernières années des gains significatifs de compétitivité grâce aux mesures de réduction du coût du travail (CICE, Pacte de responsabilité et de solidarité) : entre fin 2013 et fin 2018, la compétitivité- coût de la France s’est ainsi améliorée de 5 % par rapport aux autres de pays de l’OCDE et de 2 % par rapport aux autres pays de la zone euro. La France a ainsi résorbé en grande partie l’écart de coût du travail industriel avec l’Allemagne, sans pour autant effacer la différence avec le coût des services. La différence de coûts dans les services s’explique par une plus faible concurrence dans les activités juridiques et comptables, en raison des nombreuses barrières à l’entrée en France. L’Allemagne a réussi, en dérégulant le secteur à partir des années 2000, a compressé les marges de ce secteur de 4 points entre 2000 et 2007. Par ailleurs, malgré la réduction du coût du travail dans l’industrie, l’Allemagne n’a pas convergé vers des coûts similaires à la France, en dépit d’un plus grand dynamisme salarial. Cette absence de convergence des prix relatifs peut expliquer en partie l’absence de regain de dynamisme. En pratique, le coût des consommations intermédiaires représente 3/4 de la valeur de la production de l’industrie manufacturière, de fait, il importe bien plus dans la production que le coût unitaire du travail. Le coût unitaire des consommations intermédiaires (CUCI) s’est accru de 2,8 % par an en moyenne entre 2000 et 2007 en France, contre 0,9 % en Allemagne. Cette dynamique provenait d’une DIPP allemande profitant des faibles coûts des pays de l’Europe de l’Est. Cet écart tend à se résorber néanmoins depuis 2010 (DG Trésor, 2020).

Les taxes

La France se singularise également par des impôts de production élevés par rapport à ses principaux parte- naires (Cotisation sociale de solidarité sur les sociétés – C3S) . La partie acquittée par les entreprises représente 5,7 % de la valeur ajoutée contre 0,6 % en Allemagne, 2,7 % au Royaume-Uni, et 3,2 % en Italie. . Cette taxe dés-incite la production sur le territoire français, ce qui conduit les entreprises à utiliser

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des intrants importés non taxés, à délocaliser ou encore à s’intégrer verticalement au détriment de la pro- ductivité permise par une diminution du niveau de la taxe.

Les marges

En France, les entreprises ont pu regagner des marges (+4,2 pts de pourcentage de valeur ajoutée entre 2010 et 2015 contre –2,4 pts de point de pourcentage entre 2000 et 2007).

Les investissements directs à l’étranger

Les entreprises françaises ont multiplié les sites de production à l’étranger (délocalisations). À l’inverse, les entreprises allemandes ont essayé d’optimiser la chaîne de production en délocalisant à l’étranger des activités à faible VA et orienter sa compétitivité et son orientation vers l’export. Les entreprises allemandes ont ainsi réussi à se maintenir sur leur territoire les activités de chaîne forte valeur ajoutée dans des domaines où l’expertise allemande est forte.

Les plus forts IDE français conduisent à réduire mécaniquement le taux d’exportation. Mais, précisément, elles engendrent des revenus d’investissement nets importants, qui atteignaient 43 milliards d’euros en 2017, soit 1,9% du PIB français (contre respectivement 1,5 % du PIB en Allemagne et autour de 0,5 % en Espagne et en Italie). Ces revenus compensent partiellement le déficit des échanges de biens et services, permettant à la balance courante de la France d’approcher l’équilibre.

1.2.2.4 La spécialisation française

Pour S. Guillou et L. Nesta (2014), la France a un problème de spécialisation fine : la France est bien posi- tionnée sur certains biens de haute technologie (comme l’aéronautique), mais reste encore peu compétitivité sur les biens de moyenne technologie.

1.2.2.5 La question de la compétitivité hors-prix

Le rapport du CAE (2015) met en évidence le manque compétitivité hors-prix français. Les trois secteurs français les plus compétitifs sur la dimension hors prix sont l’aéronautique, la maroquinerie et le vin. En Allemagne, ce sont les pièces détachées automobile, les métaux non-ferreux et les produits plastiques. Ces trois premiers secteurs représentent 15 % des exportations allemandes, contre seulement 7 % des exportations françaises. Par ailleurs, l’Allemagne est n° 1 de l’OCDE sur ces trois secteurs, tandis que la France est n° 2 sur la maroquinerie et n° 3 sur le vin. Lorsqu’on descend dans la liste, l’Allemagne reste n° 1 pour ses dix premiers secteurs, tandis que la France descend au 8e rang de l’OCDE pour son dixième secteur (produits plastiques). L’Allemagne se situe donc clairement devant la France en termes de compétitivité hors prix.

1.2.2.6 Une interdépendance entre compétitivité-prix et hors prix

D’après le Rapport Gallois (Pacte pour la compétitivité de l’industrie française, 2012), la hausse de la con- currence internationale a obligé les entreprises à réduire leurs marges pour baisser les prix sans affecter les salaires, mais la baisse des marges réduit les investissements et la possible transition vers une compétitivité hors prix, et faire subir dès lors une concurrence accrue par les prix aux entreprises. Si ce cercle vicieux a joué, il faut aussi prendre en compte la répartition de la valeur ajoutée dans les entreprises, où les dividendes des actionnaires ont fortement augmenté.

La création du CICE a joué positivement sur les marges, et contribué à la réduction du coût du travail, bien que l’impact ait été modéré sur le coût des consommations intermédiaires (cf. au-dessus).

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1.2.2.7 Le cas de l’industrie automobile

K. Head , P. Martin et T. Mayer,Les défis du secteur automobile : compétitivité, tensions commerciales et relocalisation, 2020

La perte de compétitivité de l’industrie automobile française est avant tout liée à un manque de productivité et de compétitivité des coûts de production des entreprises automobiles produisant en France. Ce ne sont pas tant les coûts du travail, que les coûts des consommations intermédiaires et des impôts sur la production qui pèsent sur les entreprises françaises.

Les relocalisations d’activité, dans l’industrie automobile, peuvent être une stratégie pertinente si elles sont le fruit d’une stratégie de réduction des coûts sur le territoire national (CUCI, fiscalité) ou bien une aug- mentation importante de la productivité. Les auteurs soulignent des études sur l’impact de la robotisation : A. Krenz et al. (2021) estiment qu’une augmentation d’un robot pour 1 000 travailleurs est associée à une augmentation de 2,5 à 3,5 % de l’activité de relocalisation (c’est-à-dire qu’on relocalise plus les activités, mesurées par un indicateur construit par les auteurs) dans un secteur.

Pour les auteurs, la relocalisation doit également s’accompagner de la création de clusters pour favoriser les économies d’échelle externe.

1.2.3 Les enjeux de l’excédent courant allemand

1.2.3.1 L’excédent courant allemand provient d’une forte épargne du secteur privé

Le solde courant allemand, représentant la différence entre l’épargne et l’investissement de l’économie, a fortement augmenté depuis 2000. Alors qu’en 2000, le solde courant allemand s’élevait à -1,7 % du PIB, il a atteint 8,17 % du PIB en 2021. La hausse du solde courant traduit surtout l’augmentation des excédents commerciaux allemands, qui ont augmenté de 7 points de PIB en plus de 15 ans. Ces excédents ont permis à l’Allemagne d’accroître ses investissements.

L’importante capacité de financement allemande résulte d’une forte épargne du secteur privé : l’écart entre l’épargne des entreprises et leur investissement a augmenté de 10 points de PIB notamment.

1.2.3.2 La modération salariale allemande, le vieillissement de la population et la politique budgétaire, principales causes de l’excèdent

La modération salariale allemande adoptée à la fin des années 1990 et début 2000 (réformes Hartz) a prin- cipalement joué sur les excédents courants, par deux canaux, et peut expliquer jusqu’à un tiers du surplus courant allemand (DG Trésor, 2017) :

• une amélioration de la compétitivité-prix (les CSU sont restés stables entre 2000 et 2008 tandis que les CSU en zone euro ont progressé en moyenne de 16 % sur la même période). L’augmentation de la compétitivité a conduit à une hausse des marges, et une augmentation des dépenses de R&D, renforçant les performances allemandes à l’export.

• Un affaiblissement de la consommation et des importations, qui accroît l’excédent de la balance com- merciale. Par ailleurs, l’Allemagne a davantage eu recours à des taxes indirectes (TVA sociale) plutôt qu’à l’impôt afin de financer la protection sociale, ce qui en soit est la recherche d’un avantage fiscal compétitif.

Le vieillissement de la population allemande conduit à une hausse de l’épargne agrégée (R. Kollman et al., 2015), notamment pour motif de précaution. Enfin, la politique budgétaire allemande a été relativement restrictive au cours de la dernière décennie, et la consolidation budgétaire aurait contribué au surplus courant allemand à hauteur de 1 point et demi de PIB.

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1.2.3.3 Un déséquilibre déséquilibrant pour la zone euro

Le FMI estime que le surplus courant allemand devrait être inférieur de 4,5 points de PIB à son niveau actuel, cet écart pouvant provenir en partie d’une sous-évaluation du taux de change effectif réel allemand, de 10 à 20 % en 2016.

En amont de la crise, l’absence d’ajustement du change au sein de la zone euro a empêché la correction automatique des déséquilibres internes (dynamique de CSU et des balances courantes divergentes). La crise a accéléré un ajustement interne dans les pays en déficit, au prix de baisses de salaires coûteuses socialement, alors qu’une augmentation de la demande allemande aurait pu minimiser le coût d’ajustement pour les pays d’Europe du Sud, notamment. Si les déficits courants des PIIGS ont été corrigés, leurs positions extérieures nettes dues à l’accumulation de déficits passés demeurent très dégradées dans certaines économies (-82 % du PIB en Espagne en 2016). Ce faisant, un rééquilibrage plus symétrique des déséquilibres de balances courantes au sein de la zone euro paraît plus souhaitable pour le FMI et la DG Trésor, notamment par un plus grand dynamisme salarial et plus d’investissement public.

1.2.3.4 Un plus grand dynamisme salarial

Les réformes Hartz ont contribué à diminuer le chômage structurel en Allemagne, et la reprise économique post-2008 a conduit à une croissance forte de l’emploi. La pénurie de travailleurs qualifiés dans certains secteurs a contribué à une pression salariale haussière. Cette réaction des salaires à la situation du marché du travail serait néanmoins modérée en raison de l’aplatissement de la courbe de Phillips (cf. cours chômage, inflation et politiques conjoncturelles). Par ailleurs, la hausse récente de l’immigration, en particulier le flux des réfugiés en 2015 et 2016, représente une augmentation de la population en âge de travailler qui pourrait en partie contenir la pression haussière.

La hausse des taux de marge des entreprises allemandes (plus de 8 points de pourcentage entre 1995 et 2007) traduit une divergence entre les salaires réels et la productivité, cette dernière étant supérieure aux salaires. Le rattrapage enclenché depuis 2010 conduit à une augmentation des salaires. Enfin, l’instauration d’un salaire minimum en 2015 a bénéficié à 10,5 % de la population salariée, sans avoir un réel impact pour l’heure sur le revenu moyen.

1.2.3.5 Des conséquences positives de ce dynamisme salarial

Ce dynamisme salarial a pour principale conséquence de ne pas affecter la compétitivité des exportations allemandes, de stimuler la demande intérieure, et d’avoir un effet de compensation pour les travailleurs les plus pauvres, particulièrement affectés par les réformes Hartz, qui avaient contribué au développement de mini-jobs précaires.

1.2.4 La compétitivité, une dangereuse obsession ? 1.2.4.1 La vision de P. Krugman

Pour P. Krugman (Competiveness : a dangerous obsession, 1994), les politiques conduites au nom de la compétitivité sont perçues erronément sous le prisme de la balance commerciale. Cela conduit à allouer excessivement des ressources au secteur exportateur (haute technologie) au lieu de favoriser également des secteurs abrités bénéfiques à la croissance et au capital humain (transport, logement, santé).

Comme vu au-dessus, la stratégie allemande qui a consisté à accumuler des excédents s’est faite au détriment de la demande intérieure, et donc des exportations des autres pays (cf. cours sur l’europe).

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1.2.4.2 La productivité plutôt que la compétitivité

Le terme de compétitivité est une notion à manier avec précaution. Il traduit non seulement une capacité à gagner des parts de marché sur les marchés extérieurs, mais également la capacité d’un pays à innover et à gagner en productivité, tout en veillant à accroître le niveau de vie. La compétitivité des échanges présente un enjeu majeur pour les économies avancées, en particulier pour celles sensibles aux fluctuations du commerce mondial comme l’Allemagne et les Pays-Bas. Elle reste un objectif pour l’ensemble des économies, mais ne doit pas se faire au détriment d’autres sources significatives de croissance.

1.2.4.3 Desserrer la contrainte extérieure

L’amélioration de la compétitivité prix et hors-prix permet de desserrer la contrainte extérieure. Pour M. Porter (The competitive advantage of nations, 1990), la compétitivité d’une nation est la résultant d’un

«diamant» à quatre faces : la qualité des facteurs de production, le poids de la demande intérieure, l’existence d’industries porteuses et liées entre elles, les conditions de la concurrence.

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