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JACQUES CROZEMARIE* LUTTER MIEUX CONTRE LE CANCER

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Academic year: 2022

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LUTTER MIEUX CONTRE L E CANCER

Diminuer de moitié le nombre des victimes du cancer, augmenter de 50 % le taux actuel de guérisons, grâce au dépistage précoce et à la prévention, c'est un objectif parfaitement réalisable.

L

a création d'un Centre européen de recherches appli- quées à la détection et à la prévention des cancers, qui est soutenue par l'Association pour la recherche sur le cancer, a pour buts essentiels d'entreprendre des actions de prévention et d'information auprès du public et de développer des moyens de recherche perfectionnés afin de détecter les cancers à des stades plus précoces.

Il est nécessaire de développer les moyens de recherche perfectionnés afin d'identifier les populations à risque, de détecter les cancers à des stades plus précoces, de rendre les diagnostics plus précis, de mieux déterminer la nature des tumeurs en vue de définir une prompte action thérapeutique et de surveiller de plus près les changements survenants pendant et après le traitement. L'identification des populations à risque conduira à des programmes de dépistage plus ciblés.

* L'auteur est directeur du Centre pour le soutien de la recherche sur le cancer du CNRS, Villejuif, U 47, et président de l'Association pour la recherche sur le cancer.

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Le développement de meilleurs tests de dépistage et de diagnostic permettra une détection et une identification des tumeurs plus précoces avant qu'elles ne deviennent envahissan- tes ou essaiment en métastases. Les progrès dans le dépistage et le diagnostic sont aussi essentiels pour le médecin, car ils conditionnent le choix des thérapeutiques les plus efficaces.

En ce qui concerne la recherche relative au diagnostic, -l'accent est à mettre encore plus sur le transfert des progrès

conceptuels et technologiques de la recherche fondamentale vers le milieu hospitalier, qu'il s'agisse de marqueurs tumoraux, d'anticorps monoclonaux ou de sondes d'acide ribonucléique recombinant. L a détection des polymorphismes génétiques héréditaires sera aussi utilisée pour identifier les individus prédisposés au cancer. L a détection des altérations génétiques ou des structures cellulaires modifiées aidera à découvrir une cancérisation naissante.

D'ores et déjà, une commission spéciale est chargée de mettre au point de nouveaux moyens de dépistage précoce et de superviser les actions de prévention entreprises par le centre.

Cette commission comprend notamment les professeurs Abit- bol, Bellet, Bernard, Boiron, Broustet, Carcassonne, Chambon, Chatal, Chermann, Feldman, Fridman, Guillouzo, Imbach, Israël, Kourilsky, Laval-Jeantet, Lenoir, Mawas, Milhaud, Philip, Ribet, Richier, Samaille, Schneider, Schwarzenberg, Stehelin, Tubiana, Turc Carel, Veyre, Witz, Zagury, Zalta. Ils apportent, par la qualité de leurs travaux, leur caution scientifi- que à ce projet.

Ils auront également pour tâche, dans leurs laboratoi- res respectifs, de mettre au point des tests.

Pour la création d'un centre

de recherche européen situé en France

Européen, ce centre le sera à plusieurs titres. Il sera situé en France, l'un des pays moteurs de la recherche sur le cancer dans la Communauté. De nombreuses collaborations scientifiques unissent déjà les efforts des chercheurs européens.

Grâce aux congrès scientifiques et aux bourses internationales, le centre sera une des plaques tournantes européennes de la recherche sur le dépistage précoce et la prévention.

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Cette initiative privée - la première de ce type en Europe - s'inscrit parfaitement dans le cadre des propositions d'action du Conseil de l'Europe en matière de lutte contre le cancer.

L a réduction des risques de développer un cancer impose de lutter contre de mauvaises habitudes alimentaires.

Beaucoup croient que « n'importe quoi peut causer le cancer et qu'il n'y a pas grand-chose à faire pour l'éviter ». Ces idées sont fausses et, de plus en plus, le comportement de chacun permet de prévenir certains risques de cancers. Comme disent les Améri- cains : « Nobody takes better care of you than you » (personne ne peut mieux s'occuper de vous que vous-même).

Insistons sur les effets nocifs du tabac. Il n'y a pas deux solutions : i l faut à tout prix ne pas fumer.

Les études scientifiques sont indiscutables ; 30 % des décès par cancers sont liés au tabagisme : poumons, rhinopha- rynx, œsophage, pancréas, reins, vessie. L'objectif principal est de veiller à ce que cette habitude socialement dangereuse disparaisse : le fumeur passif ou « fumeur malgré lui » inhale sans le vouloir quatre-vingt-quatre substances cancérigènes connues.

Un exemple inquiétant vient d'être porté à notre connaissance par les responsables de compagnies aériennes. E n effet, l'air que nous respirons pendant les transports en avion se trouve assez rapidement chargé de fumée provenant des cigaret- tes se consumant entre deux bouffées. Ces foyers de fumée proviennent de deux ou trois endroits différents selon qu'il existe ou non une première classe, une classe affaires, et une classe économique. Et, pour s'en convaincre, i l n'est, paraît-il, que de constater l'encrassement des filtres de climatisation malgré l'augmentation du rythme de renouvellement de l'air des cabines qui, sur les Airbus par exemple, se reproduit totalement toutes les quinze minutes, et malgré aussi les mesures prises par les compagnies aériennes qui ont interdit, il y a longtemps déjà, l'usage de la pipe ou du cigare, tous deux grands producteurs de fumée.

Il a été démontré que, dans certains cas et sur certains appareils, le personnel de bord ainsi exposé à cette atmosphère enfumée, se trouve dans la situation de quelqu'un vivant dans l'entourage d'une personne qui fumerait un paquet de cigarettes

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par jour. Les syndicats des personnels navigants ont déposé des réclamations concernant les troubles occasionnés par cette constante exposition aux effets nocifs du tabac. Les non- fumeurs, équipage et passagers, enfermés avec les fumeurs, se trouvent ainsi exposés aux risques encourus par les consomma- teurs de tabac sans aucune possibilité de se protéger.

Pour une raison qui ne concerne pas au premier chef la santé mais la sécurité des passagers et de l'équipage, l'interdic- tion de fumer est certainement pour bientôt. Les frais de nettoyage et d'entretien seront sensiblement diminués et chacun devrait, en toute raison, y trouver son compte, sans oublier les fumeurs impénitents à qui cette petite halte ne peut faire que du bien.

Dans l'Hexagone, les lignes aériennes intérieures sont principalement desservies par A i r Inter, compagnie dont les vols durent au maximum 1 h 50 : cela correspond à peu près au temps passé dans les salles de cinéma, lieux où il est interdit de fumer, ce dont il faut se réjouir. L'interdiction de fumer dans les vols moyen-courrier serait une excellente initiative, tant sur le plan de la santé que sur le plan économique. Ce serait un exemple précurseur d'autres mesures de « légitime défense » en faveur des fumeurs-malgré-eux, mesures qui devront nécessairement être prises dans un avenir proche.

On peut parfaitement

s'arrêter de fumer, et modifier son alimentation

A ceux qui proclament que le tabac apporte un agrément dans la vie quotidienne, évite le stress, etc., il faut conseiller d'autres occupations plus saines telles que le sport pour certains, le bricolage, le jardinage, voire la simple prome- nade pour d'autres. On sait combien il est difficile de se désintoxiquer du tabac ; il est donc nécessaire de trouver des compensations, un équilibre, un mode de vie différent. Les effets bénéfiques se feront rapidement ressentir : chacun sait qu'on respire mieux quand on cesse de fumer, on retrouve le goût des aliments et on ne tousse plus. A l'image séduisante du cow-boy qui vante les « mérites » d'une marque connue de cigarettes, il faudrait substituer celle - moins sympathique - du cow-boy sujet aux quintes de toux incontrôlées.

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De même, si la population acceptait de modifier ses modes d'alimentation en mangeant plus de fibres et moins de graisses, environ 35 % des décès par cancers pourraient être évités. Il faut convaincre chacun du lien évident entre nutrition et cancer, confirmé par les plus récentes études scientifiques internationales mais aussi faire connaître ce qu'est une saine alimentation.

La prévention s'identifie aussi aux risques provoqués par l'alcool, les expositions au soleil, les œstrogènes, les conditions de travail, le cadre de vie, l'environnement, voire les virus.

C'est une mobilisation générale contre les cancers qui doit être décrétée.

Cette mobilisation concerne les médecins, les cher- cheurs, les professionnels de la santé, les enseignants, les responsables à de nombreux niveaux. Elle concerne aussi toutes les générations. C'est la responsabilité des générations actuelles de former une nouvelle génération qui aura su dominer tous les facteurs contrôlables de cancérisation.

Pour un dépistage plus précoce

Autre objectif du centre : développer de nouveaux moyens de dépistage précoce des cancers. Plus la tumeur est détectée tôt, plus elle a de chances de guérir.

Les recherches porteront plus particulièrement sur des hormones, enzymes, protéines, produits métaboliques, altéra- tions génétiques spécifiques, copies d ' A D N ainsi que l'action des oncogènes et, notamment, l'oncogene C-Myc. L'oncogène C-Myc, un des premiers oncogènes connus, est l'homologue cellulaire humain du gène transformant du virus de la myélocy- tomase aviaire. L a fabrication d'une cellule normale est guidée par des milliers de gènes (fragments d ' A D N ) inclus dans nos chromosomes. Certains de ces gènes, appelés proto-oncogènes, sont inactifs à l'état normal mais peuvent, dans certaines conditions, se transformer en gènes actifs ou oncogènes. Cette activation de l'oncogène est l'une des étapes conduisant une cellule normale à devenir cancéreuse. Dans le cas de l'oncogène C-Myc, l'activation pourrait se faire par passage du fragment du

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chromosome contenant C-Myc (chromosome 8) sur le chromo- some 14. Ce passage, ou translocation, conduirait à l'activation C-Myc par des fragments de gènes situés sur le chromosome 14.

Une telle translocation est observée dans 75 % des cas de lymphomes de Burkitt (tumeur fréquente dans certaines régions d'Afrique tropicale), ce qui suggère un rôle de C-Myc dans le développement de ces lymphomes.

Les caryotypes (représentant l'arrangement des chro- mosomes dans le noyau cellulaire) donneront des indications extrêmement précieuses concernant les anomalies de certains chromosomes dans certains cancers. Par exemple, le cancer du côlon, pour lequel un facteur génétique intervient probable- ment, les tumeurs embryonnaires, la tumeur de Wilms, les rétinoblastomes, ostéosarcomes, leucémies myéloïdes chroni- ques (sans compter aussi, en dehors de la cancérologie, les indications que cette analyse pourrait apporter pour une affection telle que la maladie d'Alzheimer relevant d'une translocation chromosomique anormale).

La technologie de pointe au service des chercheurs

Des appareils d'imagerie médicale de très haute préci-

sion équiperont ce centre. Il sera fait appel, notamment, à la haute technologie européenne et aux compétences des cher- cheurs de la Communauté européenne.

D'ores et déjà, un prototype d'appareil, actuellement à l'étude en République fédérale d'Allemagne, a retenu l'intérêt des spécialistes pour équiper le centre. Cet appareil d'imagerie par résonance magnétique (IRM) pourrait permettre l'analyse chimique par spectrographie des nombreux composants du sang qui contiennent des noyaux d'hydrogène. E n étudiant les fractions lipidiques du sang d'un malade porteur d'un cancer évolutif, le Pr Fossel, radiologiste de l'hôpital Beth Israël à Boston, aurait découvert des modifications caractéristiques du spectre I R M absentes du sang des sujets sains.

La spectroscopie I R M étudie dans ce cas les protons des groupes méthyl et méthylène des lipoprotéines et des lipides plasmatiques. Les pics graphiques correspondant à ces protons

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semblent différer significativement chez les cancéreux. Actuelle- ment, ces résultats sont fondés sur plusieurs centaines de cas vérifiés, et le taux d'erreur de la méthode est faible. L a visite du laboratoire du Pr Fossel montre l'intérêt de ces travaux.

Beaucoup de recherches devront confirmer ces résultats et permettront de comprendre le phénomène métabolique mis en évidence, probable réaction de l'organisme à la présence de la tumeur. L a qualité des premiers résultats semble permettre de grands espoirs. Dans quelque temps, peut-être, une simple prise de sang permettra de poser le diagnostic de cancer... E n attendant, une nouvelle voie est ouverte, qui peut bouleverser nos conceptions du dépistage et permettre de repérer le cancer à son début à un stade où on sait le guérir.

Un deuxième appareil permettant l'étude du polymor- phisme humain et les bases biologiques de l'individualité est également commandé.

Les nouveaux ordinateurs permettent d'absorber d'énormes quantités de données utilisables

Chaque génération a bénéficié de sa technologie et de ses limites. Actuellement, la technologie informatique permet d'absorber d'énormes quantités de données. U n changement d'échelle spectaculaire a déjà fait passer, au sein d'un labora- toire de recherche cancérologique, le traitement par exemple de

1 000 opérations par seconde à 1 000 000 d'opérations par seconde grâce à un micro-ordinateur. L'accroissement de la capacité de mémoire est égal et même supérieur à la vitesse d'accroissement de la vitesse de traitement. Le système du disque dur permet déjà de retrouver 10 à 30 fois plus d'informa- tions que le système des ordinateurs conventionnels.

L a prochaine génération d'ordinateurs existe déjà avec 5 à 10 fois la vitesse de traitement et 10 à 20 fois la capacité de mémoire des appareils actuels. L a naissance du superordinateur est pour demain, sans parler de l'amélioration apportée par l'électronique digitale, la technologie des fibres optiques et l'utilisation des supraconducteurs.

L'étude du nombre de jeux de chromosomes - appelé ploïdie - s'est également révélée importante pour définir les

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néoplasmes de nombreuses localisations dont l'endomètre, les ovaires, le larynx, la vessie, la prostate, les testicules, l'œsophage, l'estomac et le côlon. Alors que la ploïdie peut se mesurer grâce aux techniques de cytométrie à flux, la photo- métrie digitale présente dès maintenant l'avantage supplémen- taire de permettre l'observation de la forme et de la structure de la cellule.

Le diagnostic du cancer est automatisable

Sans abandonner les moyens actuels de diagnostic des cancers tels que des techniques de routine d'histopathologie utilisant la microscopie conventionnelle, la microscopie spécia- lisée complétée par la fluorescence ou l'électronique, des colorations sophistiquées sont mises au point permettant de confirmer les diagnostics mais l'apparition de l'imagerie digitale et du cytomètre à flux ainsi que l'équipement informatique adéquat laissent espérer très rapidement des progrès plus que spectaculaires.

L'automatisation du diagnostic des tumeurs peut ne pas être un rêve et se concrétiser. Des interactions au niveau moléculaire pourront ainsi être étudiées.

Une caméra vidéo à cible de silicone pourrait découvrir des images fluorescentes à un niveau microscopique.

Les systèmes experts utilisent avec une rapidité décon- certante des règles établies par des spécialistes permettant de reproduire le processus de la pensée humaine. Ces systèmes experts peuvent constituer une aide utile dans de nombreux domaines médicaux. Leur application à l'imagerie digitale peut, notamment, entraîner des progrès substantiels dans le diagnostic du cancer.

L'apparition dans cet arsenal de nouveaux appareils, tels que le microscope à laser à grande vitesse, laisse présager de très grands progrès.

Sur le plan international, un rapprochement est en cours avec les chercheurs de Boston (le Massachusetts General

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Hospital et le Beth Israel Hospital), de Washington (le National Institute of Health et le National Cancer Institute), ainsi que de l'université de Tel-Aviv (Pr Isaac, Pr Witz) et du Weizmann Institute of Science de Rehovot (Pr Michael Feldman).

Parallèlement, aux Etats-Unis, une initiative analogue est conduite sous l'égide du Anderson Hospital de Houston (Texas) et de la Strang Clinic de New York, pour ne citer que ceux-ci. Nous espérons qu'elle s'étendra rapidement à l'ensem- ble de la Communauté européenne.

J A C Q U E S C R O Z E M A R I E

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