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Interactions biotiques et dynamiques des populations : approches empiriques et théoriques de la prédation pré-dispersion des graines par les insectes

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Academic year: 2021

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Submitted on 10 Feb 2021

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Interactions biotiques et dynamiques des populations :

approches empiriques et théoriques de la prédation

pré-dispersion des graines par les insectes

Violette Doublet

To cite this version:

Violette Doublet. Interactions biotiques et dynamiques des populations : approches empiriques et théoriques de la prédation pré-dispersion des graines par les insectes. Sciences agricoles. Université Montpellier, 2020. Français. �NNT : 2020MONTG007�. �tel-03136980�

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THÈSE POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR

DE L’UNIVERSITÉ DE MONTPELLIER

En Écologie, Évolution, Ressources Génétiques, Paléobiologie (EERGP) - École doctorale GAIA

Unité de recherche UR0629 - Écologie des Forêts Méditerranéennes (URFM) - INRAE

Présentée par Violette DOUBLET

Le 5 juin 2020

Sous la direction de Thomas BOIVIN et François LEFÈVRE

Devant le jury composé de

Georges KUNSTLER, CR, Laboratoire ÉcoSystèmes et Sociétés En Montagne (LESSEM) - INRAE de Grenoble Rapporteur Frank SCHURR, DR, Institut du paysage et écologie des plantes - Université de Hohhenheim Rapporteur Réjane STREIFF, CR, Centre de Biologie pour la Gestion des Populations (CBGP) - UMR de Montpellier Examinatrice Marie-Anne AUGER-ROZENBERG, DR, Zoologie Forestière (URZF) - INRAE d’Orléans Présidente/Examinatrice François LEFÈVRE, DR, Écologie des Forêts Méditerranéennes (URFM) - INRAE d’Avignon Directeur de thèse Thomas BOIVIN, CR, Écologie des Forêts Méditerranéennes (URFM) - INRAE d’Avignon Co-directeur de thèse

INTERACTIONS BIOTIQUES ET DYNAMIQUES DES POPULATIONS

Approches empiriques et théoriques de la prédation pré-dispersion des graines

par les insectes

BIOTIC INTERACTIONS AND POPULATION DYNAMICS

(3)
(4)

INTERACTIONS BIOTIQUES ET

DYNAMIQUES DES POPULATIONS

Approches empiriques et théoriques de la prédation pré-dispersion

des graines par les insectes

(5)
(6)

Préface

Insecte n, m., du latin

insectus

, sous le tabouret. Ainsi le mot insecte désigne-t-il

un animal si petit qu'il peut (à l'aise) passer sous un tabouret sans ramper, alors

que le python, si.

Les insectes sont des invertébrés de l'embranchement des articulés. Il n'y a pas de

quoi se vanter. Leur corps, généralement peu sensible à la caresse, est entouré

d'une peau à chitine d'aspect volontiers dégueulasse.

Il se compose de trois parties :

1. La tête, avec deux antennes que l'enfant aime à couper au ciseau pour

tromper son ennui à la fin des vacances, deux gros yeux composés à facettes et

peu expressifs au-delà du raisonnable, et une bouche très dure garnie d'un faisceau

redoutable de sécateurs baveux dont la vue n'appelle pas le baiser.

2. Le thorax, lisse et brillant, affublé d'un nombre invraisemblable de pattes

et le plus souvent garni de deux paires d'ailes dont la finesse des nervures ne

manque pas de surprendre, chez un être aussi fruste. C'est grâce à ses ailes que

l'insecte peut vrombir, signalant ainsi sa présence au creux de l'oreille interne de

l'employé de banque assoupi.

3. L'abdomen, divisé en gros anneaux mous et veloutés et percé sur les côtés

de maints trous faisant également office de trachées pulmonaires. (Ce qui est

étrange, chez la libellule, c'est qu'elle respire par où elle pète, Maurice Genevoix,

Humus

.)

Il existe plusieurs millions d'espèces d'insectes. Certains vivent en

Seine-et-Marne, au Kenya, ou sur un grand pied, tel le cafard landais qui, comme le berger

du même nom, vit juché sur des échasses pour dominer fièrement les ordures

ménagères dont il est friand. Certains insectes, comme la mouche des plafonds,

possèdent des ventouses sous les pattes qui leur permettent de se coller aux ptères.

Dictionnaire superflu à l'usage de l'élite et des bien nantis,

Pierre Desproges (1985).

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(8)

SOMMAIRE

SOMMAIRE

Page 1 -

Introduction : Contexte et enjeux de la thèse

1. Les interactions plantes-insectes

2. Écologie de la prédation des graines avant dispersion 3. Objectifs et démarche de la thèse

Page 20 -

Chapitre I : Système biologique et matériel expérimental

1. L’arbre-hôte : Cedrusatlantica

2. Les insectes prédateurs de graines de Cèdre du genre Megastigmus 3. Étude de l’interaction Cedrusatlantica – Megastigmus spp.

4. Sites d’études in situ et dispositifs expérimentaux 5. Synthèse et conclusions

Page 42 -

Chapitre II : Dynamique et déterminants de la prédation

pré-dispersion des graines par les insectes

1. Cadre conceptuel de la distribution spatiale des organismes

2. Enjeux et objectifs de l’étude spatio-temporelle de la distribution des insectes herbivores 3. Le masting, un moteur de la dynamique spatio-temporelle des prédateurs spécialistes

des graines

4. Analyse de la variation inter-individuelle de la prédation des graines 5. Synthèse et conclusions

(9)

SOMMAIRE

Page 68 -

Chapitre III : Impacts démogénétiques des prédateurs de graines sur

leurs plantes-hôtes en situation d’expansion

1. Cadre conceptuel de la dynamique des peuplements en expansion

2. Enjeux et objectifs de l’étude des interactions biotiques dans la dynamique d’expansion des populations d’arbres

3. Étude analytique d’une population d’arbres en expansion soumise à la prédation pré-dispersion

4. Synthèse et conclusions

Page 92 -

Conclusion : Discussion de la thèse et perspectives

1. De l’étude des déterminants de l’interaction à la compréhension de ses impacts écologiques et évolutifs dans les populations d’arbres

2. Approche intégrée de l’interaction arbres-prédateurs pré-dispersion 3. Perspectives de l’étude de l’interaction arbres-prédateurs pré-dispersion

Page 108 -

Publications

- Article 1 : The ecology of predispersal insect herbivory on tree reproductive structures in natural forest ecosystems

- Article 2 : Spatial and temporal patterns of a pulsed resource dynamically drive the distribution of specialist herbivores

- Article 3 : Seed predation-induced Allee effects, seed dispersal and masting jointly drive the diversity of seed sources during population expansion

Page 110 -

Bibliographie

(10)
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(12)

INTRODUCTION

INTRODUCTION

Contexte et enjeux de la thèse

1. Les interactions plantes-insectes--- 2

1.1. Deux groupes d’organismes majeurs au sein du vivant --- 2

1.2. Nature des interactions plantes - insectes herbivores --- 2

1.3. Diversité des insectes herbivores : présentation des différentes guildes--- 4

1.4. Conséquences de l’herbivorie des insectes dans les populations de plantes --- 6

2. Écologie de la prédation des graines avant dispersion --- 7

2.1. Les graines comme ressource --- 7

2.2. Prédation avant et après la dispersion des graines par les insectes --- 7

2.3. Mécanismes d’interactions plantes-insectes pendant la phase de pré-dispersion --- 8

2.4. Impacts de la prédation pré-dispersion des graines sur les plantes --- 12

2.4.1. Impacts écologiques de la prédation des graines ... 12

2.4.2. Impacts évolutifs de la prédation des graines ... 13

2.5. Conclusions sur les impacts et les enjeux des interactions plantes-prédateurs de graines --- 14

3. Objectifs et démarche de la thèse --- 16

3.1. Cadre conceptuel et axes de recherche--- 16

3.2. Structure de la thèse --- 18

(13)

INTRODUCTION

1

FIGURE 1.1. Représentation schématique de la répartition des insectes et des plantes au sein de la

biodiversité. Les nombres concernent uniquement les espèces décrites à l’heure actuelle. (a) Nombre d’espèces vivantes de plantes, d’animaux, de champignons, de procaryotes et de protozoaires décrites. On constate la dominance des plantes et des espèces d’insectes. (b) Nombre de végétaux. Les angiospermes (plantes à fleurs) constituent la plus large proportion de diversité de plantes. (c) Nombre d’insectes où les 7 principaux ordres d’insectes sont détaillés (Coléoptères, Hyménoptères, Lépidoptères, Diptères, Hémiptères, Orthoptères et Thysanoptères). Les insectes herbivores représentent environ 90% de toutes les espèces d’insectes décrites. Adaptation de la figure tirée de Price 2002.

(14)

INTRODUCTION

2

1. Les interactions plantes-insectes

1.1. Deux groupes d’organismes majeurs au sein du vivant

La biodiversité est un vaste sujet de recherche et d’applications en écologie, et les interactions qui se mettent en place entre les espèces d’un écosystème en sont des composantes clés sur le plan écologique, évolutif et fonctionnel (Maron, Baer, and Angert 2014). Ces interactions régissent en grande partie les dynamiques de répartition spatiale et temporelle des organismes dans leur environnement (Case et al. 2005; Holt and Keitt 2005). Parmi ces interactions interspécifiques, celles qui sont en jeu entre les plantes et les insectes représentent un enjeu écologique considérable, étant donnée la part très importante qu’occupent ces deux groupes d’organismes dans le monde vivant (figure 1.1). La classe des insectes prédomine largement sur tous les autres groupes en nombre d’espèces connues, comprenant une trentaine d’ordres différents (figure 1.1 (c)). Les insectes renferment près des trois-quarts des espèces animales de la planète, et on estime même à 30 millions le nombre d’espèces d’insectes qui restent à découvrir (Harrington and Stork 1995; Sauvion et al.

2013) . Les végétaux forment la deuxième classe la plus importante en nombre d’espèces, soit environ

415 0000 décrites (Bachman, Nic Lughadha, and Rivers 2018), mais ils représentent la plus forte biomasse sur Terre. Néanmoins, les plantes forment le groupe d’organismes le plus important en terme de biomasse avec près de 450 Gt C, soit environ 82.54 % de la biomasse du vivant (Bar-On, Phillips,

and Milo 2018). Par ailleurs, si on considère que la biodiversité ne se réduit pas au nombre d’espèces

mais qu’elle intègre également la diversité au sein des espèces telles que la diversité génétique intra- et inter-populations, on comprend pourquoi les interactions entre plantes et insectes jouent un rôle prépondérant dans le fonctionnement des écosystèmes, et par conséquent pour la biodiversité et le fonctionnement de la biosphère (Speight, Hunter, and Watt 1999; Stam et al. 2014).

1.2. Nature des interactions plantes - insectes herbivores

Les organismes herbivores consomment du tissu végétal vivant. Parmi eux, les insectes diffèrent des mammifères en raison de leurs effectifs plus importants, leurs petites tailles, leurs durées de vie et leurs cycles biologiques plus courts, et par le fait qu’ils présentent généralement un niveau d’association plus intime avec leurs plantes-hôtes (Strauss, and Zangerl 2002).Ces caractéristiques les prédisposent à des taux d’adaptation plus rapide et à une plus forte spécialisation (Strauss, and Zangerl

2002). Cohabitant depuis environ 100 millions d’années, les plantes et les insectes ont pu co-évoluer

et générer un large panel d’interactions, soit délétères soit bénéfiques pour la plante, qui se traduisent par des relations riches et complexes (Stotz, Kroymann, and Mitchell-Olds 1999).

On distingue d’abord les relations mutualistes, qui se traduisent par des interactions positives entre les protagonistes et qui montrent un bénéfice mutuel pour la reproduction et la survie de chacun. Les insectes mutualistes incluent majoritairement des insectes participant à la pollinisation et/ou à la dispersion des graines, impliquant parfois une relation obligatoire entre plantes et insectes, ce qui leur confère un rôle crucial pour la reproduction et la dispersion de plantes (Holland and Bronstein 2008). Par exemple, une fécondation croisée de plantes peut être facilitée par des fourmis en recherche de nectar (Potts et al. 2010).

(15)

INTRODUCTION

3

On distingue également les relations antagonistes, qui se traduisent par des interactions négatives entre les protagonistes. Les insectes antagonistes des plantes incluent en grande majorité les insectes herbivores, ou phytophages, c’est-à-dire des insectes qui consomment partiellement ou entièrement les végétaux. Cela implique une grande diversité d’interactions plantes-insectes qui diffèrent dans leurs durées et dans le fait qu’elles induisent ou non la mortalité des plantes-hôtes. Dans tous les cas, l’alimentation des insectes occasionne des dégâts aux tissus végétaux qui peuvent affecter la physiologie et le développement des plantes (e.g. altérations de fonctions biologiques et du succès reproducteur, ou déclenchement de dynamiques de dépérissement voire de mortalité dans les populations de plantes-hôtes). Ces relations antagonistes font partie des moteurs clés de la diversification des plantes et des insectes, qui résulte d’une course évolutive maximisant d’une part la capacité d’exploitation des ressources disponibles sur les plantes et minimisant l’exposition ou la sensibilité aux attaques d’insectes d’autre part (Speight, Hunter, and Watt 1999). Sur le plan phylogénétique, les pressions sélectives réciproques exercées par les plantes et les insectes semblent effectivement liées à des taux de spéciation importants dans les deux groupes (Winkler and Mitter

2008). Les plantes ont évolué vers des stratégies permettant la réduction de leur appétence et de leur

digestibilité ou l’augmentation de leur toxicité. Elles incluent des défenses mécaniques (e.g. épines, poils urticants, feuilles riches en silice) et des défenses chimiques (e.g. phénols, terpènes, alcaloïdes). Également, les substances chimiques volatiles émises par les plantes lors d’une attaque peuvent indirectement attirer les ennemis naturels de l’insecte. Ainsi, ces mécanismes de protection sont attendus pour conférer aux plantes une résistance durable (Howe and Jander 2008). Les insectes ont également évolué vers des stratégies contournant les mécanismes de défense de leurs hôtes, qui optimisent par exemple la synchronie phénologique (van Asch and Visser 2007) ou l’évitement des toxines produites par les plantes (Heckel 2018).Il est cependant intéressant de garder à l’esprit que les interactions plantes-insectes ne sont pas des résultats évolutifs figés, et que la diversité des conditions locales et la diversité intra-spécifique des deux partenaires impliqués sont deux sources de variation des résultats de ces interactions, dans l’espace et dans le temps. L’intervention des changements globaux dans la modification des composantes biotiques et abiotiques de ces systèmes d’interactions (réchauffement climatique et invasions biologiques par exemple) nous poussent plus que jamais à s’interroger sur le caractère dynamique des interactions plantes-insectes.

Dans ce travail, on s’intéresse plus spécifiquement aux interactions antagonistes entre les plantes et les insectes herbivores. Dans la plupart des cas d’herbivorie, la plante n’est pas entièrement consommée, seules certaines parties le sont (feuilles, fruits, racines, graines…) et de manière sélective. La nature et l’intensité des dégâts causés varient selon les espèces d’insectes et de plantes, la durée (ou fréquence) de la pression d’herbivorie, le stade de développement des plantes ciblées (graines, plantules, plantes matures), mais également selon les conditions locales du milieu telles que le climat et la structure de la population de plantes (Marquis 1992; Neely and Manion 1991). L’herbivorie peut générer des interactions de type « proie-prédateur » si c’est une graine ou une plantule qui est consommée par un insecte car cela conduit directement à l’élimination d’un individu dans la population de plantes. On considère en revanche des interactions de type « hôte-parasite » si la consommation des parties ou organes de plantes matures n’induit pas la mort directe d’un individu à court terme (Herrera and Pellmyr 2002; Linhart 1991). Ainsi, les conséquences démographiques et évolutives de l’herbivorie pour la plante diffèrent selon que l’insecte affecte la survie ou la reproduction ou qu’il ne prélève qu’une partie des tissus de la plante (Hulme 1998). Pour simplifier le texte de ce manuscrit, on utilisera dorénavant le terme ‘insecte’ pour désigner les insectes herbivores, d’une manière générale.

(16)

INTRODUCTION

4

1.3. Diversité des insectes herbivores : présentation des différentes guildes

Les insectes généralistes (i.e. polyphages) se nourrissent sur des hôtes de différentes familles, et sont généralement plus sensibles aux mécanismes de défense de la plante. Les insectes spécialistes (i.e. monophages et oligophages) exploitent une ou quelques hôtes du même genre ou de la même famille (Howe and Jander 2008), utilisant parfois la séquestration de composés chimiques émis par la plante pour leur propre défense (Stam et al. 2014) ou le recrutement de congénères par voie phéromonale afin de faciliter l'exploitation de leur hôte (Blomquist et al. 2010). La composition et la dynamique des communautés d'insectes sont donc largement influencées par les traits des végétaux liés au métabolisme secondaire, à la biomasse, à l’architecture de la plante, à la morphologie du feuillage, et à la valeur nutritionnelle de la plante (Stam et al. 2014). Les insectes utilisent des stratégies alimentaires différentes pour obtenir les nutriments nécessaires à leur développement. Bien que les insectes phytophages occasionnent des dégâts aux tissus végétaux, la quantité et la qualité des dégâts varient considérablement selon les guildes trophiques (tableau 1.1). Les insectes « endophytes » se nourrissent à l’intérieur de la plante (i.e. via des galeries dans les réseaux, la tige, pouvant former des galles) et des insectes dits « exophytes » se nourrissent à l’extérieur de la plante (e.g. sur les bourgeons, les fleurs, les feuilles, les tiges). La majorité des guildes (rhizophages, cambiophages, foreurs, piqueurs-suceurs, phyllophages) ont des relations de type « hôte-parasite » avec leurs plantes-hôtes (tableau 1.1). En revanche la guilde des insectes des structures reproductrices montre également des relations de type « proie-prédateur » car ils sont spécialisés sur les graines en croissance ou matures.

(17)

INTRODUCTION

5

TABLEAU 1.1. Présentation des guildes d’insectes herbivores, classées suivant leurs principales caractéristiques et présentation de dégâts associés à la plante (non-exhaustifs). Exemples d’espèces référencées.

Guilde Type de relation Endo/Exophytes

Structures consommées Stade de développement de

l’insecte

Exemples de dégâts associés Exemples

Insectes rhizophages

Hôte-parasite

Endophytes et Exophytes

-Consommation des racines

-Majoritairement stades larvaires

Direct: dégâts racinaires

Indirect: déficit hydrique, retard du

développement, avortement (fleurs, fruits), sensibilité aux déracinements, collet abimé.

Lépidoptères: vers gris de Noctuelles (Noctuidae); Coléoptères: Hanneton commun

Melolontha melolontha au stade larvaire

(polyphage), larves de chrysomèles

(Chrysomelidae); Diptères: larve de Tipule des prairies Tipula paludosa (polyphage)

Insectes

cambiophages et foreurs

Hôte-parasite

Endophytes

-Consommation des tissus du

bois vivant ou mort

-Majoritairement stades larvaires (association possible avec des champignons)

Direct: destruction des tissus conducteurs Indirect: perturbations du système

vasculaire, fragilisation des tiges et branches. Porte d’entrée aux micro-organismes pathogènes

Coléoptères: Charançon du palmier

Rhynchophorus ferrugineus, Scolyte du pin

ponderosa Dendroctonus ponderosae, Lucane cerf-volant Lucanus cervus ; Lépidoptères: Foreur des tiges de canne à sucre Eldana saccharina Insectes piqueurs -suceurs Hôte-parasite Exophytes -Consommation de la sève et des tissus mous

-Adultes et stades larvaires (souvent porteurs de bactéries et virus)

Direct : déformations de tissus, brûlures et

nécroses

Indirect: affaiblissement, baisse de la

photosynthèse, défoliation. Porte d’entrée aux micro-organismes pathogènes

Hémiptères: Puceron lanigère du peuplier

Phloeomyzus passerinii, Cicadelle (polyphage) Euscelidius variegatus, Miride du cacaoyer Sahlbergella singularis Insectes phyllophages Hôte-parasite Exophytes et endophytes -Consommation de feuilles par broyage

-Adultes et stades larvaires

Direct: dégâts foliaires - défoliation

Indirect: baisse de la surface foliaire et de la

photosynthèse, affaiblissement, perte de croissance, mortalité

Orthoptères: Criquet pélerin (polyphage),

Schistocerca gregari ;Lépidopètres : Bombyx Lymantria dispar sur chêne , Mineuse de la tomate, Tuta asboluta ; Piéride du choux, Pieris

brassicae, Hyménoptères: Tenthrède du pin, Diprion pini Insectes des structures reproductrices Proie-prédateur et Hôte-parasite Endophytes et Exophytes -Consommation des

structures reproductrice, i.e.

pièces florales (étamines et ovaires, nectar), graines (mature ou en croissance) et tissus du fruit ou du cône - Adultes et stades larvaires

Direct: incapacité de produire des graines,

réduction du nombre de graines disponibles pour la régénération

Indirect: limitation de la reproduction

sexuée, réduction du succès reproducteur

Diptères : Moucheron asiatique, Drosophila

suzukii ; Hyménoptères: Megastigmus spp. sur

Conifères ; Coléoptères : Balanin du chêne,

Curculio elephas; Bruche du haricot,

Acanthoscelides obtectus; Cétoine Dorée (polyphage), Cetonia aurata, Méligèthe,

(18)

INTRODUCTION

6

1.4. Conséquences de l’herbivorie des insectes dans les populations de plantes

Les insectes peuvent affecter les populations de plantes à tous les niveaux d’organisation biologique (i.e. génétique, individuel, populationnel, communauté et écosystème). Aujourd’hui, il est admis que la compréhension des interactions plantes-insectes repose sur la connaissance des nombreux facteurs (e.g. biochimiques, physiologiques, génétiques, comportementaux, environnementaux) qui régissent l’abondance et la distribution des différentes espèces en interaction (Maron, Baer, and Angert

2014), alors qu’on a longtemps considéré que les plantes avaient un impact plus fort sur les insectes

que les insectes n’en avaient sur les plantes (Crawley 1989). La pression des insectes peut être relativement élevée sur les communautés végétales et l’altération de la croissance et la reproduction des plantes peut impacter significativement les distributions et les compositions d’espèces végétales, ainsi que leurs interactions (Coley 1983; Maron, Baer, and Angert 2014). Ces fortes pressions d’herbivorie ont notamment motivé les recherches sur les options de lutte biologique et de lutte chimique contre les insectes ou encore sur la sélection variétale de plantes plus résistantes aux attaques d’insectes.

Les dégâts des insectes sur les plantes peuvent être directs ou indirects. Les dégâts directs correspondent à l’altération ou la disparition d’une ou plusieurs parties de la plante et de leur fonction biologique, que ce soient des organes (e.g. racines, tiges, feuilles, fleurs et fruits) ou des réseaux (e.g. tissus conducteurs de sève). Les dégâts indirects résultent de facteurs aggravants ultérieurs à l’herbivorie comme (1) des réactions physiologiques de la plante (e.g. nécrose, déformation, avortement d’organes, formation de galles) ; (2) des altérations du fonctionnement de mécanismes physiologiques, e.g. capacité photosynthétique (Mattson and Addy 1975; Zangerl et al. 2002), des capacités reproductrices (Quesada, Bollman, and Stephenson 1995), de la croissance végétative

(Meyer 1998) ; (3) le développement de micro-organismes exploitant également les plantes (e.g.

phytopathogènes, saprophytes ou épiphytes, nématodes) (Paine, Raffa, and Harrington 1997; Pointeau

et al. 2011). Ainsi, l'impact global de l’herbivorie sur un individu ou à l’échelle de la population de

plantes dépend de la fréquence et de l’intensité de ces effets directs et indirects, et de leurs interactions. La taille des populations d’insectes est également une composante importante de la pression d’herbivorie et de ses conséquences. Les populations d'insectes peuvent être labiles, présentant des transitions de phases de faible densité (endémie), durant lesquelles ils attaquent un nombre limité de plantes-hôtes, vers des phases à forte densité (épidémie ou pullulation) au cours desquelles ils attaquent massivement un grand nombre de plantes (Goggin 2007; Kanat, Alma, and Sivrikaya 2005; Kausrud

et al. 2012). A l’échelle individuelle de la plante, il peut exister un effet de seuil démographique que

les populations d’insectes doivent atteindre pour pouvoir se développer avec succès et dépasser les mécanismes de défense de la plante (Fahse and Heurich 2011).

Cette thèse est centrée sur la guilde des insectes des structures reproductrices, en particulier sur les conséquences de la prédation des graines sur le succès reproducteur et des composantes de la dynamique des populations de plantes. Plus spécifiquement, on s’intéressera d’une part, à la façon dont la biologie de l’insecte et de la plante font varier l’intensité de l’interaction dans l’espace et dans le temps, et d’autre part, aux conséquences démographiques et évolutives de cette variation pour la population hôte. Le cadre conceptuel de ces travaux est étayé dans la section qui suit.

(19)

INTRODUCTION

7

2. Écologie de la prédation des graines avant dispersion

Cette section est dédiée aux enjeux et aux problématiques liés la prédation des graines avant leur dispersion. Une partie de ces éléments de réflexion a été publiée dans un article de revue au cours de cette thèse:

Article 1 - Thomas Boivin, Violette Doublet & Jean-Noël Candau (2019). The ecology of predispersal insect herbivory on tree reproductive structures in natural forest ecosystems. Insect Science 26, 182–198

2.1. Les graines comme ressource

Les graines sont des organes qui assurent des fonctions essentielles pour la démographie des populations de plantes, assurant le succès reproducteur des plantes adultes, la croissance locale d’une population, et la dispersion d’individus vers des sites plus ou moins distants des parents. Ainsi, la consommation de ces organes par les insectes a des implications potentiellement importantes pour les populations de plantes sur le plan dynamique, génétique et évolutif (Boivin, Doublet, and Candau

2019; Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007; Zhang, Drummond, and Hartke 1997). Au cours du

développement des graines, les plantes investissent une partie substantielle de leurs ressources dans les tissus reproducteurs pour soutenir à la fois l'embryogenèse et les processus de germination. Cet investissement fait d’une graine et de ses tissus une source nutritive particulièrement riche. Contrairement aux autres organes, les graines contiennent très peu d’eau, et sont, de fait, très concentrées en éléments nutritifs. Plus riches en protéines et en hydrates de carbones que tout autre organe, les graines forment donc des cibles d’intérêt pour un grand nombre d’espèces d’insectes

(Jordano 2000). Les graines forment des ressources généralement agrégées dans l’espace, pouvant

atteindre des abondances locales très élevées, mais qui ne sont souvent disponibles que pour une courte durée en raison du caractère saisonnier des évènements de reproduction (Hulme and Benkman 2002). En particulier, un grand nombre de plantes pérennes présentent de fortes variations annuelles du niveau de fructification, synchronisées à l’échelle de la population, c’est ce qu’on appelle le phénomène de masting (Kelly 1994; Silvertown 1980). Ces alternances de fructification massives et faibles (voire nulles) dépendent de l’interaction de multiples facteurs climatiques, démographiques (densité et structure de la population végétale) et individuels (succès de floraison et de pollinisation). Elles confèrent donc un caractère variable, imprévisible et éphémère à la disponibilité en ressources pour les insectes qui les consomment (Crawley 2014). Enfin, protégeant ces ressources hautement nutritives, des défenses physiques (structures rigides : cônes ou fruits à coque, épines) et chimiques sont souvent investies par les plantes dans les structures reproductrices qui constituent également des défis pour les prédateurs (Bell 1978; Janzen 1971).

2.2. Prédation avant et après la dispersion des graines par les insectes

Une distinction est généralement faite entre les insectes qui se nourrissent des graines avant leur dispersion sur la plante-mère, et ceux qui se nourrissent des graines une fois dispersées et dissociées de leurs plantes-mères. On emploie pour cela les termes prédation pré-dispersion (ou prédation avant dispersion) et prédation post-dispersion pour différencier ces deux périodes d’attaques d’insectes. Les insectes constituent le groupe d’organismes le plus important dans la prédation pré-dispersion des graines (Crawley 2014; Janzen 1971; Turgeon, Roques, and Groot 1994). Parmi eux, on retrouve notamment des insectes des principaux ordres : Coléoptères, Diptères, Hyménoptères et Lépidoptères

(20)

INTRODUCTION

8

(voir tableau 1.2). Le succès des insectes dans l’utilisation de cette niche repose notamment sur leur fort potentiel de reproduction et leur flexibilité évolutive. De fait, ils ont un cycle de vie synchronisé avec la disponibilité éphémère des graines sur leur plante hôte (Harman 1999; Rouault et al. 2004). La sélection peut être particulièrement forte pour synchroniser ce cycle avec le stade cible de la plante hôte lorsque l'oviposition et le développement larvaire se déroulent dans des structures reproductrices immatures (Boivin et al. 2015; Harman 1999), et la dépendance du développement à un seul organe ou tissu végétal est un facteur majeur de spécialisation écologique (Gaston, Duncan, and Valladeres

1992). Cela peut expliquer pourquoi les prédateurs de graines pré-dispersion sont presque

exclusivement des espèces univoltines (une seule génération par an) et spécialistes (Crawley 2014). Les espèces multivoltines (plusieurs générations par an) semblent moins synchrones avec les pics d'occurrence des fructifications sur la plante, elles peuvent également exploiter les graines en phase post-dispersion (Hulme 1998; van Klinken and White 2014; Lewis and Gripenberg 2008). Une spécialisation écologique forte pour un hôte particulier peut entraîner la perte de la variation génétique pour la capacité à utiliser d'autres hôtes, ce qui peut contraindre irréversiblement les spécialistes à une gamme restreinte d'espèces de plantes-hôtes relativement proches phylogénétiquement

(Auger-Rozenberg et al. 2006). Comme de nombreux herbivores, les insectes prédateurs de graines montrent

des adaptations biochimiques pour contourner les effets délétères des toxines produites spécifiquement dans ces structures, ce qui explique d’ailleurs pourquoi une majorité de ces espèces d’insectes sont des spécialistes (Hulme and Benkman 2002).

Les insectes prédateurs des graines qui occupent la niche post-dispersion partagent souvent des habitudes généralistes puisque les graines sont souvent moins facilement détectables une fois dispersées, irrégulièrement réparties dans l’espace et en faible densité (Hulme and Benkman 2002).Ils partagent cette niche avec une plus grande diversité d’animaux (oiseaux, mammifères, etc.) et la composition des communautés de ces prédateurs varie considérablement entre les écosystèmes (Hulme

and Benkman 2002). Bien que la niche post-dispersion ne soit pas principalement occupée par des

insectes, ceux-ci peuvent toutefois induire à eux seuls des destructions de graines conséquentes, notamment en ce qui concerne les fourmis, les charançons ou les bruches (Crawley 1989; Hulme 1998;

van Klinken and White 2014).

Dans le cadre de cette thèse, on se concentre exclusivement sur l’étude de la prédation pré-dispersion par les insectes. De fait, les termes « prédation », « prédation des graines » et « prédateurs de graines » employés ci-après ne désigneront que la prédation pré-dispersion par les insectes.

2.3. Mécanismes d’interactions plantes-insectes pendant la phase de pré-dispersion

Les graines se développent au sein de structures reproductrices plus ou moins complexes (e.g., les fruits, les cônes), dont les tissus peuvent être ciblés plus ou moins spécifiquement par une grande diversité d’espèces d’insectes. Selon les tissus végétaux consommés, les communautés d’insectes se répartissent en guildes trophiques, présentées dans le tableau 1.2 et la figure 1.2. On distingue les guildes floricoles, conophages, frugivores et conospermatophages puis enfin les séminiphages qui regroupent ici les guildes séminiphages internes et séminiphages externes (Boivin, Doublet, and

Candau 2019). La structure parfois complexe des organes reproducteurs et le temps nécessaire à leur

développement est probablement à l’origine d’une telle diversification des communautés d’insectes qui les consomment (Boivin and Auger-Rozenberg 2016). On peut noter qu’il existe deux guildes qui ne consomment pas directement les graines, soit parce qu’elles attaquent un stade précoce de développement des structures reproductrices (floricoles), soit parce qu’elles ne consomment que les

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INTRODUCTION

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tissus environnant les graines (conophages). Ce tableau synthétique montre en quoi la consommation des structures reproductrices par les insectes peut affecter la quantité de graines disponibles pour la régénération de plusieurs façons, possiblement cumulatives, selon les guildes impliquées. Dans certains cas, la consommation partielle ou totale des réserves destinées à l’embryon réduit le potentiel de germination et de développement précoce des plantules. Dans certains cas, la consommation de l'embryon de la graine rend impossible toute germination. Outre la consommation directe des graines, les attaques de ces insectes peuvent également conduire à : (1) l'avortement des structures porteuses de graines, (2) la non-libération des graines à cause d’écoulements de résine ou de la fusion de l’ovule avec les écailles, (3) l'introduction d'agents pathogènes pour les plantes (tableau 1.2).

Au cours de la phase de pré-dispersion, les interactions étroites entre les insectes spécialistes des structures reproductrices et leurs plantes-hôtes sont à l’origine de processus écologiques et évolutifs clés chez les insectes. Notamment, les guildes d’insectes exploitant cette niche écologique ont évolué vers des stratégies de contournement des contraintes liées à l’hétérogénéité spatio-temporelle de la disponibilité en graines. La diapause est une période d'arrêt du développement, reconnue comme une réponse adaptative des insectes aux variations climatiques saisonnières et aux variations de disponibilité en ressources dans l’environnement (Danks et al. 1987). Dès lors que la disponibilité des ressources semble imprévisible avec de fortes fluctuations spatiales ou inter-annuelles, un certain nombre d’espèces d’insectes a évolué vers une prolongation de leur cycle de vie en augmentant la durée de la diapause, ce qui leur permet d’éviter les années où la disponibilité des ressources est faible

(Hanski 1988). La diapause prolongée peut se traduire au minimum par une année supplémentaire

d’arrêt du cycle pour une fraction d'une cohorte larvaire, mais on observe souvent un cycle interrompu sur plusieurs années consécutives avec des proportions décroissantes au cours du temps (Annila 1982;

Hanski 1988; Pélisson et al. 2013) ou plus rarement un patron bimodal (Suez et al. 2013). L'échelle

spatiale à laquelle la synchronisation des structures reproductrices réduit efficacement leur prédation dépend de la mobilité relative des prédateurs (Satake and Bjørnstad 2004). En cas d’absence de ressources, la colonisation de nouveaux territoires par les insectes repose sur des vols actifs ou passifs de dispersion à longue distance, tandis que la recherche de structures reproductrices dispersées à l’échelle locale implique des vols actifs de courte distance (Liebhold and Tobin 2008; Turgeon,

Roques, and Groot 1994).

La biologie reproductive des plantes-hôtes peut également jouer un rôle clé dans le choix de l'hôte par les insectes. Par exemple, chez la plupart des angiospermes et certains gymnospermes, l’accumulation des tissus de réserves se déroule une fois que l’ovule de la graine est fécondé par le pollen (Owens and Blake 1985; Singh 1978). Le succès de la prédation des graines dépend donc d’une part du succès de pollinisation et de fécondation, et de la capacité du prédateur à trouver les ovules fécondés pour y pondre ses œufs d’autre part. Chez d’autres gymnospermes comme les cycadales et les conifères, le stockage de réserves peut commencer avant la fécondation. Les tissus de réserve mis en place avorteront en l'absence de fécondation, ce qui résulte en une graine formée mais vide (Owens

and Blake 1985). Certains Hyménoptères spécialistes des graines sont capables de manipuler

l'ontogenèse des graines non fécondées en inhibant les processus d’avortement et stimulant les processus d’accumulation des réserves dans les ovules comme s’ils avaient été fécondés (von Aderkas et al. 2005).

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INTRODUCTION

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TABLEAU 1.2. Présentation des guildes d’insectes consommateurs des structures reproductrices, classées suivant leurs principales caractéristiques.

Guilde des insectes prédateurs des structures reproductrices

Cycle de vie Structures consommées Stade de développement de l’insecte

Impact sur la production de graines Ordres représentatifs et Références

Floricoles Hôte-parasite Endophytes et Exophytes Consommation des inflorescences

-Adultes et stades larvaires

Pas de production possible

Coléoptères, Lépidoptères, Thysanoptères (Alford 2008; Delplanque 1998; Mitchell 1981; Roques and El Alaoui El Fels 2005)

Conophages (sur

Conifères uniquement)

Hôte-parasite

Endophytes

Consommation des tissus connexes à la graine mais pas

la graine elle-même (i.e. bractées, écailles)

-Adultes et stades larvaires

Pas de production possible

(avortement ou chute prématurée de la structure, voir empêchement de la libération)

Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Hémiptères

(Roques and El Alaoui El Fels 2005; Roques 1983; Turgeon, Roques, and Groot 1994)

Séminiphages (prédateurs de graines) Proie-prédateur Endophytes et Exophytes Consommation de la graine uniquement (mature ou en croissance)

- Adultes et stades larvaires

Empêche le développement, la maturation et la libération des graines de la structure

reproductrice

Coléoptères, Lépidoptères, Diptères, Hémiptères, Hyménoptères

(Turgeon, Roques, and Groot 1994; Pélisson et al. 2013; Battisti et al. 1999; Bonal, Muñoz, and Díaz 2007; Lesieur et al. 2014; Ramírez and Traveset 2010; Roques 1983; Xia, Sun, and Liu 2013) Frugivores (sur Angiospermes) et Conospermatophages (sur Conifères) Proie-prédateur Hôte-parasite Endophytes

Consommation des fruits

pour les angiospermes

Consommation des bractées et tissus connexes à la graine

pour les conospermatophages -Adultes et stades larvaires

Empêche le développement, la maturation et la libération des graines de la structure

reproductrice, transmission de pathogènes

Coléoptères, Lépidoptères, Diptères

(Derbel et al. 2007; Ramírez and Traveset 2010; Roques and El Alaoui El Fels 2005; Roques 1983; Turgeon, Roques, and Groot 1994)

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INTRODUCTION

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FIGURE 1.2. Présentation d’insectes des structures reproductrices appartenant à chaque guilde décrite dans

le tableau 1.2. (a) Les insectes floricoles: 1 et 2. Epinotia nigricana (Lepidoptera) et dégâts associés, 3.

Dorystomus taeniatus (Coleoptera) et 4. Holcogaster fibulata (Hemiptera) ; (b) les insectes conophages: 5. Contarinia sp. (Diptera), 6. Gelechia senticetella (Lepidotera) et 7. Gonocerus juniperi (Hemiptera) ; (c) les insectes conospermatophages et frugivores: 8. et 9.Pissodes validirostris (Coleoptera) et dégâts associés, 10. Ernobius abietis (Coleoptera), 11. Dioryctria abietella (Lepidotera) et (d) les insectes séminiphages: 12. Megastigmus pistaciae (Hymenoptera), 13. larve de Curculio elephas (Coleoptera) et 14. Leptoglossus occidentalis (Hemiptera).

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INTRODUCTION

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2.4. Impacts de la prédation pré-dispersion des graines sur les plantes

On a montré dans la section 2.3 comment les guildes associées aux structures reproductrices peuvent impacter la production de graines selon différentes voies, que ce soit par une consommation directe des graines, par une altération du développement des structures porteuses de graines ou par une incapacité à libérer les graines. C’est pourquoi ce type d’herbivorie a généré une abondante littérature sur ses impacts sur la performance, la dynamique et l’évolution des populations de plantes (Boivin,

Doublet, and Candau 2019; Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007; Zhang, Drummond, and Hartke 1997).

Ces impacts sont développés dans les sections 2.4.1 et 2.4.2 suivantes. 2.4.1. Impacts écologiques de la prédation des graines

La prédation pré-dispersion des graines modifie la pluie de graines, c’est-à-dire les graines relâchées par les plantes-mères, à la fois quantitativement et qualitativement (Crawley 2014; Hulme

and Benkman 2002; Janzen 1971; Turgeon, Roques, and Groot 1994). Elle peut donc impacter

directement le succès de recrutement des semis et le taux de croissance des populations de plantes

(Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007; Maron and Crone 2006). L’existence d’une corrélation positive

entre production de graines et recrutement des semis et plantules chez les plantes pérennes semble d’ailleurs indiquer que les prédateurs de graines pourraient directement influencer la démographie des plantes (Crawley 2014; Crawley and Long 1995; Lewis and Gripenberg 2008; Louda and Potvin

1995).Toutefois, la prédation pourrait aussi favoriser la survie des plantules en réduisant la compétition

intraspécifique après la germination (Halpern and Underwood 2006). Par ailleurs, la coexistence de nombreuses espèces végétales dans un même habitat peut être effectivement maintenue par des variations temporelles et/ou spatiales de l'impact des prédateurs qui empêchent l'exclusion compétitive de certaines espèces de plantes entre elles (Hulme 1996).

Il est attendu que la prédation des graines n’impacte que significativement la dynamique des plantes dans certaines situations. Premièrement, la prédation limite la densité des plantes seulement si le recrutement des plantules est limité par la quantité de graines disponibles et non pas par des effets de microsites (Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007; Maron and Crone 2006; Turnbull, Crawley, and Rees

2000). Si les effets de microsites constituent une limite au recrutement, alors l’ajout de graines

supplémentaires n’aura pas d’impact sur la densité des plantules recrutées (Clark et al. 2007). Deuxièmement, le cycle de vie des plantes peut compenser les pertes de graines et limiter leurs conséquences démographiques. C’est le cas des plantes qui combinent reproduction sexuée et asexuée (e.g., régénération végétative) ou qui produisent des banques de graines importantes et persistantes dans le sol (Maron and Crone 2006). Certaines plantes herbacées ont des banques de graines faibles voire quasi nulles, suggérant que la prédation est à même de réduire le taux de croissance de leurs populations (Maron and Crone 2006). L'évaluation d’une limitation de la dynamique des plantes par des effets microsites ou par la quantité de graines a souffert d'un manque d'études expérimentales combinant simultanément ajout de graines, perturbation et exclusion des prédateurs (Hulme and

Benkman 2002). Cependant, la limitation par le nombre de graines est apparue plus importante chez

les plantes (1) dont la production de graines est importante, i.e. les arbres, (2) dont le microsite est perturbé ou (3) dont la banque de graines est de courte durée, i.e. les herbacées (Clark et al. 2007). Les meilleures méthodes de quantification des impacts de la prédation des graines sur la dynamique des plantes combinent expérimentation et modélisation (Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007). En effet,

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INTRODUCTION

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plusieurs études expérimentales ont pu être conduites sur des plantes ayant un temps de génération suffisamment court pour évaluer quantitativement l’impact démographique de la prédation sur ces populations. Enfin pour projeter cet impact sur le taux de croissance des populations de plantes, nombre d’études ont utilisé des modèles de dynamique de populations incluant les évènements de natalité et de mortalité en lien avec l’herbivorie des graines (Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007). Deux types de modèles sont communément utilisés dans ce contexte : les modèles matriciels de population (en anglais matrix projection models) et/ou des modèles de projections intégraux (en anglais integral projection models). En revanche, l’appui expérimental de telles méthodes s’avère difficile, voire impossible, pour les plantes pérennes à longue durée de vie, au cycle de vie complexe et aux banques de graines importantes.

Globalement, il ressort de tous ces travaux que l’impact de la prédation des graines ne peut se résumer aux seules quantités de graines consommées par les insectes dans une population de plantes. Les populations de plantes-hôtes sont susceptibles de répondre de façons complexe et variée à de la prédation pré-dispersion. Pulido and Díaz 2005 ont démontré l'absence d'effets d'une prédation de graines à 10-30 % sur la dynamique de régénération du chêne vert, Quercus ilex. Des résultats similaires ont été trouvés sur les effets de la prédation des graines par des vertébrés sur la régénération du pin sylvestre, Pinus sylvestris (Worthy, Law, and Hulme 2006). Cependant, les taux de prédation de graines sont fréquemment élevés chez les plantes pérennes, pouvant atteindre dans certains cas plus de 80 % (Crawley 2014). Il demeure un manque d'études portant sur les effets de telles amplitudes sur le recrutement des semis et plantules en raison des échelles spatio-temporelles requises rendant l’expérimentation difficile.

2.4.2. Impacts évolutifs de la prédation des graines

En affectant directement le succès reproducteur des plantes, les prédateurs des graines peuvent exercer une pression de sélection importante sur les traits héritables et liés à la reproduction des plantes

(Hulme and Benkman 2002). De nombreuses études ont analysé l’évolution de traits liés à la

reproduction dès lors que les prédateurs diminuent la production de graines chez des individus aux caractéristiques différentes (Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007). Notamment, il a été démontré que des traits héréditaires tels que la taille des fleurs et fruits, la synchronisation et la phénologie de la floraison, les caractéristiques des inflorescences et la dynamique propre de la production de graines répondent à la sélection phénotypique par les prédateurs chez les plantes herbacées et pérennes (Brody 1997; Cariveau et al. 2004; Ehrlén 2015; Fenner et al. 2002; Janzen 1971; Rose, Louda, and Rees 2005;

Strauss and Whittall 2006). En revanche, peu d’études se sont intéressées à la pression de sélection sur

l’avortement des structures reproductrices ou bien le sexe de la plante (Boivin, Doublet, and Candau

2019; Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007; Zhang, Drummond, and Hartke 1997). Ce type d’évolution

des populations de plantes peut toutefois être limité par des compromis résultant de pressions de sélection antagonistes sur ces caractères reproductifs héréditaires, par exemple l'attrait simultané pour les prédateurs de graines et les pollinisateurs (Cariveau et al. 2004). Les conflits entre les diverses pressions de sélection peuvent donc influencer les trajectoires évolutives globales. Néanmoins, on suggère qu’il devrait être possible de mesurer ces réponses aux pressions de sélection individuelles chez les plantes (Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007).

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INTRODUCTION

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FIGURE 1.3. Variabilité inter-individuelle du taux de prédation de graines dans trois peuplements de

différentes espèces de conifères par Megastigmus spp., insectes prédateurs de graines. Source : T. Boivin, communication personnelle.

On peut souligner également que peu d’études s’intéressent aux conséquences de la prédation des graines sur la structure génétique des populations de plantes. Pourtant, comme la prédation pré-dispersion éradique des individus, on peut envisager un certain nombre de conséquences sur la diversité génétique des populations de plantes. La prédation peut notamment conduire à des effets de dérive génétique lorsque la taille de la population de plantes est faible. L’intensité de prédation pré-dispersion présente généralement de fortes variations inter-individuelles, comme chez diverses espèces de conifères (figure 1.3). Cela peut signifier des contributions individuelles variables à la pluie de graines à l’échelle locale. Ainsi, cela questionne sur l’influence possible de telles variations inter-individuelles sur la structure génétique locale, en particulier à travers une altération de la taille efficace de la population par une augmentation ou une diminution de la variance du succès reproducteur entre les arbres (Lefèvre et al. 2014). Parmi les processus susceptibles d'influencer le succès reproducteur, on peut citer l’effet Allee, c’est-à-dire une diminution de la valeur sélective induite par une diminution de la taille de la population (Courchamp, Berec, and Gascoigne 2008; Stephens, Sutherland, and Freckleton 1999). Cependant, il a été montré qu’un effet Allee peut limiter l’érosion de la diversité génétique dans les populations en expansion (Roques et al. 2012). L’occurrence d’effets Allee d’origine biotique peut alors questionner l’impact de la prédation des graines sur les dynamiques de populations de plantes-hôtes.

2.5. Conclusions sur les impacts et les enjeux des interactions plantes-prédateurs de graines

Les impacts de la prédation des graines sont donc pluriels et affectent à différents degrés et échelles les populations de plantes : survie et dispersion des graines, recrutement des plantules et dynamique de régénération naturelle (Hulme 1994; Louda, Potvin, and Collinge 1990); abondance, distribution des espèces de plantes et structure des écosystèmes (Crawley et al. 2013; Kitajima, and Foster 1999; Hulme 1997; Kollmann and Schill 1996).Cependant, il apparaît d’après l’abondante littérature dédiée à ce sujet que la compréhension des conséquences évolutives et écologiques liées à la prédation pré-dispersion, demeure difficile et limitée. Elle est d’autant plus limitée que ce type d’herbivorie présente

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INTRODUCTION

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des variations spatio-temporelles aussi importantes que celles de la ressource ciblée, les graines. Pourtant la majorité des études se limitent à l’estimation du nombre de graines prédatées, pour établir des proportions à l’échelle locale, qui ne restent à elles seules que peu informatives pour des projections démographiques et évolutives (Boivin, Doublet, and Candau 2019; Kolb, Ehrlén, and

Eriksson 2007). D’autre part, la considération des interactions entre la prédation pré-dispersion et

d'autres sources de mortalité intervenant par exemple à des stades ultérieurs du développement des plantes (par exemple, la prédation post-dispersion des graines et des plantules) reste essentielle pour comprendre de façon intégrative les échecs ou les succès des processus de régénération dans les populations de plantes (Crawley 2014; Crawley and Long 1995; Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007;

Sunyer et al. 2014).

En plus de ces impacts écologiques et évolutifs, la prédation des graines par les insectes est également porteuse d’enjeux économiques et de conservation. En effet, les populations de plantes sont naturellement associées à des services écosystémiques et la prédation des graines peut représenter un risque important sur le plan économique (Boivin, Doublet, and Candau 2019; Kolb, Ehrlén, and

Eriksson 2007). La pression de prédation sur les graines peut par exemple réduire l'approvisionnement

en semences de haute qualité à des fins ornementales, de reboisement, de boisement et de conservation lorsque les insectes exploitent des vergers à graines et des peuplements sélectionnés pour la qualité de leurs semences (Mangini, Duerr, and Taylor 2003; Turgeon, Roques, and Groot 1994). Des recherches sont menées dans les vergers à graines d’arbres forestiers à travers le monde pour limiter les dégâts causés par les insectes prédateurs de graines et optimiser la productivité de ces structures (Löfstedt et

al. 2012; Rosenberg, Nordlander, and Weslien 2015; Suckling et al. 2005). Outre l’enjeu économique,

d'importantes préoccupations ont été soulevées quant aux impacts potentiels des prédateurs de graines sur les espèces d'arbres menacées dont la régénération naturelle est très fortement contrainte par l’environnement abiotique (Guido and Roques 1996). Des préoccupations similaires ont émergé plus récemment concernant l'impact potentiel de la prédation des graines sur l'adaptation des écosystèmes forestiers naturels au changement climatique, sur des stratégies d'adaptation telles que la migration assistée, et la limitation des capacités d’expansion des populations d’arbres en limite d’aire de répartition (Jameson, Trant, and Hermanutz 2014; Kroiss, Hillerislambers, and D’Amato 2015).

Globalement, les dynamiques d’occurrence des insectes prédateurs des graines, et leurs risques potentiellement associés, présentent des variations temporelles et spatiales importantes qui sont difficilement prévisibles. C’est le résultat des interactions complexes qui s’établissent entre la dynamique de la reproduction de la plante-hôte (par exemple, le succès de la pollinisation, la maturation des graines) et des populations d'insectes (par exemple, la phénologie, la diapause prolongée, la dispersion), et des facteurs exogènes liés au climat, à la configuration du paysage ou à l'abondance des ennemis naturels de ces insectes. La définition de réponses opérationnelles efficaces aux dégâts occasionnés sur les graines repose donc sur des approches contextuelles qui intègrent une connaissance précise des facteurs écologiques et environnementaux pilotant l'abondance des insectes

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INTRODUCTION

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3. Objectifs et démarche de la thèse

3.1. Cadre conceptuel et axes de recherche

Cette thèse s’intéresse spécifiquement aux interactions entre les arbres et les insectes prédateurs pré-dispersion de graines au sein des écosystèmes forestiers. C’est un système-modèle particulièrement pertinent pour aborder des problématiques clés des interactions plantes-herbivores, notamment en ce qui concerne les processus en jeu dans les interactions plantes-insectes et leurs conséquences sur la dynamique démographique et évolutive de la population hôte (Boivin, Doublet,

and Candau 2019). En effet, la majorité des populations d'arbres exhibe d’importantes variations

spatio-temporelles de fructification dues au phénomène de masting (Janzen 1971; Kelly 1994). Ces patrons de fructification vont fortement impacter la disponibilité des graines pour les insectes prédateurs, pour lesquels on attend une réponse comportementale et démographique forte

(Bogdziewicz et al. 2018; Boivin, Doublet, and Candau 2019; Bonal, Muñoz, and Díaz 2007; Kolb,

Ehrlén, and Eriksson 2007; Pélisson et al. 2013).

On a montré dans les sections précédentes que les patrons de fructification sont des forces sélectives importantes pour les insectes (e.g. phénologie, diapause, dispersion) mais que l’influence des insectes prédateurs de graines sur la dynamique et l’évolution des populations d’arbres reste mal comprise. Les implications génétiques et démographiques de la prédation des graines dans les populations d'arbres doivent être étudiées en intégrant les processus dynamiques inhérents aux interactions arbres-insectes. En effet, on a pu voir précédemment que les conséquences de la prédation des graines pour les arbres ne peuvent être prédites seulement à partir d'approches empiriques de comptage des graines consommées. Le présent travail vise à contribuer à ces fronts de science et la figure 1.4 formalise le cadre conceptuel et les deux axes de recherches complémentaires retenus dans cet objectif.

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INTRODUCTION

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FIGURE 1.4. Cadre conceptuel des interactions arbres-insectes prédateurs des graines durant la phase

de pré-dispersion considérées dans cette thèse. En affectant le succès reproducteur des arbres-hôtes, les insectes peuvent avoir un impact sur les processus démogénétiques de leur population d’hôtes. Adapté de la revue de Boivin, Doublet, and Candau 2019.

Un premier axe de recherche empirique

Les variations complexes de l’intensité des interactions arbres-prédateurs de graines s’expliquent notamment par des fluctuations spatio-temporelles respectives des deux protagonistes (Boivin, Doublet, and Candau 2019; Kolb, Ehrlén, and Eriksson 2007). Ainsi une connaissance explicite de l’effet de la variation spatio-temporelle de la ressource pour l’insecte sur les niveaux de prédation des graines est un élément clé de notre capacité à prévoir la dynamique des populations végétales et leurs trajectoires évolutives (figure 1.4). En particulier, l’étude des facteurs qui régissent la distribution spatiale des prédateurs des graines apparaît déterminante pour la compréhension de la forte variabilité des taux de prédation communément observée entre les arbres d’un même peuplement. Pour cela, on a développé une approche empirique basée sur des suivis de long-terme d’arbres et d’insectes prédateurs de graines en milieu naturel.

Un deuxième axe de recherche théorique

Il est possible d’envisager que les prédateurs de graines peuvent impacter la diversité génétique des populations d'arbres-hôtes, en raison des effets de différentiels de succès reproducteur entre des arbres induits par des différentiels individuels de pression de prédation (figure 1.4). L'étude des processus démogénétiques de populations d’arbres exposées à des prédateurs des graines peut être abordée par des approches théoriques qui permettent de contourner les défis spatiaux et temporels de l'expérimentation sur ces organismes longévifs et à maturité sexuelle tardive (Boivin, Doublet, and Candau 2019). C’est une perspective d’autant plus intéressante que les prédateurs de graines sont très

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INTRODUCTION

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peu représentés dans les modèles de dynamique forestière (Amm et al. 2012; Gutiérrez, Snell, and

Bugmann 2016). Pour cela, on a développé une approche théorique basée sur une modélisation de

population d’arbres en expansion soumise à de la prédation des graines. La modélisation spatialement explicite de l’interaction entre le succès reproducteur individuel des plantes et la dynamique des prédateurs de graines apparaît comme une voie de recherche plutôt prometteuse et nécessaire.

3.2.Structure de la thèse

À la suite de cette partie introductive, la thèse est composée de trois chapitres suivis d’une conclusion générale. Les articles associés à ce travail sont reproduits après la conclusion générale.

Le premier chapitre (CHAPITRE I) présente le système modèle d’interactions arbres-insectes étudié : la prédation des graines du Cèdre de l’Atlas (Cedrus atlantica) par les insectes prédateurs de graines du genre Megastigmus (Hymenoptera : Torymidae). Notamment, il détaille les connaissances actuelles de ce système biologique, les variables d’intérêt et leurs traitements au cours de ce travail de thèse. Ce chapitre précise également les sites naturels dans lesquels ces travaux ont été conduits et donne les détails des données récoltées pour l’analyse empirique de cette interaction arbre-prédateur de graines.

Le second chapitre (CHAPITRE II) présente une analyse fine et empirique menée sur la dynamique des prédateurs de graines et ses facteurs explicatifs dans une population de cèdres du sud-est de la France. Deux aspects y sont développés : l’analyse de l’effet de la composante spatio-temporelle de la ressource sur la dynamique des prédateurs de graines et l’analyse d’un possible déterminisme génétique de la variation inter-individuelle de sensibilité à la prédation des graines.

Ce chapitre est associé à une publication parue dans le journal Scientific reports :

Article 2 - Violette Doublet, Cindy Gidoin, François Lefèvre & Thomas Boivin (2019). Spatial and temporal patterns of a pulsed resource dynamically drive the distribution of specialist herbivores. Scientific reports 9:177787

Le troisième chapitre (CHAPITRE III) propose une analyse des conséquences démographiques et génétiques de la prédation des graines par les insectes dans une population d’hôtes. Ici, une analyse théorique et analytique a été entreprise pour modéliser les processus démogénétiques dans une population d’arbre soumise à la prédation dans un contexte d’expansion.

Ce chapitre est associé à une publication soumise au journal The American Naturalist :

Article 3 - Violette Doublet, Lionel Roques, Etienne Klein, Thomas Boivin, François Lefèvre (2020). Seed dispersal, seed predation and masting jointly drive the genetic diversity in expanding plant population. Submitted to The American naturalist

Enfin, le dernier chapitre (CONCLUSION) offre une vue d’ensemble des travaux développés dans cette thèse et les met en perspective. De nouvelles pistes sont également proposées pour poursuivre l’étude de ces interactions plantes-insectes.

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INTRODUCTION

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CHAPITRE I

Une civilisation sans la Science, ce serait aussi absurde qu'un poisson sans bicyclette. Pierre Desproges ; Vivons heureux en attendant la mort (1983)

CHAPITRE I

Système biologique et matériel expérimental

1. L’arbre-hôte : Cedrus atlantica ... 21

1.1. Une espèce originaire de l’Atlas, établie dans le bassin Méditerranéen ... 21 1.2. Éléments de biologie ... 23 1.2.1. Cycle de reproduction ... 23 1.2.2. Masting chez le Cèdre de l’Atlas ... 24 1.2.3. Dispersion, potentiel de colonisation et régénération naturelle ... 28 2. Les insectes prédateurs de graines de Cèdre du genre Megastigmus ... 29 2.1. Des espèces exotiques, originaires d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient ... 29 2.2. Éléments de biologie ... 30 2.2.1. Cycle biologique ... 30 2.2.2. Adaptation au masting : diapause prolongée ... 31 3. Étude de l’interaction Cedrus atlantica - Megastigmus spp. ... 32 3.1. Un système modèle simple d’interaction arbres-prédateurs de graines ... 32 3.2. Une variable centrale pour caractériser l’interaction : le taux de prédation des graines .... 34 4. Sites d’études in situ et dispositifs expérimentaux ... 35 4.1. Approche individuelle sur un échantillon d’arbres d’intérêt ... 35 4.1.1. Caractéristiques du site... 35 4.1.2. Stratégie d’échantillonnage ... 35 4.2. Approche individuelle dans des patchs de cèdres ... 36 4.2.1. Caractéristiques des patchs ... 36 4.2.2. Stratégie d’échantillonnage ... 38 5. Synthèse et conclusions ... 40

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CHAPITRE I

21

1. L’arbre-hôte : Cedrus atlantica

1.1. Une espèce originaire de l’Atlas, établie dans le bassin Méditerranéen

Le cèdre de l’Atlas, Cedrus atlantica (Manetti ex Endl.) Carrière, est un conifère appartenant à la famille des Pinacées et originaire d’Afrique du Nord où il est implanté à une altitude comprise entre 1200 et 1800 mètres, soit dans des zones montagneuses. À l’heure actuelle, les populations indigènes de cette essence forestière sont menacées dans leur aire d’origine, i.e. au Maroc et au nord de l’Algérie (Bentouati 2008; Linares et al. 2013;Wazen et al. 2018). Au Maroc, sa distribution est morcelée et se répartit entre le Haut Atlas, le Moyen Atlas et le Rif (figure 1.1). En Algérie, sa distribution est encore plus fragmentée (figure 1.1). Des dépérissements massifs sont constatés, comme dans le massif du Belezma (cf. point 14 de la figure 1.1) situé à la marge de son aire de distribution en limite du désert, en raison des changements globaux (réchauffement climatique, conflits d’usages des terres liés au pâturage et à la surexploitation). Ces dépérissements entraînent un remplacement du Cèdre de l’Atlas par d’autres essences telles que le Chêne vert et les Genévriers (Linares, Taïqui, and Camarero 2011). De fait, le Cèdre de l’Atlas est ainsi classé comme espèce menacée d’extinction dans la liste rouge de l’IUCN (Thomas 2013). En plus de cette fragmentation, on prévoit un déplacement de sa niche écologique, vers de plus hautes altitudes, dont on ignore si elles seront accessibles aux populations restantes (Bouahmed et al. 2019). Ces enjeux de conservation motivent les recherches sur la dynamique de la diversité génétique de ces populations de Cèdre menacées (Terrab et al. 2008; Cheddadi et al. 2009; Karam et al. 2019) afin d’orienter leur gestion et leur préservation.

FIGURE 1.1. Distribution du Cèdre de l’Atlas, Cedrus atlantica dans son aire d’origine (en

Références

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