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Les marqueurs de l'écologie alimentaire chez le mandrill : le cas des micro-usures dentaires et des ratios d'isotopes stables

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Academic year: 2021

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(1)Les marqueurs de l’écologie alimentaire chez le mandrill : le cas des micro-usures dentaires et des ratios d’isotopes stables Alice Percher. To cite this version: Alice Percher. Les marqueurs de l’écologie alimentaire chez le mandrill : le cas des micro-usures dentaires et des ratios d’isotopes stables. Biologie animale. Montpellier SupAgro, 2017. Français. �NNT : 2017NSAM0050�. �tel-01872271�. HAL Id: tel-01872271 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01872271 Submitted on 11 Sep 2018. HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés..

(2) THÈSE POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE MONTPELLIER En : Biologie évolutive École doctorale : GAIA Unité de recherche : Institut des Sciences de l’Évolution de Montpellier. Les marqueurs de l’écologie alimentaire chez le mandrill : le cas des micro -usures dentaires et des ratios d’isotopes stables. Présentée par Alice PERCHER Le 15 décembre 2017 Sous la direction de Marie CHARPENTIER Codirigée par Alejandro ROMERO. Devant le jury composé de Marie CHARPENTIER, Directrice de recherches CNRS, ISEM, Université de Montpellier. Directrice de thèse. Pierre-Olivier ANTOINE, Professeur, ISEM, Université de Montpellier. Président du Jury. Emmanuelle POUYDEBAT, Directrice de recherche CNRS, MNHN, Paris. Rapporteuse. Robert SCOTT, Associate Professor, The State University of New Jersey. Rapporteur. Cécile BLONDEL, Maître de conférences, IPHEP, Université de Poitiers. Examinatrice. Laurent MARIVAUX, Chargé de recherches CNRS, ISEM, Université de Montpellier. Examinateur. .

(3) Résumé Le régime alimentaire est un élément clé de l’écologie des espèces et dépend à la fois des besoins nutritionnels des individus et des ressources alimentaires disponibles. Ainsi, les stratégies alimentaires peuvent varier en fonction de l’âge, du sexe ou de l’état physiologique des individus, mais également de paramètres environnementaux et, en particulier, de la saisonnalité. Reconstruire le régime alimentaire d’espèces cryptiques ou difficiles à observer en milieu naturel nécessite l’emploi de marqueurs capables de détecter les variations du régime alimentaire sur le court terme. L’analyse des patrons de micro-usures dentaires et des ratios d’isotopes stables du carbone et de l’azote constitue une approche pertinente pour distinguer le régime alimentaire entre différentes espèces ou entre populations. Dans le cadre de cette thèse, nous avons évalué le pouvoir prédictif de ces deux types de marqueurs sur les variations saisonnières et interindividuelles du régime alimentaire dans une population naturelle de mandrills (Mandrillus sphinx) sur laquelle des données comportementales étaient disponibles. Conformément aux comportements alimentaires observés, les patrons de micro-usures dentaires et les signatures isotopiques varient en fonction de la saison, de l’âge et du sexe des individus. L’ensemble de nos résultats nous indique que la diversité importante d’aliments consommés à faible fréquence par les mandrills ne peut être détectée par les marqueurs analysés qui semblent être, en revanche, pertinents pour identifier des changements significatifs de consommation d’aliments majoritaires tels que les fruits et les feuilles. Enfin, les signatures isotopiques varient en fonction du cycle reproducteur des femelles et de leur rang de dominance, nous indiquant que l’utilisation de tels marqueurs peut permettre la mise en évidence d’aspects de la physiologie des individus non reportés par des observations comportementales. Les résultats présentés dans cette thèse apportent des données de référence essentielles pour la reconstruction du régime alimentaire d’espèces éteintes partageant des traits communs avec le mandrill, telles que des primates généralistes de forêts tropicales. Mots-clés: écologie alimentaire, micro-usures dentaires, isotopes stables, saisonnalité, cycle reproducteur, Mandrillus sphinx, Gabon.. Abstract Diet is a critical factor of species’ ecology and depends on both individuals’ nutritional needs and availability of their food resources. As such, feeding strategies may vary with age, sex or physiological condition of the individuals but also depend on environmental factors and, in particular, seasonality. In cryptic species and those that are difficult to observe in their natural habitat, diet reconstruction requires the use of proxies with the ability to detect dietary variations over the short term. Analyses of dental microwear patterns along with carbon and nitrogen stable isotopes constitute a relevant approach to discriminate between diets of different species or populations. In the framework of this thesis, we assessed the predictive power of these two proxies on seasonal and inter-individual variations of diet in a natural population of mandrills (Mandrillus sphinx) for which behavioural data was available. According to the feeding behaviours observed, dental microwear patterns and isotopic signatures vary depending on the season as well as individual’s age and sex. Taken together our results indicate that the large diversity of rarely consumed food items cannot be detected by the proxies analysed, which are however, relevant to identify significant changes in the consumption of major foods such as fruits and leaves. Finally, isotopic signatures vary across females’ reproductive statuses and dominance ranks, indicating that the use of those proxies may allow the highlighting of some aspects of individuals’ physiology not detected by behavioural observations. The results presented in this thesis provide a baseline data essential for dietary reconstruction of extinct species sharing similar traits with mandrills, such as generalist primates from tropical forests. Key words: feeding ecology, dental microwear, stable isotopes, seasonality, reproductive status, Mandrillus sphinx, Gabon. 1.

(4)                3RXU6LPRQ . .

(5) Remerciements J’aimerais remercier du fond du cœur Marie Charpentier, ma directrice de thèse, pour avoir été d’un grand soutien du début à la fin de mon doctorat, tant sur le plan scientifique que moral. Je la remercie en premier lieu d’avoir accepté de construire avec moi un projet de recherche sur les marqueurs de l’écologie alimentaire chez les mandrills lorsqu’il y a trois ans, les méthodes que je souhaitais employer n’appartenaient pas à son (pourtant grand) champs de compétences. Malgré la difficulté de se lancer dans des thématiques de recherche aussi nouvelles pour elle que pour moi, Marie a été présente sur la durée et m’a largement aidée à écrire les articles présentés dans ce manuscrit. Je la remercie également de m’avoir offert une grande liberté dans le choix des questions de recherche et dans la mise en place des collaborations clés de ma thèse. Marie m’a par ailleurs permis de partir au Gabon et de réaliser mon rêve de suivre des primates en liberté dans la forêt tropicale. Enfin, je la remercie de s’être investie dans la réflexion scientifique de mon projet et de m’avoir accompagnée pendant mes balbutiements du début de thèse puis lors de mes prises d’assurance. C’est une chercheuse inspirante et une femme brillante, merci encore. Je remercie chaleureusement mes deux co-encadrants de thèse, Alejandro Romero et Jordi Galbany, qui ont suivi mes recherches depuis Alicante, en Espagne, et la forêt rwandaise ! Leur expertise en écologie dentaire m’a permis d’acquérir rapidement les bases nécessaires à l’étude des micro-usures dentaires. Je remercie donc Alejandro Romero de m’avoir accueillie dans son laboratoire à Alicante pendant trois mois et de m’avoir appris les méthodes de préparation des moulages dentaires, l’utilisation du microscope électronique à balayage et l’analyse des patterns de micro-usure buccale, entre autres. De plus, je le remercie de m’avoir aidée à trouver mes marques dans un pays que je ne connaissais pas et d’avoir assuré le bon déroulement de mon séjour à l’université d’Alicante. Je suis également reconnaissante à Jordi Galbany qui, outre l’importance de sa contribution à la collecte de données lors des captures, a répondu présent à mes appels à l’aide au travers d’entretiens skype en début de thèse. Alejandro et Jordi ont par ailleurs tous deux apporté leurs conseils et suggestions lors de l’écriture des articles sur les micro-usures dentaires, assurant la qualité du travail fourni. J’adresse de profonds remerciements aux rapporteurs de ma thèse, Emmanuelle Pouydebat et Robert Scott, pour leur intérêt pour mes recherches et pour l’évaluation minutieuse de mon manuscrit. J’exprime également ma gratitude à Cécile Blondel, Laurent Marivaux et Pierre-Olivier Antoine qui ont accepté avec enthousiasme de faire partie de mon jury de thèse et pour m’avoir témoigné de l’intérêt et du soutien depuis mes débuts en paléontologie – puisqu’ils ont été mes professeurs en master PPP ! Je remercie tous les co-auteurs de mes articles et notamment Gontran Nsi Akoué, dont le travail de thèse constitue un des fondements de mon projet de recherche, ainsi qu’Alejandro PérezPérez pour ses conseils pertinents visant à améliorer notre article sur les patterns de micro-usures buccales des mandrills. Lors de mes deux comités de thèse, les discussions scientifiques avec Elise Huchard, Gildas Merceron, Pierre-Olivier Antoine et Michel Raymond ont été d’une importance capitale pour l’avancée de mes recherches et je leur en suis chaudement reconnaissante. En dehors de ces comités, Elise, Gildas, PierrO et Michel ont par ailleurs toujours répondu présents. En particulier, je remercie Elise Huchard pour nos longues discussions sur la recherche, pour ses remarques intelligentes et pour les rapports amicaux qu’elle a su mettre en place rapidement pour que je me sente à l’aise dans mes deux équipes de recherche, au CEFE et à l’ISEM. J’ai apprécié faire mes recherches dans le même laboratoire qu’Elise car elle représente pour moi un modèle inspirant en tant que femme scientifique. Ma thèse n’aurait pas été ce qu’elle est sans ma précieuse collaboration scientifique avec Gildas Merceron. Gildas m’a accueillie au laboratoire de paléontologie à Poitiers pendant un total d’un.

(6) mois et demi au cours duquel il m’a formée sur l’analyse des textures de micro-usures dentaires et permis gracieusement d’utiliser le matériel de pointe nécessaire à ces analyses. Son enthousiasme et son dynamisme ont agréablement rythmé mes recherches sur les micro-usures dentaires. Je remercie Pierre-Olivier Antoine pour son intérêt dans mes recherches et pour avoir accepté de travailler avec moi sur les hypoplasies linéaires de l’émail des mandrills. Ses conseils avisés et sa bienveillance ont contribué au bon déroulement de ma thèse. Enfin je remercie particulièrement Michel Raymond, le directeur de l’équipe de recherches en biologie évolutive humaine à l’ISEM, ma seconde famille après le CEFE. Michel a soutenu mon projet depuis le master 2, m’a apporté de nombreux conseils et a surtout permis de fournir un environnement de travail stimulant et chaleureux au cours de ma dernière année de thèse. J’exprime ma gratitude à mes deux autres collaborateurs, Julien Renoult et Viktoria Oelze, grâce à qui j’ai pu respectivement découvrir et maîtriser des concepts en vision assistée par ordinateur et en géochimie isotopique. Merci à Julien de m’avoir tout appris de l’apprentissage automatique et son utilisation via MATLAB, pour son enthousiasme et pour sa disponibilité. Merci à Vicky de m’avoir accueillie deux semaines à l’institut Max Planck à Leipzig, de m’avoir présentée à toute l’équipe de primatologues et de m’avoir solidement formée sur la préparation des poils de mandrills destinés aux analyses isotopiques. Je remercie les chercheurs, techniciens, doctorants, post-doctorants et stagiaires de mes deux laboratoires de recherche, le CEFE et l’ISEM, pour leur soutien scientifique et moral ainsi que, pour certains, leur véritable amitié. Pour n’en citer que quelques uns car la liste est longue, je remercie David Grémillet et Thierry Boulinier, directeurs de l’équipe Ecologie Spatiale des Populations au CEFE ainsi que Bernard Godelle de l’équipe Biologie Evolutive Humaine de l’ISEM pour leur gentillesse et les discussions scientifiques (ou moins scientifiques !) stimulantes entre midi et deux. Les filles de l’équipe ‘primato’ ont également toute ma gratitude pour les épisodes de décompression autour de repas végétariens (si je le deviens presque à 100% aujourd’hui c’est en partie grâce à vous !) : Marie, Elise, Clémence, Alice et Alecia. Un énorme merci à Valérie Durand, le petit soleil de l’équipe BEH ! Mais je dois aussi l’idéal de mon environnement de travail à mes amis Alexandre Suire, Myriam Boivin, Samuel Ginot, Amélie Fargevieille, Françoise Amélineau, Virginie Demeyrier, Sarah Kada, Malicia Besnard, Aurore Ponchon, Aloïs Robert, Tanguy Lebot, Claire Guérin… tous doctorants ou stagiaires au cours de ma thèse. Merci à Nory El Ksabi et à toute l’équipe du Projet Mandrillus pour leur accueil chaleureux à Bakoumba, au Gabon, pour nos échanges à l’arrière de la camionnette au lever du soleil, nos discussions sur la 16 (spéciale dédicace à Pacelle) et les aventures en forêt. Merci à Laure et Sarah sans qui mon séjour n’aurait pas eu cette pincée de folie ensoleillée. Merci à l’équipe de l’ISEM à Poitiers, qui conserve ma profonde affection, et je remercie en particulier mes encadrants de stage de master Olivier Chavasseau et Géraldine Garcia pour nos rapports amicaux. Je remercie par ailleurs les enseignants et moniteurs du département Biologie Ecologie de l’Université de Montpellier, ainsi que Nicolas Saby, Thierry Brassac et l’équipe de choc ( !) de la mission diffusion avec qui j’ai pris énormément de plaisir à travailler et confirmé mon engouement pour l’enseignement et la médiation scientifique. Merci au personnel du laboratoire d’Alicante et en particulier à Pascual, Phanie et Laura qui resteront sans aucun doute des amis. Aussi, je remercie tout particulièrement le graphiste Alexandre Boudry qui, en plus d’être un ami incroyable (rock’n’roll man !), a contribué à l’esthétique de mon manuscrit en réalisant des dessins originaux pour illustrer mon schéma bilan ! Également un GRAND merci à Jade et Jasper pour leurs soigneuses relectures de mon anglais. Merci à Simon, Sandrine, Christophe, et Benoît de m’avoir aidée à la dernière minute pour éliminer des coquilles de mon manuscrit !.

(7) Pour leur présence, leur soutien et leur amour inaltérable, je remercie mes amis Clémence, Benoît, Jade, Jasper, Kévin, Valentine, Lucie, Léa, Floriane, Valentin, Anaïs, Elodie, Florian, Gabriel, Thomas et tous ceux dont je n’ai pas la place d’écrire le nom ici mais qui se reconnaîtront ! Vous êtes formidables et vous le savez. Merci aux fouilleurs angeacais, Merci à Zack, Camille et les autres du club de musique du CRI. Enfin je remercie ma famille incroyable et en particulier mes parents, mon frère et mes grands parents pour leur soutien sans faille et leur sagesse. Merci à Out of Time, merci à Fracaz, merci au chœur de Celleneuve, merci au Hellfest et au Black Sheep, merci à Myles Kennedy et, de manière plus générale…, merci à la musique..

(8) Table des matières Introduction générale ............................................................................................. 5 1. L’écologie alimentaire et ses marqueurs .................................................................... 6 2. Objectifs de notre étude ............................................................................................ 12. Premier chapitre: Reconstruire l’écologie alimentaire des espèces grâce aux micro-usures dentaires: le cas du mandrill………………………17 1. Comment analyser les micro-usures dentaires ? ...................................................... 18 1.1. Déterminer le potentiel abrasif des aliments consommés ................................. 18 1.1.1. Les propriétés mécaniques ......................................................................... 18 1.1.2. Les particules abrasives .............................................................................. 20 1.2. Le choix de la face dentaire à analyser .............................................................. 21 1.2.1. La face occlusale ........................................................................................ 22 1.2.2. La face buccale ........................................................................................... 24 1.3. Les différentes méthodes d’analyse des patrons de micro-usures dentaires ..... 24 1.4. L’analyse des patrons de micro-usures dentaires chez le mandrill .................... 26 1.4.1. Approches classiques .................................................................................. 27 1.4.2. Nouvelle approche: la détection automatique de descripteurs à partir d’images 2D ..................................................................................................................... 28 2. Collecte et analyse des données de micro-usures dentaires chez le mandrill........... 29 2.1. Réalisation de moulages dentaires in vivo ......................................................... 29. 1.

(9) 2.2. Mesure de la macro-usure dentaire.................................................................... 30 2.3. Description des micro-usures 3D de la face occlusale ...................................... 31 2.4. Description des micro-usures 2D de la face buccale ......................................... 32 2.5. Classification des aliments selon leurs propriétés physiques ............................ 33 2.6. Analyses statistiques .......................................................................................... 34 3. Relations entre micro-usures dentaires et écologie alimentaire chez le mandrill..... 35 3. 1. Effets des facteurs environnementaux et individuels ....................................... 37 3.1.1. Micro-usures 3D de la face occlusale ......................................................... 37 3.1.2. Micro-usures 2D de la face buccale ........................................................... 41 3.2. Macro-usure dentaire: impact sur les patrons micro-usures et influence du régime alimentaire ................................................................................................................ 44 4. Nouvelle approche pour décrire les micro-usures dentaires: une étude préliminaire .................................................................................................................................................. 48 4.1. Apprentissage non supervisé ............................................................................. 48 4.1.1. Les sparse-codes ......................................................................................... 50 4.1.2. Les SURF ................................................................................................... 51 4.2. La classification des images .............................................................................. 52 5. Conclusions et perspectives ...................................................................................... 53. Deuxième chapitre: Reconstruire l’écologie alimentaire des espèces grâce aux signatures isotopiques: le cas du mandrill ........................................... 59 1. Les ratios d’isotopes stables, des marqueurs du régime alimentaire ........................ 60 1.1. Définitions ......................................................................................................... 60 2.

(10) 1.2. Le ratio d’isotopes stables du carbone............................................................... 61 1.3. Le ratio d’isotopes stables de l’azote................................................................. 64 1.4. Les limites méthodologiques ............................................................................. 66 1.5. L’analyse des signatures isotopiques chez le mandrill: démarche et prédictions .............................................................................................................................................. 67 2. Matériel et méthodes pour les analyses isotopiques ................................................. 68 2.1. Préparation des échantillons .............................................................................. 68 2.1.1. Tissus des mandrills :kératine des poils et plasma sanguin ........................ 68 2.1.2. Aliments: plantes, insectes et champignons ............................................... 69 2.2. Analyses statistiques .......................................................................................... 70 2.2.1. Variations saisonnières et interindividuelles des signatures isotopiques .... 70 2.2.2. Variations saisonnières et interindividuelles du régime alimentaire .......... 71 2.2.3. Etude de l’effet du cycle reproducteur des femelles sur l’écologie alimentaire ........................................................................................................................ 73 3. Variations des signatures isotopiques en relation avec l’écologie alimentaire des mandrills ................................................................................................................................... 74 3.1. Fractionnements isotopiques ............................................................................. 74 3.2. Saisonnalité du régime alimentaire ................................................................... 77 3.3. Variations interindividuelles .............................................................................. 83 3.4. Cycle reproducteur des femelles ....................................................................... 88 4. Conclusions et perspectives ...................................................................................... 92. Discussion générale ............................................................................................... 93 3.

(11) Bibliographie ......................................................................................................... 103 Annexes……………………………………………………...…………………..122. 4.

(12) INTRODUCTION GENERALE. 5.

(13) 1. L’écologie alimentaire et ses marqueurs L’alimentation est un élément clé de l’écologie des espèces et son étude est essentielle pour comprendre les interactions entre les organismes et leur environnement. Les aliments consommés par un organisme sont sélectionnés pour répondre à ses besoins nutritionnels, par exemple en protéines, en fibres ou en sucres. Ainsi, la composition du régime alimentaire peut varier entre individus d’une même espèce mais également au cours de la vie d’un même individu. Le sexe, l’âge, l’état physiologique ou encore le rang social d’un individu peuvent influencer ses choix alimentaires. Par exemple, chez les gorilles des plaines de l’Est (Gorilla beringei), les jeunes et les femelles consomment plus de protéines que les mâles à dos argenté, relativement à leur masse corporelle (Rothman et al., 2008). Par ailleurs, chez les macaques japonais (Macaca fuscata), les mâles juvéniles consomment plus de viande et moins d’aliments fibreux que les mâles adultes (Hanya, 2003). Chez les mammifères, des modifications physiologiques liées à la gestation peuvent augmenter les besoins énergétiques des femelles et les conduire à consommer une plus grande quantité de nourriture; un phénomène observé notamment chez les campagnols (Microtus brandti; Liu et al., 2003). Enfin, chez certaines espèces sociales, telles que les hyènes (Crocuta crocuta; Tilson et Hamilton, 1984), les cerfs élaphes (Cervus elaphus; Appleby, 1980) ou les macaques à bonnet (Macaca radiata; Boccia et al., 1988), le rang de dominance offre un accès privilégié aux ressources alimentaires. Le régime alimentaire est aussi étroitement lié à la disponibilité des ressources dans l’habitat. Il est donc indirectement dépendant du climat (Kaeriyama et al., 2004; Pettorelli et al., 2011; Poulsen et al., 2001) et/ou de la saisonnalité (Brockman et Schaik, 2005) mais également de la compétition interspécifique (Luiselli, 2006). La phénologie des plantes exerce notamment un contrôle important sur l’alimentation des animaux, comme par exemple chez le macaque crabier (Macaca fascicularis) qui va consommer plus de fruits au détriment des 6.

(14) insectes pendant les périodes de forte fructification (Lucas et Corlett, 1991). Les geladas (Theropithecus gelada) vivant en savanes de haute altitude consomment, quant à eux, plus d’organes souterrains de plantes (par exemple: tubercules, racines) pendant les périodes arides (Fashing et al., 2014). Par ailleurs, dans la toundra, la compétition entre le renard polaire et le renard roux pour les mêmes proies contraint ces deux espèces à restreindre leurs aires de répartition géographique (Hersteinsson et MacDonald, 1992). Bien que l’étude de l’écologie alimentaire permette de répondre à de multiples questions en biologie évolutive, notamment sur les stratégies de survie en saison de pénurie (Brockman et Schaik, 2005) ou sur l’automédication (Grueter et al., 2009; Roode et al., 2013), seules quelques espèces emblématiques (par exemple: chimpanzé, éléphants) ont été étudiées de manière approfondie et sur du long terme. Ainsi, des descriptions détaillées du régime alimentaire en populations naturelles sont rares dans la littérature (Fritz, 2017; Kappeler et Watts, 2012; Kissling et al., 2014; Leuthold, 2012). Une manière directe et évidente de déterminer le régime alimentaire d’une espèce consiste à effectuer un suivi comportemental des individus et d’identifier l’ensemble – ou une partie – des aliments consommés (voir: Fashing et al., 2014; Felton et al., 2009). Cependant, en milieu naturel, de telles données sont bien souvent parcellaires en raison des difficultés et des biais liés aux observations comportementales. Par exemple, l’habitat peut poser des problèmes de visibilité et d’accessibilité des individus à l’observateur (végétation dense, hauteur de canopée, climat parfois rude; Kappeler et Watts, 2012). De plus, il est rare de pouvoir assurer un suivi comportemental continu d’individus en milieu naturel, ce qui conduit à des approximations inévitables et rend les variations journalières et saisonnières parfois difficiles à estimer. Des méthodes alternatives et indirectes ont donc été développées pour accéder à des informations cruciales sur l’alimentation et plus généralementsur l’écologie des espèces (Newsome et al., 2009). Parmi celles-ci, l’analyse des contenus fécaux ou stomacaux informe sur la 7.

(15) composition des derniers repas des individus. L’analyse des contenus stomacaux d’otaries à crinière (Otaria flavescens) retrouvées sur les plages de Patagonie a permis de mettre en évidence la diversité des proies consommées par cette espèce (par exemple: poissons, céphalopodes, crustacés) et des différences de régime alimentaire entre mâles, plus pélagiques, et femelles, plus benthiques (Alonso et al., 2000). Cette méthode présente néanmoins l’inconvénient majeur de ne pouvoir être utilisée que sur des individus morts, rendant impossible des suivis individu-centrés. De plus, l’identification des aliments est parfois difficile dans les contenus stomacaux et la reconstruction du régime alimentaire nécessite de considérer de grands échantillons (Baker et al., 2014). A l’inverse, la collecte de matières fécales est une méthode non-invasive représentant une excellente alternative au suivi comportemental. Dans le cas d’études de populations sur le long terme, une analyse régulière des contenus fécaux peut permettre, par exemple, de détecter des variations saisonnières du régime alimentaire. Chez le coyote (Canis latrans), le suivi saisonnier des contenus fécaux a permis de montrer que les individus consommaient plus de rongeurs et de jeunes cervidés en été et plus de grands ongulés en hiver (Bowen, 1981). Par ailleurs, l’analyse des contenus fécaux de drills (Mandrillus leucophaeus), une espèce de primate quasiment impossible à observer directement du fait de son statut de conservation (extrêmement menacé), a montré que les individus vivant dans les montagnes étaient plus folivores que leurs congénères des forêts de basse altitude, plus frugivores (Owens et al., 2015). En plus de l’identification des résidus alimentaires visibles, il est possible de réaliser du bar-coding moléculaire (caractérisation génétique) à partir de matières fécales afin de déterminer plus précisément les espèces consommées (Kartzinel et al., 2015; Srivathsan et al., 2015), quoique l’efficacité et le degré de finesse de cette méthode aient été récemment remis en question (Ficetola et al., 2016). De plus, les fèces ne contiennent pas les nutriments absorbés au cours de la digestion et ne reflètent pas exactement les proportions dans lesquelles les aliments on été consommés 8.

(16) par les individus, notamment du fait des différences de digestibilité (Sheppard et Harwood, 2005). Les matières fécales apportent donc des informations relativement parcellaires sur le régime alimentaire. La composition en isotopes de certains éléments (par exemple: carbone, azote, oxygène, soufre; voir pour revue: Boecklen et al., 2011) dans les tissus, assimilés pendant la respiration (par exemple: bactéries) ou la digestion, peut constituer un marqueur alternatif de l’écologie alimentaire des espèces. En particulier, les ratios d’isotopes stables du carbone et de l’azote informent sur la consommation de certaines catégories d’aliments, telles que les graminées (DeNiro et Epstein, 1978) ou les aliments riches en protéines (animales: Minagawa et Wada, 1984; ou végétales: Sponheimer et al., 2003). Analyser les variations des signatures isotopiques au sein de populations permet donc de comparer les proportions dans lesquelles les individus consomment ces catégories d’aliments. En outre, la signature isotopique d’un individu informe sur son régime alimentaire pendant une certaine période de temps qui dépend de la vitesse de synthèse et du taux de renouvellement du tissu analysé (Hobson et al., 1993). L’émail dentaire enregistre, par exemple, des informations sur le régime alimentaire adopté au cours de l’odontogénèse (développement des dents), un processus durant plusieurs semaines à plusieurs années chez les espèces longévives (par exemple: Papio cynocephalus: Swindler et Meekins, 1991). A l’inverse, le renouvellement des isotopes du sang s’effectue au bout de quelques jours à quelques semaines, signifiant que le plasma sanguin, par exemple, informe sur l’alimentation récente des individus (voir pour revue: MacAvoy et al., 2006). Tandis que les signatures isotopiques informent sur la nature biochimique des aliments consommés par les individus, les micro-usures présentes sur la surface de leurs dents renseignent sur les propriétés physiques de leur nourriture. L’usure dentaire, c’est-à-dire la perte de tissu dentaire (émail ou dentine), est causée par trois mécanismes principaux que sont l’abrasion, l’attrition et l’érosion. L’abrasion résulte du frottement entre la surface dentaire et 9.

(17) des particules exogènes, l’attrition découle du frottement entre deux dents lors de l’occlusion et l’érosion est le résultat de l’action d’agents acides qui corrodent le tissu dentaire (voir pour revue: Bru et Gruel, 2007; Ungar, 2015). L’aspect et la densité des lésions provoquées par l’abrasion dépendent par exemple de la taille, de la dureté ou de la concentration en particules abrasives présentes dans le bol alimentaire (voir pour revue: Teaford, 1994; Ungar, 2015). Alors que la combinaison d’analyses sur les signatures isotopiques et les patrons de micro-usures dentaires constitue une approche puissante, l’interprétation des signaux qui en résultent reste limitée par le manque de travaux de référence solides étudiant directement l’impact des propriétés physico-chimiques des aliments sur le phénotype des individus. En effet, les études sur les micro-usures dentaires sont historiquement basées sur des dents issues de collections muséales et qui appartiennent à des individus dont l’âge, le sexe, voire la provenance géographique sont souvent inconnus (par exemple: Aliaga-Martínez et al., 2017; Estebaranz et al., 2012; Galbany et al., 2009; Goillot et al., 2009; Gordon, 1982; Ryan, 1981; Scott et al., 2012; Strait, 2014; Taylor et Hannam, 1987; Teaford et Walker, 1984; 2004; Ungar, 1994). Ces études utilisent généralement des données écologiques récoltées sur d’autres individus, vivants, afin d’établir les liens entre les patrons de micro-usures dentaires et l’alimentation des espèces analysées. Certaines expériences d’alimentation contrôlée ont par ailleurs confirmé les hypothèses formulées à partir de ces spécimens de collections. Par exemple, elles ont montré un lien entre la consommation de graminées et la présence de nombreuses stries longues (Schulz et al., 2013) et orientées dans la même direction (Merceron et al., 2016) sur les surfaces d’usure dentaire de mammifères herbivores (Oryctolagus cuniculus, Ovis aries). En parallèle, des analyses isotopiques basées également sur des expériences d’alimentation contrôlée ont, d’une part, mis en évidence une corrélation entre la consommation de graminées et le ratio d’isotopes stables du carbone (Tieszen et al., 1983) et ont confirmé, d’autre part, les relations entre la consommation de protéines et le ratio 10.

(18) d’isotopes stables de l’azote (Sponheimer et al., 2003). De telles études de référence sont importantes car, en considérant le principe d’actualisme, les analyses des ratios d’isotopes stables et des micro-usures dentaires peuvent être appliquées à la reconstruction des écosystèmes passés (Wood et Schroer, 2012). En effet, malgré les altérations possibles des tissus au cours de la fossilisation liées aux processus diagénétiques (Koch et al., 1997; Kohn et al., 1999), la partie minérale des os et des dents (bioapatite) se conserve à travers les temps géologiques. Ainsi, l’étude de sa composition isotopique permet de retracer l’écologie alimentaire d’espèces éteintes, au moins en partie (Crowley et al., 2011; Fox-Dobbs et al., 2006). L’examen de quelques rares fèces, contenus stomacaux, organes internes ou encore kératine fossilisés a apporté des informations précieuses sur les écosystèmes passés (Dal Sasso et Signore, 1998; Hansen, 1978; Kriwet et al., 2008; Schweitzer, 2011; Taru et Backwell, 2013). Mais les dents restent les organes les plus étudiés en paléontologie, en raison de leur forte minéralisation (72-96% chez les humains; Williams et Elliott, 1979) qui leur confère un remarquable pouvoir de préservation. Plusieurs méthodes permettent de déterminer le régime alimentaire à partir des dents. De manière générale, la morphologie dentaire indique les catégories d’aliments qu’une espèce est apte à consommer (Kay, 1977; Kay et Hiiemae, 1974; Maier, 1984; Ungar et al., 2007) mais n’indique pas ce que les individus consomment réellement (Teaford, 1994; Wood et Schroer, 2012). En effet, la morphologie dentaire est le résultat de l’histoire évolutive d’une espèce; elle est donc soumise à certaines contraintes de forme (inertie phylogénétique) qui ne la rendent pas nécessairement optimale pour la consommation des ressources disponibles à un instant donné (Evans et Sanson, 1998; Gailer et al., 2016). Au contraire, l’analyse des patrons de micro-usures dentaires permet de reconstruire plus finement le régime alimentaire d’espèces éteintes. Elle a notamment été largement utilisée pour déterminer le régime alimentaire d’humains préhistoriques (Karriger et al., 2016; Krueger et Ungar, 2012; Lalueza 11.

(19) et al., 1996) et de mammifères éteints – essentiellement des herbivores (Galbany et al., 2004, 2009; Geissler, 2013; Henton et al., 2017; Jones et Desantis, 2016; Peigné et al., 2009; Puech et al., 1983). Par exemple, l’analyse des patrons de micro-usures dentaires d’antilopes du Pliocène d’Afrique du Sud a permis de distinguer les espèces paisseuses de graminées des espèces consommatrices de feuillages (Ungar et al., 2007). L’étude des micro-usures dentaires de mammifères fossiles a par ailleurs permis de conforter les scenarii de reconstruction des habitats d’hominidés anciens suggérés par les signatures isotopiques (Grine et al., 2012; Rodrigues et al., 2009). Afin de reconstruire l’écologie alimentaire des espèces, actuelles ou éteintes, à partir de marqueurs indirects tels que les signatures isotopiques de leurs tissus (par exemple: kératine, hydroxyapatite) ou les patrons de micro-usures dentaires, il est important de bien comprendre quelles informations ces marqueurs fournissent sur l’écologie des individus. Pour cela, il est nécessaire d’analyser de manière intégrée le comportement alimentaire observé, les marqueurs du régime alimentaire ainsi que les caractéristiques des individus (par exemple: sexe, âge, statut physiologique) et de leur environnement (par exemple: climat, disponibilité des ressources). Les études sur le long terme de populations naturelles sont idéales pour ce genre d’analyse car elles permettent de fournir des informations longitudinales et individucentrées, couplées à des histoires démographiques.. 2. Objectifs de notre étude Dans le cadre de cette thèse, nous avons étudié les patrons de micro-usures dentaires et les signatures isotopiques des individus d’une population naturelle de mandrills (Mandrillus sphinx; encadré 1) vivant en liberté au parc de la Lékédi, au sud du Gabon (encadré 2). Nous avons, d’une part, analysé les variations de ces marqueurs écologiques en fonction de facteurs environnementaux et individuels et, d’autre part, comparé ces variations avec des données 12.

(20) d’observation sur le régime alimentaire, collectées sur la population étudiée (Nsi Akoué et al., 2017). Dans ce manuscrit sont présentés et discutés les résultats de nos analyses qui font l’objet de quatre articles scientifiques disponibles en annexes (articles 1-4) ainsi que de deux chapitres. Nous proposons une approche intégrative de l’écologie alimentaire du mandrill centrée sur trois questions principales: i) Peut-on déterminer le régime alimentaire d’un individu à partir du patron de micro-usures dentaires et de la signature isotopique de ses tissus (kératine des poils et plasma sanguin)? ii) Les micro-usures dentaires et les ratios d’isotopes stables apportent-ils des informations complémentaires? iii) Les patrons de micro-usures dentaires et les signatures isotopiques sont-ils pertinents pour reconstruire l’écologie alimentaire de primates généralistes tels que le mandrill ? Nous abordons ces questions dans deux chapitres et proposons des éléments de réponses dans une discussion générale à la fin de ce manuscrit. Dans un premier chapitre, nous présentons les résultats des analyses des patrons de micro-usures dentaires des mandrills, obtenus via l’utilisation de trois méthodes différentes: la caractérisation des textures de micro-usures dentaires en trois dimensions (analyse 3D) sur la face occlusale des molaires, celle en contact avec les dents opposées lors de la mastication (article 1); le comptage semi-automatique des stries en deux dimensions (analyse 2D) sur la face buccale des molaires, en contact avec les lèvres et joues (article 2) et la détection de caractéristiques visuelles sur cette même face buccale (voir chapitre 1). Dans un second chapitre, nous présentons les résultats d’analyses isotopiques réalisées sur des segments de poils (kératine) ainsi que sur des échantillons de plasma sanguin collectés sur les individus de la population étudiée (article 3). Dans ce chapitre, nous nous intéressons en particulier à l’influence du cycle reproducteur des femelles sur leur écologie alimentaire (article 4). 13.

(21) Dans la discussion générale, nous présentons les signaux concordants mais aussi les informations contradictoires que nous apportent la combinaison d’analyses des micro-usures dentaires et des signatures isotopiques quant au régime alimentaire des mandrills. Enfin, nous replaçons l’ensemble de nos résultats dans le contexte socio-écologique caractérisant cette espèce de primate de l’Ancien Monde. Encadré 1: le mandrill Le mandrill est un primate catarrhinien de l’Ancien Monde, semi-arboricole, habitant les forêts équatoriales denses d’Afrique Centrale, du Sud du Cameroun au Sud du Congo (Grubb, 1973). Les mandrills forment de grands groupes sociaux de plusieurs centaines d’individus (Abernethy et al., 2002), où les mâles migrent régulièrement, et sont plus nombreux en période de reproduction (Brockmeyer et al., 2015). En captivité, le mâle dominant monopolise les femelles lors de la période de reproduction et engendre jusqu’à 70% des naissances (Charpentier et al., 2005). Les sociétés de mandrills présentent une structure de type matrilinéaire organisée autour de femelles (philopatriques) apparentées via la lignée maternelle. Chez ces femelles, le rang de dominance est transmis de mères en filles. Les mâles migrent de leur groupe natal autour de la puberté (Abernethy et al., 2002). Cette espèce est également caractérisée par un dimorphisme sexuel extrême: les mâles sont plus de trois fois plus lourds que les femelles ; ils présentent des couleurs vives sur leur face et leur région ano-génitale (Figure 1; Setchell et Dixson, 2001; Setchell et al., 2001) et ont de longues canines supérieures (jusqu’à 5 cm: Leigh et al., 2008). Le mandrill présente un régime omnivore à tendance frugivore (Rogers et al., 1996; Tutin et al., 1997; Nsi Akoué et al., 2017). Son alimentation est largement dominée par des espèces végétales (74%) correspondant à près d’une cinquantaine de familles, notamment des Marantaceae et des Zingiberaceae. Les mandrills se nourrissent toutefois d’invertébrés (6%), de petits vertébrés (<1%) et de champignons (<1%; Nsi Akoué et al., 2017). La composition du régime alimentaire des mandrills varie considérablement entre les saisons et diffère également entre mâles et femelles et entre individus de différentes classes d’âges (Nsi Akoué et al., 2017). Les femelles et les jeunes individus passent par ailleurs plus de temps à fourrager que les mâles et les individus plus âgés et, de manière générale, les mandrills fourragent plus longtemps pendant la saison la plus sèche (Nsi Akoué et al., 2017). 14.

(22) Encadré 2: La population d’étude Nous avons. étudié une population d’environ 150 mandrills,. reconnus. individuellement pour la plupart et suivis quotidiennement depuis 2012 par une équipe de terrain dans le cadre du Projet Mandrillus (http://www.projetmandrillus.com/), un projet de recherches en biologie évolutive. La colonie a été fondée à partir de 65 individus originaires du Centre International de Recherches Médicales de Franceville (CIRMF), relâchés à deux reprises (2002 et 2006; Peignot et al., 2008) au sein du parc de la Lékédi au sud du Gabon (Figure 2). Les femelles issues de captivité se sont rapidement reproduites avec des mâles sauvages du parc. En 2017, près de 90% des individus de la population sont nés en milieu naturel. Depuis le lancement du Projet Mandrillus, cinq grandes campagnes de captures ont été organisées (Avril 2012, Septembre 2012, Avril-Mai 2013, Juillet 2014 et Décembre 2015) afin de collecter des données biologiques diverses sur les individus, incluant des poils (arrachés avec leur bulbe), des moulages dentaires et des échographies de l’appareil manducateur, utilisés dans le cadre de cette thèse. En parallèle, des données comportementales sont collectées quotidiennement sur les individus depuis 2012. De plus, entre Mai 2013 et Octobre 2014, des observations comportementales des prises alimentaires ont été effectuées sur 57 individus de la population (voir Nsi Akoué et al., 2017). L’habitat de la population étudiée est caractérisé par de larges zones de forêt équatoriale parsemées de clairières de type savane humide. Au Gabon, on reconnaît une grande saison des pluies (de Février à Mai), une grande saison sèche (de Juin à Septembre), une petite saison des pluies (d’Octobre à Novembre) et une petite saison sèche (de Décembre à Janvier). Les températures moyennes locales, relevées par une station météorologique, varient entre 22.1°C/mois en grande saison sèche à 23.9°C/mois en grande saison des pluies et le cumul des précipitations varie de 19 mm/mois en grande saison sèche à 245 mm/mois en grande saison des pluies (Figure 2). Les individus fondateurs de la population étudiée ont été approvisionnés en nourriture entre le premier relâché en 2002 et les premières captures en avril 2012, dans des quantités décroissantes (Brockmeyer et al., 2015). Cet approvisionnement, essentiellement à base de bananes, était suffisamment modéré pour encourager les individus à fourrager spontanément.. 15.

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(31) PREMIER CHAPITRE Reconstruire l’écologie alimentaire des espèces grâce aux micro-usures dentaires: le cas du mandrill. 17.

(32) 1. Comment analyser les micro-usures dentaires ? Afin d’évaluer la pertinence des micro-usures dentaires pour déterminer le régime alimentaire d’une espèce, il est nécessaire d’étudier l’impact des aliments consommés par les individus sur leurs dents. Pour cela, il faut i) déterminer les propriétés physiques des aliments consommés, puisque celles-ci ont un impact direct sur l’abrasion dentaire (Strait, 1997); ii) choisir une partie informative de la dent (en contact avec les aliments au cours de la mastication); iii) utiliser une méthode pertinente pour décrire les patrons de micro-usures dentaires.. 1.1. Déterminer le potentiel abrasif des aliments consommés Le potentiel abrasif d’un aliment dépend notamment de ses propriétés mécaniques et de sa concentration en particules abrasives microscopiques (Teaford, 1994). 1.1.1. Les propriétés mécaniques On dénombre classiquement trois estimateurs pour décrire les propriétés mécaniques des aliments: la résistance à la déformation plastique irréversible (dureté ou « hardness »), la résistance à la déformation élastique réversible (raideur ou « stiffness ») et la résistance à la propagation des fractures (coriacité ou « toughness ») (Agrawal et al., 1997; Lucas et al., 2008). Ainsi, le régime alimentaire se caractérise par l’ensemble des propriétés mécaniques des aliments qui le composent: un régime folivore contient plus d’aliments coriaces (feuilles; Choong et al., 1992; Onoda et al., 2011), un régime granivore plutôt des aliments durs (graines) et un régime frugivore peut comprendre un mélange d’éléments tendres (la pulpe des fruits) et durs (les pépins, certains téguments durs). Les propriétés mécaniques des aliments influencent le degré d’usure dentaire. Par exemple, les femmes Hadza – des chasseurs-cueilleurs de Tanzanie – consomment plus de tubercules que les hommes et présentent également une usure dentaire plus importante 18.

(33) (Berbesque et al., 2012). Or, les tubercules sont des aliments fibreux et coriaces (Dominy et al., 2008), des propriétés mécaniques également connues pour être impliquées dans l’usure dentaire chez les geladas (Venkataraman et al., 2014). Les patrons de micro-usures dentaires permettent également d’identifier des différences de régime alimentaire entre espèces (Goillot et al., 2009; Schulz et al., 2010; Scott, 2012; Scott et al., 2012; Souron et al., 2015) et au sein d’une même espèce (Bignon-lau et al., 2017; El-Zaatari, 2010; Merceron et al., 2010). Contrairement à la macro-usure, qui ne va qu’en s’aggravant avec l’âge (par exemple: Galbany et al., 2014; Severinghaus, 1949), les patrons de micro-usures dentaires dépendent des interactions entre les dents et les aliments au cours de la mastication. Or, la stratégie de mastication employée (par exemple: amplitude des mouvements masticateurs, activité des muscles masticateurs, nombre et durée des cycles masticatoires) est adaptée à la fragmentation des aliments selon leurs propriétés mécaniques (Agrawal et al., 1998; Hiiemae et al., 1996; Peyron et al., 2002; Plesh et al., 1986). Par exemple, une analyse en trois dimensions de la cinématique mandibulaire de deux capucins du genre Cebus a montré qu’une nourriture peu coriace est associée à des séquences de mastication plus courtes, moins de cycles par séquence et moins de déplacements verticaux de la première molaire inférieure (M1) en début de séquence, contrairement à des aliments plus coriaces (Reed et Ross, 2010). Plusieurs auteurs ont invoqué le rôle des mouvements des mâchoires (par exemple: Charles et al., 2007) et des forces appliquées à l’occlusion pour le broyage des aliments (par exemple: Calandra et al., 2012) dans les variations des patrons de micro-usures dentaires. Ils ont notamment suggéré l’association entre la consommation de viande et l’utilisation de mouvements masticateurs verticaux pour expliquer la présence de stries verticales sur la face buccale des molaires de certains humains (Lalueza et al., 1996). A l’inverse, les stries horizontales indiqueraient plutôt la consommation de feuilles. La fracture de graines ou de fruits à coque nécessiterait, quant à elle, l’application de forces importantes qui peuvent 19.

(34) expliquer la présence de lésions larges et profondes sur les surfaces dentaires (Gordon, 1984; Scott et al., 2006). Par ailleurs, il est largement admis que les aliments durs sont responsables de ponctuations, notamment observées en grand nombre sur les dents de certains primates (Teaford et Runestad, 1992; Teaford et Walker, 1984), parce qu’un grand nombre de cycles est nécessaire pour les fragmenter (Pereira et al., 2006). La consommation de fruits ayant une enveloppe dure a notamment permis d’expliquer la présence de nombreuses ponctuations sur la denture antérieure des chimpanzés (Ryan, 1981). 1.1.2. Les particules abrasives Les particules pouvant produire des micro-usures dentaires ne sont pas nécessairement plus dures que l’émail sur l’échelle de Mohs (mesure de la dureté des minéraux; Xia et al., 2015). En effet, Rabenold (2017) suggère qu’avec le bon angle d’attaque, n’importe quelle particule est susceptible de rayer la surface dentaire. Des travaux sur les hyracoïdes, les rongeurs et les moutons ont montré qu’une consommation importante de graminées est associée à un nombre élevé de stries sur la face occlusale des molaires (Mainland, 2003; Rodrigues et al., 2009; Walker et al., 1978). Les auteurs ont expliqué ces résultats par les concentrations importantes de phytolithes1 présents dans les tissus des graminées (monocotylédones) par rapport aux autres plantes (dicotylédones; Hodson et al., 2005; McNaughton et al., 1985; Piperno, 2006). Ces phytolithes se retrouvent en effet dans les féces des hyracoïdes et des moutons consommateurs de graminées (voir pour revue: Ungar, 2015). En outre, des images de microscopie électronique à balayage ont permis d’observer des phytolithes incrustés dans les micro-usures des molaires de Gigantopithecus blacki, un hominoïde géant du Pléistocène (Ciochon et al., 1990), confortant l’hypothèse selon laquelle ces particules siliceuses sont capable de produire des lésions sur les dents. 1. Les phytolithes sont des éléments microscopiques des tissus végétaux, issus de la cristallisation des minéraux absorbés par les racines des plantes (Farmer et al., 2005), et sont considérés comme un des principaux agents d’usure dentaire (Danielson and Reinhard, 1998; Merceron et al., 2016).. 20.

(35) Cependant, les agents d’abrasion dentaire ne proviennent pas nécessairement de la nourriture: les particules minérales (notamment le quartz) issues de la poussière aérienne ou du sol et qui recouvrent les aliments prélevés en milieu naturel peuvent également contribuer à la formation des micro-usures dentaires (Covert et Kay, 1981; Ungar et al., 1995). Leur potentiel abrasif, en comparaison à celui des phytolithes, a d’ailleurs fait l’objet de nombreux débats (par exemple: Burgman et al., 2016; Lucas et al., 2013; Merceron et al., 2016; Rabenold et Pearson, 2011; Sanson et al., 2007). En particulier, Lucas et al. (2013) ont montré que les phytolithes n’étaient pas suffisamment durs pour provoquer une perte de tissu dentaire mais pouvaient déformer celui-ci, à l’inverse des particules de quartz, plus dures que l’émail, capables de détacher des débris. Cependant, les expériences in vivo (Merceron et al., 2016; Ramdarshan et al., 2016) et in vitro (Gügel et al., 2001; Xia et al., 2015) menées par la suite semblent confirmer que les phytolithes et les particules externes sont deux agents capables d’abraser l’émail dentaire. Il est théoriquement possible de distinguer les micro-usures dentaires causés par les phytolithes de celles produites par les particules externes via une analyse comparative entre la taille des lésions et la taille des particules abrasives (Maas, 1994). Une étude menée sur des orangs-outangs suggère notamment que les phytolithes produisent des stries plus larges sur les dents de ces derniers par rapport aux particules du sol, expliquant les différences observées entre les individus fourrageant au sol – les mâles – et ceux se nourrissant dans la canopée – les femelles (Ungar, 1994).. 1.2. Le choix de la face dentaire à analyser Pour étudier les relations entre régime alimentaire et patrons de micro-usures dentaires à l’échelle de l’espèce ou de l’individu, il est pertinent de comparer des surfaces d’usure homologues en termes biomécaniques, c’est-à-dire interagissant de manière similaire avec les aliments consommés (Calandra et al., 2016; Gordon, 1982, 1984). Par exemple, en travaillant. 21.

(36) sur la denture post-canine (prémolaires et molaires), il est préférable de comparer les surfaces d’usures dentaires d’une seule ou de plusieurs dents ayant la même fonction au cours de la mastication. En outre, en fonction de la question posée, il est possible d’étudier les patrons de micro-usures dentaires sur différentes faces des molaires (occlusales, buccales ou linguales) sollicitées différemment au cours de la mastication. 1.2.1. La face occlusale La face occlusale des molaires est directement impliquée dans la mastication: elle reflète donc à la fois les propriétés physiques des aliments et les processus biomécaniques utilisés pour les préparer à la digestion. On identifie plusieurs facettes d’usures sur la face occlusale, impliquées soit dans la phase coupante, soit dans la phase écrasante de la mastication (Figure 3 et Figure 4; Fortelius, 1985; Kay, 1981; Krueger et al., 2008). Lors de ces deux phases, la mandibule suit des mouvements antérieurs et médiaux entraînant des contacts. dynamiques. entre. les. facettes. des. molaires. supérieures. et. inférieures. correspondantes. La phase coupante, également nommée « Phase I » se caractérise par un mouvement de bas en haut de la mandibule, provoquant le glissement des facettes coupantes des molaires opposées les unes contre les autres. Elle se termine par une occlusion complète lors de laquelle le protocône est imbriqué dans le talonide (constitué de l’hypoconide et de l’entoconide; Figure 4). La phase écrasante ou broyeuse, dite « Phase II », se traduit par l’écrasement des cuspides dans les bassins induit par un mouvement vers le bas de la mandibule (Hiiemae et Kay, 1973). Les micro-usures dentaires sont soumises à un renouvellement continu: celles de la face occlusale s’estompent au bout de quelques jours à quelques semaines (Teaford et Oyen, 1989), d’où leur pertinence pour reconstituer les derniers repas des individus. Cependant, l’attrition et l’impact de la cinématique mandibulaire peuvent perturber le signal strictement lié à l’alimentation sur cette face. En effet, la présence de ponctuations sur la face occlusale peut être non seulement due à la consommation 22.

(37) d’aliments durs (Teaford et Walker, 1984) mais également à l’application d’importantes forces de pression sur les surfaces dentaires pour fragmenter la nourriture au cours de la mastication (Lucas et Teaford, 1994).. Figure 3: Orientation anatomique des dents le long de la rangée dentaire (a), nomenclature des faces dentaires et principaux mouvements masticatoires impliqués dans les phases I et II (b). D’après Lucas (2004) et Ross (2000).. Figure 4: Cuspides et facettes d’usure d’une molaire inférieure gauche de mandrill.. 23.

(38) 1.2.2. La face buccale Au contraire de la face occlusale, la face buccale présente le double avantage de ne pas être soumise à l’attrition et d’être peu sollicitée pour la mastication des aliments: elle est de ce fait plus exhaustive concernant l’alimentation (Puech et Pant, 1980) et plus conservatrice que la face occlusale, comme l’atteste le renouvellement plus lent des micro-usures qui s’y forment (Pérez-Pérez et al., 1994; Romero et al., 2012). De manière générale, les microusures buccales informent sur l’ingestion de particules abrasives qui sont ramenées contre la face buccale par les muscles des joues au cours de la mastication (Grine et al., 2012; Ungar et Teaford, 1996). Pourtant, de nombreux auteurs considèrent l’interprétation des patrons de micro-usures de la face buccale impossible à cause des mouvements aléatoires des aliments qui en sont la cause au sein de la cavité orale (Grine et al., 2012). Les différents avantages et inconvénients des faces occlusales et buccales nous ont amené à étudier leurs signaux respectifs, et possiblement complémentaires, relatifs au régime alimentaire du mandrill.. 1.3. Les différentes méthodes d’analyse des patrons de micro-usures dentaires Différentes méthodes permettent d’analyser les patrons de micro-usures dentaires soit en deux dimensions, à partir de photographies prises au microscope électronique à balayage (MEB) ou à la loupe binoculaire (Galbany et Pérez-Pérez, 2004; Merceron et al., 2005; Walker et al., 1978), soit en trois dimensions à partir « d’objets » issus du balayage des surfaces dentaires par profilométrie surfacique (Merceron et al., 2014; Scott et al., 2006), par variation de mise au point (Purnell et al., 2012) ou par microscopie confocale (Calandra et al., 2016; Schulz et al., 2010). L’analyse 2D des micro-usures dentaires nécessite parfois une préparation préalable de l’échantillon; l’utilisation du MEB requiert notamment de recouvrir les réplicats de moulages 24.

(39) dentaires d’une couche d’or ou de palladium (voir: Pérez-Pérez et al., 1994). Les stries et les ponctuations observables à l’œil nu sur les photographies (Figure 5) sont ensuite comptées et mesurées. Cette méthode dépend de la résolution des images et peut s’avérer très chronophage. De plus, la perception des micro-usures dentaires peut être affectée par les paramètres du microscope (Gordon, 1988), d’où la nécessité de standardiser les images au préalable (Grine et al., 2012). Pour pallier à ces problèmes, les analyses basées sur des images MEB fixent le grossissement du microscope et homogénéisent l’aspect des photographies à l’aide de traitements automatisés d’image (Estebaranz et al., 2009; Romero et al., 2013; 2004). L’analyse 2D des micro-usures dentaires ne garantit pas totalement l’objectivité des mesures, du fait de la détection manuelle des micro-usures impliquant des biais interobservateurs (Estebaranz et al., 2012; Galbany et al., 2005; Grine et al., 2002; Mihlbachler et al., 2012).. Figure 5: Les deux méthodes classiques d'analyse des patrons de micro-usures dentaires utilisées dans notre étude. Les flèches blanches indiquent les stries sur la photographie d’une face buccale de molaire prise au MEB. L’échelle colorimétrique indique les niveaux de relief d’une facette écrasante sur la face occlusale d’une molaire de mandrill.. 25.

(40) L’analyse 3D des micro-usures dentaires réduit ces problèmes d’objectivité puisque des logiciels extraient automatiquement des variables décrivant les surfaces d’usure à partir d’objets 3D (Scott et al., 2005; Ungar et al., 2003; Figure 5). Les méthodes d’analyse 3D des micro-usures dentaires, généralement groupées sous le nom de « DMTA » (« Dental Microwear Texture Analysis ») permettent de prendre en compte bien plus d’informations que les stries ou les ponctuations, obtenues par des méthodes 2D, en fonction des paramètres utilisés (les plus courants étant les paramètres SSFA [Scott et al., 2006] et les paramètres ISO/FDIS 25178 [Schulz et al., 2010]), notamment liées à la profondeur des micro-usures. Ces méthodes sont, de plus, beaucoup plus rapides que les méthodes d’analyse 2D (Scott et al., 2006) et ne requièrent pas de préparation des échantillons pour la microscopie. Il est même possible de scanner directement les moulages dentaires (et non les réplicas) pour l’analyse 3D (Ramdarshan et al., 2016). Toutefois, l’information tirée des « objets surfaces » en 3D reste controversée et pourrait ne pas être entièrement liée à l’écologie alimentaire, notamment dans le cas de dents fossilisées ayant été altérées par les processus taphonomiques et présentant, en conséquence, une rugosité de l’émail moins importante (Estebaranz et al., 2007). Une étude comparative récente sur des primates catarrhiniens a pourtant montré que les méthodes d’analyse des patrons de micro-usures 2D et 3D conduisent à des résultats similaires, confortant ainsi la pertinence des deux méthodes (Aliaga-Martínez et al., 2017).. 1.4. L’analyse des patrons de micro-usures dentaires chez le mandrill Dans le cadre de cette thèse, nous avons analysé les patrons de micro-usures dentaires de molaires inférieures gauches de mandrills à partir de moulages réalisés in vivo. Une partie de nos analyses fait l’objet de deux articles disponibles en annexes 1 et 2 de ce manuscrit et une nouvelle méthode est présentée dans le paragraphe 4 de ce premier chapitre.. 26.

(41) 1.4.1. Approches classiques Nous avons utilisé à la fois les paramètres SSFA pour décrire la face occlusale des molaires inférieures gauches des mandrills, notées M1 et M2 (article 1), et des variables décrivant en 2D les patrons de stries présentes sur la face buccale de ces molaires (article 2). Avec ces deux approches (Figure 5), nous souhaitions répondre à différentes questions: la première est de savoir si les patrons de micro-usures dentaires occlusales et buccales reflètent toutes deux le régime alimentaire des mandrills; la seconde concerne les informations, concordantes ou non, obtenues à partir des facettes écrasantes et coupantes de la face occlusale des molaires. Nous nous sommes enfin demandé si des facteurs individuels influençaient les patrons de micro-usures dentaires chez cette espèce. Pour répondre à ces questions, nous avons examiné les relations entre les variables de description (2D et 3D) des micro-usures dentaires des mandrills et des facteurs environnementaux (saison) et individuels (âge, sexe, rang social) connus pour influencer l’écologie alimentaire des individus de la population (Nsi Akoué et al., 2017). Nous avons également testé l’impact des muscles masticateurs sur les micro-usures dentaires de la face occlusale, considérant d’une part la corrélation entre force de morsure et usure dentaire, démontrée notamment par une étude sur le bruxisme chez l’humain (Diraçoǧlu et al., 2011) et, d’autre part, la corrélation entre la taille des muscles masséters et la force de morsure (Bakke et al., 1992; Sasaki et al., 1989; van Spronsen et al., 1989). De plus, nous avons étudié l’influence de la taille de la glande parotide sur ces patrons de micro-usures occlusales, en partant de l’hypothèse selon laquelle l’effet lubrifiant d’une importante sécrétion de salive – liée à la taille des glandes salivaires (Inoue et al., 2006) – limiterait les contacts directs entre les particules abrasives ingérées et l’émail dentaire et/ou limiterait l’érosion dentaire grâce à un effet tampon de l’acidité de certains aliments consommés (par exemple: fruits; Cuozzo et al., 2008). Conformément à cette hypothèse, nous nous attendions à observer une corrélation 27.

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