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Le statut de l 'enfant procréé artificiellement :

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482

nvs

'

SYNTHÈSE

médecine/sciences 1986; 2 : 482-8

Geneviève Delaisi de Parseval

Psychanalyste, chercheur en bio­

éthique.

Anne Fagot-Largeault

Maître de conférences de philoso­

phie à l'université Paris XII, médecin psychiatre attaché à l'hô­

pital Henri-Mondor à Créteil.

ADRESSES---

G. Delaisi de Parseval : I I 8, rue de Vaugirard, 7 soo6 Paris.

A. Fagot-Largeault : I I 5-I I7, rue Saint-Antoine, 7 5004 Paris.

Le statut de l 'enfant procréé artificiellement :

disparités internationales

A la suite des colloques internationaux orgamses en 1985 à Paris et Lausanne, les auteurs commentent d'un point de vue éthique et psychologique les disparités internationales des lois et réglementations sur la procréation artificielle.

L e droit de ne pas avoir les enfants qu'on ne veut pas est aujourd'hui effectif dans les pays qui offrent à leurs citoyen(ne)s un large accès à la contraception et à l'inter­

ruption de grossesse; il y naît de moins en moins d'enfants non­

voulus (donc, d'enfants disponibles pour l'adoption). Le droit d'avoir les enfants qu'on désire est défendu avec moins d'unanimité que le pré­

cédent.

<c

Avoir un enfant n'est pas un droit imprescriptible de l'être humain, . . . l'insémination ne doit être autorisée qu'à la condition d'of­

frir à l'enfant à naître la possibilité d'une croissance favorable

>>,

dit-on en Suède [

1]

, tandis que dans l'état canadien du Saskatchewan, refuser l'insémination d'une femme céliba­

taire passe pour une mesure discri­

minatoire, et que la Commission de réforme des lois de l'Ontario s'est demandé si des citoyens canadiens à qui l'on dénierait l'accès à une technique artificielle de procréation n'auraient pas un recours auprès des

Nations Unies [2]. Dans les pays d'Europe de l'est, le droit d'avoir les enfants qu'on veut, quand on le veut (sauf si cela met la santé en danger), apparaît comme un droit constitutionnel, il implique la gra­

tuité des traitements de la stérilité [3

]

. Savoir si la Convention européenne des droits de l'homme implique, ou non, un

<c

droit à l'enfant

>>,

est objet de controverse [4]. D'aucuns, en France, jugent

<c

que l'on fait plus de cas de l'enfant

désiré que de l'enfant né

>>

[5]. Ce débat est très vif depuis les prises de position de R. Badinter lorsqu'il était Garde des Sceaux

[6].

Filiation génétique, filiation volontaire et filiation légale.

Cette incertitude se reflète dans le statut de l'enfant

<c

artificiel

>>.

L'en­

fant

<c

naturel

>>

souffrit naguère de situations juridiques privilégiant le lien social de filiation. On considéra comme un progrès l'évolution du droit qui, en ajoutant au critère social le critère génétique pour la filiation paternelle, rendit aux

mfs n° 9, t1ol. 2, novtmbrt 86

(2)

<< bâtards ))- (enfants rarement dési­

rés) le droit de revendiquer l'héri­

tage de leur père (loi de 1972, en France). Et voici que, paradoxale­

ment, l'enfant né des techniques artificielles de reproduction est, dans bien des cas, un bâtard à qui l'on dénie la << vérité )) de sa filiation biologique, au nom d'une volonté de procréer. Qui est l'enfant de qui ? De larges disparités internationales mettent en évidence les hésitations contemporaines. On parlera ici sur­

tout de l'insémination artificielle avec sperme de donneur (lAD), pratique la plus ancienne, la mieux connue, et sur laquelle beaucoup de pays ont déjà pris des mesures législatives ou réglementaires.

Depuis que l'lAD se pratique dans le secret des cabinets médicaux (c'est-à-dire depuis 1 920, environ), l'effort des parties a été d'effacer toute trace du lien biologique entre l'enfant né de l'lAD et le donneur de sperme : l'enfant était enregistré à l'état civil comme né du couple dont la femme avait été inséminée, il ignorait souvent lui-même sa filiation << artificielle

)>,

le dossier du donneur anonyme était inaccessible ou inexistant. Juger que ce qui fait la paternité, c'est la volonté d'avoir un enfant, de l'élever, de lui transmettre son patrimoine, c'est se ranger à un critère culturel de la filiation; les anthropologues font observer que ce critère culturel prime dans beaucoup de civilisa­

tions, où c'est le système de parenté qui désigne les vrais géniteurs. Il se trouve que dans la nôtre, le système traditionnel de parenté s'est effacé derrière une réalité génétique éta­

blie scientifiquement. Toutefois, certains pays ont intentionnellement conservé le critère social pour ce cas, en prévoyant qu'un enfant né d'lAD sera au regard de la loi, non pas l'enfant du donneur, mais celui du conjoint de la femme inséminée, cela de façon irréversible. Le Code civil de la Louisiane (1980) stipule :

<< le mari ne peut désavouer sa pater­

nité à l'égard d'un enfant né d'une insémination de sa femme à laquelle il a consenti )) [3]. Et le Code civil du Québec (1980) : << nul ne peut contester la filiation d'une personne pour le motif qu'elle a été conçue par insémination artificielle )) et << le recours en désaveu ou en contesta-

mjs n° 9. vol. 2, novembre 86

tion de paternité n'est pas recevable si l'enfant a été conçu par insé­

mination artificielle, soit des œuvres du mari, soit des œuvres d'un tiers, avec le consentement des époux )) [3].

Les difficultés immanentes à ce système tournent autour du consen­

tement du père social, mari ou concubin stable de la femme insémi­

née. L'lAD est cherchée, en règle générale, comme remède à sa stéri­

lité, ou pour prévenir la transmis­

sion par lui-même à l'enfant d'une maladie génétique. Faut-il exiger de lui un consentement écrit et signé, comme on le fait par exemple dans l'état canadien du Yukon, et dans certains états américains ? Faut-il le présumer consentant, au risque de le voir un jour apporter la preuve qu'il n'avait pas réellement consenti ? Le problème est bien posé dans le rapport sur la repro­

duction artificielle présenté par la Commission de réforme des lois de l'état canadien de l'Ontario [2] : si la possibilité que le donneur soit investi de la paternité est à tout jamais barrée, et que le mari pré­

sumé consentant est autorisé à apporter la preuve de son défaut de consentement, l'inconvénient inévi­

table (et accepté par la commission ontarienne) est que certains enfants nés d'lAD se retrouvent sans père.

La même conséquence existe, natu­

rellement, là où l'insémination est accessible aux femmes célibataires.

Ceux que n'effraie pas cette consé­

quence font observer que, dans beaucoup de pays, l'adoption est permise aux célibataires. Quant au donneur, là où le critère volontariste de la filiation domine (Québec, France, état australien du New South Wales, etc.), sa réalité même est oblitérée.

Le

droit de l'enfant à connaître sa filiation

génétique.

Tout à l'opposé, en . Allemagne Fédérale, le critère biologique est, en cas de contestation, décisif. Il n'existe pas de législation propre à l'lAD, mais une jurisprudence redoutable pour les donneurs de sperme. Une décision du tribunal fédéral (BGH), en 1983, implique qu'en cas de désaveu de l'enfant lAD par son père << apparent )), la paternité revient automatiquement

au donneur. Le médecin insémina­

teur est tenu d'informer le donneur que le don de sperme, n'étant .pas considéré comme un acte médical, n'est pas couvert par le secret pro­

fessionnel . L'lAD est assimilée à l'adultère. Le conjoint stérile, même s'il a consenti à l'insémination de sa compagne, peut contester sa pater­

nité (et s'il meurt, ses ascendants peuvent le faire en son nom) dans un certain délai après la naissance de l'enfant. L'enfant lui-même peut contester sa filiation (dans un délai de deux ans à partir du moment où l'lAD lui est connue) en cas de divorce de ses parents, ou de faute reprochée à son père social. Quand la procédure judiciaire aboutit, cet enfant de légitime devient illégi­

time, et ce rétroactivement depuis sa naissance. Si la paternité du don­

neur est alors prouvée, la filiation naturelle est rétablie, car << un enfant ne peut rester sans père )). Le médecin est tenu de communiquer les informations pertinentes tou­

chant le donneur, et celui-ci << ne peut se soustraire aux conséquences de son don )) [7 ].

Il est compréhensible qu'en RF A, depuis 1 983, les donneurs se soient faits rares, et les hôpitaux publics ne pratiquent plus d'inséminations

·

artificielles. Mais les gynécologues privés la pratiquent. En 1985, on estimait à plus de 20

ooo

personnes la population née d'lAD en Répu­

blique Fédérale [7]. Le nombre des contestations venues devant la jus­

tice est très faible, ce qui suggère que, même dans ces conditions pré­

caires, la volonté des parties l'em­

porte sur la filiation << automatique et obligatoire )) prévue par la loi. En Suisse, où environ une naissance sur cent serait actuellement une nais­

sance lAD, la jurisprudence est ine­

xistante. Pourtant, la Suisse penche pour une attitude proche de celle de la RF A. La réforme du droit de la filiation (1976) y a prévu qu'un mari ne peut désavouer l'enfant lAD s'il avait consenti à l'insémination de sa femme. Mais l'enfant,

.

jusqu'à 21 ans, avec l'aide d'un curateur, y peut désavouer son père social, si

·

ses parents se sont séparés. Au cas où cette action aboutit., l'enfant peut, soit être adopté ·par le nouveau . conjoint de sa mère, soit (peut-être) chercher à établir une filiation avec

463

(3)

484

le donneur. Le cas ne s'est pas pré­

senté, mai:; un juriste S\lisse éminent a récemment écrit que dans cette hypothèse, le médecin serait alors tenu de révéler l'identité du donneur

: <<

la simple promesse d'anonymat doit céder devant le droit de l'enfant à faire établir un lien de filiation

>>

(8].

Les pères des enfants nés d'insé­

mination artificielle.

L'anonymat du donneur joue donc un rôle crucial là où le critère biolo­

gique de la filiation pèse fort. En France, où la population née d'lAD était estimée à 1 2

ooo

personnes en 1985 [9], la loi de 1972 {qui ne men­

tionne pas l'lAD) a largement ouvert le droit de faire prévaloir la vérité génétique en cas de contesta­

tion de paternité. Le tribunal de Nice, en 1976, jugea qu'un mari pouvait désavouer l'enfant né de sa femme après lAD (en apportant la preuve qu'il n'était pas le père géné­

tique), bien qu'il eût préalablement consenti à cette lAD. Cela rejoint sans doute une tendance française à faire de l'insémination un droit de la femme, le consentement du conjoint étant alors secondaire (même si les CECOS - Centres d'étude et de conservation du sperme - se don­

nent pour règle de réserver l'lAD aux seuls couples). Si, en cas de désaveu par le mari, l'enfant reste sans père, ce n'est aucunement par une impossibilité juridique; c'est parce que la procréation artificielle est médicalisée, et que le corps médical respecte strictement le secret professionnel. Révéler le fait de l'lAD, ou l'identité du donneur, serait pour le médecin un manquement à la déontologie;

aucun tribunal ne saurait le contraindre à une telle révélation, parce que le droit de connaître ses origines n'est pas, en France, un droit reconnu. Cependant, le main­

tien de l'anonymat des donneurs est actuellement en discussion [5].

Sur l'acceptabilité d'inséminer des femmes célibataires ou lesbiennes, chaque médecin prend sa décision en conscience; l'Ordre des Méde­

cins tolère une grande diversité d'attitudes, insistant sur le fait qu'en contrepartie de cette liberté, chaque médecin en ces matières engage sa · responsabilité et doit

informer ses

<<

patients

>>

de son code d'éthique personnel. Il faut noter, qu'en France, le fait que l'lAD entraîne une déclaration mensongère à l'état civil (s'il est

<<

reconnu

>>

par le concubin de la

femme) ne soulève pas d'objection;

en Grande-Bretagne, par contre, l'état civil étant en principe

<<

véridique

>>,

le rapport Warnock

proposait qu'on indique sur le registre que le conjoint est le père de l'enfant grâce à un don (by dona­

tion) [4].

Les droits du donneur de gamètes . . .

Dans l'état australien de Victoria, une loi détaillée ( 1984) couvrant l'insémination artificielle et la fécondation in vitro (FIV) prévoit qu'en cas de don de gamète, aucun lien de filiation ne peut être établi entre le donneur (ou la donneuse) et l'enfant né grâce au don. Le lien de filiation est automatiquement établi avec le couple receveur, le consente­

ment du conjoint stérile est pré­

S\lmé, ce consentement est irréversi­

ble; si le conjoint prouve qu'il n'était pas consentant et qu'il est sans lien génétique avec l'enfant, l'enfant est sans père.

Le lien volontaire l'emporte donc sur le lien biologique. Mais ce der­

nier n'est pas entièrement gommé.

D'abord, rien n'interdit au couple de choisir un donneur connu (frère ou cousin du mari pour l'lAD, par exemple), à condition que celui-ci satisfasse aux critères de sélection habituels (examen du sang et du sperme, caryotype, absence de maladie transmissible). En cas de donneur anonyme, le médecin doit, avant d'engager la procédure médi­

cale, fournir par écrit à la femme receveuse des informations sur le donneur, à l'exception de toute information identifiante. Récipro­

quement, l'insémination n'est possi­

ble qu'avec le consentement écrit du donneur (et de son épouse, s'il en a une); le donneur a le droit de sollici­

ter des informations (non-identi­

fiantes) sur la famille receveuse, sur le devenir des grossesses résultant de l'usage de ses gamètes, sur les enfants issus de ces grossesses. Le dévoilement des identités est même acceptable à tout moment, si les deux parties y ont consenti par écrit.

Il est prévu dans le texte de loi que les intervenants soient guidés par des conseillers qualifiés, et que les méthodes impliquant une FIV soient réservées aux hôpitaux dûment autorisés. Les médecins ou institutions pratiquant la féconda­

tion artificielle sont tenus de conser­

ver des dossiers complets sur les donneurs, les receveurs, les procé­

dures, les résultats; ils ne peuvent refuser de communiquer aux parties concernées les renseignements demandés, dans les limites de confi­

dentialité fixées par la loi. La doctrine du Victoria a été résumée par le Comité qui examina là-bas les problèmes posés par la FIV ( 1983) :

<<

le législateur a vite fait d'effacer le

lien légal entre parent génétique et enfant, mais il ne peut ignorer le droit moral de l'enfant à connaître son origine génétique

>>

[2].

La loi suédoise entrée en vigueur en mars 1985 accorde à l'enfant lAD le droit de connaître son géniteur, tout en statuant que le conjoint de la femme inséminée doit donner son consentement écrit à la procédure, et devient par là irrévocablement le père légal de l'enfant. L'hôpital à qui le couple demandeur s'est adressé (seuls les hôpitaux publics sont habilités en Suède à pratiquer la fécondation artificielle) a la res­

ponsabilité de sélectionner le don­

neur, et de conserver son dossier pendant au moins 70 ans. Lorsqu'il

a

<<

atteint une maturité suffisante

>>

l'enfant peut, sur sa demande, et avec l'assistance des services sociaux, obtenir communication des informations contenues dans le dos­

sier (iden,tité comprise). Le dossier est également accessible, sur requête d'un tribunal, en cas de contestation de paternité, mais en dehors de cette hypothèse le droit d'accès est réservé au seul enfant. Celui-ci a donc la possibilité, comme les enfants adoptifs, de rechercher son père biologique. Cela ne crée entre eux aucun lien formel, puisque la loi exclut que le donneur ait jamais à l'égard de cet enfant les obligations d'un père. C'est néanmoins une éventualité dont le donneur est informé, et qu'il doit pouvoir psychologiquement assumer. Il semble d'ailleurs que, depuis la mise en application de la loi, le profil des donneurs ait changé : le donneur-

mfs n° 9, vol. 2, nov•mbre 86

(4)

type n'est plus un étudiant, mais un père de famille qui fait ce geste avec l'assentiment explicite de sa femme (G. Ewerlof, communication per­

sonnelle).

C'est sur le modèle de l'adoption que les juristes suédois ont traité la filiation artificielle. G. Ewerlof, secrétaire de la Commission qui prépara la loi de 1 985, explique que l'ancienne attitude, qui consistait en Suède comme ailleurs à tout faire pour ev1ter que l'enfant lAD apprenne comment il avait été conçu, n'est plus acceptable au regard de ce qu'on sait aujourd'hui de la psychologie des enfants adoptés [10). Non seulement l'en­

fant a droit à un père, parce que la présence d'une figure paternelle est aussi nécessaire à son développe­

ment que celle d'une figure mater­

nelle (la loi de 85 exclut l'insémina­

tion de femmes seules ou lesbien­

nes), mais il a droit à la franchise sur ses origines. Certes, les parents ne sont pas forcés de révéler à l'en­

fant qu'il est né d'une lAD, et le fait de l'lAD n'est pas inscrit à l'état civil. Mais les médecins sont invités, lors de la consultation préalable à la procédure médicale, à apprécier si le couple demandeur est en mesure d'offrir à l'enfant des conditions de croissance favorables, en insistant sur l'importance pour l'équilibre de l'enfant de ne pas lui dissimuler sa conception artificielle. On vise par là, au nom des intérêts de l'enfant, à dissiper l'opprobre qui s'attache à la stérilité masculine (ct qui la mure dans le secret). On en accepte la conséquence, qui est de mettre au grand jour la réalité d'une double paternité sociale et biologique, la loi intervenant pour réserver sans ambiguïté à la première les droits et devoirs de la fonction (obligation alimentaire, éducation, etc.).

Mère génétique, mère porteuse et mère sociale . . .

Notons que le critère biologique n'est pas le même pour l'homme et la femme. La contestation de mater­

nité pour absence de lien génétique n'existe nulle part, et aucune don­

neuse d'ovule ne risque, à ce jour, d'être déclarée mère légale de l'en­

fant issu de son don. Partout la femme qui accouche de l'enfant est sa mère au regard de la loi, même si

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dans quelques pays (comme en France) la possibilité d'accoucher anonymement fait qu'il y a des enfants sans mère. Et la femme qui déclare sien à l'état civil un enfant dont une autre a accouché se rend coupable du crime de supposition d'enfant, même si cet enfant est génétiquement d'elle. A notre connaissance, seule la Commission de réforme des lois de l'Ontario a jusqu'ici envisagé que l'enfant né d'une mère de substitution puisse, en toute sécurité juridique, être enregistré à l'état civil comme enfant d'une femme qui ne l'aurait pas porté.

Si l'on suivait la voie de la franchise ouverte par la Suède, on serait conduit à laisser apparaître une maternité triple (mère génétique, mère porteuse, mère sociale), voire quadruple (mère nourrice). Les juristes tiendraient sans doute à ce que la

<<

vraie

>>

mère soit désignée

de façon non ambiguë, mais les autres ne seraient pas caéhées [ 1 1].

La protection des partenaires de la procréation artificielle.

Quel est le prix à payer pour pren­

dre conscience des liens humains découlant des nouvelles techniques de procréation? Quelles personnes, quelles valeurs sont protégées par les systèmes existants? Q!J'en est-il des intérêts de l'enfant, que tout le monde invoque, alors que les études objectives sur le devenir des person­

nes nées d'lAD sont presque inexis­

tantes?

G. Annas (12] déplorait que la pra­

tique de l'lAD aux Etats-Unis dans les années 1970 protégeât mieux les intérêts des donneurs et des méde­

cins que ceux de l'enfant à naître et de ses parents. C'est un fait que les partenaires en présence dans la pro­

création artificielle ne sont pas par­

tout traités de façon égale. Nous

Tableau 1

lAD. PROTECT I ON D ES I N TÉ R ËTS D ES D I FFÉR E NTS PARTENAI R ES

Donneur Médecin Parents Enfant

et son épouse

épouse pêre mêre

France + + + - + ( -) -

R FA - - - + (-)

Suède + (-) + ( -) + (-) + (-) + (-) +

État de

Victoria + + + + + +

(Australie)

+ =bien protégé; - -peu protégé; + (-) =plus ou moins bien protégé.

Le système adopté par l'état de Victoria (4• ligne) protège de façon efficace les intérêts de tous les protagonistes (le donneur, son épouse, les médecins, les parents, l'enfant). A l'inverse, actuellement en RFA les partenaires sont tous, à

l'exception de l'enfant, dans une situation très vulnérable (:lB ligne). La France et la Suède sont dans une position intermédiaire. Les droits de l'enfant sont mieux respectés en Suède qu'en France (4• colonne), mais les intérêts des donneurs et de leurs conjoints sont mieux protégés en France qu'en Suède

(1'"

colonne). Les médecins sont efficacement protégés partout, sauf en RFA où

les responsabilités qui leur incombent sont très lourdes (2• colonne). L es parents, enfin, sont traités avec égards par le système adopté dans l'état de Victoria, et mal défendus en RFA. La France et la Suède représentent ici encore des cas intermédiaires. Il faut noter cependant qu'en France le père (social) a une position particulièrement fragile (Je colonne).

485·

(5)

486

RÉFÉRENCES ---

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nistratifs. Paris : ESF, 1986, chap. 1.

1 1 . Huet-Weiller D. Les nouveaux modes de procréation, Conference prononcée à l'Université de Fribourg le 3 juin 1986, texte à paraître dans la Revue de Métaphysique et de Morale, 1987.

12. Annas G]. Artificial insemination: beyond the best interests of the donor. Hastings Center Report 1979; 9,4: 14-5.

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Projet 1985; 195: 22-32.

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avons tenté de schématiser dans le Tableau !, p. 485, la façon dont sont protégés les

<1

intérêts bien com­

pris )) des personnes dans quatre des systèmes évoqués précédem­

ment (France, RF A, Suède, Victo­

ria).

En France, donneurs et médecins sont très protégés. Le donneur ne court aucun risque, contrepartie logique du fait qu'il perd tout contrôle sur l'utilisation de ses pail­

lettes, et n'est pas informé des résul­

tats de ses dons. Les médecins tien­

nent une position confortable, grâce à une solide tradition de confidentialité : leurs obligations sont des obligations de moyens, ils sélectionnent les donneurs selon des règles internes à la profession, et ne sont pas menacés d'avoir à révéler l'identité des parties. La famille­

lAD est en position plus précaire.

Le couple qui sollicite l'insémina­

tion doit se plier aux règles d'une déontologie médicale qui lui est imposée. La clause d'anonymat le préserve de toute irruption du don­

neur, mais lui interdit de pouvoir révéler jamais à l'enfant qui est son père génétique. Ce qui n'empêche pas le mari d'être investi d'une paternité fragile, puisque contesta­

ble au nom de l'absence de lien génétique, même s'il a consenti à l'lAD, ce qui rend son consente­

ment dérisoire. La femme doit accepter que le géniteur de son enfant disparaisse derrière le personnage du médecin qui choisit la paillette de sperme. Elle doit en outre supporter de ne pas connaître cet homme dont le sperme, intro­

duit dans son vagin, a permis la conception d'un enfant qu'elle va porter neuf mois en ignorant la moitié de sa provenance. Elle pos­

sède, enfin, un pouvoir ambivalent sur son mari, puisqu'elle peut contester sa paternité, elle dont la maternité est incontestable. L'en­

fant, quant à lui, se voit dénier le droit de savoir son origine exacte : ou bien il restera toute sa vie

<<

protégé )) par le mutisme de ses

parents, ou bien il saura que sa conception est due au don anonyme d'une goutte de sperme qui a tran­

sité par une banque et par la congé­

lation (qui abolit la dimension tem­

porelle). Est-il si simple de faire le deuil de

<<

rien )) ? Nous pensons

qu'on ne peut faire le deuil que du connu (par exemple, d'un père mort, disparu, ou indigne). Nous avons indiqué ailleurs les risques d'irrepérage paternel [13].

Il faut noter, dans ce type de système, l'importance considérable du secret. Ce secret abrite un droit à l'intimité, forme de liberté négative, consistant à être préservé contre l'ingérence d'autrui dans ses affaires privées. La non-circulation des informations, dans le même temps, limite la liberté positive et les res­

ponsabilités. Chacun répond de ses actes devant sa conscience, la corn�

munication est minimale. Ainsi Je donneur qui aurait sciemment dissi­

mulé une tare ne peut être poursuivi, il est couvert par l'anony­

mat; mais il ne peut ni connaître, ni assumer, les conséquences de son geste. Peu de guidance psychologi­

que, pas de suivi : le médecin

<<

ne doit pas s'immiscer dans la décision de procréation qui appartient au couple )) [9], il ne doit pas chercher à savoir comment se développe l'en­

fant; la recherche sur les enfants­

lAD est presque inexistante. L'inté­

rêt de l'enfant, plus ou moins confondu avec celui de sa famille, n'implique ni le droit à la vérité, ni le droit de revendiquer un père (ou une mère); il implique le droit au secret protecteur. On craint que la révélation d'une double paternité biologique et sociale ne fasse

<<

éclater la famille )). Notons que la

collectivité ne se hâte cependant pas de prévenir les ennuis qu'entraîne une levée accidentelle du secret, comme si elle tenait à ce que les libertés sus-mentionnées s'exercent, pour les familles bénéficiant d'un

<<

enfant de la médecine

)>,

dans une

relative insécurité : en général, les juristes français ne souhaitent actuellement consolider aucune filiation

<<

artificielle )) par un statut juridique.

En RF A, les brèches ouvertes dans la confidentialité accentuent l'insé­

curité, en l'absence de renfort juri­

dique. L'épouse du donneur n'a rien à dire, bien qu'elle ait d'éven­

tuelles conséquences à supporter.

Une menace aléatoire pèse sur le donneur, difficilement acceptable, puisqu'il ne dépend pas de lui que la mésentente du couple receveur déclenche une procédure judiciaire

m/s n° g, vol. 2, novtmh" 86

(6)

qui dévoile son identité, et transfere sur lui les droits et devoirs pater­

nels. Certes le médecin doit l'avoir informé des conséquences possibles, quoique i__rnprobabl�s, de son don de

.

paternité. Mais le médecin lui­

même est dans une position délicate.

Il faut bien qu'il trouve des don­

neurs s'il veut pratiquer l'lAD, et il y a une demande pour l'lAD. Etant mal couvert par le secret médical, il n'est pas à l'abri d'une condamna­

tion à des dommages et intérêts en cas de procédure judiciaire. (En Suisse, il n'�st pas exclu qu'il soit un jour mis en cause par l'enfant, par exemple pour l'atteinte aux droits de la personne que constitue le fait de naître sans père, en cas d'insémination d'une femme seule.) Les parents-lAD n'ont pas non plus une position très confortable. La filiation avec le père <( apparent •>

peut être dénoncée par plusieurs personnes, y compris l'enfant, mais non par la mère. L'enfant est en principe le gagnant de cette histoire. C'est au nom de ses <( droits fondamentaux •> que l'anonymat du donneur est jugé <( immoral •>. Ces droits fondamentaux sont le droit à un père, et le droit à la vérité (la

<( vraie •> filiation paternelle étant la filiation génétique). La fuite de la clientèle lAD vers la clandestinité des cabinets médicaux pnves, depuis le verdict du BGH en 1983, a évidemment rendu très difficile tout contrôle, et toute enquête objective sur la situation de ces enfants.

Le coût psychologique, pour toutes les parties, du dévoilement brutal, par une enquête judiciaire de la vérité biologique, est considérable.

Qyelles valeurs très fortes défend­

on au prix de ce risque ? En assimi­

lant l'enfant lAD à un <( enfant de l'adultère •>, on tente, semble-t-il, de lui tisser des liens humains.

L'idée que le donneur de gamètes puisse contribuer à faire un enfant

<( en dehors de toute communication humaine •> et sans prendre aucune responsabilité, est mal supportée en RF A. <( La franchise d'une nais­

sance par mère de substitution effraie moins que le mensonge d'une naissance lAD avec donneur anonyme •> [7). Au lieu qu'en France, pour ne pas troubler l'inti­

mité familiale, on détache de la personne du donneur son potentiel

m/s n• 9, vol. 2, novtmbre 86

génétique, apporté au couple demandeur comme un don médical, on résiste en Allemagne fédérale à la réification d'une partie de la personne, et on accepte la souf­

france qui peut résulter d'une re-se­

xualisation des techniques pro­

créatives. Pas plus qu'en France on ne paraît souhaiter, pour le moment, atténuer cet inconfort par des mesu­

res juridiques.

Responsabilité et droit à la vérité : les exemples suédois et de l'état de Victoria.

Démembrement de la filiation, éta­

lée à tous les regards; chosification technologique de l'être humain à ses origines; ce sont les périls de la

<( procréatique •>. Le second est bien analysé par C. Labrusse-Riou [14).

La France et la RF A sont des exem­

ples de pays qui refusent l'un ou l'autre. I.:a Suède, l'état du Victoria, ont plutôt cherché à les encadrer par des législations spéciales, qui, en régulant les flux d'information, donnent aux individus plus de liberté positive (au prix d'une perte d'intimité), et plus de sécurité psychologique (au prix d'une direc­

tivité forte).

En Suède, le donneur actuel (post­

loi de 85) est à la fois protégé par la loi (la paternité de l'enfant-lAD ne peut lui échoir), et fortement res­

ponsabilisé en tant que donneur de gènes : en acceptant le risque d'une confrontation éventuelle avec l'en­

fant, lui et sa compagne font une démarche qui n'est pas neutre, ni pour eux-mêmes, ni pour leurs pro­

pres enfants. A la lumière de ce qu'on sait sur la psychodynamique du don de sperme [ 1 s], nous pen­

sons qu'en contrepartie il peut tirer des bénéfices psychologiques de cette position, et que (passé l'effroi qu'elle a pu susciter) la loi suédoise n'est pas injuste pour les donneurs.

Les médecins ont. une charge lourde : outre l'intervention propre­

ment médicale, ils doivent apprécier la situation psycho-sociale du cou­

ple, un peu comme les services sociaux le font dans les enquêtes préliminaires à l'adoption. De plus, il leur incombe de recueillir les consentements avec soin, celui du mari étant légalement irréversible une fois les inséminations commen­

cées. La loi suédoise a été explicite-

ment votée dans l'intérêt de l'enfant : celui-ci ne risque de se retrouver ni sans père, ni nanti d'un autre père que le premier, et il a le droit de savoir comment il a été conçu. Les textes d'application pré­

voient en outre quelles précautions doivent être prises pour que, adoles­

cent, s'il le désire, il puisse accéder à la révélation de l'identité du don­

neur sans traumatisme inutile (l'hô­

pital ne doit pas communiquer de données sans que le demandeur ait eu un entretien avec un profession­

nel compétent des services sociaux).

Il peut sembler injuste que seul l'enfant ait un droit d'accès au dos­

sier (et non pas sa mère, par exem­

ple). Les parents dans le système suédois sont fortement encadrés, incités à vivre l'lAD comme un acte avouable, normal, révélable à l'en­

fant. On peut se demander si la pédagogie médicale suffit à aplanir la difficulté d'assumer entre soi et devant l'enfant cette <( mise à plat •>

de la stérilité du père, et de l'immix­

tion d'un tiers dans l'intimité de la procréation. Cette réserve émise, il nous semble que le système suédois, malgré une certaine raideur, assure aux protagonistes une égalité de droits.

Concevoir la parenté-lAD sur le modèle de l'adoption plénière, malgré la différence des situations (parents en manque d'enfant, contre enfant en manque de parents), c'est lui conférer une acceptabilité sociale : la filiation adoptive est noble. Cette respectabilité se paie par un contrôle strict (procédure réservée aux hôpitaux publics, accordée seulement aux couples sta­

bles, dans des indications médicales;

pas de banques de sperme à but lucratif, pas d'insémination post mortem). Elle implique aussi pour les individus une véritable socialisa­

tion, ou sublimation, de la sexualité.

Mais honorabilité n'est pas conformisme. La loi prévoit résolu­

ment que l'enfant a le droit d'être informé, dans son intérêt. L'idée qu'il n'est pas éthique de maintenir des habitudes dont la recherche montre qu'elles sont nocives pour le développement de la personne sug­

gère qu'on valorise la connaissance scientifique. La possibilité de poursuivre une recherche sur le devenir de <( l'adoption-lAD •> est

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(7)

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cependant limitée p ar le fait que la loi suédoise restreint au seul enfant l'accès au dossier.

L'état de Victoria se singularise par l'importance qu'il attache au consentement des donneurs de gamètes, et de leurs conjoint(e)s.

Les donneurs peuvent fixer cer­

taines conditions d'utilisation de leurs paillettes, les modifier en cours de route. Il est clairement entendu qu'ils donnent plus qu'un simple capital génétique, qu'ils peuvent avoir un engagement émotionnel qui les conduit à évoluer dans la compréhension de la finalité de leur geste, ou à avoir envie de savoir ce qu'il advient de leur don - ils sont des hommes, non des étalons. En face d'eux, la famille receveuse est traitée avec les mêmes égards, quant à son besoin de garder la mémoire d'un lien au donneur. La loi du Vic­

toria prévoit en outre que tous les protagonistes reçoivent une guidance psychologique particu­

lière. Les médecins, garants du sas par lequel transitent les informa­

tions non identifiantes entre don­

neurs et receveurs, sont très enca­

drés. Outre les comités médicaux et instances hospitalières, ils sont cou­

verts par une autorité administrative (Ministre, ou Secrétaire de la Health Commission), qui tranche en cas de conflit entre les parties. Il existe, pour les litiges, un Standing Review and Advisory Committee [3]. Ce dernier est une commission compo­

sée de huit membres : un philo­

sophe, deux médecins, deux repré­

sentants des familles spirituelles, un travailleur social, un juriste, un représentant de la fonction publi­

que. Notons l'analogie avec la com­

position de la commission Warnoc�, analogie que l'on retrouve d'ailleurs dans les mesures préconisées. Mais, à la différence des comités euro­

péens qui n'ont qu'une voix consul­

tative, il s'agit ici d'une instance de décision, qui gère un système mani­

festement inspiré par le double souci de traiter tous les intervenants comme des personnes humaines, ni trop protégées, ni trop exposées, et de ne pas laisser la procréation arti­

ficielle se développer sans contrôle.

Responsabilité médicale et prise en charge collective.

A la différence de la Suède, qui s'en

remet aux médecins hospitaliers pour assurer la bonne marche de l'lAD dans les limites d'acceptabi­

lité fixées par la loi, l'état du Victo­

ria donne l'exemple d'une véritable prise en charge collective de la ges­

tion des techniques de fécondation artificielle, comme si cette coutmu­

nauté australienne avait pris conscience que les enjeux actuels de la procréatique sont trop graves pour être laissés aux choix des indi­

vidus, fussent-ils médecins.

(Banques de sperme, d'ovules, d'embryons : les médecins auront bientôt le pouvoir de fabriquer des

<<

enfants de l'espèce )) en dehors de

tout lien personnel de filiation.)

<<

Les médecins ne sont pas dispen­

sés de suivre les standards éthiques de la communauté. Leur déontolo­

gie n'est pas une morale séparée, mais un aspect de notre morale.

Décider de ce qu'ils doivent faire ou ne pas faire relève des principes éthiques de l'ensemble de la société

))

[2]. Ces principes exigent que l'information circule, que les risques psychologiques soient mini­

misés pour tous les intervenants, et que les liens humains soient préser­

vés autant qu'ils peuvent l'être. Les informations (non identifiantes) contenues dans les registres tenus par les hôpitaux sont accessibles, non seulement aux parties concer­

nées, mais à d'autres personnes

<<

autorisées

l>,

possiblement des

chercheurs. Des peines sont prévues pour ceux qui s'égareraient sur des voies prohibées : clonage, hybrida­

tion, recherche sur l'embryon, mais aussi fécondations successives d'une femme avec du sperme (ou des embryons) de donneurs différents (pratique habituelle en France pour l'lAD). Où l'on voit que, loin d'être réduit à une goutte de semence, le don.neur devient ici un partenaire de la famille, avec, sinon une identité, du moins une silhouette indivi­

duelle.

Système pilote pour petit pays seulement ? Expérience intéressante à suivre, en tout cas. << Cessons de nous auto-protéger, place à l'intérêt de l'enfant )>, écrivait G. Annas dès 1979

[ 1 2].

Nous dirions aujourd'hui qu'à travers le souci de l'enfant se fait jour le souci de ne pas laisser l'activité procréatrice de l'espèce se déshumaniser •

Summary

Two international colloquiums on "artificial procreation, gene­

tics and the law" were held in 1 985, in Lausanne and Paris res­

pectively. For these occasions a comprehensive body of laws and regulations relating to human artificial procreation was collec­

t

e

d, which evidenced a variety of possible solutions to the pro­

blems faced today by sterile parents, gametes donors, "artifi­

cial" children, the medical pro­

fession, and society in general.

The authors comment on the positions offered to parties in different cultural . settings .

.

In particular, they review the cases of France and Federal Republic of Germany, Sweden, the state of Ontario (Canada), and the state of Victoria (Australia).

TIRÉS A PART---

G. Delaisi de Parseval : 1 18, rue de Vaugirard, 75006 Paris.

m/s ,.• 9. vol. 2, novembu 86

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