DISC OURS
D E
J. B. LECARPENTIER,
Député du Département de
laManche
,
A LA CONVENTION NATIONALE,
SurIb Jugement
déjinitifde Louis C^pet^
Du
6Janvier179^’ ^ sme. delaRépubliquefrançaise.;Imprimé par ordre de la Convention Nationale.
Malgré les médians je ferai mon devoir.
A
' PA R
I S ,D U
IM P R
IM E R
IE NATIONALE,
I 7
P
3.Législation. (N*^. 2c2.)
A
USRARY
r !.
DISCOURS
D E
J. B. LE CARPENTIER,
Député du Département de la ManchKj
A LA CONVENTION NATIONALE,
Jugement
définitifde ZjOUIS CAP RJ' Du
6 janvier lygS,Fan 2îne.dela Républiquefrancise.Représentans du peuple
,De
toute parton
appelé à l’impartiale raisoïl,à
l’éternelle justice
pour prononcer
sur Louis Capet.Tous ceux
qui ont parlé à cette tribun e ont re-connu hautement
lacoupabilitéde Louis
; mais par quelle inconcevable 'fatalitéplusieurs
de
ces ora- teursveulent-ils le faire jouirde
l’impunité ?...A
2/.
4 ) -J’ose le dire , les lioiiimes réfléchis , la nation entière , les générations futures , s’étonneront et
de
nos doutes et de notre^ foiblesse.Quoi
! Louis Capet, le plus criminel des lioiniiies respire en- corean
milieude
la nation qu’illa si cruellement outragée...de
cette nation^^qui-a vu verserpar
lesmains
de cemonstre
les torrens de sang quiinnon
dèrent plus.cruue fois cettemalheureuse
cité.
Et
l’ondemanderoit
encore aujourd’hui , si l’on doit punir fauteur de tantde maux
îCitoyens
,Ja vengeance
trop foihle attire un"second crime
, et
fimpunité
est iamère
des for-faits. . . ^ ^
Quel
prestige incroyable peutdonc
vous re- tenir? .. *Vous
croiriez-vous coupablesde
porterun
jugeiiierit équitableet salutaire?Ne
vous ytrompez
pas , Législateurs, vousêtesau moment
c|ui doit décider de votre salutou de
votre perte ....Oui
,du jugement de
Louis dé-pend
la destinéede
iaRépublique
encoreau
berceau....
Combien
ce grandévénément
doit fixerprofon-dément
votre attention et enflanier votre zèle !Les
nations étrangères , lemonde
entier , ont les re- gards attachés.^sur vous , et votîs devezcompte
à la sévère postérité devotre conduite présente; ellevous imputera
ses mauvaises destinées ,ou
bénira vos vertus et votre patriotisme.Il
ne
s’agit pas de ces petites jalousies, de ces petites rivalités^ de ces' misérables cpierelles
d’am- biihm
, qi.i iroublent sisouvent les Empires. Ilfaut niettrè de c tout‘esprit de parti , et s'occuper 4^éiieusemeat e ^ la chose publique.
(>) Yofrrnoïl opiiiion imorimeeà la date<>11 00novembre :
ça été sur ifia proposition que la Joi, qni déciarc que la
Coiivemion nationale jugera Louis
XYl
, a éiérenduele 5 décembre.i)isço-itrs
de
/. i?.Lecarpanner. A S
( 5 )
Loin
d’ici laliaiue, lesinjures , Î;'S déclamations..... Il n’appartient qu’au citoyen vertueux
dé
traiter
dignement
les intérêts desa patrie; il idap- partient qu’à celui qui estpénétré de la dignitéde
l’homiiie, de parler de ses droits.
Citoyens, tarissons , lasource de tous les raa?:îx c’est le tronc
de
l’arbre qu’il Faut attaquer , vous parcourerez ensuite les brancîies Si vous prenezune
autremarche
, vous n’alîeiadrez point le noble butauquel
tous aspirez ; et des siècles s’écouleront peut-être, sansque
des circonstances aussi propices viennent s’offrirpour
aflérmir la liberté etl’égalité, sur des basesimmuables.
. ..Je l’ai déjà dit (1); d(tns
V
exisbancode Lonis Capeb
legerme de
tous lesmaux
quinous
affligent. L’espérance des scélérats durera autant
que
lui , ilestle point centrai deralliment.Ce
n’est pas , j’en crnviens , à Louis ,comme homme
,que
ion met
bien de l’importancejlnais au caractère qu’ilaperdu
et qu’on voudroit faire revivre ; oui faire tevîvre la royauté. . . • J’ea frémis d'iiorreur !,.... Les partisans de Louis sont noiiibreux; ils travaillent continuellement
l’esprit public
,
pour
faire des prosélites et re- dresser l’idole abbattue.•Je sçais
que
les vrais répubiicains souffriroieiit mille morts plutôtque de
consentir jamais à( 6 )
l^esclavage î
mais
, représentans -,vous
êtes les pèresdu
peuple , prévenez les dangers ,empê- chez
lesdéchiremens dont nous sommes menacés
,portez la bienfaisance et la paix dans tous les points de cette Piépubliciue
que
vous avez^
crée.
Vous pouvez
d’unmot
opérer la tranquilité et lebonheur
de vosCommettans
; ils ont le di oitde
les attendre; vousles leurs devez, parce
qu
iisvous ontchoisispour
cela. . .. •.
Citoyens , voushésitezencoreà
prononcer
sur le sortde
Louis.Quel
estdonc
l’obstacle qui vous arrête?H
n’en existe d’autreque
dans cesprétendus
renversemeus de
l’ordre, des formes et des principes , donton cherche
à effrayer votre timidité , età troubler vos consciencesMais
cene
sonr là.que
de grandsmots absolument
vuidesde
sens , bienincapables, sansdoute
,de
séduirele Législateur probe et pénétréde
l’importancede
ses fonctions.
Des
crimes attroces ont étécommis
parlepre-mier
agentde
la nation.Le
coupable est con-vaincu ; il
ne
s’agitdoue que de prononcer
lapeine elle devroit être
prononcée
! . •..
Les
difficiiltées ont été,Cependant,
multipliéespeur
entraverlamarche
simple, grave et régulièreque
laGonvention
devoit prendre.On
a doutéde
la mission des députés
pour
lejugement
de Louis;on
a misen
question s’il étoitjugeahie
;on
a in- voüiié l’inviolabilité coustitutionnelle;on
a argu-menté
de lacumulation
des pouvoirs;on
a pré-tendu que
le peuple devoit jugeren
assemblées primaires;on
aavancé que
lejugement
qui seroitprononcé
par laConvention
devoit etre présente( 7 )
àla sanction
du
peuple ;on
a varié sur lespein6s à appliquer : Enfin ,on
aeu
lecourage
,au mo- ment
de juger de proposer, ceque
dans l’ancienrégime
,on
appeloitun
dcclinatoire.... (i).O
justice !O
raison !... Jusqu’àquand
serez-vous
méconnues
, méprisées ?O ma
patrie !
quand
seras-tu heureuse?.Citoyens,, plusieurspréopinans (?) ; ont lumineu-
sement répondu aux
chétives objections qu’onà
imaginéespour
faire illusion. Ils vous ontévidem- ment démontré
leurdanger
et leurinconséquence.Je
ne
diraiplusqu’un
mot.Louis
ne
pouvoit avoirpour
juges dans tout l’Empireque
ses accusateurs, parce
que
tout le peuple adû
l’accuser et l’a accusé véritablement.La Convention
aéténomméo
,
pour
lejuger,parce
qu’aucun
autre tribunal n’eûtétécompétent.
Celane
peutêtre cotesté debonne-foi. Jene veux pour
l’établir
,
que
rappelermes
collèguesau moment où
ilsontéténommés
, età celuidu 20 septembre où
l’Assemblée se forma. Seroit-il possiblequ’un
espacede
troismois
eût fait oublier les disposi- tions d’alors?.. ..
Aussi la
Convention
a - t- elle déclaré qu’elle(1) Beaucoup de Coristituans tiennent u?z peu à la. Cons- titutions :ilestbiennaturelqu’ilsaimentleurenfant.»•••
Certains Législateurs du10août, croient avoir tout faitet pouvoir*seuls tousfaire»•••»»
(2) J’avois d’abord entré dans deplus grandsdétails, maïs
j’ai téduit
mon
Discours au point simple de la question afin d’éviter les redites.( 8 )
pjgeroit
Louis XVI
; elle a demême
réglé lamarche
de riiistructionpar plusieurs décrets exé- cutés ; elle s’est débarrassée des formes routin-^
uiéres
, qui obstruent si souvent tes
canaux
de la justice; Louis a été interrogé ,
entendu,
défendu, eniinl’instruction estconsommée
; Louis s’atiend lui-même que
vous le jugerez , eton vous
pro-E
ose
un
déclinatoire. C’est, ilfaut ledire,lecoin-ledu
délireetdelà déraisonoù
plutôt ,c’est la manifestationdu
regret de n’avoir pas long-temps
discuté, prolongé, perpétué
une
question,
qui sérieusement n’en
pou
voit faire une.Je
ne
parlerai pasde V
inviolabilitédont on
vou- droit implorer le secourspour
innocenter Louis ; cette ressource est si pitoyableque
laplupartde
ses défenseurs
Font abandonnée.
Jene
ni’ar- réterai pas davantage à la longue -et fastidieuse défensede
Louis. Si l’onmanquoit
de preuves contre lui,
on en
trouveroit juscpies dansses pré- tendusmoyens
dejustification .mais
continuons,»Maintenant que
vous devez juger ,où
plutôt répéter lejugement
de Louis , écrit dans tous lescœurs
Françaisen
caractères de feu ; la peinen’est pas douteuse lamort
est la seule qui doive être appliquée.Demander
qu’il soitenfermé
, exiléou
déporté,c’est
demander en
d’autres termes , qu’il soit rétablisur le trône etque
lepeuplesoit réasservi. . .On
craint la haine des autres rois ,meme
desautres nations , si Louis est supplicié.
Je
réponds
d’abord cjue c’estune
bien funeste^( 9 )
politique
que
celle qui arrête^ le cours de la justiceCitoyens , vous devez
condamner
Louis , etvous ne pouvez
luipardonner Dans
lepremier
cas la justice sera satisfaite; dans lesecond,
les partisans de Louis seroient redoutables.Car
siTon
peut croirequ’ungrand
acte de justicenous
fasse desennemis
, coin bienn’enaurionsnous
pas davan- tage dans lalâcheté ?.. . .Législateurs,
nous
avons juré la destruction dès tyrans ,commençons
par le nôtre.Prononçons hardiment*
....Que
par des craintes exagérées, des terreurs- paniques , votre caractère augustene
soit point amoli.
Que
votre fermeté sedéveloppe
et
donne
aumonde
entier l’exemple le plus écla- tant de justice et de hainepour
les tyrans.L’arche de la Constitution républicaine , n’est pointencore organisée; en architectes habilesvous aurez soin d’en éloigner toutes les parties hétéro- gènes.
Commencez
dès cemoment
à détruire et anéantir tout ce qui semhleroity
nuire. Louis se-roit toujours
un
des leviers puissans qui pourroit démolir ce sublime édificeQuant
à l'appel au peuple, il est ridicule et imprancaijk
Les
lois de ce ail,de circonstances et
réglémen-
tnirc'i , ite src.t point soumises à la sanction
du
pen]>io , il n’y a cfue les lois constitntionnelles.
Ainn' ( H ne prétendra pas
que
lejugement
d’unhomme
soitun
acte constitutionnel ;donc
, c’est uacr riLlicuîe absurditéjue dedemander
la sanction sur lejugement
de Louis( 10 )
’
^
On
a fait voir clairement,
que
ce seroit allumeK, leflambeau
de la guerre civile. Celame
paroitd’autant plus certain
que
Louis auroitpour
jugesune
foule cVintrigans
,de modérés
, d’aristorçrates et
de
royalistes,
que
le peupleen masse
, exerçant sa souveraineté, a voulu éloignerdu
sanctuaireoù
Louis devoir entendre son arrêtde
mort.En
vous choisissantpour
le. représenter, à vous,•seuls, ce
bon
peuple a confié le soin d’affermir la liberté qu’il avoit sipéniblement
conquise. Il n’a pasentendu que
vous le fassiez rentreren
lice avec ses aiUagonistes,
pour
savo-ir à qui appar- tiennent les fruits de la victoire.La
saine partiede
la nation, l’imposante
ma-
jorité est loin, j’en conviens ,
de
flécliirà la voixde
l’intrigue etde
la cabale ; elle sera toujours impassible; mais
pourquoi provoquer vous-mêmes
l’occasion des troubles et des dissentions qui se- roient infailliblement la suite
de
l’appel aupeu-
ple ?(i)Si tous nos
ennemis du
lo août étoientaussi si-lencieuxy
que
lelendemain
de cettemémorable
journée.
O
jene
serois plus inquiet I l’appelau
peuple pourroit s’exécuter paisiblement et sansdanger
; mais dans cettehypothèse on ne
le de-manderoit
pas , etil seroit parfaitement inutile et frustre parceque
vous êtes sûr de l’assentimentunanime
de ce peuple quivous a choisispour
juger irrévocabiement Louis , etpour
faireune Cons-
titution.C’est
donc uniquement pour
nosennemis du
lO aoûtqu’on
vous proposel’appel au peuple...
(i) Lecélèbre J. J, Roiisseati a dit**** jamais on.ne cor*
romptle Peuple
, mais souvent onle trompe.•i
•
' ( 11 )
Eh
juste ciel 1où en
serions-nous
siun
pareilsystème
étoit acceuilli? Qu'ils seroientheu- reux
lesennemis
irréconciliablesdu
peuple detrou- verune Convention
quiles protégeâtouvertement
îIl est
donc
évidentque
l’appelau
peuple tendà
favoriser la causedu
Tyrais^, de ses complices, età punir le peuple lui-
même
d’avoir fait la ré-•volution.
Mille fois
vous
avez dit, dans cette enceinte
,
que
l’anarchie conduisoitau
despotisme.Or
, par l’appelau
peuple , vousamèneriez
l’anarchieConcluez
Je
demande que
la discussionfermée
,Ton pose
ainsi la question, Louis
Capet
subira-t-il lamort?
Chaque membre de
laConvention répondra
à la tribune parouiou
par non.Quand
lerecenfemenn
des suffrages sera fait et le résultatproclamé
; le Conseil- exécutif sera chargéde
lapromte
exécutiondu
décret.J’ai